Spoiler:

Depuis la soirée de l’anniversaire du Lost Paradise, je mettais tenu plutôt tranquille, ne m’occupant que de peaufiner mes spectacles. En fait, mon intention était de me faire oublier un peu afin que, lorsque je recommencerais mes manigances, on me remarque encore plus! C’est que je trouvais que les gens devenaient trop méfiants de ma personne et, ainsi, mes petits tours ne faisaient plus rire personne. Moi, je voulais du nouveau. Je voulais de l’explosif! C’est pourquoi que, entre deux spectacles, je me penchais sur la concoction d’un nouveau breuvage qui, cette fois, serait très amusant. Il s’agissait d’une poudre incolore et inodore que je prévoyais saupoudrer dans le repas de ce midi. Ce n'était qu'une expérience purement scientifique, rien de reprochable. Et puis, personne ne le remarquerait. J’avais tout planifié pour que sa texture, pour que sa saveur ne se fasse pas découvrir. Et puis, c’était que pour jouer. Que faisait cette poudre vous me direz? Ho, mais ce qui était intéressant avec mon nouveau produit, c’est que c’était une poudre que je qualifiais de caméléon. Elle avait un agissement différent d’une personne à l’autre, d’une race à une autre. Je voulais d’ailleurs noter les effets qu’elle aurait chez plusieurs individus afin de faire mon inventaire.

C’est sur cette idée mesquine que, flacon de poudre en poche, j’entrai dans la cuisine, ni vu ni connu (je pouvais me déplacer de manière plutôt rapidement). Je savais, qu’en ce moment, les cuisiniers étaient en pause et la majorité des artistes en spectacle, c’était l’heure parfaite pour mettre dans les aliments le fruit de mon méfait et, par la suite, pour me promener dans la salle à manger pour observer. Moi, avoir l’air louche? Jamais! Enfin, j’étais le roi des excuses bidonnes, j’inventerais quelque chose à si jamais on me pinçait dans les cuisines. Et puis, j’avais eu un comportement si exemplaire depuis qu’Eddy m’avait fait la morale après le bal, que pouvait-on me reprocher?

C’est ainsi que je commençai mon méfait : je saupoudrai quelques légumes et quelques aliments de mes nouvelles épices jusqu’à temps que j’entende un bruit au loin. Quelqu’un m’avait-il repéré? Pourtant, l'heure était parfaite! À moins qu'il s'agisse d,un civil, d'un habitué? Dans ce cas, aucun problème: le grand public ne me connait pas encore à quel point j'étais coquin, ahaha. Ceux qui me connaissais, devaient avoir vite fait de m'oublier tant je les avais troublé.

Je rangeai mon flacon et, en prenant un air naturel, je sortis de la cuisine et lançai, innocemment:

- Une odeur de brûlé m’a attiré jusqu’ici. Une chance que mes sens étaient en alerte. Je suis certain que le Lost Paradise aurait passé au feu sans mon intervention.,dis-je à cette personne que je rencontrais à la sortie des cuisines pour ‘’excuser’’ ma présence ici. C’est alors que je reconnus le regard doré d’Aly. Un sourire sadique se dessina au coin de mes lèvres. C'était bien un habitué, mais pas n'importe lequel, il s'agissait d'un loup-garou bien mal léché. Je déclarai:

-Ho, bonjour Aldrick! Ça fait longtemps qu’on ne s’est pas vu. Tu es ici pour voir un de mes spectacles? J’ai justement une représentation spéciale ce soir. Si tu le veux, je t’offre le billet., ajoutais-je comme s’il n’était RIEN arrivé entre nous au bal et comme si je ne venais pas d’empoisonner la nourriture. Enfin, empoisonner était un grand terme. Je ne tuais personne : je ne faisais que m’amuser avec leur sens.

*Je ne pouvais pas tomber sur plus grand divertissement que ce colérique pour mon retour sur la scène de la provocation Je sens que la journée risque d’être mouvementée et qui sait, je finirai peut-être par me faire frapper, ho ouiiii! Moi, maso? Jamais! *siflotte**

Ayant appris que Nathanaël était amoureux, Aldrick était passé par tout un panel de sentiments, allant de la joie pour son ami, à la perplexité devant sa révélation sur le "genre" et enfin à l'angoisse en apprenant que l'Heureux élu -qu'il avait passé la soirée à défendre pour que son meilleur ami cesse de douter des bienfaits de l'amour- n'était autre que l'unique démon du Lost: Walter. L'angoisse s'était transformée en colère sourde au moment même où son interlocuteur avait déclaré qu'il se demandait s'il n'avait pas été envouté. Là, connaissant le phénomène qu'était le magicien, Aldrick avait eu nettement moins de doutes que son ami sur le propos et c'était pour tirer cette affaire au clair qu'il avait débarqué dès le lendemain matin au cabaret.

L'air furibond, levé du pied gauche, Aldrick avait fini -après un quart d'heure de recherches où on n'avait fait que l'envoyer dans des directions éronnées- par retrouver Walter Blackmoon dans les cuisines. Ce dernier en sortant, lança avec une innocence improbable que le Lost aurait pris feu sans son intervention.

*A qui veut-il faire croire ça?* Songea l'agent bougon en le gratifiant d'un regard noir alors que ce dernier le reconnaissait.

Son petit air sadique l'énerva au plus haut point. Il n'était vraiment, mais alors vraiment pas d'humeur et son histoire de représentation spéciale n'eut pour effet que de raviver violemment à sa mémoire l'épisode mémorable de l'anniversaire du Lost. Ce fut la goutte d’eau qui fit déborder le vase ! Immédiatement tous les doutes qu'il avait pu avoir sur l'innocence présumée de Walter dans ce phénomène volèrent en éclats et il passa directement sur le banc des condamnés.
Sans réfléchir d'avantage, Aldrick laissa sa colère se déverser sur le magicien. Il le saisi violemment par le col et le plaqua avec poigne contre le mur le plus proche. Soulevant son corps de façon à ce qu'il touche à peine le sol, n'ayant cure de l'étrangler à demi, sa voix semblable à un coup de canon tonna à son encontre:

- Ecoute-moi bien espèce de sale petit merdeux! Je ne sais pas ce que tu manigances encore comme coup foireux mais crois moi je finirais bien par le savoir! Qu'est-ce que tu as fait à Nathanaël?

Il laissa un temps le silence s'immiscer entre eux, à ses tempes le sang battait, ses mains tremblaient sous la colère et il n'était rien pour l'heure qu'il puisse l'énerver d'avantage que de savoir qu'on se fichait de son meilleur ami. Pire encore qu’il en ressentait un plaisir non dissimulé !
Que savait-il des souffrances déjà endurées par Nathanaël? De quel droit se permettait-il de se moquer de lui alors qu'il faisait tant d'efforts pour sourire encore et toujours au quotidien? Lui que le destin avait choisi pour exorciser les autres? Que savait-il de ses larmes étouffées? De ses nuits d'angoisses? De ces cris qui résonnaient dans sa tête durant les exorcismes? De quel droit lui infligeait-il encore d'avantage de souffrances par un enchantement? Avait-il seulement une once de conscience de ce qu'il adviendrait de Nathanaël s'il venait à apprendre tout ceci?
Non décidément il ne pouvait rester de marbre face à ça! C’était impossible !
Nathanaël était comme un frère pour lui, il l'avait déjà vu si dévasté par le passé qu'il refusait de le voir revivre ça, que seul le souvenir de cette époque suffisait à faire trembler la part d'âme en lui qui haïssait l'impuissance de ses instants où les mots lui manquaient pour le consoler. Où son visage déprimé affichait un sourire fictif auquel il ne croyait plus lui-même en lui répétant que tout allait bien. Comment aurait-il allé bien alors que son cœur hurlait si fort? Le brun n'osait imaginer les pensées qui avaient pu lui parcourir l'esprit. Il avait juste souvenir de son impuissance à lui fournir de l'aide dans ce moment-là. Pour rien au monde il ne voulait que cela ne se reproduise. Même si ça n'avait pas duré longtemps, savoir qu'il souffrait lui était insupportable, et si cette fois il pouvait changer la donne, même s'il devait se faire haïr pour que ça soit possible, il le ferait avec joie.

-Attention à ce que tu vas répondre, crois moi je ne suis vraiment pas patient et je ne sais pas ce qui me retient encore de ne pas t'en coller une directement ! Alors tu as intérêt à être convainquant! Dis-moi quel genre de sort tu lui as jeté et comment le défaire, ou je te garantis que démon ou non, tu regretteras de ne pas être resté en Enfer à côté de ce qui t'attend! Un grognement féroce acheva le propos. Un de ceux qu'il réservait d'ordinaire à Edward White.

Son poing se leva à hauteur de visage et il ne faisait aucun doute qu'il n'hésiterait pas un millième de seconde avant de l'abattre sur celui qu'il avait pris en grippe s'il ne daignait pas annuler ses grotesques tours maléfiques. Certaines de ses mèches lui barrèrent les yeux, mais aux fond de ceux-ci il était aisé d'y lire la colère qui augmentait en flèche les pulsions meurtrières du lycanthrope. Dans un coin de sa tête, il savait d'ailleurs que les êtres les plus sensibles à celles-ci finiraient par alerter le maître des lieux, mais cela lui importait peu.
Pour l'heure, il n'avait que faire d'Edward. De lui et du monde entier. Seul lui importait de pouvoir assouvir l'élan de colère qui rugissait en lui et de passer ainsi définitivement à Walter l'envie de recommencer et de mêler de près ou de loin ses amis à ses obsessions stupides, qui finissaient toujours mal.

Spoiler:

Je n’étais pas certain de comprendre ce qui se passait. Enfin, si on savait déjà que j’avais mis des épices dans la nourriture qui n’était même pas encore préparé et servie, je pouvais le dire haut et fort, les rumeurs allaient à bon train au Lost Paradise.

Aly:

-Je te l’ai dit, j’ai sauvé le Lost et… hum, ce que j’ai fait… à Nath?lançais-je sur le coup, un peu surpris par la question soudaine. Savait-il pour nous deux? Enfin… qu’importe.

Toutefois, plus  j’écoutais les paroles  vociférée par ce rustre d’Aly, plus je me disais qu’il  m’inculpait d’une toute autre faute que celle pour laquelle je croyais qu’on me réprimanderait.

Ses mains étaient posées sur ma gorge faisant ainsi une pression notable sur mon organe vocal. Notez que je faisais exprès de me laisser ainsi faire, les jambes se balançant de haut en bas comme si je me débattrais en vain. Étant un démon, j’aurais pu facilement me sortir de cette étreinte et donner à ce malotrus la monnaie de sa pièce, mais vous me connaissez bien, non? J’aimais  bien sentir mon coeur et ma respiration s’accélérer ainsi sous le joug du danger.

Mes yeux toujours aussi taquins étaient posés sur ceux en colère d’Aly. Riais-je de lui? Pas loin de ça… sérieusement, je me demandais vraiment ce que ce dernier me voulait… cette fois! Je n’eus même pas le temps de répondre davantage à sa question sans contexte qu’il me coupa :[/i]

Aly:

Tiens et il se mettait à grogner par-dessus le marché! De nous deux je me demandais qui était la bête. J’éclatai alors de rire, d’un rire plutôt méprisant quand je vis le poing de ce dernier se lever à quelque centimètres de mon visage. Je me tortillai alors dans tous les sens : (je me débattais encore pour m’amuser.)

-Ho oui, frappe-moi, tu sais comment j’aime ça, coquin…

Puis, après avoir lancé cette idiotie d’une voix un peu éteinte, je poussai un peu les doigts du malotrus qui m’empêchait décidément de parler avec fluidité et j’ajoutai, plus ‘’sérieusement’’ :

-Quoique normalement, j’aime comprendre le motif des violences qu’on m’inflige. Tu dis que j’ai fait quelque chose à Nath? Je ne vois pas de quoi tu parles. Hum…

Je fis mine de réfléchir et je m’exclamai à nouveau :

-Je n'ai rien fait à Nath. Il reste de loin le seul humain qui a le privilège de subir mes traitements expérimentaux amoureux parce que je l'aime. Un problème avec ça?

À la fin de ma phrase, ma voix était devenue étrangement plus grave et mes yeux plus rougeoyants. S’il continuait comme ça, Aly allait réussir à faire ressurgir le démon en moi, ce qui n’était pas une si mauvaise chose, mais qui pouvait très mal se terminer... pour lui.  Et moi qui prévoyait une journée tranquille à observer les réactions des gens à ma surprise dans la salle du diner, c’était bien gâché.

*Tant qu'à se faire attaquer comme ça, profitons en et s'il s'énerve vraiment trop, je lui montrerai qu'il n'a pas le droit de me juger comme ça, non mais, pour qui il se prend ? èé.*

Aldrick haussa un sourcil et devant la bêtise dont faisait preuve Walter, il ne voyait aucune raison de se retenir d'avantage de lui exprimer clairement le fond de sa pensée et lui donnant ce qu'il méritait depuis belle lurette: une correction dont il se souviendrait.

Il se serait fait un malin plaisir de succomber à cette alléchante tentation si les derniers propos du démon ne l’avaient pas laissé coi de surprise. Son étreinte se desserra sur la gorge du diable et il le laissa retomber au sol, les yeux dans le vague un instant perdu dans ses propres pensées. Walter était-il complétement fou?

-Tu...l'aimes? Répéta-t-il hagard, mais avant même que le concerné n'ait l'opportunité de  répondre quoique ce soit il fut pris d'un fou rire.

*Epris d'un exorciste! Un démon épris d'un exorciste!*

Le rire franc et moqueur s'échappa malgré lui de ses lèvres, c'était un rire mauvais, qui ne lui allait pas. Un rire dénué -de ce qu'il s'évertuait le plus à réprimer quand il été face au clan- d'humanité.
Ses deux pupilles dorées fusillèrent son interlocuteur du regard.

-Foutaises! Allons Walter! Pourquoi donc croirais-je pareille ineptie? Ton instinct sait bien que Nath' n'est pas un humain comme les autres, n'est-ce pas?

Sans crier gare, il abattit le poing plus tôt brandit en plein dans le ventre du magicien. Sans aucune retenue. De plein fouet. Avec toute la colère qu'avait fait naître en lui tout ceci. Se penchant pour glisser à son oreille avec tout le sadisme lié à son espèce devant une proie stupide.

-N'as-tu pas plus crédible? Particulièrement après ce qui s'est passé au bal. Ce n'est pas vraiment ce qui s'appelle "épargner les gens par amour", ça serait même plutôt le contraire, et je doute être le seul à penser ainsi.

Il retira avec nonchalance son poing et après s'être redressé un peu croisa les bras sur son torse. C'était bien loin de lui suffire ; autant comme explication que comme défouloir mais s'il se retenait pour ne pas passer ce saligaud à tabac, c'était uniquement par respect pour Nathanaël.

-Qu'est-ce que tu lui as fait subir comme "traitement expérimentaux" au juste? S'enquit-il en espérant trouver ainsi comment rompre le sortilège. Oh et pitié, épargnes moi tes salades sur l'amour, d'accord? Je n'y crois pas deux secondes!

*Il n'a vraiment rien comprit cet abruti! Comment Nath' peut-il aimer un être pareil?*

La veine au-dessus de sa tempe ne cessait de se gonfler, et il n'était nul besoin d'avoir fait une école supérieure pour se rendre compte de la fureur qui émanait du commissaire.  Ce dernier ne cherchait d'ailleurs nullement à la dissimuler.

*Quand je pense que j'ai passé la soirée à le défendre, LUI! Si j'avais su... Ce nigaud n'a jamais ressenti de l'amour pour quelqu'un, alors impossible qu'il puisse éprouver quoique ce soit de sincère vis à vis de Nathanaël!*

Quelque part au fond de lui pourtant, une petite voix, comme par esprit de contradiction glissait : "En es-tu sûr?". Mais il chassa sans attendre ce doute, comme on ballait un moucheron gênant de la main, grognant de s'être laissé importuner par des idées saugrenues alors qu'il été occupé.