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Cabaret du Lost Paradise - Forum RPG

Forum RPG fantastique - Au cœur de Paris, durant la fin du XIXe siècle, un cabaret est au centre de toutes les discussions. Lycanthropes, vampires, démons, gorgones… Des employés peu communs pour un public scandaleusement humain.
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 Raccommodage. [pv Reilly]

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AuteurMessage
Félicien Matagot
Le Matou du Diable
Félicien Matagot

Messages : 56
Date d'inscription : 08/03/2014
Localisation : Drappés dans la nuit, des yeux verts vous observent

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MessageSujet: Raccommodage. [pv Reilly]   Raccommodage. [pv Reilly] I_icon_minitimeLun 17 Aoû - 20:49

Un grondement lui échappa lorsqu'il déchiffra l'écriteau. Y était inscrit en lettres majuscules : "Horaire d'ouverture (...) Fermé le dimanche" Félicien avait été si pressé d'atteindre le Cabaret du Lost Paradise afin d'effacer le souvenir de son affreuse journée qu'il oublia que tout était fermé le dimanche, y compris l'établissement le plus anormal de toute la ville. Las et désespéré, Félicien laissa sa tête tomber sur la porte d'entrée qui la heurta d'un bruit sourd. Il expira longuement, essayant d'évacuer la colère et la frustration accumulée tout au long de la journée, ignorant le bleu qui ornerait bientôt son front. Il savait pertinemment qu'il n'avait à s'en prendre qu'à lui-même, après tout, il ne s'agissait que d'un petit maillon venant allonger la déjà longue chaîne de déception de sa journée...

Il finit par lâcher un soupir puis s'éloigna de l'entrée, allant prendre appui sur un réverbère faisant face à l'établissement. Le chat considéra un moment le fronton imposant du cabaret, par ce dimanche de pluie, il lui trouvait des airs de forteresse imprenable. La pensée réconfortante qu'il n'était peut-être pas le seul à s'être fourvoyé de la sorte illumina son esprit, mais en jetant un regard çà et là de la rue, la réponse s'avéra plus que négative. Il était seul arrêté sur les pavés du Lost Paradise. Voir un de ces spectacles lui aurait fait tant bien songeait-il avec amertume.

Le boulevard des arts était plutôt silencieux, les passants y étaient rares du fait de la pluie et du dimanche soir. Elles tombaient à grosse goutte il y a une heure, mais se faisait à présent plus clémente prenant forme d'un léger crachin humidifiant, mais qui permettait de rester dehors sans être aveuglé. Félicien s'en inquiétait peu maintenant, il n'appréciait guère la pluie, mais il était trop trempé pour s'inquiéter de subir encore quelques gouttes. Elles tombaient à grosse goutte il y a une heure, mais se faisait à présent plus clémente prenant forme d'un léger crachin humidifiant, mais qui permettait de rester dehors sans être aveuglé. Les seuls parisiens de passage marchaient à pas vifs sous des parapluies sombres. Bourgeois, commerçants, gavroches, aristocrates, ouvriers... les différents personnages des caricatures des journaux satiriques se succédaient sous le regard du matou. De l'agitation quotidienne, il ne restait que le roulement des fiacres sur les pavés ajoutant une couche à la morosité de la scène, en éclaboussant de larges flaques le trottoir et les passants.

Félicien se contenta quelques minutes de ce spectacle, ne réfléchissant à rien, se laissant glisser dans la tranquillité humide de l'instant. Puis le moment fatidique arriva : il s'ennuya. Il détestait s'ennuyer. L'inactivité lui était insupportable, il la percevait comme un fléau qui un siècle ou l'autre le conduirait à la dépression, au désespoir puis au suicide. Vivre plusieurs siècles fut été impossible s'il n'y avait encore des choses à découvrir après tant d'années. Il se sentait glisser dans un gouffre de spleen qui, il le sentait s'il ne prenait gare, finirait par l'engluer et le tuerai à petit feu. Il s'agissait de la raison pour laquelle il semblait ne pas tenir sur place, qu'il était dans cesse à la recherche d'une occupation, d'une découverte, d'un savoir. S'occuper l'esprit l'empêchait de trop réfléchir, de trop se pencher sur des questions existentielles, tranquilles d'apparences, mais empoisonnées.

Le chat voulut se saisir de sa bague à tabac pensant que fumer l'occuperait un peu, au lieu de rester à bâiller aux corneilles. Il fouilla dans la poche intérieure de son manteau lorsqu'un déchirement l'interrompit. Les coutures de sa manche gauche de son manteau tendues par son geste venaient de céder et c'était tout le haut de sa manche qui pendait à présent à son bras, retenue par un pli au coude. Il lâcha une exclamation exaspérée. Que sa veste tente de lui fausser compagnie n'était pas nouveau, il n'y avait qu'à voir toutes les coutures qui maintenaient maintenant les pièces de tissu entre elles. Sa veste était vieille, très vieille, il ne souvenait même plus d'où il la tenait, elle était abîmée, mais il ne s'était jamais résolu à s'en séparer. D'autant que ce siècle-ci les goûts parisiens en matière de mode lui paraissaient saugrenus, il n'y avait qu'à voir les grands capitons que portaient les dames, ridicules ! Félicien remonta sa manche négligemment, concentré sur la promesse de tabac frais. Il finit par atteindre sa pochette de cuir frappée de nœuds celtique qui se révéla moite au toucher. Félicien fronça les sourcils, ce n'était pas bon signe. Le félin découvrit en la sortant de la poche intérieure de son manteau que ce dernier était si trempé qu'il en avait mouillé sa bague et le tabac avec. Il lâcha un énième soupir agacé. Il avait pris la résolution d'arrêter le tabac de toute manière afin de regagner tout son odorat qui se révélait capital dans son travail. Le félin fixa les lèvres pincées sa pochette, se demandant ce qu'il avait pu fa dans une de ses sept potentielles vies antérieures pour mériter un tel acharnement.

.« Raaaaah ! Feckin Fate ! 'Pas comme-ci j'tai fait cocu, oui ! C'mon Life, let me, d'you want ? »

Il se rémora les paroles que Fabrizio, son spectre colocataire, lui avait dit un jour. Le spectre le fixait en silence, comme il avait coutume, le chat ne s'en était pas inquiété plus que d'habitude. Puis le fantôme avait fini par déclarer : "Je pense que tu es quelqu'un d'extrême n'y chanceux. Ton père a sans doute dû le pressentir pour te nommer ainsi." Félicien avait été surpris, il s'apprêtait à remercier son ami, mais le spectre ne lui en laissa pas l'occasion, n'ayant pas fini d'exposer le fruit de sa réflexion : "C'est ma seule théorie pour expliquer que tu sois encore vivant." Le chat changea de couleur, alors que le spectre renchérissait de plus belle : "C'est vrai quand on y réfléchit sérieusement. Pour que tu sois encore en vie après plusieurs siècles, en considérant ton don pour t'attirer des ennuis ou bien les créatures les plus dangereuses en ce monde, cela ne peut être dû qu'à une chance incommensurable, énorme." Les spectres possédaient une manière unique et stupéfiante de désacraliser la vie et la mort et Fabrizio avait le don de lui adresser ce genre de phrase charmante vous donnant le mal de mer au rez-de-chaussée d'un appartement et pire, l'accomplissait avec grand tact. Un phénomène qui donnait encore des vertiges au matou, n'ayant nul doute que son majordome bien-aimé eu sans problème pu pousser des tierces personnes à se défenestrer de désespoir. Néanmoins, vivre avec une telle personne avait l'avantage de rendre plus résilient à force de telles remarques.

S'il suivait la théorie de son directeur de conscience ectoplasmique, il était en train de payer toute la chance dont il avait pu bénéficier tout au long de sa longue vie. Il fallait reconnaître que la journée avait été fantastique.

Depuis ce matin, il avait enchaîné les calamités et concours de circonstances. En travaillant, il s'était d'abord fait passé à tabac à cause d'un éternuement très mal interprété. Alors qu'il n'était pas enrhumé. En rentrant chez lui, Fabrizio était furieux parce qu'il avait mis du sang sur les serviettes de salle de bain. Alors qu'il n'était nullement responsable que son nez ait décidé de détrôner les chutes du Niagara des Sept merveilles du monde. En plus il avait très mal. Il n'avait rien de cassé fort heureusement, mais il avait très mal. Il avait essayé de dormir, sans réussir. Son épaule gauche le faisait souffrir, impossible de trouver une position qui ne lui arrache un couinement. Alors que son métabolisme de félin lui réclamait 15 heures de sommeil journalière. Fabrizio avait continué à râler, improvisant de fantastiques monologues en italien auxquels Félicien ne comprit pas un mot, mais devinait au ton qu'il ne s'agissait pas d’un éloge en son honneur. Fatigué, il décida de quitter son appartement qui ne pouvait lui procurer le calme recherché et décida de se rendre au seul lieu à sa connaissance pouvant lui apporter tranquillité et repos : le cabaret du Lost Paradise.
Il avait marché sous la pluie pendant presque une heure, il avait réussi à prendre un fiacre mais qui eut un accident cinq minutes après qu'il soit monté. Les conducteurs d'omnibus faisant la grève il s'était résigné à poursuivre à pied. Trempé et harassé, il s'était trainé jusqu'au panneau de l'entrée.

Une idée illumina son visage soudainement. Il y avait bien d'autres bêtes dans les rues de Paris n'ayant rien à voir avec les dauphins-garous qui pouvaient encore égayer sa journée. Félicien après avoir vérifié que la rue était assez déserte lança un miaulement, mais il se perdit bien vite dans la ruelle. Il n'eut en réponse que les crissements des gonds d'un volet rouillé secoué par le vent. Il jeta un coup d'œil à des fenêtres allumées aux étages du cabaret. Il avait oublié que la présence de certains éloignait ses cousins. Ne parlant pas le vent, il se résigna à l'idée que sa journée prendrait fin de la sorte, à moins que par le plus grand des hasards son appartement eut pris feu en son absence. Pour couronner sa journée, il eut fallu peut-être qu'il croise son ancienne compagne sirène, débarquant à Paris pour lui réclamer de l'argent comme s'il eut été le compte en banque miaulant à moustache qu'elle aimait s'imaginer. Heureusement pour lui, elle devait avoir largement plus de cinquante ans aujourd'hui. Dans la limite du plausible, il aurait pu croiser par hasard un de ces enfants, qu'elle aurait eu avec le loup-garou pour qui elle l'avait quitté. Bien que les chances fussent minces, au vu de sa nymphomanie. Il essaya d'imaginer la progéniture d'un loup-garou et d'une femme-poisson; un dauphin-garou ? À quoi pouvait ressembler, le cri du dauphin-garou les soirs de pleine lune ? *'Talk about a joke...*

Il se rappelle alors la jeune louve qu'il avait rencontrée à la fête de la musique, Tala Harcourt si sa mémoire ne lui faisait défaut, qui lui avait parlé de rendre la chaussure du seigneur des lieux de la même manière que le chat l'avait reçue. Il avait perdu la chaussure, mais peut-être que mademoiselle Harcourt l'avait finalement récupéré. Il espérait bien que cette dernière ait finalement pu accomplir sa vengeance, comptant sur son tempérament de feu pour outrepasser les règles de la meute. Se serait bien la première fois qu'un loup gagnerait sa sympathie. Il étira un sourire ironique à cette pensée, bien saugrenue venant d'un chat. Fabrizio était loin d'avoir tort en lui prêtant le don d'attirer et parfois même de sympathiser avec des personnes capables de le réduire en charpie. Si elle le fait, je lui payerai un verre à cette gamine ! Pensa-t-il un sourire triomphant aux lèvres.

Le clapotis d'une flaque interrompit l'irlandais qui tourna vivement la tête vers l'origine du bruit. Une personne plus loin en amont du boulevard marchait tranquillement dans sa direction. Cette silhouette du bout de la rue interpella tout de suite le chat, lui semblant familière. Il dressa la liste des personnes qu'il était susceptible de croiser en cette heure et en ce lieu, mais aucun des noms ne le satisfaisant, il plissa des yeux pour mieux distinguer ces traits. Plus celle-ci se rapprochait plus elle ressemblait à un garçon aux cheveux blonds presque décolorés. Félicien plissa le nez, lorsqu'il comprit à qui il allait avoir affaire, peu enchanté de cette rencontre qui se profilait valant à son goût largement celle d'un dauphin-garou. Le dernier maillon de la chaîne de ses péripéties malheureuse allait porter le nom de Reilly O'Brian. Il essaya d'avorter l'entrevue avant que le petit bout d'homme ait le temps de faire quoi que ce soit.

-Oh no, not you ! Stop ! Oui juste là, tu t'arrêtes tout de suite, voilà. Non ! Non non non, tu ne dis pas un mot. Non, pas un mot, j'ai dit ! Ce n'est ni le jour, ni l'heure, ni le moment ! Tu bouges pas avant que j'aie tourné au coin de la rue et j'oublierai de t'avoir croisé. C'mon be a good boy, let me go away, don't say a word. Please. In all the ways, you can't hug me, I'm totally wet...

Il finit sa phrase sur un ton de victime de la fatalité. Felicien n'oublia pas cependant de fusiller du regard ce lutin maléfique qui s'approchait dangereusement de lui, par précaution et par principe. De ces trois cents ans de vie, il n'avait jamais rencontré un être aussi collant que Reilly O'Brian.

Sa rencontre avec ce petit être perfide avait vite tourné au vinaigre ; cette carence affective gargantuesque prenant la forme d'une cruche au fond percé ne pouvait être qualifiée autrement. Il l'avait rencontré au cabaret, Félicien l'avait d'abord pris pour un enfant, il ne comprit pas d'ailleurs pourquoi on l'avait laissé entrer. Il adorait les enfants, cependant, il découvrit vite que Reilly était loin d'être le marmot de 14 ans dont il avait l'air. Le chat savait comment se comporter avec les enfants, il les appréciait même. En revanche, découvrir sous cette apparence candide d'enfant une personne ayant la maturité d'un grand adolescent, voire d'après ce qu'il comprit, avec horreur, la maturité sexuelle d'un adulte, le découvrir lui avait l'effet d'un piano tombé du troisième étage sur sa tête. Le matou s'était vu complètement déboussolé.
Alors lorsque le non-enfant débordant d'amour tenta de l'agresser physiquement en pénétrant de force dans sa sphère privé dans le but de pourvoir son besoin journalier en câlin en s'apercevant de sa présence -Félicien avait réussi à l'éviter jusque-là- et qui avait soi-disant passant, deux secondes auparavant lancé une plaisanterie sous les yeux ébahis du matou avec une bande de marins ayant le triple de son âge sur des sujets on ne peut plus osés qui avait fait rougir la serveuse et les autres clients attablés près d'eux... Le choc fut violent.
Félix ne sachant pas comment réagir face à cet être manifestement complexe et très étrange et d'autant plus que son caractère faisait qu'il lui était impossible de rester entre deux eaux, il trancha vite de manière tout aussi violente. Reilly O'Brian finit avec la chaussure de Félix entre les deux yeux. Un geste qui fut répété à maintes reprises lors de leurs rencontres, le môme essayant à chaque fois de le saluer de la même manière. Ce gosse devait avoir quelque chose de masochiste, car il revenait à chaque fois de plus belle.
Leurs rencontres au cabaret furent vite mouvementées, le chat et l'enfant ayant tous deux un goût prononcé pour l'ironie. Alors que Félix espérait que l'enfant fuit à force de sarcasmes à son sujet, ce dernier de prêts à son jeu et au contraire redoubla d'enthousiasme. Selon l'avis de Félicien alors, ce garçon aimait décidément se faire maltraiter.

Sa présence ici pouvait bien remplacer un potentiel dauphin-garou. Son arrivée sonnait le glas de sa journée infernale, il était bien la dernière personne qu'il souhaitait voir aujourd'hui. D'ailleurs, il ne se souvenait pas avoir souhaité une seule fois le voir, il n'allait pas commencer à le souhaiter à partir de ce jour.

Le félin regarda Reilly de haut en bas, comme-ci même trempé jusqu'à l'os et cerné comme un mort-vivant, sa félinité faisait de lui un être appartenant à une race supérieur conservant un amour propre et une dignité à toutes épreuves. Le chat commença à lui tourner le dos, prêt à partir tel un prince, sa dignité sous le bras s'en retournant en son royaume remplit d'oiseaux de paradis, de pelote de laine et de coussins chaud garnis de plume d'oie.

Spoiler:

_________________
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Je te casserai les oreilles en #339966
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MessageSujet: Re: Raccommodage. [pv Reilly]   Raccommodage. [pv Reilly] I_icon_minitimeSam 22 Aoû - 23:33

"Feck you, life !" (&#?à"! la vie !)

L’agacement du petit irlandais était clairement audible dans cette interjection soudaine qu’il venait de lancer à la vie elle-même. C’était pas comme si elle allait l’écouter, en plus, alors pourquoi s’en priver ? Non, parce que si elle l’avait écouté, il aurait passé une bien meilleure journée. Tout ayant commencé par une fin de nuit horrible. Il avait bien trop bu, la veille, et il en avait encore bien mal au crâne.

Ah ça, Reilly O’Brian ne faisait pas ses dix-huit ans, même pas une chope à la main non, seulement il les faisait largement quand il blaguait sur certains sujets avec des hommes, des adultes, parfois de plusieurs fois son âge, quand son comportement changeait et qu’il se prenait au jeu de quelques aventuriers, d’hommes qui se plaisaient à tenter de nouvelles expériences. A vrai dire, Reilly commençait à être connu pour ça, dans certains quartiers, et il ne savait pas si c’était très bien… Enfin, pour le coup, la nuit dernière avait été mouvementée, et l’alcool avait coulé à flot, bien plus que ce qu’il n’aurait dû ! Puisque, le petit irlandais étant et restant irlandais jusque dans son foie, il tenait extrêmement bien l’alcool. Et il avait fini complètement saoul. Saoul à se réveiller chez un inconnu, enfin chez quelqu’un dont il ne se souvenait plus, à se perdre dans Paris pour la millième fois, à déambuler pendant des heures avant de tomber sur une de ses connaissances en la personne d’Aliessandre.

Aliessandre Courrel, jeune horloger rencontré à la fête de la musique, fort sympathique mais…très collant. Pourtant, le petit lorialet adorait le contact physique ! Mais lui, il était juste…trop. Un jeune homme tout à fait charmant, mais qui avait cet intérêt pour lui qui faisait qu’il savait pertinemment que quand ils se croisaient, il devrait lui céder un baiser pour être libre. L’attitude libertine de son petit coup de coeur ne plaisait pas du tout à l’horloger qui, plusieurs fois déjà, lui avait écrit des poèmes pour lui demander de lui être exclusif. Seulement voilà : Reilly ne pensait pas avoir quelque vraie relation que ce soit, avec qui que ce soit, alors il ne comprenait même pas pourquoi Aliessandre le lui demander. Et puis, en plus, il n’éprouvait strictement rien pour lui à part de l’amitié, et il le lui avait déjà répété plein de fois. En plus, c’était tout bonnement impossible que quelqu’un s’intéresse vraiment et sincèrement à lui. Alors voilà.

Pour le coup, il était resté plus de deux heures chez son ami, qui, par contre, lui avait fait à manger. Ce qui était la seule bonne chose de sa journée. Parce que, quand le destin décidait de s’acharner sur Reilly, il ne faisait vraiment pas semblant, oh que non ! La gueule de bois, Aliessander l’horloger collant, puis…

Alors qu’il avait essayé de rentrer au Lost et avait finalement réussi à détacher Aliessandre de lui grâce à un baiser envoutant et fourbe, qu’il assumait totalement, il avait commencé à pleuvoir. A beaucoup pleuvoir. Une pluie digne de chez lui, en Irlande. Et, bien évidemment, puisque c’était dimanche, tous les commerces étaient fermés puisque dimanche était la sainte journée ou il ne savait pas trop quoi. Reilly n’avait jamais cru en Dieu, et il n’y croirait jamais. Si quelque Dieu existait, il avait pensé, si quelque Dieu existait quelque part dans le ciel, il ne ferait pas subir autant d’atrocités aux gens. Et puis, ceux qui justifiaient ça avec des « ce sont des épreuves pour tester notre foi », ça lui sortait vraiment par les trous de nez ! Une épreuve, pour lui, c’était le début de l’épreuve, l’épreuve en elle-même, et la fin de l’épreuve. Rien d’autre, pas de « post-épreuve » donc techniquement pas de malheurs qui suivent. Et puis, si un Dieu existait et qu’il rendait quand même la vie de ses fidèles aussi moche, à coup de malheur sur malheur, c’était vraiment un…vicieux ! Un gros vicieux pas du tout bienveillant ! Et sadique en plus !

"Oh non mon pauvre chou, tu es perdu ? Tu es complètement trempe, viens là !"

Reilly cligna des yeux en analysant la chose à la voix sur-aigüe qui venait de lui adresser la parole, le sortant complètement de son résumé sur cette si mauvaise journée. Il s’agissait d’une dame, enfin elle y ressemblait en tous cas, mais on aurait pu aussi bien en douter, donc une présumée dame saucissonnée dans une tenue bien trop serrée pour elle, pleine de rose et de froufrous et fanfreluches. La basque de sa sur-jupe verte aux motifs de lys dorés donnait l’illusion qu’elle possédait un derrière trop immense pour être réel, et en plus la couleur tranchait irrémédiablement et péjorativement avec le jaunâtre défraîchi de sa jupe et de son corset qui, soit dit en passant, était à l’envers. Une dame qui avait son corset à l’envers, les boutons derrière. Oh, pas que le style déplaisait à Reilly, au contraire ! Le petit couturier avait en effet déjà muni quelques-unes de ses créations de boutons dorsaux, seulement là on pouvait clairement voir que ce n’était pas fait exprès. Ajouté à sa tenue étonnante, un accessoire d’aussi bon goût trônait au dessus de la tête coiffée de la dame, en un parapluie tout à fait distingué, bleuâtre et totalement imbibé d’eau.

"Tu es souvent au Lost Paradise, non ? J’y suis souvent aussi, tu connais bien le propriétaire ? Quel homme ! Et les artistes aussi ? Tu connais celui qu’on appelle Silvery ? Ou encore Emerald ? Oh tu sais, moi aussi je chante ! Je peux te faire écouter ? Comme ça tu pourras en parler au patron du cabaret, d’accord ?"

Non. Reilly soupira discrètement. Il n’allait pas ramener cette humaine au patron. Mais avant qu’il n’ait eu le temps de dire quoi que ce soit, la dame se mit à chanter. Ou plutôt, à pousser des sortes de cris entre deux mugissements, dans des tonalités stridentes et tranchantes sur une sorte d’opéra que le petit lorialet n’arrivait pas à identifié tant les hurlements- la voix, la voix de cette dame était…particulière. On ne peut plus particulière même. Il le supporta une trentaine de secondes avant que ses tympans ne lui chuchotent délicatement de couper court à cette entrevue artistique. Reilly, même de mauvaise humeur et en plein dégrisement, était bien trop gentil avec les inconnus.

"Heu…je parlerai de vous à le mon patron, il- il faut que j’aille vite madame, milady…jeune dame ?"

Gagné. La dame en question, ravie de l’apostrophe « jeune dame », gloussa paisiblement, pleine de confiance. Le petit couturier le voyait dans ses yeux : elle ne doutait pas du fait d’être prise au Lost Paradise. Ah ! Si seulement elle savait !
Mais Reilly ne perdit pas de temps et, avant que la tonne de froufrous jaunâtres ne se rende compte qu’elle ne lui avait pas donné son nom, il fila aussi vite que possible pour se glisser dans une nouvelle rue. Ses oreilles sifflaient encore, bien mécontentes de cet intermède musical non-consenti, et elles frissonnaient tellement que ça lui faisait des chatouilles aux tympans.

Par contre, il n’avait toujours pas cessé de pleuvoir. Et il était pieds nus, comme d’habitude. Très mauvaise idée par temps pluvieux. Là, ses petits pieds pâles n’étaient plus blancs mais marrons, noirs, un peu gris et très boueux, très sales, lavés au fur et à mesure par la pluie puis sales, encore. Ca, et puis de toute façon il était trempe jusqu’au os et à la moelle ! Son habituelle chemise blanche lui collait à la peau et, bien qu’assez épaisse en temps normal, dévoilait légèrement son torse en semi-transparence. Son pantalon noir près du corps…était encore plus près de son corps, comme greffé à sa jambe, ou plutôt comme une seconde peau.
Le petit couturier s’immobilisa quelques secondes dans la rue presque vide, occupée par seulement quelques badauds munis de parapluies. Il releva la tête, foudroyé par un éclair de génie et d’inspiration. Un pantalon près du corps, comme une seconde peau, prêt du corps donc…qui mettrait en avant les jambes des gens, qui flatterait leurs formes et les définirait mieux. Oh oui. C’était génial. Il fallait essayer ça ! Pas un collant, mais bien un pantalon ! Peut-être même pourrait-il en faire porter à des femmes ? Il cligna les yeux et secoua la tête. Son avant-gardisme était bien trop enthousiaste. En tous cas, cette nouvelle idée venait de lui faire retrouver le sourire, en à peine quelques secondes !

Ce fut tout autant de temps qu’il fallut à un fiacre pour le raser de près et l’éclabousser, avec l’aide d’une énorme flaque nichée dans un nid de poule dans les pavés. Un magnifique « splash » retentit alors que le petit lorialet arborait une mine de chaton mouillé complètement effarouchée. Véritable montagne russe d’émotions que cette journée…

"AAAAAAH ! I FECKIN’ HATE YOU SOMETIMES, LIFE, Y’HEAR ME ???" (je te hais parfois, la vie, tu m'entends ???)

Reilly soupira bruyamment, juste après ce puissant nouvel appel à la vie, qui elle était encore, visiblement, sur répondeur puisque le coût de son message fut un vrombissement infernal à l’intérieur de son crâne. Il pesta en gaélique, fidèle à ses racines, en se tenant la tête. Ne jamais crier quand on a la gueule de bois. Il voulu enfouir ses mains dans les poches de sa veste afin d’illustrer encore mieux sa frustration, mais seul l’air enveloppa ses petites mains graciles. Il cligna des yeux, les baissa, les remonta en soufflant fort après avoir constaté, et s’être rappelé, qu’il ne portait pas de veste puisque la veille avait été une magnifique journée, et la nuit tout aussi dégagée.

Reilly reprit donc sa route sur les pavés parisiens, agacé, perdu depuis au moins deux bonnes heures, et trempe. Avec sa bouille renfrognée, on pouvait facilement le comparer à un chaton trempé en pleine détresse. Là, il rêvait de retrouver son chemin, de rentrer au Lost, de se mettre complètement nu, de prendre une douche avant de se sécher et de s’étaler dans son lit pour se rouler dans les couvertures le plus douillettement possible, et de s’endormir en ronronnant de tout son saoul. Ca, et du lait chaud. Ah…qu’est-ce qu’il avait envie de lait chaud !
Les O’Brian n’étaient pas des personnes du genre à s’apitoyer sur leur sort ou sur ce qui leur arrivait, non, mais il y avait bien des jours, comme celui-là, où la vie est tellement sadique qu’il leur fallait bien rêver et bougonner en gaélique pour se sentir mieux.

Chemin faisant, le petit irlandais bougonna donc joyeusement de sa petite voix claire, doucement pour ne pas s’attirer trop de regards curieux, tout en se demandant ce qui pouvait lui arriver de pire que ce qui s’était déjà passé aujourd’hui.
Là encore, la réponse ne fut pas très longue à venir, alors qu’il venait tout juste de marcher dans une énième flaque.

-Oh no, not you ! Stop !

Le petit lorialet releva à nouveau la tête. Hein ? A qui appartenait donc cette voix grave ? Il était sûr de la connaître…il n’y en avait pas trente six mille… Et puis, est-ce qu’il, puisque c’était vraisemblablement un homme, lui parlait à lui, au moins ? Au loin, en haut de la rue, il pouvait apercevoir une silhouette sombre. Alors il se pointa du doigt pour s’assurer qu’elle s’adressait bien à lui.

-Oui juste là, tu t'arrêtes tout de suite, voilà.

Ah… Reilly pencha la tête sur le côté, un petit sourire étendant doucement ses lèvres roses. Il avait reconnu. Son interlocuteur se résumait en deux mots : Félicien Matagot. Qui d’autre pour avoir une si jolie voix grave et lui commander, à grande distance, de ne pas se rapprocher de lui ? Ah, son Félicien préféré ! Son meilleur ami et son pire ennemi combiné dans le corps d’un chat d’argent, un chat au comportement grincheux qui l’appréciait autant qu’il le détestait. En fait, leur première rencontre ne s’était pas très bien déroulée. Enfin, tout dépendait le point de vue.
Félicien l’avait d’abord pris pour un enfant, comme tout le monde, quand ils s’étaient croisés dans le bar du Lost. Alors, pendant quelques minutes, ils avaient parlé normalement. Reilly avait été ravi de rencontrer un irlandais comme il les aimait, un homme avec qui il allait pouvoir s’entendre à merveille, sans aucun doute ! Seulement voilà, à la base le petit couturier passait la soirée avec trois ou quatre marins de passage à Paris, donc il avait bien dû les rejoindre. Là, il avait blagué avec eux de manière plus que décomplexée sur des sujets tendancieux qui pouvaient choquer la sensibilité de…beaucoup de gens. Ce qui fut tout à fait le cas, puisqu’il avait même fait rougir toutes les tables alentour. Il avait alors capté dans le regard de son matou irlandais la désillusion à l’état pur. Parce qu’en plus, deux des matelots avec qui il buvait étaient en train de se battre pour le prendre sur leurs genoux, donc Reilly s’était laissé faire, comme d’habitude. Ajouté à tout ça que les marins devaient avoir le double ou le triple de son âge…
Forcément, quand il avait ensuite essayé de faire un câlin au Matagot, ça ne lui avait pas du tout plu, et il avait fini avec la chaussure du matou en pleine face. Reilly rit un peu en se remémorant la scène. D’abord, il s’était dit que Félicien, qui avait sûrement deviné son homosexualité, avait seulement peur qu’il essaye de l’attirer avec lui, mais après réflexion, il en était arrivé à la conclusion que Félicien ne l’aimait pas. Qu’il ne le supportait pas, en tous cas. Seulement voilà, lui ayant toujours eu cette capacité à identifier les personnes susceptibles de bien s’entendre avec lui, il n’avait pas eu envie de rayer ce matou irlandais de sa liste de connaissances.
En plus, ils avaient la même sorte d’humour, et puis, Reilly le pensait, ils commençaient à apprécier leurs rencontres, chacun de leur côté. Reilly adorait les moments qu’ils passaient ensembles, en tous cas, une des raisons principales à cela étant qu’il ne s’ennuyait jamais avec Félicien. Une autre de leurs caractéristiques communes étant la peur de l’ennui, avec lui il savait qu’il aurait toujours de quoi faire. Et puis, même si à chaque fois il lui sautait dessus et que, par conséquent, le matou lui lançait toujours sa chaussure en pleine face, ça ne le dérangeait absolument pas. Même, Reilly se plaisait définitivement à le provoquer de ce côté-là, puisqu’après tout il avait connu bien pire. Et puis, plus Félicien l’attaquait à coup de chaussures ou de sarcasmes, plus il piquait l’intérêt de Reilly, plus il le lui rendait.

Le petit irlandais, ravi, ouvrit la bouche en reprenant sa marche pour se rapprocher du chat, qui semblait aussi trempe que lui. Il ouvrit la bouche, prêt à lui répondre qu’il bougerait s’il avait envie, quand le chat le coupa sans vergogne :

-Non ! Non non non, tu ne dis pas un mot. Non, pas un mot, j'ai dit ! Ce n'est ni le jour, ni l'heure, ni le moment ! Tu bouges pas avant que j'aie tourné au coin de la rue et j'oublierai de t'avoir croisé. C'mon be a good boy, let me go away, don't say a word. Please. In all the ways, you can't hug me, I'm totally wet…

Le matou était en train de lui tourner le dos. Parfait. Reilly rit un peu avant de se mettre à courir aussi vite que possible pour le rattraper avant de…lui sauter dessus.

"FEEEEELICIEEEN I LOVE YOOOUUUU ! JE M’EN FICHES QUE TU SOIS TREMPE MOI AUSSIIIIIII !" (Félicien je t'aaaiiime !)

Le petit lorialet riait aux éclats, vraiment ravi. La présence de ce Matagot à la fin de sa journée était presque apaisante. Presque.
Reilly se raccrocha à la veste du matou, prêt à se prendre l’éternelle chaussure de sanction quand l’imprévisible se produit. La manche du chat se déchira en un craquement qui sonnait les derniers instant de sa veste large, et il dû se rattraper de justesse à son pantalon, joue contre son ventre, pour ne pas tomber genoux sur les pavés.

"What the ?"

Il se redressa avant que Félicien eut le temps de réagir et l’inspecta sérieusement, la manche déchirée entre les mains.
La veste du chat était en bien piteux état. Non, pire que ça même. Les deux manches déchirées, une poche trouée, le tissus complètement imbibé d’eau, rapiécé de tous les côtés…ça n’allait pas du tout ! Du tout du tout ! Cette veste devait avoir connu une mêlée de cinq cent guerriers et amazones pour être dans cet état là ! Reilly ne pouvait pas ne pas faire quelque chose pour…ça ! Son instinct de couturier de l’extrême lui interdisait de passer à côté de ça !
Il prit vivement la main de Félicien sans lui laisser l’occasion de protester ou de se dégager, et le tira vers l’entrée du cabaret qui était fermé le dimanche. Ils seraient tranquilles pour que Reilly lui recouse sa veste.

"Ya’ do not say anything, mean old cat, and ya’ follow me closely, I shall sew ya’ a new jacket or try to get this one better ! Et tu râles pas sinon…" (tu ne dis rien, vieux chat odieux, et tu me suis, je vais te coudre une nouvelle veste ou essayer d'arranger celle-là !)

Sinon rien, en vérité. Mais il espérait dignement que sa voix candidement menaçante suffisait à dissuader son matou favori de râler.

Il passa prudemment la porte du cabaret, sa petite main qui tenait toujours bien la grande main du grand Félicien, et jeta un coup d’oeil à gauche, puis à droite avant de se risquer à faire quelques pas dans l’établissement, entièrement aux aguets. Normalement, il n’avait pas le droit de faire rentrer des gens ici, encore moins de les faire monter aux étages, alors s’ils se faisaient prendre…
Il tira doucement Félicien avec lui, observant précautionneusement chaque recoin du cabaret jusqu’à arriver en bas des escaliers. Là, il commença à monter quelques marches, toujours très attentif, et déjà en train d’imaginer ce qu’il pourrait faire de la veste de son chat. Est-ce que ça allait vraiment le coup d’essayer de rapiécer celle-là qui, en plus, était complètement trempe ? Bon, il lui laisserait le choix. Il suffisait juste de monter, au deuxième, passer devant le bureau d’Edward et ensuite- OH NON !
Le petit lorialet stoppa brusquement à la sixième marche de l’escalier et plaqua sèchement son bras tendu sur le ventre de Félicien, lui octroyant une corde à linge magnifique et claquante, pour le faire s’arrêter aussi.

"Stop ! You can’t go upstairs y’a le boss ! Tu…stay here ! Je reviens !" (tu ne peux pas monter à l'étage ! Reste là !)

Il lui avait rapidement chuchoté ses instructions avant de filer dans les escaliers. Bon, s’il ne pouvait pas faire monter Félicien, au moins il pouvait aller chercher de quoi se changer et le changer aussi, et puis il pouvait aussi descendre la boîte à couture ! Il monta jusqu’à la mansarde, son cher atelier si douillet, et attrapa un pantalon et un polo secs, à la taille de Félicien, qu’il avait finis la veille dans la journée, puis il se munit d’une veste qu’il avait commencé, d’un peu de tissu supplémentaire juste au cas où, avant de redescendre dans sa chambre en trébuchant plusieurs fois sur le chemin à cause de tout son attirail de vêtements, pas franchement pratique pour regarder où il marchait.
Là, il posa le tout sur son lit avant de se déshabiller complètement pour attraper une serviette et commencer à se sécher. Alors qu’il se frottait activement pour se débarrasser de toute l’humidité qui noyait son petit corps, il eut un instant de doute en se demandant si Félicien allait vraiment l’attendre au bas des escaliers ou tout simplement rentrer chez lui avec son air de chat dédaigneux, trop vexé qu’il ait proposé de lui coudre une nouvelle veste ou d’arranger l’ancienne. En tous cas, il espérait fermement que le matou l’attendait sagement au rez de chaussée, parce qu’en plus il avait vraiment envie de lui coudre quelque chose. Alors si en plus ça pouvait le dépanner, pourquoi se priver ? Reilly reposa sa serviette, une fois complètement sec, même si ses cheveux eux avaient décidément trop fait copain copain avec l’eau pour la laisser les quitter pour le moment, et il en attrapa une nouvelle qu’il déposa sur les autres vêtements qu’il devait porter en bas. Ensuite, il attrapa sa petite chaise afin de grimper dessus et accéder au haut de sa grande armoire pour prendre sa boîte à couture. Puis, bien équipé et après avoir organisé tout ça pour ne pas trop risquer de se casser la figure dans les escaliers, il redescendit prudemment afin de retrouver Félicien.

Un nouveau petit sourire s’empara de ses lèvres quand il constata que le matou d’argent l’attendait toujours là où il l’avait laissé. Bien ! Il lui intima de se diriger avec lui vers une des salles privées du Lost. Là, il était sûr que personne ne les trouverait et ils seraient donc tranquilles. Une fois passé la porte de ladite salle, il demanda de sa petite voix cristalline à l’accent irlandais assez proéminent :

"J’ai pris de quoi pour que tu te changes et sèche Fels, donc c’est sympa si tu dis merci, ‘kay ? I won’t stare at you naked don’t worry. Donne ta veste cassée." (je ne vais pas te fixer quand tu es nu, ne t'inquiète pas)

Il déposa le change et la serviette sur une chaise et le lui indiqua d’un geste de la tête avant de se tourner dos à lui pour qu’il puisse se changer en paix. Puis il ouvrit sa boîte à couture, déjà en pleine réflexion.

"Tu veux je te fais une nouvelle veste ou je répare celle-là que tu as ?"
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MessageSujet: Re: Raccommodage. [pv Reilly]   Raccommodage. [pv Reilly] I_icon_minitimeMer 29 Juin - 1:15

Alors que le matou s’engageait dans la direction opposée au gnome, il l’entendit courir et s’exclamer :

- FEEEEELICIEEEN I LOVE YOOOUUUU ! JE M’EN FICHES QUE TU SOIS TREMPE MOI AUSSIIIIIII !

Le chat lâcha un soupir excédé, en entendant les égosillements de l’insupportable jeune homme et sa course bruyante à travers le champ de flaques d’eau. « Si tous les gars que j’avais à prendre en filature étaient aussi bruyants…. » Marmonna-t-il pour lui-même. Il pensa d’abord à esquiver le jeune homme en se décalant au dernier moment. Il n’aurait eu aucun mal avec le boucan qu’il faisait. Toutefois, l’image du petit garçon glissant au sol puis s’écorchant sur les pavés mouillés l’en dissuada. Ce n’était qu’un gosse après tout, insupportable, mais un gosse tout de même. « J’suis vraiment trop gentil parfois. » Il lança un long et bruyant soupir, décomptant avec exactitude les secondes le séparant du choc physique à venir. « 4….3….2….1…. »
Le petit garçon éclata d’un rire particulièrement niais qui eut pour effet de parachever son exaspération en irritation totale, l’amenant à reconsidérer avec tentation le pavé. Comme prévu le garçon lui sauta dessus puis s’agrippa à sa veste.

- What the- ?

Le chat entendit un long déchirement. Ciel ! C’était sa manche qui rendait l’âme !

« What-the-feck did you ? Merci le gnome, alors ça c’est…! »

Il ne put finir son feulement, car le jeune s’empara de sa main et le coupa net.

- Ya’ do not say anything, mean old cat, and ya’ follow me closely, I shall sew ya’ a new jacket or try to get this one better ! Et tu râles pas sinon…

Félicien fixa l’enfant dédaigneusement, décidé à empêcher une nouvelle catastrophe. Il allait se dégager brutalement de sa petite main blanche mais les paroles de l’enfant captèrent son attention. Ce nabot, enfin O’Brian, venait de lui dire qu’il allait lui coudre une veste ? Surpris, l’enfant pu aisément le tirer par la main jusqu’à l’entrée du Lost. La porte close du cabaret en ce jour fatidique allait–elle s’ouvrir grâce au gamin nuisible ? Prenant conscience que les minutes qui suivraient serviraient pleinement ses intérêts personnels, ses instincts de chat lui préconisèrent de docilement suivre le jeune homme. Félicien retrouva vite son calme tout en surveillant les moindres gestes du bout d’homme.
La tête blonde pénétra avec mille précautions dans l’établissement. Il sembla d’abord vérifier que personne ne se trouvait au rez-de-chaussée puis avança sur la pointe des pieds dans le hall, sous le regard orgueilleux du chat. Tous ces gens qui faisaient un bruit énorme à chacun de leurs pas et de leurs gestes ! L’agent de la Curia se contenta de marcher sans précaution particulière, déjà silencieux de nature. Le petit bout d’homme se dirigea vers l’escalier, suivit de Félicien sur les talons. Ce dernier jetait des coups d’œil à la pièce, découvrant un tout nouveau cabaret que celui qu’il avait l’habitude de fréquenter. Le petit blond le sortit de ses pensées en se retournant l’air paniqué :

- Stop ! You can’t go upstairs y’a le boss ! Tu…stay here ! Je reviens !

Le chat jeta un regard sceptique au bout de l’escalier, sa félinité irrespectueuse ne voyant guère de raisons mais un fumet âcre lui parvint qui lui rappela la nature du « boss ». Il s'écarta avec précaution de l'escalier puis attendit sagement le retour du petit légendaire.

- J’ai pris de quoi pour que tu te changes et sèche Fels, donc c’est sympa si tu dis merci, ‘kay ? I won’t stare at you naked don’t worry. Donne ta veste cassée.

Il gratifia les revendications d’un sourcil sceptique jusqu’à ce que son regard tombe sur la pile de vêtements. Il écarquilla les yeux avant de souffler bas un remerciement. Il tendit la main vers la pile de tissus, sans même tenir compte des dernières paroles du garçon, et commença à s’en revêtir.

- Tu veux je te fais une nouvelle veste ou je répare celle-là que tu as ?
« mhm ? »

Félicien releva la tête vers l’enfant, interloqué. Il ne comprit pas. Le fait que Reilly O’brian soit à même de remplir une tâche utile à une quelconque macro-société fut-elle le cabaret l’étonnait déjà. Son esprit feignit de comprendre, ingérant mal l‘information.

« A new one ? »

Sa caboche réfléchit à toute vitesse, prenant en compte mille paramètres financiers et temporels : salaire, argent de ces virées nocturnes, temps de repos, emprunt, potentiel prix du tissu et de main d’œuvre infantile, confort d’une nouvelle veste… Il plissa les yeux, concentré sur ses calculs puis referma le poing après avoir agité, ouvert et refermé ses dix doigts dans toutes les combinaisons possibles.
Il jeta un regard à Reilly puis à sa veste étendue sur la table, la scène rappelant vaguement celle d’une opération chirurgicale. Si sa veste eut une âme, elle se serait évaporée sous leurs yeux et eut rejoint le Valhalla des valeureux vêtements. Nul doute qu’avec toutes les épreuves qu’il avait traversé avec Félicien ce brave tissu eut mérité l’honneur de combattre le jour du Ragnarok. Il souleva du bout des doigts sa veste, songeant qu’elle allait tremper la belle nappe du cabaret. Il s’empara de sa veste chérie puis alla l’essorer au-dessus d’un pot-de-fleur décorant la salle et répéta la même étape avec le reste de ses vêtements. Il retourna à sa veste qu’il commença à examiner lui-même, sans recourir au petit qu’il savait vaguement couturier.

« Hum, la proposition est intéressante. Mais je ne pense pas pouvoir me permettre de m’offrir les services d’un couturier. Elle est réparable de toute manière, encore, non ? J’aimerais avoir une idée du prix d’abord…»

Il frotta nonchalamment ses hanches pour se réchauffer un peu. Il frissonna au contact du tissu, il était si confortable ! Le vêtement était frais, mais ne sortait pourtant pas du lavage. Le chat s’étonna de n’y sentir que l’odeur du petit irlandais et du Lost Paradise. Quittant son air dubitatif, il rajouta aussitôt :

« T’as les moyens toi dis-donc, ça paie si bien que ça le cabaret ? »
Il ne se rappelait pas avoir déjà une chemise coupé ainsi, aussi arqua-t-il les sourcils en inspectant le vêtement. Il s’en désintéressa vite, n’ayant de considération que pour la chaleur du textile.

« Ils sont un peu grands pour toi, tu les as volés à qui ? J’espère que tu ne les gardes pas pour toi plus tard, le tissu risque de se décomposer avant qu’il ne soit à ta taille. »

Il lui lança un regard moqueur. Il n’essayait plus depuis longtemps d’être particulièrement cassant avec le jeune homme, ce dernier aimait trop que l’on médise de lui afin de pouvoir donner la réplique. Il semblait d’ailleurs à Félicien que le petit légendaire trépignait sous son regard, attendant que le chat lui adresse une énième horreur à son sujet. Félicien avait dû changer de technique anti-pot-de-colle et avait tenté de l’ignorer, ce qui s’avéra un échec total. Il était impossible d’ignorer longtemps cet énergumène dépassant à peine le mètre et demie. Comme il semblait impossible de repartir ce soir avec sa vieille veste déchirée sans que Reilly O’Brian ne s’en mêle.

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MessageSujet: Re: Raccommodage. [pv Reilly]   Raccommodage. [pv Reilly] I_icon_minitimeJeu 30 Juin - 18:48

« A new one ? »

C’était certainement la meilleure solution, en effet. Assis, coudes calés sur les genoux, les mains soigneusement imbriquées devant le nez, Reilly analysait la veste - ce qu’il en restait - d’un oeil de chirurgien aguerri. La comparer à un cadavre en décomposition était bien trop dévalorisant pour ledit cadavre en décomposition. Non mais, sérieusement, que Félicien avait-il bien pu faire avec pour la mettre dans un tel état ? S’il n’était pas au moins passé sous les pieds d’un troupeau de lycans en furie, il n’avait aucune excuse. Son coeur de couturier soucieux du bien être des vêtements se serra quand il observa le matou mal luné en retirer l’eau de pluie et ses yeux suivirent, plissés, son soupir de désapprobation.

« Hum, la proposition est intéressante. Mais je ne pense pas pouvoir me permettre de m’offrir les services d’un couturier. Elle est réparable de toute manière, encore, non ? »

Le lorialet roula gentiment des yeux avant de les planter dans ceux du chat, tentant implicitement de lui suggérer la mort de sa veste. Là, il ne voyait vraiment pas ce qu’il pouvait faire pour la sauver de sa fin tragique. Cependant, il y avait quelque chose, là, dans le regard dubitatif de son Félicien que le petit couturier comprenait. Il semblait vraiment tenir à son bout de tissu rapiécé, le matou. Hein ? Reilly se mordit la lèvre en le dévisageant des pieds à la tête. Non… Un nouveau sentiment chaud et acre vint prendre son ventre, remontant lentement mais très sûrement vers son coeur, qui, lui, battit légèrement plus fort, un instant, juste assez pour que ce nouveau sentiment s’accroche à lui et commence à l’enlacer. Non… Non, vraiment… Reilly était en train de ressentir de…

Ses grand yeux bleus s’ouvrirent encore plus grand, quelque peu agités et curieux de ce sentiment improbable qui venait même réchauffer ses joues et les tinter d’une douce couleur rose, presque poudré. Et Félicien observait toujours sa veste, imperturbable, et surtout inconscient du fait que le petit couturier le regardait lui, complètement obnubilé par son visage si impassible. Diable que lui avait-il fait ?! Reilly déglutit, refusant ce sentiment d’une nouveauté insaisissable catastrophique. Mais il n’y avait aucun doute, maintenant. Un sentiment aussi pur, qui réchauffait le coeur et donnait envie de sourire, alors qu’il regardait celui qu’il adorait tant faire tourner en bourrique… de… la sympathie. De la sympathie profonde.

Forcément ! Ils parlaient vêtements et le chat voulait sauver son ancienne veste, compagne de mille aventures ! Reilly se maudit, à présent couturier pivoine, d’avoir laissé Félicien gagner son esprit de la sorte.

« J’aimerais avoir une idée du prix d’abord… »

Le petit lorialet secoua rapidement la tête afin de l’aérer et récupérer sa couleur naturelle. Le… prix ? Ses yeux curieux se plissèrent à nouveau. Il ne comptait pas le faire payer, à vrai dire. Il n’y avait pas pensé même une seconde. Bon, il fallait bien le dire, c’était très peu commerçant de sa part, mais sa spécialité était de bonifier les vêtements, aussi, en quelque sorte, de créer la vie en leur donnant une nouvelle forme, plus intéressante, qui convenaient mieux à leurs porteurs. Parce que, oui, c’était bien là une chose que Reilly ne mettait jamais de côté : un vêtement, une vulgaire pièce de tissu anti-nudité comme l’appelaient les gens trop simples à son goût, était la première chose que leur société actuelle considérait. Tout, de la classe sociale à la personnalité, tout pouvait se voir à travers les vêtements, et c’était une qualité des tissus que beaucoup sous-estimaient. Si l’habit n’était pas censé faire le moine, il fallait tout de même admettre qu’une société telle que la leur y prêtait grande attention. Quel genre de personnes allaient à l’opéra en haillons ? Quel genre de pêcheurs se paraient de costumes inconfortables pour affronter la mer ? Pour le petit couturier, un « vulgaire » vêtement devait être l’association parfaite entre caractère et utilité.

Dans son état actuel, la veste de Félicien ne représentait en rien, à ses yeux, ni l’un ni l’autre. Il lui fallait quelque chose de fin, de souple, d’assez discret pour passer inaperçu mais d’assez brillant pour témoigner de son répondant d’acier. Pas quelque chose de grossier et primaire.

« Je vais réparer celle-là, c’est gratuit. Seulement parce que j’ai pitié d’elle. Pas de toi. Quoique t’es pas mal non plus dans ton genre… »

Evidemment, Reilly passa sous silence la nouvelle sympathie toute pure qu’il portait au chat. Sinon, où donc s’envolerait le semblant de répondant qu’il avait ?
Tel une Marie Shelley en pleine élaboration d’un nouveau Frankenstein, il s’empara de la veste et d’autres tissus qu’il avait descendus afin de commencer à visualiser. Dans une situation aussi urgente que celle-ci, il n’avait en effet nullement besoin de patrons. Son seul esprit lui suffisait et tout, du placement des boutons à l’alignement des coutures, finissait absolument parfait. Même James le lui avait dit - un des seuls compliments auxquels il avait eu droit - « Reilly tes es vraiment doué pour faire des vêtements ». Aussi ne prêta-t-il aucune attention à l’objet de sa nouvelle sympathie et commença-t-il à déterminer quelle couleur conviendrait le mieux.

« T’as les moyens toi dis-donc, ça paie si bien que ça le cabaret ? »

Mais le chat était définitivement bien bavard, aujourd’hui. Légèrement perturbé, il releva des yeux inquisiteurs vers lui pour le trouver en train d’analyser la tenue qu’il lui avait prêtée ; la chemise était particulière, l’emmanchure un peu basse pour plus de confort, un peu comme les ailes d’une chauve-souris mais pas aussi extravagant. Mais en fait il ne savait pas, lui, si le cabaret payait bien.

« Je n’ai jamais travaillé avant donc je peux pas comparer. Mais je n’ai pas l’impression de vivre mal du tout, donc j’imagine que ça paye bien, oui. »

Aussi, pour Reilly, ses vêtements étaient tous très confortables pour la seule unique et bonne raison qu’il les confectionnait avec attention et amour. Ses lèvres faisant la moue, ses joues légèrement gonflées, il reporta son regard sur les tissus choisis.

« Ils sont un peu grands pour toi, tu les as volés à qui ? J’espère que tu ne les gardes pas pour toi plus tard, le tissu risque de se décomposer avant qu’il ne soit à ta taille. »

Le petit irlandais soupira bruyamment. S’il continuait à jouer de la sorte, pas sûr que Félicien rentre chez lui habillé du tout. Cependant, Reilly ne reculait jamais devant les petites piques qu’il s’amusait à lui lancer, trouvant ça fortement divertissant, et, aussi concentré était-il à ce moment précis, cela ne l’empêchait en rien de se permettre de lui répondre.

« Je ne veux pas entendre ce genre de commentaires de la part d’un oldman qui s’habille de bouts de tissus rapiécés et n’en prend même pas soin. Tu fais quoi avec ? La chasse aux ours mais c’est eux qui ont gagné ? Pas étonnant quand on voit quel âge tu as… »

Le petit lorialet osa même dévisager son interlocuteur d’un air supérieur, pas vexé pour un sous, avant de rajouter :

« Ce sera la mode, plus tard, tu ne peux pas comprendre. »

Son esprit à lui le voyait bien. Un jour, ce serait vraiment, vraiment à la mode. De plus, les quelques costumes qu’il avait conçus de la sorte pour les artistes du Lost avaient toujours eu des retours positifs. Aussi, lui ne pouvait pas porter n’importe quoi. Il avait besoin de dissimuler des choses… entre autre, tout ce qui n’allait pas chez lui.

« Et si je mets des vêtements parfaitement ajustés… »

Au lieu de finir sa phrase, Reilly souleva légèrement la chemise qu’il portait, laissant soin à Félicien de constater quelques côtes ressortantes ainsi que sa taille si fine et gracieuse qu’elle paraissait volée au corps d’une jeune femme certainement des plus charmantes. Si parfaitement marquée, même, elle offrait un creux de peau blanche et lisse merveilleux aux mains qui désiraient s’y incruster. On l'avait déjà pris pour une fille, en Irlande, de dos. Aussi, sans attendre son reste, le lorialet laissa retomber sa chemise cache-misère avant de se rasseoir correctement. Et toc ! Un dernier coup d’oeil pétillant de malice au maudit matou, et il attrapa la plus grosse aiguille de sa boîte à couture.

« What do you say about navy blue ? » (Que penses-tu d’un bleu marine ?)

Afin de mieux présenter ce qu’il avait en tête, le petit irlandais désigna un genre de tweed bleu marine au chat ; sûrement se serait-il blottit contre, pensait-il, tellement le tissu respirait la chaleur et le confort.
Reilly commença à placer son matériel de manière efficiente partout autour de lui, sur la table et sur quelques chaises, vrai professionnel de l’organisation. Cette opération risquait d’être délicate, même si pas impossible. Par contre, l’idée d’un chat muet qui allait passer les prochains moments à le regarder faire sans rien dire le débectant fortement, le petit lorialet tâcha de lancer un nouveau regard brillant de taquinerie à son interlocuteur, désireux de le faire parler.

« Oh et raconte-moi ta journée pendant que je commence. Pourquoi tu es venu ici un dimanche ? Tu voulais me voir, c’est ça ? »
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MessageSujet: Re: Raccommodage. [pv Reilly]   Raccommodage. [pv Reilly] I_icon_minitimeLun 1 Aoû - 14:33

Petit à petit, Reilly O’Brian se montra de plus en plus vindicatif au sujet de sa veste. S’il avait dès lors proposé au chat de réparer son manteau, puis lui exposa le choix des réparations ou d’une nouvelle veste, voilà que le petit légendaire lui adressait des regards univoques. L’avenir de son vêtement, à en croire l’absence d’espoir, semblait sans appel. Félicien se sentit piqué, pensant que le petit le prenait pour un radin. Déjà que le petit ne se gênait pas pour faire des sous-entendu sur son âge, Félicien aurait été vexé que l’on dresse un portrait d’avantage aigri de sa personne. Puis il se souvint qu’on lui avait mentionné la profession du jeune garçon. Malgré son agacement, le chat dû concéder, que l’avis du lorialet avait peut-être une corrélation avec une connaissance minime, ce qui l’aurait mené à lui reconnaître des compétences. Damned… I can’t belive it. Cependant le chat nota un changement dans l’odeur du lorialet qui se refléta immédiatement dans son comportement. Ses oreilles frémirent de ravissement à l’annonce de la gratuité. Il recula la tête, surpris, en apprenant que le jeune exerçait ici son premier emploi. Qu’il était vieux pour commencer à travailler !

« Je ne veux pas entendre ce genre de commentaires de la part d’un oldman qui s’habille de bouts de tissus rapiécés et n’en prend même pas soin. Tu fais quoi avec ? La chasse aux ours mais c’est eux qui ont gagné ? Pas étonnant quand on voit quel âge tu as… »
-Oldman ? répéta Félicien narines retroussées.

Il tourna instinctivement la tête vers une surface réfléchissante –le cadre d’un tableau-. Il passa la main sur ses joues très légèrement creusés par l’âge et chercha des yeux des traces de pilosité blanche. Prenant au mot le petit légendaire, il garda les sourcils froncés en se détournant du cadre de verre, convaincu que malgré sa longue vie il gardait une apparence parfaitement conservée.

« N’répand pas ton sel parce que personne ne gobe que tu ais plus de 14ans. Les gens se fatiguerons d’la farce tu sais. » rétorqua-t-il en grattant ses joues avec amour-propre.
- Ce sera la mode, plus tard, tu ne peux pas comprendre. »


Félicien ne réagit pas, trop approbateur pour se sentir insulté. Le petit légendaire ne soupçonnait pas le tiers des modes que le chat avait vu défiler durant ses siècles de vie. Peut-être alors, il aurait pu envisager le désintérêt que Félicien éprouvait à leurs égards. Le chat pouvait tout à fait comprendre, dans la mesure où cet ancien animal avait intégré cette lubie humaine. En revanche, il n’y attachait aucune importance.

« Et si je mets des vêtements parfaitement ajustés… »


Contre toute attente le jeune homme souleva sa chemise, dévoilant une belle rangée de côtes saillantes. Félicien leva un sourcil, presque moqueur, ne laissant rien échapper de ce qu’il pensait. De l’exercice aurait à son avis, mieux fait qu’une flopée de tissu trop large afin d’obtenir de l’effort ce que mère nature n’avait daigné offrir.

« What do you say about navy blue ? »
(Que penses-tu d’un bleu marine ?)

Il lui porta sous les yeux une étoffe de tweed de la couleur annoncée dont Félicien se saisit aussitôt. Il poussa une petite exclamation de surprise à la vue du tissu.

« God ! It’s’true one ?! » (Oh mon dieu ! C’est un vrai ?!)

Il porta tout de suite le tissu à ses doigts dont il goûta la douceur sans ménagement. Il murmura sous la surprise en ancien gaélique, plus ancien encore que la venue des anglais en Irlande. Puis se surprenant lui-même en pleine acte de quasi-volupté en la présence du lorialet l’arrêta.

« That’s been years since… Oh ! Il s’adressa au lorialet. How did you get it ? It’s so expensive !” souffla-t-il. (Cela fait des années que…. Oh ! Ou l’as-tu eu ? C’est si cher !)

Le garçon lui, avait commencé à installer son matériel sur la table et improvisa la salle privée en atelier de fortune.

« Oh et raconte-moi ta journée pendant que je commence. Pourquoi tu es venu ici un dimanche ? Tu voulais me voir, c’est ça ? »
-Oui, oui… machonna-t-il, me pendre en mâchant du verre pilé ne me semblait pas assez douloureux. Lâcha-t-il sur le ton de l’explication. »

Le chat avait parlé par pur automatisme. En d’autres circonstances, il aurait agrémenté sa pique d’un regard entendu, d’un ton sardonique. Bien que dépossédée de ces habituels apparats, elle eut l’effet d’un un gros caillou tombant dans l’eau interrompant la baignade gracile de jeunes nymphes, en regard des efforts fournis par le lorialet. Il avait noté le regard anormalement pétillant du jeune homme. Essayait-il de nouer quelques complicités entre eux ? Félicien dans tous les cas, ne pouvait se permettre de parler honnêtement de sa journée. Son nouvel emploi lui imposait le silence sur une grande partie de sa vie à présent.

« So… il toisa le petit homme se voulant provocateur, tu dis être capable de faire une veste… ? »

Mais avant que le petit couturier plante sa première aiguille, Félicien l’interpella gravement :

« O’Brian. Rien n’est gratuit dans cette vie. Personne n’en fait rien. Alors soit un peu franc, tu veux ? En échange tu attends quoi ? »

Il lui lança un regard on ne peut plus sérieux à mesure que sa voix s’enfonçait dans les basses. Il s’était auparavant assis de travers sur la chaise, l’aisselle reposant sur le dossier alors que ses jambes étaient inégalement étendues, l’une repliée. Confortablement assis, dégageant assurance, ses paroles se voulaient impossible à contourner.

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