Un bruit sourd retentit soudain et Horace ouvrit les yeux. Se redressant vivement, il parcourut la pièce du regard avant de se détendre. Ce n'était rien. Juste le bruit qui animait parfois la chaudière. Il s'était assoupi pendant son heure de veille au bon fonctionnement de l'engin et la relève, arrivée depuis un moment déjà, avait jugé bon de le laisser dormir. Chose que le jeune homme regrettait déjà. Sa chaise n'était pas très confortable, et il aurait tout donné pour avoir sommeillé dans son lit bien douillet.
S'étirant doucement en faisant protester ses muscles endoloris, le garçon finit par se lever et quitter la pièce, laissant la machine qui faisait tourner le Lost Paradise aux bons soins de son collègue. Sa petite sieste ne lui avait pas permis de se reposer comme il en avait besoin, mais avait suffit à lui passer toute envie de dormir. Sa matinée s'annonçait donc bien tranquille. Trop tranquille, même. Il ne savait que faire. Aucune réparation ne nécessitait ses mains d'expert. Nul ne requérait ses compétences de mécanicien. Pour le moment, tout du moins. Alors il se mit à flâner dans les couloirs familiers du Cabaret, sans but aucun, sans pensée aucune. Il était tel un fantôme hantant la bâtisse qui fut autrefois son tombeau. Aucune envie, aucun désir. Comme si toute vie l'avait momentanément déserté.
Mais sa marche errante finit par prendre fin au beau milieu d'un couloir. Devant un objet qui ne fonctionnait plus, et ce depuis un moment déjà. Cela faisait des mois qu'il avait cessé de chanter et que nul ne faisait rien. Cela faisait des semaines que le machiniste passait devant et avait remarqué l'absence de son tic tac régulier. La vielle horloge était comme morte, figée dans l'immobilité de son temps arrêté.
Il savait ce qu'il avait à faire. Un objectif précis venait de s'imposer à lui, comme une lumière guidant l'égaré jusqu'à la sortie, le libérant ainsi définitivement de l'ennuie qui le menaçait. Quelques pas jusqu'à sa chambre pour récupérer sa boîte à outil, et il prit d'assaut le couloir de l'objet cassé.
Quelques minutes plus tard, Horace se retrouvait tête et mains plongées dans la vieille dame éventrée, à donner des coups de clé et asperger ses entrailles d'huile. Tous ces rouages bloqués qui lui donnaient autrefois vie, il allait les dompter. Et l'ancienne retrouverait toute sa jeunesse et sa fougue d'antan.
Cependant, tant occupé qu'il était de ranimer cette vieille horloge, il n'entendit pas la jeune femme qui s'approchait, intriguée par son dur labeur. Il ne vit pas plus la main fine qui se tendait vers sa malle à outils étalée sur le sol. Quand à faire attention à ce qu'elle se mit à mimer contre le mur avec l'une de ses clés à molette, c'était bien trop lui demander. Alors, quand la question fusa, il fut tout aussi surpris que si la curieuse venait d'apparaître sous ses yeux ébahis, comme par magie.
« Que faites-vous ? C'est intriguant. »
Pris au dépourvu par cette voix inattendue, il sursauta et s'extirpa brutalement de l'horloge pour poser les yeux sur l'intruse. Une jeune femme qu'il avait déjà pu croiser dans l'enceinte du bâtiment mais dont le nom comme le rôle lui échappaient. Qui donc était-elle ? Question qu'il éloigna rapidement de son esprit quand il remarqua le geste qu'elle effectuait contre le mur avec... SA clé à molette. Que Diable faisait-elle donc avec cet outil ? Quand l'avait-elle pris ? La surprise dut se lire sur son visage un moment tandis qu'il fixait son bien entre des mains inhabituelles. Une découverte qui l'avait figé dans une expression d'incompréhension. Il n'était pas en colère, non. Juste non habitué à voir une femme effectuer un tel mouvement, même dans le vide.
Et puis, le contenu de la question lui revint en mémoire. «
Que faites-vous ? », s'était-elle enquise. Zut, il était déçu maintenant. Lui qui s'était attendu à ce qu'elle sache ce qu'il faisait, finalement, elle l'imitait simplement. Lui qui pensait avoir rencontré une jeune femme qui s'y connaissait en mécanique, finalement, il se trouvait face à une ignorante de plus. Mais une ignorante que la curiosité avait poussée à s'informer. Sauf que la réponse était parfaitement évidente à ses yeux. L'expliquer était quelque chose de difficile. S'il employait trop de termes techniques, elle serait probablement larguée. Alors il choisit l'explication la plus simple du monde, pensant qu'elle ne voudrait pas en savoir davantage par la suite.
« Eh bien, voyez-vous, cette vieille horloge -Il accompagna ses mots d'un signe de tête en direction du meuble- ne fonctionne plus depuis quelques temps. Alors j'ai décidé de la réparer, histoire qu'elle indique à nouveau l'heure qu'il est quand on passe dans ce couloir. »
Un acte finalement bien routinier pour lui, mais qui l'était peut-être un peu moins pour l'inconnue. Haussant les épaules comme pour signifier que ce n'était rien de bien extraordinaire, il replongea dans ses réparations et donna un nouveau coup de clé à molette sur l'un des rouages qui refusait de bouger. Il y eut un déclic, et la grande aiguille se mut pour se placer sur le douze. Puis l'horloge se mit à entonner son chant annonçant l'heure, bien qu'elle soit fausse pour le moment. Elle était enfin réparée.
« Tiens, on dirait qu'elle fonctionne ! »
- Spoiler:
Je suis vraiment désoléééée pour tout le retard >< J'ai été vraiment surprise par la quantité de travail que j'avais. M'enfin, voilà enfin ma réponse \o En espérant qu'elle te conviendra, même si je dois avouer que je ne suis pas particulièrement fière de ce que j'ai écrit.
Côté délai et qualité de réponse, promis, j'essaye de faire mieux la prochaine fois !!