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Neige

Cabaret du Lost Paradise - Forum RPG

Forum RPG fantastique - Au cœur de Paris, durant la fin du XIXe siècle, un cabaret est au centre de toutes les discussions. Lycanthropes, vampires, démons, gorgones… Des employés peu communs pour un public scandaleusement humain.
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 All alone :music: [PV:Libre] | [1889] - [Fini]

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MessageSujet: Re: All alone :music: [PV:Libre] | [1889] - [Fini]   All alone :music: [PV:Libre] | [1889] - [Fini] - Page 2 I_icon_minitimeDim 8 Oct - 14:56

Il n'était pas encore huit heures du matin lorsqu'Andréa quitta sa chambre. En d'autres circonstances la scène aurait été exceptionnelle, mais la pâleur de ses traits et la fatigue qu'on y lisait encore indiquaient très clairement qu'il sortait d'une sale nuit. Un sommeil irrégulier et agité, entrecoupé d'images et d'odeurs qu'il n'aurait jamais dû endurer avait petit à petit rongé ses nerfs. La dernière heure ne l'avait pas épargné au point de l'arracher à la chaleur d'habitude si rassurante de son lit. Habillé à la va vite, il dégringola les marches à la recherche du réconfort le plus proche.

Edward ?

Son cœur se serra lorsqu'il découvrit le bureau vide de son oncle. Il aurait, sans hésiter, poussé la porte de sa chambre si une série de taches sombres ornant le tapis n'avait pas attiré son attention. Il les suivit avec hésitation d'abord, puis avec angoisse, jusqu'à découvrir la marque ensanglantée de la large paume de main d'Edward imprimée sur son bureau. Alors une peur indescriptible s'empara de son être et emporta avec elle toutes les laideurs de la veille. La gifle, la rixe, le commissariat, le cadavre… Plus rien ne comptait, plus rien à part son oncle.
Le louveteau s'élança dans les escaliers et cette fois, il appela avec force :

Edward !!

Le jeu de piste sordide se poursuivit jusqu'au rez-de-chaussé. Une trace plus importante que les autres le guida dans le corridor menant aux salles privées. Andréa appela encore, mais arrêta brusquement sa course devant l'une des pièces dont la porte était restée entrouverte. La poignée, rouge de sang, convainquit le jeune homme de doucement repousser le battant. Il n'aurait pas dû.
L'état de la pièce lui coupa le souffle. Le sol était couvert de débris, la fenêtre en miettes donnait sur un parquet et un tapis trempés par la pluie, les murs abîmés paraissaient avoir encaissés des chocs suffisants pour désaxer ou faire chuter les cadres. De tous les meubles, seul le divan semblait avoir survécu à ce qui ressemblait à une guerre.
Andréa sentit les larmes lui monter aux yeux et ce ne fut qu'après une profonde inspiration qu'il reprit ses recherches. Elles ne furent pas longues. De nouveau dans le couloir, à peine quelques pas supplémentaires suffirent pour qu'il croise un regard familier.

Manfred ? Mais qu'est-ce que tu fais… Oh.

En récupérant son ami emplumé, le jeune homme se retrouva nez à nez avec sa propriétaire dont le visage dépassait à peine de l'encadrement de la porte. Son sourire le rassura, mais alors qu'il allait l'interroger, elle lui fit signe de garder de silence. Il obéit sans comprendre et se pencha légèrement lorsqu'elle fit pivoter le battant de bois. Aldrick était allongé dans le canapé, Edward dormait dans le fauteuil. Le soulagement d'Andréa fut sans précédent, sa surprise tout autant.
Car Dolores lui raconta tout. Elle n'omit aucun des détails connus de l'affaire qui l'avait conduite, à quatre heures du matin, à soigner deux lycanthropes sérieusement amochés et réveilla chez le jeune homme un certain mécontentement. Vraiment ? Mais qu'est-ce qui leur avait pris ? Dire qu'Edward s'était permis de lui faire la leçon sur le fait de se contrôler… Bel exemple.
Une moue boudeuse se glissa sur les traits d'Andréa qui observa du coin de l'œil les deux adultes pendant que la doctoresse lui remettait une médications toute particulière. Ils se quittèrent dans un sourire complice et le louveteau n'eut plus qu'à attendre sagement que l'un des malades daigne se réveiller. Enfin presque. Dolores partie, la porte de la petite salle claqua violemment sous sa poigne.

Après toutes ces émotions, ils méritaient bien un petit coup de pouce !

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MessageSujet: Re: All alone :music: [PV:Libre] | [1889] - [Fini]   All alone :music: [PV:Libre] | [1889] - [Fini] - Page 2 I_icon_minitimeMar 10 Oct - 23:16

Dans un mouvement brusque, le corps entier d'Aldrick se souleva, et chaque coup de la veille se rappela d'un bloc à son bon souvenir. Pourtant, alors qu'il s'asseyait en tentant de comprendre ce qui se passait, il s'étonna d'abord de tomber nez à nez avec Manfred.

Par réflexe, le loup recula au fond du divan, avant de se cogner la tête légèrement. Mais bien assez pour le faire souffrir en malmenant ses blessures de la veille. Il lui sembla qu'on lui parlait mais il n'en comprit pas un mot.

- Andréa ? Qu'est-ce que tu fais chez moi avec ce drôle d'oiseau ?

Le loup noir fronça les sourcils, remarquant enfin que la pièce ne correspondait pas à son appartement, et que ses mains, en outre, étaient intégralement bandées, bien qu'il puisse bouger ses doigts.

- Des bandages ? C'est toi qui... ?

Aldrick n'acheva pas, surprit d'apercevoir Edward endormi non loin. Aussitôt, il se figea, puis se frotta les yeux, sidéré de réaliser que la réalité était belle et bien aussi étrange qu'elle paraissait. Surtout depuis que ce pigeon le fixait avec une intelligence toute relative, incrustée au fond de ses yeux globuleux. Bon, il ne paraissait pas dangereux, c'était déjà ça. Cela le rassura mais ne l'empêcha pas de soupirer.

Plusieurs secondes lui furent encore nécessaires avant qu'il ne parvienne à mettre véritablement de l'ordre dans son esprit. Quand ce fut fait, il passa une main sur son visage, la laissa ensuite glisser dans son cou et n'osant regarder le plus jeune, hésita, se mordit la lèvre brièvement, la douleur lui défendant de poursuivre, le loup noir finit par abandonner avec dépit, dans un murmure caverneux :

- Je présume que j'ai passé la nuit ici ?

Mais sans attendre de véritable réponse, il glissa avec regret, surprit de la tonalité de sa propre voix, en poursuivant pour ne pas réveiller le loup blanc :

- Je suis désolé pour hier. Edward avait raison : je n'aurai jamais dû te laisser monter là-haut tout seul.

L'aveu lui arrachait la bouche, mais c'était une réalité.

- Tu as pu dormir un peu quand même ?

Ses iris d'or détaillèrent cette fois la frêle silhouette de son homologue, juste assez pour noter la pâleur de son visage et faire augmenter sa culpabilité. Mais ce fut surtout la colère qu'il sentit qui le mit mal à l'aise. Honteux, le loup noir aurait probablement baissé vivement les oreilles sous sa forme lupine, mais là, il ne put que poursuivre dans un murmure :

- Pardon. C'est légitime que tu sois fâché. Je ne pensais pas le retenir aut...

Mensonge. Aldrick bafouilla, entrecroisa ses doigts douloureux entre eux avant de fixer le sol avec inquiétude, y discernant tâches de sang et couverture. À nouveau, il hésita, soupira et passa une main dans ses cheveux, en abandonnant sans parvenir à soutenir le regard d'Andréa :

- Non, en fait, j'avais des comptes à régler et je voulais en finir avec ton oncle.

Un silence lourd de sens se coucha entre eux. Cette fois, il est on ne peut plus sincère. À tous les sens du terme. Probablement qu'en d'autres circonstances, il aurait été fier de lui, pourtant, ce fut avec un certain pragmatisme, qu'il fut forcé de reconnaître l'évidence :

- Mais il n'est plus le loup que j'ai connu. Plus du tout.

Puisant dans ses forces, Aldrick ramassa la couverture pour la poser sur le canapé et se remettant debout manqua de vaciller. Seul son orgueil lui permit de tenir bon. Le brun se rapprocha, tendit la main pour la poser sur l'épaule d'Andréa, mais se ravisa, laissant son bras retomber le long de son corps. Jamais, depuis le fameux soir où il l'avait mordu, il ne l'avait vu si fatigué et en colère. Mais que savait-il de lui après tout ? Après l'avoir abandonné une première puis une seconde pas plus tard que la veille à d’effroyables démons. Il secoua ensuite légèrement la tête en réalisant sa propre bêtise, avouant sans y prendre garde d'un ton presque inaudible, à la suite de ses pensées :

- Pff, on peut dire que j'ai bien choisi mon soir pour agir comme un gosse égoïste, tiens.

Un nouveau soupir las le prit. C'était trop tard pour ce genre de regrets de toutes façons. Tâchant de reprendre contenance, il fallut tout son courage au lycanthrope pour proposer :

- C'est probablement déplacé de ma part, vu mon comportement d'hier, mais si tu veux parler de... Tout ça. Tu peux venir me voir quand tu veux.

Il se massa la joue, sans parvenir à sourire, s'attendant à en prendre une d'un moment à l'autre, aussi il préféra prendre les devants, en fixant brièvement Edward, avant de fermer les yeux.

- En tout cas, c'est grâce à toi s'il est différent aujourd'hui. Je ne sais pas par quel miracle tu as réussi à l'apprivoiser, mais merci.

Malgré son air fatigué et les nombreuses blessures qui scindaient son corps-ci et là, la reconnaissance éclatait dans la voix du loup noir, avec une intensité qui dépassait de loin la rancœur qu'il avait jadis accumulée. Après quoi, Aldrick parut plus serein lorsque ses iris d'or se perdirent dans ceux noisettes du louveteau. Un fin sourire, sincère et doux étira ses lèvres quelques secondes, puis il fit un pas vers la porte et entreprit de quitter la pièce, sans parvenir toutefois à s'empêcher de noter :

- Oh, et c'était de ma faute hier soir. Je n'ai pas pu m'empêcher de lui rendre le coup qu'il t'avait filé. Entre autres. Mais à ce que je vois... Tes poings te démangent quand même.

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MessageSujet: Re: All alone :music: [PV:Libre] | [1889] - [Fini]   All alone :music: [PV:Libre] | [1889] - [Fini] - Page 2 I_icon_minitimeDim 15 Oct - 18:47

Leçon n°12 : Le langage corporel.

Prenons l'exemple d'un jeune loup-garou. Il n'a pas encore la vingtaine, sort d'une très mauvaise nuit et se retrouve dans la désagréable situation suivante : écouter un adulte en lequel il a naïvement cru pour finalement se rendre compte que ce dernier était un parfait idiot.
On remarque immédiatement une certaine crispation chez l'adolescent. Son corps tout entier se raidit dans une forme de rébellion silencieuse qui s'intensifie après chaque seconde passées dans ce mutisme forcé. En réalité, les moindres muscles de ce corps  hurlent leur désapprobation en se contractant à l'excès. On le remarque parfaitement dans ces poings si rageusement serrés que le sang semble y manquer. Les mâchoires sont également une zone clef. Ici elles sont soudées par une colère si féroce qu'elle saillit les veines et les tendons du cou. Les yeux enfin trahissent plus facilement encore les intentions. Là, le regard noir, presque masqué par les sourcils fortement froncés, laisse deviner le nombre de secondes avant l'explosion. Trois, deux, un…

Vous avez fini de dire n'importe quoi ?

La voix d'Andréa éclata enfin. Forte et furieuse, elle s'éleva au-dessus de toute opposition. Son regard était glacial, hostile même, comme jamais depuis des années et il n'était destiné qu'à Aldrick. Pourtant deux mains nerveuses vinrent brièvement le dissimuler. Les doigts longs et fins du violoniste passèrent sur ses traits marqués par la colère, remontèrent dans ses mèches noires encore en désordres et redescendirent dans son cou, sans jamais réussir à lui rendre même un soupçon de calme. Tant pis.

Qu'est-ce que vous espériez ?! Que je vous tombe dans les bras en apprenant que vous avez eu la délicatesse de ne pas tuer mon oncle ?

Cette fois-ci le jeune homme se rapprocha du loup noir. Un seul pas avait suffit. Immense et inévitable, il lui permit de poser un index accusateur sur le buste de son interlocuteur :

Vous aviez juré de ne pas le mettre en prison ! Mais peut-être que vous auriez dû me dire qu'à la place vous vouliez lui régler définitivement son compte ?! Et si vous aviez réussi, hein ? Vous y avez pensé à ça ?

L'idée même d'entendre à nouveau sa voix lui fit à tel point horreur qu'il s'empressa d'ajouter :

Ne répondez pas.

Une profonde fatigue s'empara brusquement des traits du jeune homme. Après un soupir audible, il se détourna du commissaire sans lui accorder la moindre attention et rejoignit la petite table basse derrière eux, où il avait déposé Manfred et les concoctions préparées par Dolores. Le pigeon se manifesta dans un roucoulement bienveillant lorsqu'Andréa récupéra deux des fioles. Il se redressa et les tendit à Aldrick à bout de bras :

Pour vous, de la part de notre doctoresse. Il faut prendre le rouge en premier et le bleu après. Elle a insisté. Elle saura si vous ne les prenez pas et je vous déconseille de la sous estimer sur ce point là. Même lui le fait pas.

Andréa indiqua son oncle d'un mouvement de tête. Malgré lui, son regard s'attarda sur sa silhouette toujours assoupie et se gonfla d'une brève, mais intense inquiétude. Jamais il ne l'avait vu comme ça. Bon sang mais qu'est-ce qui lui avait pris ? Sa colère revint à la charge dans la seconde. Le garçon croisa les bras et reporta enfin son attention sur Aldrick.
Il se garderait bien de lui souffler que chacun de ces deux breuvages était absolument infecte et que l'un d'entre eux était probablement parfaitement inutile. La punition était méritée et presque trop gentille selon le jeune homme qui n'avait oublié ni le sang dans le bureau de son oncle, ni la salle privée complètement mise à sac. Le louveteau ne se priva d'ailleurs pas pour en remettre une couche et ajouta d'un ton grinçant :

Dire que je vous ai fait confiance…


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MessageSujet: Re: All alone :music: [PV:Libre] | [1889] - [Fini]   All alone :music: [PV:Libre] | [1889] - [Fini] - Page 2 I_icon_minitimeJeu 19 Oct - 17:14

Aldrick baissa les yeux dès le premier éclat de voix, sans trop savoir quoi dire. Ses iris d'or remontèrent malgré lui sur le corps fin d'Andréa avant de passer sur Edward. Lui aussi était mal en point et c'était uniquement à cause de son égoïsme.

- Non je...

Aldrick n'acheva pas, l'unique contact de l'index vindicatif du louveteau sur son torse, avait suffi à le dissuader de répliquer tant il ressentit intensément toute la rage qui s'était emparée de lui. Était-ce parce qu'il était son mordu ? Probablement. Un frisson lui remonta intégralement l'échine et chaque mot du louveteau lui parut plus véridique et plus douloureux encore que tous les coups réunis de son oncle.

La suite pourtant lui arracha un regard froid. Oh ça oui, il y avait pensé. Cela faisait longtemps qu'il y pensait. Beaucoup trop longtemps. Andréa dû le sentir car il interdit aussitôt toute réponse, préférant lui tendre deux flacons.

Le brun ne put que le remercier en arquant un sourcil, étonné de se voir livrer de la médecine alors que l'instant suivant, il était si proche de s'en prendre une. Tout autant que de savoir qu'il existait des gens qui avaient assez de pouvoir sur Edward pour qu'il les écoute avec attention. D'un geste maladroit, il enserra les fioles, et s'apprêtait à parler avant d'être devancé. Ses doigts se crispèrent sur le verre et il lui fallut toute sa concentration pour ne pas les briser dans la seconde. Il déglutit avec difficulté, encore marqué de cette réplique pire qu'une gifle, avant d'abandonner plus sèchement qu'il n'avait originellement voulu :

- À t'entendre, ton oncle n'a aucun tord. Crois-tu vraiment que nous nous serions battus à ce point sans raison ?

Sa curiosité sur la doctoresse s'était envolée. Tant et si bien qu'il n'attendit pas de réponse, pour souligner :

- Par ailleurs, et aussi inconcevable que ça puisse te paraître actuellement, sache que je serai toujours de ton côté. Toujours.

Le loup noir planta son regard doré dans celui de son homologue pour être certain que le message serait compris. Quand il eut l'impression que ce fut le cas, il se détourna et entreprit de gagner la sortie.

- Je vais vous laisser. Je crois que j'ai bien assez abusé de votre hospitalité.

Les quelques mètres qu'il avait à faire lui rappelèrent sans mal ses blessures de la veille, mais serrant les dents, le brun parvint miraculeusement à s'avancer jusqu'à la porte sans vaciller de trop. Sa main se serra sur la poignée et le souffle court du peu d'efforts déployés pour ce simple parcours, la voix encore caverneuse d'Aldrick s'éleva de nouveau.

- S'il te plaît, Andréa. Dis simplement à ton oncle que je paierai pour le mobilier et les soins. Pour la fille dans le couloir et... Enfin, tout ce qu'on abîmé, je ne me souviens pas bien, mais... Qu'il m'envoie la note.

Priant intérieurement pour que le plus jeune ne se rende pas compte du rouge qui colorait à présent ses oreilles et de tout l'orgueil qu'il lui avait fallu mettre de côté simplement pour dire ça, le loup noir grimaça en appuyant plus conséquemment sur la poignée. Cette simple action ayant réveillé sans mal la douleur de sa main malmenée. La porte s'entrouvrit dans un grincement distinctif, mais désagréable ; dans un ultime effort, Aldrick inspira profondément et annonça avec un bref sourire, en se retournant à peine :

- J'espère vraiment qu'on arrivera à discuter normalement un jour lui et moi.

Ses iris d'or détaillèrent brièvement Edward avant de revenir sur Andréa, puis sur la poignée à la hâte. Car il était bien trop conscient que le rouge à ses oreilles avait gagné en intensité.

- Au revoir Andréa.

Mais à l'instant, où il s'apprêtait définitivement à partir, quelque chose lui tapa dans l'épaule, avant de chuter au sol.
Aldrick retint avec difficulté un cri de douleur, arqua un sourcil, en reconnaissant Manfred sur le parquet et perplexe, avisa le plus jeune, sans comprendre.

- Rouh ?
- Qu'est-ce qui lui prends ?

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MessageSujet: Re: All alone :music: [PV:Libre] | [1889] - [Fini]   All alone :music: [PV:Libre] | [1889] - [Fini] - Page 2 I_icon_minitimeMar 24 Oct - 20:58

Bien. Visiblement il était le seul adulte responsable dans cette pièce, alors même qu'il n'était pas majeur ! Le monde était tout de même mal fait.

Andréa écouta Aldrick, vraiment, mais il accueillit chacun de ses propos avec une réticence visible et appuyée par le moindre de ses gestes. Lever les yeux au ciel, soupirer, grimacer, le jeune homme n'épargna rien à son aîné dont il ne voulait recevoir ni conseil, ni leçon. Il fut même heureux lorsque ce dernier se décida à quitter les lieux (de toute façon si c'était pour bafouiller de telles inepties, sa présence ne servait à rien). Mais allez savoir pourquoi ce fut à l'instant précis où il atteignait la porte que Manfred se lança à sa suite dans un vol maîtrisé. L'oiseau le heurta et retomba sonné au sol. Andréa le ramassa doucement, puis se redressant, il fit face à l'interrogation commissaire avec un froid glacial :

Probablement qu'il essaie de vous coller la mandale que je me retiens de vous mettre depuis cinq minutes. C'est gentil Manfred, merci. Je peux au moins compter sur toi.

Les derniers mots avaient été méticuleusement pesés. Prononcés lentement, appuyés avec insistance, il n'avaient aucun autre but que d'enfoncer purement et simplement le clou. La boule de plume retrouva le confort de la pile de couvertures sur la table basse dans un roucoulement douillet, tandis qu'Andréa se tournait à nouveau vers Aldrick, prêt à le guider définitivement vers la sortie cette fois. Pourtant quelque chose l'arrêta. Il le détailla en silence, remarqua enfin ses nombreux bandages, la fatigue qui tirait ses traits et cette gêne palpable qui semblait s'écouler de tout son être. Le jeune homme frissonna.
Un instant il crut se voir adolescent, sauvé par Edward de cette rage parasite qui le poussait à souhaiter leur mort à tous. Cette sensation étrange lui retourna l'estomac si violemment, que le louveteau porta une main à ses lèvres et pâlit. Sa colère s'évanouit d'un coup et un long soupir souleva ses maigres épaules :

Sérieusement ? À quoi vous pensiez tous les deux ?

Andréa s'appuya contre l'accoudoir du divan, passa une main sur son visage et fixa ses pieds avec un air songeur, incertain des paroles qu'il devait tenir. Finalement quelques mots très simples lui vinrent en tête, ceux qu'il aurait aimait qu'on ait pour lui s'il avait été à sa place :

Excusez moi…

Il releva ses yeux noisette et les posa avec une douceur nouvelle sur le commissaire. On y lisait beaucoup de compassion, mêlée à une compréhension vague et lointaine qui se voulait pourtant sincère. Le jeune homme esquissa un geste incertain, pressentant une possible interrogation et expliqua :

Je n'ai pas à vous juger sans savoir, c'est désagréable et injuste pour tout le monde. C'est juste…

Un nouveau soupir. Il ferma juste une seconde les yeux, pencha la tête en arrière et reprit en faisant à nouveau face au commissaire :

Edward est un idiot. C'est pas nouveau. Il est plein de maladresse et fait n'importe quoi dès qu'il est submergé par ses émotions. Vous m'aviez l'air de quelqu'un de solide, alors…

Son silence parla pour lui et le reste de passait de commentaire. Alors Andréa se détourna de son interlocuteur et récupéra machinalement la couverture qu'il avait laissée sur le divan. Il la plia, puis se remémorant les paroles du commissaire, il ajouta en se tournant vers lui :

Une dernière chose. Pour la note, si vous la voulez il faudra venir la chercher.

Il se rendit compte tardivement que ses mots pouvaient porter à confusion et ajouta aussitôt en esquissant un geste qui signifiait qu'il n'avait pas souhaité se montrer déplaisant :

C'est parce qu'il ne vous l'enverra jamais que je vous dis ça. Il est plutôt du genre à tout résoudre tout seul, vous voyez.

Un faible sourire se glissa sur ses lèvres. Sourire qui se serait peut-être effacé si le jeune homme avait aperçu les deux iris dépareillés qui l'observaient dans l'ombre.

Edward était réveillé, restait à savoir depuis quand.


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MessageSujet: Re: All alone :music: [PV:Libre] | [1889] - [Fini]   All alone :music: [PV:Libre] | [1889] - [Fini] - Page 2 I_icon_minitimeSam 25 Nov - 12:00

1-0 pour Manfred.

Les iris d'or d'Aldrick coulèrent sur le duo improbable du loup et du pigeon. S'il était habitué à recevoir des menaces de ce genre, il était bien rare qu'il doive les prendre au sérieux. Mais là, le loup noir s'estima heureux que ce soit Manfred qui s'en soit chargé, tant le volatile lui paraissait inoffensif, en comparaison avec la colère qui animait le jeune loup. Nul doute qu'après ça, il aurait eu bien du mal à s'exprimer si c’était Andréa qui l'avait frappé.
Il ouvrit néanmoins la bouche pour parler, mais face à l'antipathie palpable de son interlocuteur Aldrick se ravisa, préférant fourrer les fioles dans l'une des poches de son pantalon, avant de remonter son regard vers lui. Alors seulement, il remarqua la pâleur du plus jeune. Son cœur s'emporta dans une danse folle et l’inquiétude mangea son visage si violemment, qu'avant même qu'il en ait conscience, il s'était déjà rapproché d'Andréa en posant sa main sur son épaule.

- Hey ! Qu'est-ce qu'il y a ? Tu ne te sens pas bien ? Tu...

Andréa dut sentir sa crainte, car sa réponse le stupéfia au plus haut point. Il ne put que détourner le regard avant de le libérer, honteux. Aucun argument ne trouva grâce à ses yeux pour assurer sa défense. Il s'était conduit comme un parfait imbécile, et il était normal qu'il en assume à présent les conséquences. Fermant les yeux fort, en sentant le coup venir, Aldrick les ouvrit pourtant aussitôt de stupéfaction, sans comprendre d'abord d'où venaient ces excuses. La suite ne fit que le laisser plus bête encore. Jusqu'à ce qu'un fin sourire timide n'étire finalement ses lèvres.

- Je crains de ne pas être loin derrière ton oncle en terme de bêtises.

Gêné, Aldrick passa une main dans ses mèches rebelles avant d'ajouter :

- Tu le connais bien on dirait. C'est rare d'avoir droit à ce genre de portrait. Je comprends mieux pourquoi vous vous complétez tant. C'est quelqu'un de vraiment important pour toi, pas vrai ?

Son sourire s'élargit encore un peu, lui donnant un air presque envieux, avant qu'il ne hausse un sourcil au sujet de la note.

- Je vois. Je doute qu'il ait encore envie de me voir, mais je ferai ça al...

Un frisson souleva le corps entier d'Aldrick tandis qu'il poursuivait en puisant dans sa fierté pour soutenir le regard disparate qui le détaillait à présent, tout en concluant :

- ... Ah, tu es réveillé. Peut-être que tu préfères me la donner maintenant, du coup ?

Une seconde trop tard, son instinct lui souffla qu'il aurait mieux fait de la fermer. Peut-être qu'il n'avait rien entendu du début de leur conversation et qu'il n'y comprenait rien ? Voilà que dès le réveil il lui demandait quelque chose d'improbable après avoir gâché sa soirée, entre autres. Pourtant, il s'avança calmement près d'Andréa de crainte qu'il ne subisse un potentiel courroux, sans trop savoir toutefois, que dire pour masquer le trouble qui venait à présent de s'emparer de son être. Maladroitement, le loup noir tenta tout de même :

- Est-ce que... Ça va ?

Aldrick peina à retenir un soupir, lassé de sa propre bêtise, pourtant, ce fut clairement qu'il s'entendit déclarer, n’ayant cure de le couper dans un potentiel remontage de bretelles :

- Je suis désolé. Pour tout ça. Pour hier et pour… Tout ça. Je suis désolé.

Il inspira rapidement et sans ciller ajouta pour le bigaré :

- Est-ce qu’on pourrait… Essayer de discuter calmement ?

S’il avait bien conscience que sa requête pouvait passer pour ce que les Humains appelaient communément « l’hôpital qui se fout de la charité », le lycanthrope n’en démordit pas pour autant et campa sur ses positions. Ajoutant à la hâte de crainte qu’un refus ne tombe :

- Au moins pour lui.

Il désigna Andréa, et reprit :

- Toi aussi, tu n’aimes pas l’inquiéter, non ?

Si en temps normal, le fait d’évoquer un potentiel point commun avec le loup blanc lui aurait non seulement hérissé le poil, mais aussi donner envie de coller son poing dans la truffe d’Edward, cette fois, il n’en fut rien. Aldrick resta étonnement calme. La fatigue rongeait son visage à l’égal de celle de son homologue ; pourtant, s’entêtant encore, plus téméraire, il interrogea, en surveillant ses réactions comme le lait sur le feu :

- Pourquoi avoir demandé à me faire soigner ?


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MessageSujet: Re: All alone :music: [PV:Libre] | [1889] - [Fini]   All alone :music: [PV:Libre] | [1889] - [Fini] - Page 2 I_icon_minitimeSam 13 Jan - 15:52

Edward aurait préféré ne jamais se réveiller. Il aurait préféré ne jamais entendre ces vérités sortir si naturellement des lèvres de son neveu. Il était un idiot. Il faisait n'importe quoi. Et il le faisait seul. Magnifique. Il se sentit honteux, pitoyable, blessé. Disparaître, quitter cette pièce était pour lui l'unique échappatoire, mais il en était incapable. Constante, omniprésente, la douleur clouait ses bras engourdis au fauteuil, ses jambes ankylosées au sol et pulsait au rythme de son cœur déchiré. En lambeau lorsqu'il s'était assoupi, ce matin la présence d'Aldrick lui donnait l'impression qu'on y plantait encore une lame pour en disperser les morceaux.

Il souffrait et cela se voyait.

Est-ce que... Ça va ?

Edward se pinça les lèvres, sa mâchoire serrée au point d'en faire grincer ses crocs. Encore un peu assommé par les calmants administrés par Dolores, le loup blanc ne fut pas en mesure de savoir si son homologue était stupide ou si son sens de l'humour se résumait à une basse cruauté. Mais cela n'avait, désormais, aucune importance.

Oui.

En fait non, mais il était heureux qu'on lui laisse le privilège de ne pas l'admettre.

S'en suivit une scène irréelle. D'abord Aldrick s'excusa. Distinctement, sans incompréhension possible. Une farce au regard du loup blanc, qui voulut s'épargner ce spectacle. Se redressant nerveusement dans son siège, il ouvrit une bouche grimaçante, mais s'étouffa avec ses propres mots lorsqu'il croisa le regard de son neveu. L'inquiétude et les reproches qu'il y lut le dissuadèrent de toute contestation. Ce fut en silence qu'il se résigna à assister à la suite de ces aberrantes déclarations. L'héritier Voelsungen ne lui épargna rien, pas même l'emploi injuste et facile de son affection pour son neveu. La dernière phrase résonna à ses oreilles comme ultime coup bas, triste question due à la surprise que l'ignoble Vyresh ait renoncé à le laisser se vider de son sang. Puis plus un mot.
Alors Edward attendit, ses doigts enfoncés jusqu'au bois de ses accoudoirs, et comme aucun autre son ne quittait les lèvres du loup noir, il osa demander :

Tu peux aller me chercher de l'eau Andréa ?

Regard suspicieux du louveteau pour ses deux homologues. Il croisa les bras avant de répondre :

Vous n'allez pas vous battre ? Encore ?
Non.
Promis ?
Juré. Et si Aldrick essaie, je lui briserai les bras.
Tu es vraiment nul pour rassurer les gens…

Edward avoua d'un haussement d'épaules. Le garçon hésita encore une seconde, puis quitta la pièce en jurant de faire vite. Son oncle en fut soulagé et se leva après un mouvement pénible. Son regard dépareillé soutint celui d'Aldrick, mais il n'esquissa pas un seul geste dans sa direction et lorsqu'il prit la parole, ce fut en passant une main moite sur sa tête tournante :

Soulagé ? Maintenant qu'il n'est plus là tu n'as plus besoin de faire semblant.

Car il faisait semblant, Edward en était persuadé. Après cette nuit, tout ce verbiage ne pouvait être qu'une mascarade. Pour une raison qui lui échappait, ce loup s'était entiché de son neveu et c'était uniquement pour lui éviter une peine inutile qu'il avait mimé un tel élan de compassion. Tant mieux. Mais qu'il n'espère rien d'autre. D'ailleurs, autant que les choses soient claires :

Tu veux savoir pourquoi je t'ai fait soigner ? Parce que je suis ton roi et si mauvais et monstrueux que je sois, je fais tout ce que je peux pour vous.

Il reprit rapidement un souffle que son cœur battant tentait de lui retirer et, levant l'index vers son unique interlocuteur, il ajouta sans le laisser intervenir :

Et c'est désormais tout ce qui nous liera.

Sa fermeté avait vacillé sur les derniers mots. Sa voix s'était abîmée et avait perdu de sa force. Edward le mit sur le compte de la fatigue, mais il savait que c'était autre chose. Et lorsqu'il reprit la parole ce fut en puisant dans son orgueil pour ne pas détourner ses iris de ceux de son interlocuteur :

Tu voulais ma mort Aldrick ? Considère la comme acquise. Tu ne m'auras plus dans les pattes.

Plutôt que de lutter jusqu'à l'épuisement, Edward acceptait de devenir une ombre dans la vie des siens. Il resterait roi, il prendrait soin d'eux, mais il ne chercherait plus jamais à être l'un d'eux. La leçon avait été on ne peut plus claire et il n'était pas loup à se la faire répéter deux fois.

Un choix à contrecœur, pour rester en vie, quoi qu'ils en pensent.


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MessageSujet: Re: All alone :music: [PV:Libre] | [1889] - [Fini]   All alone :music: [PV:Libre] | [1889] - [Fini] - Page 2 I_icon_minitimeMar 10 Avr - 23:14

Si le loup noir trouva que son homologue mentait au moins aussi bien que lui, il n'en toucha mot, certain que cette aura meurtrière qui l'entourait lui était destinée. Les dires du bigarré le confirmèrent, lui faisant fermer les yeux un instant, dès qu'Andréa fut sorti. Aldrick les rouvrit pourtant aussitôt, la bouche entrouverte, stupéfait par le point de vue d'Edward.

- De quoi tu parl... ? S'étrangla-t-il, sans achever.

La surprise mangea son visage fatigué : il était perdu.

* Il ne me croit pas ? Pense-t-il que je puisse dire ce genre de choses simplement par fourberie ? *

Son cœur se serra. Bien sûr, qu'il le pensait. Manifestement, il en était même persuadé, au vu de son discours.

Aldrick ferma les yeux, anéanti. Ne parviendraient-ils donc jamais à communiquer ? Un instant, il songea à se défendre, à hurler, mais lorsqu'il contempla à nouveau la pièce, il fut frappé uniquement par la froideur assassine au fond des iris de son homologue. Ça, et quelque chose proche d'une infinie tristesse. Les sourcils froncés d’incrédulité, le loup noir s'avança, sans tenir compte de son corps qui tremblait par à-coups, réclamant un repos qu'il ne pouvait lui offrir dans l'immédiat.

- Par bonté d’âme donc ? D’autres auraient appeler ça de la folie, et ils auraient eu raison. N’aurais-tu pas été plus serein en constatant ma mort ?

Il tressaillit intégralement, manquant de tomber à genoux tant ses jambes ne pouvaient plus lui offrir de soutien concret. Il lui fallut puiser dans son orgueil pour se maintenir debout face à son aîné, et mettre le reste de côté, pour avouer :

- Je n'y comprends plus rien, Edward. Pourquoi t'être excusé hier si c'est pour aboutir à ça ?

* Imagine-t-il seulement combien j'avais peu espoir que cela arrive un jour ? *

Une détresse nouvelle mangea le visage du commissaire, une incompréhension parasite qui tatouait son empreinte sur son corps plus violemment encore au fil des secondes. Aldrick se sentit las, harassé, honteux, pathétique et pitoyable. Pourtant, ce fut avec une inquiétude sincère qu'il abandonna sans même s'en rendre compte, ni lui laisser réellement le temps de répondre :

- Et surtout, si c'est ce que tu veux, alors pourquoi est-ce que... On dirait que tu vas pleurer.

Il n'y avait aucune moquerie dans ses propos. Un simple constat, qu'il n'avait d'ailleurs pas souhaité formulé à voix haute, en réalité. Pas même avec l'intention de lui nuire. Une évidence si flagrante, qu'il n'avait pu la retenir. Ce fut donc sans vraiment y prendre garde, qu'il poursuivit, comme si cette pensée ne s'était jamais échappée de son esprit :

- C'est vrai. J'ai longtemps souhaité ta mort, mais aujourd'hui... Sa voix se brisa.

C'était un bel euphémisme. Sa mort, il l'avait souhaité au moins une bonne dizaine d'années ! Peut-être même plus. En fait, il ne se souvenait pas de combien de fois il l'avait espéré, rêvé, imaginé. Un nombre incommensurable. Il aurait dû sauter de joie à cette idée. Seulement, depuis...

Un amalgame de sentiments dévastateurs se déchaînaient en lui, une tempête destructrice qui abattait à nouveau toutes ses certitudes, une à une, comme jadis, déroutant son esprit. Le loup noir leva la tête vers le plafond, y cherchant une solution, un réconfort, n'importe quoi ! Mais rien ne vint. Seul un profond désespoir minait à présent sa silhouette éreintée. Son âme paraissait presque étiolée par le temps qui l'avait tant usé.

* À quoi bon ? Quelle importance, si tout n'est que faux-semblants dans son esprit ? De toutes façons, il ne me croira jamais... *

Cette seule pensée lui broya le cœur. C'en était trop pour lui. Alors, étouffant un soupir proche d'un sanglot, Aldrick posa sa propre main sur son avant-bras pour l'empêcher de frémir davantage. Ses iris d'or parcoururent la pièce, hagards, indécis, sans même qu'il ne songea un instant, à remonter sa garde. Après de longues secondes, il abandonna, presque à regret :

- Oublie ça. Il vaut mieux que je rentre. Merci pour les soins.

Sans attendre de réponse, il se détourna, parcourant difficilement les quelques mètres qui le séparait de la sortie. La distance lui parut interminable et il lui fallut rassembler les dernières miettes de son orgueil, pour ne pas s'appuyer ailleurs que sur la poignée, lorsqu'il l'eut atteinte.

Étrangement, une part de lui semblait hurler, comme il l'aurait fait à la lune, sous sa forme lupine, pour manifester sa tristesse à la mort d'un des siens, ou pour appeler un frère. Mais faisant à peine pivoter le battant de la porte, il se surprit à afficher un sourire aussi amer que triste, lui jetant un dernier regard, en poursuivant comme s'il n'y avait désormais plus rien qui puisse les aider :

- Tu sais, aujourd'hui, je ne suis pas sûr de savoir lequel de nous deux est le plus vivant.

Son sourire s'effaça. Aldrick fit un pas hors de la pièce.


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MessageSujet: Re: All alone :music: [PV:Libre] | [1889] - [Fini]   All alone :music: [PV:Libre] | [1889] - [Fini] - Page 2 I_icon_minitimeSam 2 Juin - 21:20

Aldrick aurait dû rire. Sa victoire éclatante aurait dû lui bruler le visage, rougir ses joues et embraser sa gorge. Il aurait dû se vanter, il aurait dû se moquer, être ivre de son succès. C'était cela qu'Edward voulait voir. Il souhaitait que cette cruauté dévore ce nouvel étranger, qu'elle donne raison à ce choix ignoble qui lui perçait le cœur.
Mais Aldrick ne rit pas. Les quelques rougeurs sur ses joues s'effacèrent même pour une pâleur fantomatique inexplicable, que ses traits, tristes et sombres, rendirent plus blanche encore. C'en fut trop pour Edward, qui détourna le regard. Il aurait été plus avisé de se boucher les oreilles.

Ses excuses ? Ce bel échec.

Je ne les pensais pas…

Étranglé par le chagrin, sa propre voix lui parvint à peine. Les yeux clos et les poings fermés avec tant de force que le sang n'y coulait plus, Edward attendit, priant pour que ce cauchemar s'arrête. Mais une phrase suffit à le rendre pire encore.

Et surtout, si c'est ce que tu veux, alors pourquoi est-ce que... On dirait que tu vas pleurer.

Il releva la tête. Ses iris dépareillés se plongèrent dans le regard d'ambre du loup noir, violemment et sans pudeur, y cherchant avidement cette lueur haineuse qui devait s'y trouver, forcément. Il en revint bredouille, plus perdu et hagard que jamais. Alors, comme un enfant, le grand et effrayant Vyresh remonta ses mains bandées à son visage, pressé d'y faire disparaître la plus infime trace de  larmes absentes de ses yeux rougis.
Une peine immense lui gonfla le buste, encore enflée par un lointain, mais profond soulagement auquel il peinait à croire.

Aldrick ne mentait pas. Edward s'était trompé.

C'était fou, impossible même, et pourtant voilà le loup blanc prêt le concevoir. L'espoir balayé de la veille revint avec une violence inouïe raviver la flamme de vie féroce qui l'avait toujours animé, s'embrasant plus encore au son brisée de la voix d'un de ses pairs. Et plus Aldrick souffrait, plus son roi renouait avec cette soif de vie et de lutte qui l'avait emmené si loin, porté par l'idée démente que  l'un des siens puisse avoir de la peine pour lui.
Mais les émotions, trop contradictoires et trop fortes, mêlées à la fatigue du loup blanc retinrent prisonniers les mots encore plein de doutes qui se pressaient derrière ses lèvres. La gorge serrée, les mains tremblantes, il suivit les actions et les paroles suivantes d'Aldrick avec appréhension d'abord, puis avec effroi.

Le loup noir quittait la pièce. Edward hurla :

Attends !

Il avait bougé sans même s'en rendre compte, refermant sa main sur ce bras qui, la nuit précédente, avait frappé si fort. Sa propre poigne, douce cette fois, presque suppliante, libéra dans la seconde le loup noir. Edward ouvrit la bouche, mais ce regard d'ambre si familier le décontenança.
Il recula, doucement. Puis il esquissa plusieurs gestes brouillons et pressés, craignant qu'Aldrick s'en aille avant qu'il ait put tenter quoi que ce soit. Le souffle erratique, il finit par porter ses mains à sa figure et s'imposa une longue et profonde inspiration qu'il ne termina pas. Retrouvant brusquement sa voix pleine, sûre et forte, il lança en esquissant un grand geste en direction de son homologue :

Deux semaines. Accorde-moi deux semaines.

Tout était si embrouillé, si empêtré dans ce mélange d'espoir et de tristesse qu'Edward se savait incapable de rendre, à ce moment-là, ce qu'Aldrick semblait prêt à lui donner. Le loup blanc, si seul pendant si longtemps, avait besoin de temps pour, enfin, oser espérer se tenir près d'un des siens. Mais ce dernier l'attendrait-il ?
S'imaginer que ce ne soit pas le cas suffit à affoler le roi des loups qui reprit, le cœur battant, après un pas vers Aldrick :

S'il te plaît.

C'était sa chance, sa plus belle chance depuis Andréa. Il ne la laisserait pas passer.


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MessageSujet: Re: All alone :music: [PV:Libre] | [1889] - [Fini]   All alone :music: [PV:Libre] | [1889] - [Fini] - Page 2 I_icon_minitimeSam 28 Juil - 10:57

L'injonction le figea. Autant que le geste.

Meurtri et harassé, Aldrick tourna un visage aussi surpris qu'épuisé vers Edward. Que comptait-il lui infliger encore ? Une réflexion concernant sa mère et son comportement à venir ? Un énième coup ? Résigné, il attendit qu'une nouvelle douleur s'imprime sur son corps. Il ne songea même pas à se défendre. Il n'en avait plus ni la force, ni l'envie. Mais rien ne vint. Il aurait probablement craint le pire, si l'étreinte ne s'était pas si rapidement envolée, aussi fugace qu'un rêve. La suite lui parut tout aussi intemporelle, et s'il n'y avait pas eu la douleur de son corps pour le rappeler à l'ordre, probablement qu'il aurait mis ça sur le compte d'un délire quelconque.

* Deux semaines ? Pourquoi faire ? *

Les mots étaient morts dans sa gorge, à peine audibles dans son esprit. Le loup noir acquiesça, trouvant presque touchante la maladresse subite du grand Vyresh.

- D'accord.

Sa voix, d'une neutralité effrayante, semblait peiner à fendre l'air pour y inscrire cet unique mot. Pourtant, ce fut un regard calme et presque compatissant, qu'Aldrick posa sur son homologue. Jamais, il ne lui avait vu pareil affolement, pareille crainte. Jamais, il n'avait sondé de lueur d'espoir si vive au fond de ses yeux disparates. Jamais, il ne lui avait semblé qu'il ressemblait autant à un louveteau. Un louveteau perdu. Perdu sans l'un des siens.

Alors, Aldrick comprit.

* Ainsi donc, il lui arrive à lui aussi d'être terriblement maladroit parfois ? *

Un fin sourire étira ses lèvres, bref, mais sincère. Une bouffée d'oxygène nouvelle sembla inonder ses poumons. Pouvait-il seulement y croire ? Peut-être qu'ils n'avaient pas tout perdus finalement. De ce simple échange, naquit un espoir fou dans le cœur du loup noir. Un espoir d'avenir.
Mais comme pour le rappeler à l'ordre, le corps entier d'Aldrick tressailli. La tête lui tourna. Lui aussi avait besoin de temps. Ils devaient réfléchir à tout ça. Mais d'abord, il leur fallait du repos.

Pas ici. Ça, il s'y refusait.

Pas question de devoir ensuite rendre des comptes à d'autres qu'aux siens. Ce, même s'il était responsable de biens des dégâts, à tous points de vue. Quelques couleurs revinrent parsemer son visage à cette simple pensée. Honteux de son emportement précédent, le lycanthrope détourna le regard, baragouinant une série de sons sans sens, avant de forcer sur sa voix pour ajouter, en remarquant le louveteau plus loin :

- Andréa attenti...

Aldrick n'acheva pas, fermant fort les yeux en rentrant instinctivement la tête dans les épaules, craignant la chute. Mais rien ne se passa, et lorsqu'il contempla de nouveau la haute silhouette filiforme d'Andréa, tout semblait miraculeusement entier. L'agent soupira de soulagement, ses épaules s'affaissant d'un bloc, tant il avait vraiment craint que le jeune homme finisse par fusionner avec le sol.

- Fiou, c'est mauvais pour le cœur tout ça, je ne sais pas comment tu fais... Abandonna-t-il pour Edward sans réfléchir, une main sur son palpitant affolé.

Malgré sa fatigue, il songea que ça aurait dû être à lui de s'occuper d'Andréa, de l'aider à traverser les nuits difficiles, plutôt que de s'administrer de la morphine pour ne pas entendre ses appels désespérés. Cette simple pensée suffit à marquer violemment la culpabilité sur son visage. Il eut envie de s'excuser à nouveau dans la seconde, mais un grondement singulier le devança.

Aussitôt, l'agent devint pivoine. Pourquoi fallait-il que son estomac se manifeste de manière si virulente face à eux ?
Par réflexe, plus qu'autre chose, il posa une main sur son ventre pour tenter d’atténuer le bruit et leva l’autre vers ses homologues en arguant à la hâte :

- Tûûte ! Interdiction de rire !

Nul doute que s'il avait pu disparaître tel un Sylphe, Aldrick l'aurait fait.


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MessageSujet: Re: All alone :music: [PV:Libre] | [1889] - [Fini]   All alone :music: [PV:Libre] | [1889] - [Fini] - Page 2 I_icon_minitimeSam 18 Aoû - 14:06

- Andréa attenti...

Le tapis s'étirait sur toute la longueur du couloir de son rouge flamboyant, quoi que tâché ci et là. Il était impeccable à l'exception d'un seul pli, sorte de bosse de tissu qui remontait devant l'entrée de la salle saccagée la veille. Cela suffit à Andréa. Il se prit les pieds dedans.
Les bras chargés d'un plateau remplit à la va-vite, il bascula en avant. Il releva vivement le large plat, comme pour l'éloigner du drame, avança sa jambe gauche à l'aveuglette dans un angle incertain qui le rapprocha bien trop vite du mur. Sa cheville affirma son désaccord et l'obligea à un quart de tour qui jeta son dos contre la tapisserie, arrêtant sa chute. Il ferma les yeux. Le plateau au-dessus de son nez, maintenu à bout de bras, il écouta avec appréhension le balancement de la carafe d'eau. Elle vacilla à droite, puis à gauche, heurta les verres dans un tintement inquiétant, esquissa encore un arc de cercle et s'immobilisa enfin. Un soupir de soulagement gonfla le torse du louveteau qui se redressa avec un sourire triomphant :

C'est bon ! Je tiens !

Son regard noisette passa d'Aldrick, debout dans le couloir, à Edward resté dans l'embrasure de la porte. Il rougit de leurs mines inquiètes et se redressa avec précaution. Cette fois-ci il prit soin d'enjamber le cahot du tissu et les rejoignit en trois belles foulées pleines de bonnes volontés.
Au sourire timide de son oncle et au regard qu'il accordait au commissaire, le jeune loup fut certain d'avoir raté quelque chose. Il entrouvrit la bouche pour l'interroger, mais une main se glissa dans ses cheveux et le décoiffa avec cette tendresse que nul n'aurait pu soupçonner en observant la silhouette puissante d'Edward. Son oncle resta appuyé contre l'encadrement de la porte, mais la mine perplexe de son neveu sembla le décider à parler :

Je crois que tu as eu du flair en remplissant ton plateau.
Ah oui ?

Andréa observa son plateau avec curiosité, cherchant le Graal qui, d'après Edward, devait combler le commissaire. Il se rendit compte qu'il y avait jeté à peu près tout et n'importe quoi. De l'eau évidemment, mais aussi des croissants, des bonbons, du saucisson et pour une obscure raison des petites cuillères. Sept petites cuillères. Il ne se rappelait pas les avoir ajoutées, pourtant elles étaient bien là, éparpillées entre la nourriture.
Il le tendit tout de même à Aldrick en l'invitant à prendre ce qu'il souhaitait. Edward appuya d'un signe de la tête avant d'interroger :

Est-ce que tu pourras appeler un cab pour ramener le commissaire chez lui ?
En fait, il y en a un qui attend à l'entrée.
Vraiment ?
Oui. C'est peut-être Dolores qui l'a commandé ?
C'est possible, admit le loup blanc en passant une main sur son visage fatigué.
Tu veux que j'aille lui demander ?
Non ça ira. Tu as certainement raison.

Edward récupéra un verre d'eau du bout des doigts et retourna s'installer dans le fauteuil de la salle privée, non sans un dernier geste pour Aldrick. Andréa le suivit du regard. Il hésita un peu, mais comme le commissaire s'était finalement servi, il finit par poser le plateau sur la petite table basse de la pièce. Manfred vint picorer un croissant tandis que le louveteau revenait près d'Aldrick.

Je vous raccompagne ?

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