Once upon a time…
Born to be wild
Morceaux de vie, fragments de l’âme
THE MEETING : Là ou tout commence. La nuit enveloppait lentement la ville de Londres, l’entourant d’un manteau de brume si épais que la faible lueur des lampadaires semblait inutile.
L’ambiance glaciale et figée des rues était franchement sinistre, presque oppressante. Cependant, dans une ruelle aux pavés rendus brillants par la pluie et l’humidité constante, deux frêles silhouettes s’avançaient à travers le brouillard londonien.
- « Je t’avais dit qu’on aurait dû rentrer plus tôt ! piailla une voix suraiguë »
- « Arrête donc tes simagrées Agathe, je t’en pris ! maugréa une voix de fillette sensiblement plus grave. Tu as peur de quoi concrètement ? »
- « De pleins de choses, pleurnicha la dénommée Agathe. De l’obscurité, des violeurs, des bandits et … Du croque mitaine aussi ! Arrête de rire Rose ce n’est pas drôle ! »
La fillette qui répondait au prénom de Rose titubait et se tenait le ventre tant elle riait aux larmes, la tête baissée vers ses souliers.
C’est pour cela qu’elle ne vit pas les deux hommes qui arrivaient en face d’elle. Si elle avait écouté son amie en arrêtant de rire, si elles étaient rentrées plus tôt, elle n’aurait pas percuté cet homme. Sa vie aurait alors était totalement différente. Elle aurait été celle d’une jeune fille normale. Mais le destin en avait voulu autrement. Non. Tout n’était que fatalité.
- « Oh excusez moi je ne vous avez pas vu ! »
Rose leva la tête vers l’homme qu’elle venait de percuter, un petit sourire d’excuse flottant sur ses lèvres. L’homme baissa les yeux vers elle. Il empestait l’alcool.
- « Comment ca tu ne m’avais pas vu ?! Regarde un peu ou tu vas, poufiasse ! »
Rose sursauta devant l’insulte. Comment ce sac à vin osait-il s’adresser à elle ainsi alors qu’elle venait de s’excuser ? Elle fit un pas en avant et se campa les mains sur les hanches devant l’homme
- « Comment ça « pouffiasse » ?! Je viens de te présenter des excuses pauvre minable ! »
L ‘homme fronça les sourcils et empoigna la petite fille par le col, la brutalisant de manière excessive. Rose fut tellement secouée qu’elle en eu la nausée : elle avait beau se débattre, mordre, griffer, et hurler des injures, son assaillant refusait de lâcher prise. Derrière elle, elle entendait les piaillements d’ horreur d’ Agathe : elle ne servait décidément et définitivement à rien celle-là !
- « Espèce de petite traînée je vais t’apprendre moi ! vociférais l’ivrogne. »
Au bout de quelques minutes, épuisé, le sac à vin souffla un instant, cessant momentanément de la violenter. Ce fut l’ouverture qu’attendait Rose. Elle lui assena une gifle retentissante qui eut pour effet de lui faire lâcher son col. Les pieds à nouveau sur la terre ferme, la petite blonde remonta prestement son genou vers les parties génitales de son agresseur, qui s’écroula lourdement en gémissant des insultes fleuries.
- « On fait moins le malin, hein sale déchet ! cracha Rose »
Fière de sa victoire, elle se tourna vers Agathe, prête à lui asséner un sourire triomphant dans le genre « même pas peur » lorsqu’un petit rire suivit d’applaudissements la firent grincer des dents. Ah oui, le sac à vin avait un compagnon. Rose espérait de tout cœur qu’elle n’allait pas devoir lui flanquer une leçon aussi, car elle devait bien avouer qu’elle avait à présent du mal à tenir debout. Mais contre tout attente le second homme s’avança vers elle et lui tendit la main. Méfiante, Rose ne la saisit pas : après tout, son ami gisait bien sur le pavé bavant de douleur, qu’est ce qui lui disait que cet homme ne voulait pas lui faire la peau ? Mais l’homme ne se démonta pas : il lui fallait cette gamine. A en juger par ses vêtements, l’argent ne coulait pas à flot chez elle et l’offre qu’il allait lui faire était, somme toute, plus qu’alléchante.
-« Je m’appelle Alexandre de la Tour. Je trouve que tu nous à fait là une remarquable démonstration de force ma petite, sourit-il. J’aimerais t’engager. »
Rose observa l’homme, suspicieuse : il était jeune, vingt ans tout au plus, possédait des cheveux bruns en bataille, un corps frêle mais qui imposait le respect et des yeux d’un bleu à vous glacer le sang dans les veines. Ce type avait l’étoffe d’un leader, elle le sentait. Il était sûrement impérial et respecté mais… Mauvais point pour lui. La « petite » avait horreur qu’on lui rappelle son statut.
- « Je ne m’appelle pas ma petite. Je m’appelle Rose asséna-t-elle. Vous voudriez m’engager pour quel genre de travail Monsieur de la Tour ? »
Alexandre De la Tour se pencha vers elle en un sourire amusé, pour qu’Agathe ne puisse saisir ce qu’il chuchotait à l’oreille de son interlocutrice. Il était convaincu d’avoir piqué la curiosité de la blonde.
- « Trafic de drogue mademoiselle Rose. J’ai besoin d’une jeune fille comme vous qui pourra dealer sans éveiller les soupçons de la police, mais qui saurais tout de même défendre la marchandise. Vous comprenez ? »
- « Je comprends très bien répliqua la blonde. Je veux en savoir plus avant d’accepter, après tout je ne sais rien de vous ni de vos motivations . Donnons nous rendez-vous demain au « Café des trois borgnes. » Mais sachez que mes services seront loin d’être gratuit. »
THE FALLING : La descente dans les abysses. Rose, attablée à la terrasse d’un café comptait la liasse de billet qu’elle avait entre les mains. Cet argent représentait plus que ce que ses minables de parents ramenaient en un mois, et elle, la petite Rose l’avait ramassé en à peine une semaine. Mais elle n’en ferait pas profiter ses géniteurs : ils ne s’étaient jamais occupés d’elle, elle ne leur devait rien.
Le serveur se présenta, elle commanda une bière. Le serveur revint quelques instants plus tard, posant une pinte mousseuse sur la table. À quinze ans passé, elle n’avait aucun problème pour se commander de l’alcool et en profitait allégrement, parfois même plus que raison.
Une fois sa pinte vide elle sortit dans la rue et alluma une cigarette, prenant la direction du pitoyable appartement familial. Le manque de nicotine la rendait nerveuse et elle se sentit plus détendue une fois qu’elle eu tiré quelques bouffées. Perdue dans ses pensées, elle n’entendit pas l’homme se glisser derrière elle dans la ruelle déserte pour poser la main sur son épaule et l’immobiliser.
- « Scotland Yard. Je vous arrête pour trafic de drogue. Retournez vous lentement Mademoiselle. »
Le sang de Rose se figea dans ses veines. Si cet homme l’arrêtait ,elle allait finir en prison. Pire à la potence, à se balancer au bout d’une corde. Il la torturerait jusqu'à ce qu’elle dénonce Alexandre pour qui elle travailler depuis déjà deux ans. Le beau Alexandre qu’elle admirait. Alexandre… Mais oui ! Le pistolet dont il lui avait fait cadeau se trouvait dans son corsage. Lentement elle se tourna vers le policier et sans gestes brusques glissa une main dans son corset.
- « Les mains en l’air ! » ordonna le policier l’œil suspicieux
La main de rose se referma sur la crosse de l’arme. Elle sourit au représentant de la loi et d’un geste fluide et gracieux dégaina. Avant qu’il ait pu ne serait-ce que hurler, l’homme s’effondra, une balle logée entre les deux yeux.
Rose souffla profondément et reprit sa route comme si de rien était. Mais elle l’avait fait : elle avait tué. Bien entendu elle avait déjà tiré sur des hommes, mais jamais elle n’en avait abattu un. Jamais. Cela l’effrayait. Pas parce qu’elle avait ôté la vie d’une personne, non. Mais parce que ça ne lui faisait rien. Pas un remord, une larme.
Rose bifurqua subitement : elle avait besoin de parler à quelqu’un. Elle avait besoin de voir Alexandre.
THE SCARS : Miss Walk’ entre en scène.Le jour pointait à travers la fenêtre du bureau de Rose. Enfin « bureau » était un bien grand mot, le terme plus exact aurait été « foutoir ». Des papiers s’entassaient ça de là, des cendriers pleins gisaient sur le sol et la poussière commençait à former une couche plutôt épaisse sur le haut des meubles. Mais ça ne faisait rien, Rose était heureuse. Voilà quelques mois qu’elle avait pris son envol et monté son propre réseau de contrebande. Alexandre et elle avaient conclu un marché, il l’avait aidée, protégée et conseillé.
La jeune femme passa une main dans ses cheveux, regardant le soleil se lever à travers la fenêtre. Elle avait rendez-vous avec le jeune homme à huit heures précise, et la vieille pendule suspendue au mur jaunit indiquait sept heures trente-neuf. Il lui fallait se hâter si elle ne voulait pas être en retard. D’un pas souple, elle attrapa son manteau suspendu à la patère de l’entrée et sortit sur les docks. L’emplacement de son bureau était idéal : un peu isolé et près du port, pour acheminer la marchandise. C’est donc seule, qu’elle cheminait à travers les conteneurs pour rejoindre le centre de Portsmouth dont elle avait fait le quartier général de son entreprise. Rose se stoppa lorsqu’elle aperçu un rouquin planté au milieu de son chemin : il s’agissait d’un mafieux avec qui elle avait eu quelques déboires récemment, car son marché empiétait sur le sien et faisait considérablement baisser son chiffre d’affaires. Mais Rose l’avait bien évidemment emporté, alors que venait-il faire sur son territoire ?
- « Mademoiselle Walkson quel plaisir de vous revoir » sourit le mafieux avec un sourire à vous glacer le sang.
- « Plaisir non partagé, répliqua Rose en fronçant les sourcils. Poussez vous de là je vous prie, je suis pressée. »
Rose s’était arrêtée, et recula prudemment d’un pas, pour mettre entre elle et son adversaire une distance de sécurité. Malheureusement, elle se heurta aux torses de deux mastodonte qui l’empoignèrent sans ménagement, l’immobilisant totalement.
- « On en fait quoi Patron ? »
- « Tuez la, cracha l’homme. Je ne veux plus d’elle dans mes pattes. »
Rose inspira profondément. Elle ne devait surtout pas paniquer. Ne pas céder à la peur, malgré le bruit de la longue lame que l’on tire de son fourreau et à son incapacité à se libérer de l’emprise du géant. Ne pas montrer qu’au fond, elle se savait perdue. Qu’aucun de ses hommes n’était dans les parages. Qu’elle était totalement seule et faible face à ses agresseurs.
- « Vous voulez vous débarrasser de moi seulement parce que vous avez conscience que vous ne faites pas le poids. Face à moi, vous êtes un minable, un moins que rien un… Urg ! »
Rose sentit la lame d’acier pénétré dans son épaule. Elle la senti glisser dans sa chair en diagonale jusqu'à ses reins puis se retirer, laissant le liquide chaud et carmin se teinter ses vêtements. Un des mastodonte lui flanqua un violent coup de pied. Elle s ‘écroula sur le sol. La jeune femme ne pouvait plus bouger, prise d’un spasme, elle cracha un mélange de bile et de sang. À présent, on lui retirer ses vêtements chauds, déjà rouge de sang.
- « Avec ce froid, elle crèvera plus vite cette chienne. »
La blonde ne pouvais plus parler, elle n’y arrivait plus, elle n’en avait plus la force. Tout ce qu’elle pu faire c’est regarder s’éloigner les trois hommes, d’un regard plein de haine et de mépris. Dès qu’ils furent hors de vue, elle se laissa aller dans l’inconscience.
Rose rouvrit les yeux, ( elle n’aurait su dire, combien de temps plus tard.) Elle avait mal partout, ne distinguait pas bien tout ce qui se passait autour. Le sol était dur et froid. Mais Alexandre était là, à ses côtés. Tout se passerais bien. Comme depuis qu’elle l’avait rencontré.
THE NEW LIFE : Liberté retrouvée Rose posa un pied hors de la calèche et contempla la ville illuminée autour d’elle : Paris était aussi belle que ce qu’on lui avait prédit. Derrière elle deux hommes battis comme des armoires à glace se pressèrent pour sortir et prendre les bagages de la demoiselle, qui était déjà partie vadrouiller ça de là. Ils la suivirent docilement, sans rien dire.
Rose se retourna et leur tendit deux adresses griffonnées à la va vite sur un bout de journal.
- « À la première adresse, vous porterez mes malles qui contienne la paperasse. Ce sera mon bureau. Mon appartement se trouve à la deuxième adresse, portez-y les reste de mes effets. »
- « Mais boss, on... »
Mais la jeune femme avait déjà disparu. Depuis son agression l’an passé, Alexandre avait voulu qu’elle s’entoure. Mais après avoir décidé d’émigré à Paris pour étendre son marché, elle ne supportait plus de cette encombrante protection. Elle voulait être libre de disposer de sa dix-huitième année. Elle tira sur sa cigarette, les mains gelées par le froid de novembre. Sa cicatrice dans le dos n’était rien à côté de l’humiliation que lui avait fait subir ces hommes. Mais à présent ils mangeaient les pissenlits par la racine et savoir cela lui procurait un plaisir extrême. Elle s’était occupée de leurs cas dès qu’elle avait été remise sur pied, quelques mois après son agression. Car la blessure avait mis du temps à cicatriser, beaucoup trop de temps à son goût. Cette cicatrice était la marque de sa défaite et quiconque la verrait subirait son courroux. La blonde bifurqua à droite et s’appuya à la rambarde du pont, au dessus de la Seine. Ici elle avait des contacts, de nouveaux clients prêt à payer le prix fort, et plus de Alexandre pour surveiller si elle ne faisait pas de bêtises. Le jeu allait vraiment pouvoir commencer.