Paris 1891. Le claquement de fouet d’un omnibus vous détourne de ces lettres pourpres barbouillées sur une affiche. Vous levez la main, le cocher arrête ses chevaux et vous montez. La première place libre fait l’affaire.
Balloté par les roues qui s’ébranlent, vous êtes ailleurs. Vos pensées sont restées accrochées à ces mots qui s’étalent sur les murs et les portes de la capitale. « Ils » ce sont ceux que les plus diplomates préfèrent désigner par « les autres ». Ils n’existaient pas six mois plus tôt et pourtant, ils ont toujours été là.
Une bourrasque de murmures vous souffle au visage. L’omnibus s’est arrêté et une femme vient d’en gravir la margelle. Malgré vous, votre œil est hameçonné par une tâche de couleur à son bras. Du pourpre, encore, ceint d’un cercle blanc. C’est l’une des « autres ». Elle ne s’assied pas et votre curiosité l’emporte sur la décence. Deux longues cornes en spirale vous hypnotise, vous en parcourez la finesse jusqu’à atteindre leur pointe aiguisée, avant de vous reprendre. Baisser la tête pour la redresser aussitôt.
Le cocher annonce qu’il doit faire un détour. Une manifestation bloque la rue. Reproches et ralliements s’entremêlent dans un bref brouhaha, puis le calme revient. Vous ignorez quel parti est en cause, mais vous savez que c’est l’un des deux seuls capables d’enflammer la ville.
Quand l’omnibus tourne, vous jetez un œil. Au loin quelques pancartes ondoient, illisibles pour la plupart, mais sur l’une d'elles vous pensez apercevoir un mot. Le même qui faisait les gros titres de la presse générale. Vous vous souvenez du journal acheté ce matin même, vous le gardiez dans votre sacoche pour la pause de midi.
Vous le dépliez entre deux arrêts. « Nouvel incendie d’origine inconnue dans le IXe arrondissement. » C’est vrai. Deux semaines que ça dure. Des bâtiments prennent feu sans raison apparente. Ce n’est pas sans rappeler les départs de feu qui ont eu lieu, six mois plus tôt, pendant la grande catastrophe. C’est souffler sur les braises d’une situation bien compliquée.
« Saint-André des Arts ! »
C’est ici qu’on se sépare. Vous descendez. Au coin de la rue, vous apercevrez peut-être de la peinture pourpre en train d’être nettoyée. Mais non. Ce sourire sur votre visage, il est clair que vous pensez à autre chose. Sans doute à ce rideau rouge que vous allez franchir. À cet autre monde qui vous attend.
Vous pensez au Lost Paradise.
Est-ce que votre personnage ronfle ?
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