Enfin un peu de calme. Depuis son arrivée dans la capitale française, Zeno se demandait si un jour cela lui serait enfin possible. Non pas qu’il m’aimait pas son travail au cabaret, bien au contraire ! L’atmosphère changeante du lieu en question le rendait sans cesse euphorique de par les nouveautés que l’on pouvait y trouver chaque jour ! Jamais il n’aurait cru cela possible, si on le lui avait rapporté ce fait sans l’avoir constaté de ses propres yeux auparavant. Mais présentement, puisque c’était chose faite, il n’y avait plus à tergiverser ou chercher une quelconque explication sous cette masse grouillante d’étrangetés toujours plus variées. Il n’y avait pas d’explication rationnelle, de toute façon. Et c’était très bien ainsi, au moins l’ennui était tenu loin de l’italien qui de toute façon, ne supportait que difficilement cette unité-là.

Néanmoins, aujourd’hui lui paraissait spécial, sans raison particulière. Il flânait dans les rues de Paris, en laissant son regard d’argile voleter ça. Tantôt les courbes d’une jolie bourgeoise attiraient son attention, tantôt c’était au tour d’une péniche voguant sur les flots de la Seine. Le Zucchero se sentait… Libre. Et c’était dérangeant, pour la simple et bonne raison que la dernière fois qu’il avait eu ce genre de sensation infusée dans le corps, c’était lorsqu’il avait rencontré la fameuse Ludivine.

Aaaah, jolie promise au corps affriolant mai qui lui avait causé bien des soucis… Le blond se demandait bien comment elle allait, d’ailleurs. Mais il se retint de se mettre lui-même en quête d’informations, c’aurait pu lui causer du tort, une nouvelle fois.

Alors il se décida à embrayer sur un autre sujet, histoire de s’occuper l’esprit. Et lorsque son chemin l’eut mené devant la somptueuse Cathédrale de Notre-Dame, midi venait de sonner. Déjà plus de trois heures qu’il errait sans savoir trop quoi faire, en se contentant de marcher toujours plus loin, là où ses deux pieds voulaient bien l’emmener. Ça doit être ça, ce que l’on appelle le pouvoir de l’inconscient, probablement. Même si, pour dire vrai, Zeno se fichait éperdument de tous ces facteurs abracadabrants. Tout ce qui comptait pour lui, c’était de se changer les idées au plus vite car il ne voulait pas voir son esprit embrumé par le visage de la jolie française, sachant déjà pertinemment ce qui allait se passer dans le cas contraire.

Soit, il atterrit bien vite devant une librairie et, après avoir détaillé l’enseigne de bois travaillé, en poussa délicatement la porte avant d’entrer à l’intérieur. L’ambiance invitait à la proximité, mais pas celle que l’on peut retrouver dans une maison close en revanche. Non, là, c’était différent ; encore quelque chose d’inédit. Rien de mieux pour ravir l’expatrié, en somme.

Laissant ses yeux parcourir les étagères, la tête dans les nuages, Zeno laissa soudainement une première de couverture attirer son regard. Le livre était revêtu d’une couche de cuir bordeaux aux reliures argentées, le tout surmonté d’une écriture manuscrite d’une grande beauté. Ne pouvant museler davantage sa curiosité, le « surhomme » ouvrit la première épaisseur et eut l’agréable surprise de découvrir que les premières lignes inscrites sur le papier fin mais de qualité, n’était autre qu’un conte que l’on lui avait déjà raconté maintes et maintes fois lors de sa prime enfance. Une bouffée de nostalgie l’envahit dés lors aussitôt en même temps qu’un magnifique sourire étira ses fines lèvres. L’émotion se propageât de plus belle. Jamais il n’aurait pu penser, un jour, revoir cette histoire, pourtant banale sous ses grands yeux bruns. C’était comme un bon en arrière, dans son passé qu’il avait fui dans un sens, pourtant…

« Santa Maria… »

Deux petits mots lui échappèrent, lui qui ne pouvait plus contenir son ressentit.

Journée de congé pour la belle rouquine, mais elle n'était pas de tout repos. Alors qu'elle envisageait de dormir jusqu'à pas d'heure ou de flâner en ville, voilà qu'elle se retrouvait le derrière posé sur une chaise, attendant dans la librairie de son paternel. Oh celui-là alors ! Si elle avait su, jamais elle n'aurait mit le nez hors de sa chambre, mais il fallait bien avouer qu'il était malin quand il s'agissait de lui faire faire ce qu'il voulait. Et pouvait elle vraiment le lui reprocher, il s'agissait de son père après tout.
C'était un de ces jours calmes où peu de personnes ouvraient la porte de la boutique, lui laissant tout le loisir de bouquiner derrière le comptoir, dos bien calé contre le dossier et jambes étendues posées négligemment contre le meuble. Elle avait la tête ailleurs, repensant à sa matinée pourtant très bien commencée...

Elle n'était pas descendu trop tard, ayant envie de prendre son petit déjeuner avec les hommes qui occupaient sa vie et sa maison. Son père prenait des notes dans un carnet, comme lorsqu'il avait une idée pour un roman, ce qui devait être le cas. Et juste à côté de lui, Loki le regardait avec curiosité. Malgré le fait qu'il ne revêtait plus que son apparence humaine, son cher tendre toutou gardait des mimiques typiquement canines, ce qui faisait souvent sourire la demoiselle. Ce fut d'ailleurs lui qui l'avait remarqué le premier, affichant un air réjouit de la voir. Il était tellement adorable...
Valentine s'approcha de lui et déposa un baiser sur son front avant de s'assoir à côté de lui, prête à attaquer son repas, mais son binoclard de père eu l'idée du siècle...

"Tient, puisque tu ne travaille pas aujourd'hui, tu vas pouvoir surveiller la boutique. Je compte donner des cours de français à Loki durant toute la journée, cela lui fera le plus grand bien."

"Heiiiiiin ?! Mais pourquoi je devrais m'enfermer dans la librairie, tu fais normalement tes cours là-bas ! J'ai pas envie de passer ma journée à rien faire..."

"Les clients risquent de nous interrompre et je n'ai pas envie d'expliquer pourquoi j’apprends à lire à un homme qui semble avoir plus de vingt ans. Tu préfères donner des cours à ma place fillette ?"

Valentine gonfla ses joues dans une moue mécontente. Elle qui avait tant voulu prendre l'air et se promener avec son compagnon à deux pattes. Rhaaa ! Et le simple fait qu'il lui dise "fillette" était une provocation habituelle qu'il lançait lorsqu'il était sûr d'avoir suffisamment d'arguments pour la contredire et l'obliger à lui obéir. Elle n'avait pas le choix...
Faisant un petit bruit agacé entre ses lèvres, elle se leva et entraina avec elle un plateau repas, préférant petit déjeuner en bas. Évidemment l'heure d'ouverture était dans cinq minutes et elle n'avait plus le temps de manger tranquillement...

Et voilà comment elle s'était retrouvée à glandouiller sans rien faire dans cette librairie dont les livres avaient bien plus que son âge pour la plupart et qui attendait acquisiteur... Personne qui se laissait désirer depuis un moment d'ailleurs.
Elle se plongea dans un roman pour passer le temps, s'ennuyant au point de ne pas en comprendre la moitié, laissant son esprit vagabonder. Même pas de client pour l'occuper, c'était d'un ennuie...
Puis midi sonna, annonçant qu'elle n'avait plus que la moitié de la journée à supporter. Passer son congé à rien faire, non mais j'vous jure...

Mais alors qu'elle envisageait sérieusement de fuir sans qu'ils ne s'en rende compte en haut, elle entendit le bruit caractéristique de la porte de la boutique qui s'ouvrait. Oh, un client ? Avec un peu de chance, il s'agissait de quelqu'un qu'elle connaissait et avec qui elle aurait pu passer un précieux temps à papoter, mais lorsqu'elle se redressa pour observer la personne, elle eu un pincement au coeur. Raté, elle ne connaissait pas du tout cet homme.
Et à sa manière de vagabonder dans les rayons, il n'avait rien d'un client et plutôt d'un promeneur de passage.

La journaliste se leva quand même et le suivit discrètement, l'observant avec attention. Il semblait assez jeune et avait un petit air étrange. Elle en déduisit qu'il n'était pas français d'origine. Elle n'était pas paranoïaque, mais par mesure de précaution, elle préférait le surveiller, un vol était si vite arrivé.
Il s'était arrêté près d'une étagère et avait prit un livre en particulier et le regardait, fasciné. Le connaissait-il ? Aussitôt, la voix de l'homme parvint jusqu'à ses oreilles. Santa Maria ? Elle avait donc vu juste, il s'agissait bien d'un étranger. Mais de quel pays ? Espagne, Italie ? Les deux langues se ressemblaient tellement.

Valentine finit par se rapprocher de lui et se mit dans son champ de vision, arborant un sourire aimable et professionnel. Il fallait au moins qu'elle agisse comme il faut sinon son père n'allait plus la lâcher et c'était la dernière chose dont elle avait besoin. Elle avait déjà sa mère sur le dos, inutile de rajouter son époux.

"Bonjour. Ce livre vous intéresse ? A votre expression, vous semblez le reconnaître... Oh euh... Vous savez parler français rassurez moi, je ne suis pas à l'aise dans les langues hispaniques."

Elle et sa grande bouche ! Rien qu'à sa remarque, elle venait de prouver qu'elle était là depuis bien plus longtemps qu'elle n'avait voulu le faire croire. Qu'elle idiote... Enfin, il valait quand même mieux demander, elle ne pouvait certainement pas communiquer avec un étranger donc elle ne parlait quasiment pas la langue...

Spoiler:

Tout absorbé qu’il était dans sa lecture brève, Zeno n’avait pas remarqué la ravissante rouquine derrière lui. Pourtant que diable ! Il était un homme, un vrai, et italien en plus de ça ! S’il avait pu, il se serait lui-même cogné la tête contre le mur le plus proche mais il se rendit bien vite à l’évidence, il aurait été bien plus ridicule dans ce cas de figure qu’il ne l’aurait jamais été autrement. Surprit par cette voix pourtant très douce à ses oreilles, le blond vit son visage brisé par un ravissant sourire, pas spécialement charmeur, mais au moins très chaleureux, comme si savait si bien les faire. Comme elle était mignonne, en plus ! Et sa façon de lui demander s’il parlait français aurait très certainement fait fondre le cœur du plus endurci des insensible, ça, le Zucchero en était persuadé ! A moins que ce ne soit juste son amour prononcé pour le genre féminin en ce milieu d’après-midi qui ne parle ? C’était également une possibilité à ne pas omettre.

Mais pour le moment, l’expatrié se foutait bien de ce genre de chose, tout ce qui importait était sa sympathique interlocutrice, devant laquelle il ne put s’empêcher de jouer un peu de sérénade, plus pour la forme qu’autre chose mais bon, c’était Zeno après tout…

Ainsi, posant un genou à terre et ramenant sa main droite sur son torse, il décocha sa dextre gauche pour se saisir de celle de la jeune femme et y appliqua un délicat et très galant baisemain. Se relevant presque immédiatement avec l’élégance d’un prince – tout était calculé, pensez-vous ! – l’italien se décida enfin à délier ses lèvres.

« Grand dieu, je ne pensais pas que l’on trouvait des anges fait de chair et d’os en France ! Je suis ravi d’avoir pu en voir un au moins une fois dans ma vie, Señorita ~ »

Il assorti le tout d’un clin d'œil et rehaussa son haut en remettant le tissu bien droit, histoire de ne pas paraitre bouseux devant une « lady ». C’était ainsi, le machisme du sud laissait des traces bien ancrées dans l’esprit de ses bambins après tout, quoi de plus normal que cela ? Mais ceci n’exténuait en rien la soif de curiosité qui venait de poser ses ongles fins sur l’individu étranger. Redirigeant soudainement son regard sur l’étagère ou était posé le livre qui l’avait agréablement surpris, il s’autorisa a interroger la jeune femme à ce propos.

« Eh bien, a vrai dire, il m’a rappelé de sympathique pans de mon enfance et… a tout hasard, auriez-vous d’autres ouvrages du même auteur ? J’avoue être assez friand de ses œuvres aussi, vous illumineriez encore davantage ma journée en m’aidant de la sorte. »

Il lui sourit, encore. Il ne sait faire que ça, de toute manière, sourire et avancer. Même s’il est un parfait idiot. D’ailleurs, il venait juste de s’apercevoir qu’il ne s’était même pas présenté dans les règles de l’art, cet imbécile. S’excusant pas une révérence polie, il se racla la gorge et formula une nouvelle phrase.

« Veuillez m’excuser mademoiselle ! Je n’ai même pas décliné mon identité, quel sot ! Je me prénomme Zucchero Zeno, pour vous servir Gentedame ~ Et vous êtes, si je puis me le permettre, bien entendu ? »

Ses yeux rieurs trahissaient plus que jamais sa bonne humeur. Il venait de faire une sacré rencontre et il ne le regrettait en rien, pour être franc.

Valentine s'était toujours prise pour une personne à part. Son style vestimentaire et ses manières de garçons manqué quand elle s'y mettait sérieusement, le confirmait assez. Il lui était déjà arrivé de croiser des individus des plus étranges, comme l'artiste peintre qu'elle croisait parfois au cabaret. Mais elle se trompait en pensant qu'il n'y avait pas pire que dragueur invétéré. En effet, à peine avait-elle adressé la parole au client qu'immédiatement celui-ci entra directement dans sa liste des personnes à la mentalité loufoque.
Il s'était soudain mis à genou, prenant sa main et faisant un baisemain. Il déclarait des choses des plus flatteuses, se rapprochant incroyablement de la sérénade amoureuse. Allons bon qui était donc cet hurluberlu ?
Tout du long, la rouquine resta médusée, encore sous le choc de cette réaction pour le moins exagérée. Avait-il dit Señorita ? Cela confirmait sa nationalité étrangère, mais il ne répondit quand même pas à sa question. Certes, elle voyait très bien qu'il parlait français, mais il n'avait aucunement citer son pays d'origine.

Ravalant sa curiosité et dévisageant l'inconnu avec des yeux ronds, elle resta muette à sa tirade, préférant attendre qu'il se relève pour reprendre consistance. Les gens de nos jours... Par chance, il finit par changer de sujet et se tourna vers l'étagère, mentionnant le livre qu'il regardait un peu plus tôt. Oh, cela lui rappelait son enfance, elle comprenait à présent pourquoi s'était-il exclamé...
Prenant un air professionnel, elle s'approcha de l'étagère et prit l'ouvrage, observant le nom de l'auteur et le titre. Hum... A vrai dire, elle ne savait pas grand chose là-dessus. Alors que son père lui aurait pu immédiatement répondre et parler même de la vie de cet auteur, la journaliste se retrouvait comme une idiote à réfléchir à toute vitesse, tentant de se remémorer le stock de la librairie. Mais en vain, il y avait beaucoup trop de livres ici.

"Hum, je ne saurais le dire précisément, d'ordinaire c'est mon père qui tient la boutique. Cependant, je peux toujours regarder dans le registre, suivez moi, je vais regarder ça de suite."

Elle sortit de l'allée et se redirigea vers le comptoir où Laurent mettait toutes les documentations dans des cahiers soigneusement entretenus. Autant s'en servir puisqu'elle n'avait pas d'autres moyens de satisfaire le client. Surtout si elle ne devait compter que sur sa mémoire.
Valentine, se retourna vers l'homme blond au moment même où il fit une petite révérence et se présenta. Ah tient, c'était bien la première fois qu'elle entendait un client se présenter de la sorte. Etait-ce une coutume dans son pays ? Ou bien continuait-il son numéro de charme ? Bah c'était plutôt amusant finalement, autant se prêter au jeu, affichant un petit sourire amusé, elle répondit sur un ton moins monocorde.

"Lefevre Valentine. Mais vous pouvez m'appeler simplement Valentine. Cette librairie appartient à mon père, je ne fais que le remplacer pour la journée. Encore désolée de ne pouvoir vous répondre d'office , mais il est vrai que d'ordinaire, je suis plutôt du côté de ceux qui posent les questions, pas qui y répondent."

Elle regagna le comptoir et fouina un peu derrière à la recherche du registre en question. Il fallut qu'elle cambriole un tiroir pour le trouver et le posa sur le meuble d'un air triomphant. Bien au boulot !
Se penchant pour regarder à l'intérieur, Valentine fit danser les feuilles du cahier jusqu'à ce qu'elle tombe sur le nom de l'auteur. Fort heureusement, son père avait tout classé par ordre alphabétique et put le dénicher assez rapidement. Elle posa son doigt délicatement sur l'écriture arrondi et légèrement penché du paternel et le fit glisser jusqu'à trouver les lignes concernées.

"Nous avons effectivement d'autres livres de cet auteur. Il y a un conte pour enfant, un recueil de poèmes et un roman fantastique en plus de celui que vous avez trouvé. Souhaitez vous que je vous sorte les trois ou un seul style vous intéresserait ?"

Elle se redressa et observa Zeno avec curiosité. Quel pouvait bien être son style d'écriture ? A son caractère, elle aurait dit les romans d'amour, mais les préjugés n'étaient pas forcement véridique aussi préférait-elle ne pas s'énoncer là-dessus. Gardant son sourire vendeur et attendit sa réponse, ayant relevé où était placé chacun de ses ouvrages. Comme leur thème était différent, ils étaient éparpillés un peu partout dans les étagères, ce qui expliquait pourquoi n'avait-il pas vu les autres ouvrages en compagnie de celui-ci.

"Me permettrez vous d'être curieuse en vous demandant pourquoi vous êtes en France ? Vous n'avez pas l'air d'un simple touriste, vous vous exprimez parfaitement bien dans notre langue."

Elle élargit son sourire, la déformation professionnelle étant son plus gros vice. Elle était vraiment curieuse par nature et évidemment, il fallait bien qu'elle craque de temps à autre pour en savoir plus sur les gens. Ah lala celle là !

Comme elle était serviable cette demoiselle ! Zeno n’avait vu que peu de personnes se comporter de la sorte avec lui, lorsqu’il ne rusait pas de stratagèmes séducteurs en stratagèmes séducteurs pour se tirer d’affaire. Serait-il possible que, pour une fois quelqu’un ne soit guère effrayer par sa manie tactile et ses manières ?  Tant mieux, ce serait reposant, comme ça ! Rares étaient ce genre d’individus prêt à tout – du moins en apparence- pour aider son prochain. L’italien ne pouvait qu’en être témoin, l’étant lui-même. Et bien malheureusement, il avait appris souvent à ses dépens que la sympathie envers autrui n’apportait pas que du bon, malheureusement… Mais bon, ça ne l’empêchait pas de recommencer encore et encore, comme s’il ne retenait jamais la leçon. Tient, d’ailleurs, est-ce que ce n’était pas un peu le cas, lorsque l’on y réfléchissait bien ?

Hum, apparemment elle n’avait guère été très réceptive à ses tentatives de charmes non plus. Allons bon, se pourrait-il que notre expatrié commence à rouiller dans ses méthodes de contact ? … Non. Non non non et non, ça ne pouvait guère être ça, il avait bien trop confiance en ses capacités – et un égo surdimensionné aussi, comme tout italien qui se respecte- pour admettre une chose pareille. Si ça clochait, ce n’était pas de lui que ça venait. Mais bon, il verrait plus tard pour les spéculations. Chaque chose en son temps et pour l’heure, il voulait surtout acquérir un ouvrage de son auteur favori.

Suivant donc la délicate roussette docilement, il parvint jusqu’à une sorte de bureau et la regarda chercher dans un gros registre, sans la déranger. Même en s’excusant, elle paraissait savoir ce qu’elle faisait et mieux valait, selon l’instinct de l’artiste, éviter de la perturber de cette façon. Finalement, une poignée de minutes furent nécessaire seulement pour qu’un écho à sa demande face surface. Oh, il ne savait pas que l’écrivain dont il s’était délecté des textes plus jeune avait tenté d’autres genres littéraires. Pourquoi ne pas tester, après tout ? Il se demanda, l’espace d’une seconde, quel genre d’histoire pourrait faire plaisir à Epona, sa nouvelle amie.

Mais à peine s’était-il perdu en pensées internes que la voix mielleuse – à ses oreilles du moins- de la jolie jeune femme – dont il apprit qu’elle se nommait Valentine – l’interpella de nouveau. Tiens donc, ça, par contre, on ne lui avait jamais demandé. Enfin, pas de la sorte, du moins. Non pas que c’était très perturbant mais bon, parler de trahison dans une ville ou la vermine a la vie dure… Le Zucchero se demandait si c’était réellement une bonne idée. Mais bon, on ne fera guère d’un chien un chat et le blond, toujours fidèle à lui-même, entama donc une première tirade.

« Et bien à vrai dire je suis … en vacances sur un très long terme ! »

Il laissa un rire emplir sa gorge pendant une petite minute avant de reprendre son sérieux. Oui, il avait eu besoin e mentir pour se protéger, c’était devenue une habitude depuis qu’il était arrivée ici et qu’il avait intégré le cabaret, surtout.

« Dites-moi, d’après vous, quel genre de livre, parmi les trois que vous avez dénichés, pourrait plaire à une jeune femme pour a lecture du soir ? »

Vite changer de sujet, viiiiite.

Valentine avait parfaitement vu la gêne qu'avait eu Zeno lorsqu'il lui répondit enfin. Des vacances prolongées ? Allons donc... En tant que journaliste il lui était assez aisé de relever des mimiques ou des timbres de voix différentes lorsqu'un individu qu'elle interviewait, lui mentait.
Son histoire n'était pas si véridique et elle l'avait très bien comprit. Elle ne pu s'empêcher d'espérer qu'il n'était pas de ces nouveaux gang italien qu'on appelait Mafieux. Cela aurait fait une très mauvaise image à la boutique... Quoi que...
Elle plongea son regard dans le sien, le regardant avec insistance, puis, se reporta à nouveau sur le registre, alors qu'il lui posait une nouvelle question. Il tentait de changer de sujet.

La rouquine était à présent incroyablement curieuse, mais elle n'insista pas, ne voulant pas faire fuir un client potentiel. Avec professionnalisme, elle écouta sa demande et réfléchit un moment avant de fermer le registre. Il valait mieux le ranger à présent, il ne lui était plus vraiment utile.
Se penchant pour le glisser dans son tiroir d'origine, elle laissa trainer un peu de silence avant de reprendre la conversation, répondant enfin.

"Je suis la fille d'un libraire, pour moi tous les styles me conviennent. Tout dépend de la dame à qui vous désirez faire la lecture. Si c'est une jeune demoiselle, le conte l'amusera surement. Si c'est une rêveuse, l'histoire fantastique est l'idéal... Et si vous voulez la séduire, les poèmes sont bienvenus. Le soucis est que j'ignore le style que possède cet auteur et cela peut très bien ne pas convenir. Je vais vous chercher les trois ouvrages, vous n'aurez qu'à vous faire une idée, je pense que vous la connaissais bien mieux que moi"

Elle afficha un petit sourire taquin et se retira dans les allées, cherchant parmi les étagères afin de dénicher les trois livres. L'un était plus simple à dénicher, placer avec d'autres ouvrages fantastiques.
Mais ce ne fut au cour d'une rude bataille avec un escabeau et une montagne de livres, qu'elle parvint à attraper les deux autres œuvres. Le rangement laissait à désirer quand même... Elle allait devoir ranger tout cela une fois le client partit.

Elle retourna auprès de lui et déposa les trois objets sur le comptoir, lui donnant la possibilité de les consulter à loisir. Affichant un sourire professionnel, elle le lui fit comprendre d'un geste de la main et retourna derrière le comptoir, se permettant enfin de se poser sur la chaise de bois qu'elle avait occupé peu de temps avant son arrivée. Elle n'avait pas fait grand chose de sa journée mais se sentait tout de même un peu fatigué. Comme quoi, ne rien faire avait le don d'épuiser.
Par politesse, elle conserva le silence le temps que Zeno choisisse le ou les livres qu'il allait prendre, l'observant faire d'un air passif. Valentine restait à l'écoute si jamais il avait envie de lui poser une question, même si au final, elle finit par poser une question avant lui.

"En tant que touriste, si je peux vous conseiller sur un endroit à visiter, ce serait le Cabaret du Lost Paradise, je suis persuadée qu'il vous plairait..."

Spoiler:

Il pensait que son plan avait fonctionné « comme sur des roulettes ». C’est vrai, après tout la jeune femme n’avait pas insisté sur les raisons de sa présence en France donc pourquoi douter de la véracité de son petit évitement ? En plus, généralement, ce n’était pas les raisons de sa présence sur ces terres luxuriantes qui intéressait la gente féminine – ou masculine, parfois … - mais la manière dont il fallait s’y prendre pour qu’il se glisse dans des draps n’étant pas les siens. Forcément, avec un contexte pareil, la perspective d’argumenter davantage à ce sujet ne lui avait pas effleuré l’esprit une seule seconde. Et dans sa grande bêtise naïve, il pensa que c’était largement suffisant pour que la rouquine en oublie sa précédente question. Oui oui, il fallait y croire, s’auto-persuader. Tout serait sans doute plus simple après, n’est-ce pas ?

C’était ainsi qu’il avait toujours agit, pourquoi changer une équipe qui gagne après tout ? Ça lui paraissait on ne peut plus logique tout ça. Il soupira alors d’aise lorsque la belle Valentine partie à la recherche des ouvrages, le laissant seul un petit instant. Ca l’aurait tout de même embêté qu’elle le prenne pour un individu suspect, du genre mafieux, qui commençait à se faire dangereusement connaître en dehors des frontières italiennes. Il ne fallait pas croire, ce n’est pas parce qu’il avait vu le jour au cœur d’un pays méditerranéen qu’il en aimait toutes les ficelles et toutes les controverses. La Mafia, il détestait ça. Du temps où il avait été en passe de devenir un jeune et puissant commandant de cavalerie, il avait déjà eu à croiser le fer avec ce genre d’individus, et ça ne lui avait pas laissé que des bons souvenirs. Il garde encore quelques cicatrices criardes sur son corps à cause de ces affrontements à l’épée qu’il avait dû mener plus ou moins contre son gré.

Ses pensées courantes s’arrêtèrent sitôt sa ravissante compagnie improvisée de retour, avec les livres recherchés comme le Saint Graal. Les posant sur le comptoir, elle laissa tout loisir à l’italien de s’emparer du premier pour en feuilleter quelques pages avant de le reposer pour faire la même chose avec le second et le troisième. Il fut immédiatement happé dans sa lecture, qui, comme attendu, lui rappelait beaucoup de souvenirs. Il était tellement prit par la contemplation de ces quelques lignes qu’il répondit distraitement à la question que lui posait Valentine.

« Je sais, j’y travaille… »

Avant de se rendre compte de sa connerie. Mierda ! Il était presque sûr qu’elle l’avait fait exprès, d’attendre une ouverture pour l’interroger sur ce genre de choses ! Pourvu que le patron ne l’apprenne pas ou il sentait déjà un coup de bâton lui revenir dans les dents, au sens figuré. Mais bon, ça restait tout de même désagréable. Relevant ainsi ses deux agapes aux couleurs chaudes de ses terres natales, il essaya, vainement, d’embrayer sur un autre sujet, tout en restant sur la base posée par sa compatriote rousse.

« Euh… Pour le tourisme, les faubourgs parisiens seraient sans doute plus adaptés, vous ne pensez-pas ? »

Et voilà que sans même s’en rendre compte, il se trahissait de nouveau. Franchement Zeno, ce que tu peux être débile, parfois… Non, tout le temps, enfaite.

Spoiler:

Alors qu'elle avait demandé cela en toute innocence, la réponse que lui donna Zeno alors qu'il bouquinait ses trouvailles la perturba. Comment ça il y travaillait ?! Alors lui aussi était ..."différent" des humains ?!
Valentine ouvra la bouche, stupéfaite. Oh oui elle comptait bien lui balancer quelque chose mais elle cherchait encore comment le dire.
Puis il tenta de changer de conversation en lançant une petite remarque. Mais son expression gênée l'avait complétement trahit à présent. Croisant les bras d'un air suspicieux elle finit par répondre à cette remarque, pas du tout convaincu.

"Certes... Mais à quoi bon visiter et faire le touriste si vous ne l'êtes pas vraiment ?! Je ne sais pas qui vous êtes, mais je fréquente beaucoup ce cabaret et je n'ai pas souvenir de vous y avoir déjà croisé. Qu'êtes vous ? Un serveur ? Un danseur ? Dites moi donc tout avant que je ne m'empresse d'aller me renseigner auprès d'Edward. Vous ne devez pas être au courant, mais c'est un bon client ici, il aime les livres qu'écrit mon père."

Un sourire presque machiavélique se dessina sur ses lèvres. Et voilà, ce pauvre bougre venait d'attiser sa vilaine curiosité. Et tout le monde savait dans son entourage que lorsqu'elle mettait dans ce mode là, tant qu'elle n'avait pas tiré les vers du nez de la personne, elle en devenait quelque peu psychotique. C'était plus fort qu'elle. Dès qu'on parlait de choses paranormales, elle ne se contrôlait plus. Oh certes, elle s'était déjà fait taper sur les doigts par son ami d'enfance qui était à l'origine de cette passion malsaine, mais elle s'en moquait un peu. Voir même éperdument en fait. Ce qui était fait était fait. Il en avait trop dit ou pas assez.

Étant donné qu'il n'y avait toujours aucun client dans la librairie à par lui, elle n'hésita pas bien longtemps avait de prendre son air grave. Ses yeux brillaient d'une connaissance qui n'aurait pas dut se manifester. Elle n'était qu'une simple humaine, elle n'avait pas à savoir cela mais... trop tard !

"Je suis au courant de ce qui se trame là-bas. Je ne m'y rend pas pour rien... Oh bien sûr, le service et le spectacle est agréable, mais rien ne vaut de s'entourer de non humains. Ne niez pas cela, je sais tout pour les employés... D'ailleurs... Vous êtes quoi ? Ils n'embauchent pas d'humains chez eux."

Elle le scruta avec insistance, prête à lui sauter dessus pour le retenir au cas où il tenterait de fuir. Oui évidemment qu'elle savait qu'elle n'était qu'une simple humaine frêle et sans défense, mais elle s'en moquait complétement. Elle ne le lâcherait pas !
Évidemment, il n'avait pas encore fuit aussi restait-elle immobile et attendait avec un air déterminé. Puis, se rendant compte qu'elle ne devait pas du tout le rassurer, elle afficha un petit sourire amusé et reprit d'une voix plus douce.

"Ne vous inquiétez pas, je ne divulguerais pas cette histoire à qui que se soit, tout ceci n'est que pour mes connaissances personnelles, rien de plus. Je veux savoir à qui j'aurais à faire quand je vous reverrais au Lost paradise... Car je suis certaine que nous nous reverrons, mon cher Zeno..."

[bon un peu court mais ayé j'ai enfin répondu XD]

Bon, eh bien, le moins que l’on pouvait dire à présent était que si ce n’était encore guère le cas jusqu’alors, Zeno venait de se fourrer dans de très sales draps. Enfin, façon de parler, car la compagnie d’une demoiselle, qui qu’elle fut-ce, n’aurait jamais eu à être accusée d’une pareille comparaison de manière solennelle ; ce n’était pas là le genre de ce macho-séducteur italien. Bien au contraire. Malgré tout, il ne put s’empêcher de penser que les sueurs froides qu’il sentait prendre possession de son échine ne se trouvaient pas là pour rien. Et ce n’était pas pour le rassurer, d’établir un tel constat.

Son instinct de survie – appelons ça ainsi – lui dictait de faire tout ce qui était possible de mettre en œuvre pour se carapater le plus vite possible loin de cette bien étrange librairie. En dépit de cette pensée et des coups d’yeux furtifs en direction de la porte, le Zucchero sentait la belle Valentine prête à se jeter sur lui pour l’empêcher qu’il ne parte. En soit, qu’une femme se ruent sur lui ne le gênait en rien, pour dire vrai ; il restait un homme avec des instincts bien ancrés, ne l’oublions pas, ce serait faire une erreur. Malgré tout, dans une telle situation, le blond se serait bien passé de ce type d’expériences s’annonçant musclées – et pas dans le bon sens du terme qu’il aurait su apprécier… Quelle cruauté.

De plus, avec sa force herculéenne, il était pleinement conscient d’être un danger notoire pour quiconque si jamais il venait à ne pas maîtriser ses gestes. Hors, sous le coup de la panique qui commençait à l’envahir, un dérapage n’était pas à exclure. Autant dire que plus ça allait et moins il était rassuré par ce qui se tramait autour de lui. Pourquoi avait-il tant ouvert sa grande bouche aussi ?! Il se promit à lui-même d’apprendre à la boucler, un jour.

Mais d’un seul coup, et aussi vite qu’elle était arrivé sur sa frêle unité de fugitif, la peur s’évapora. Tel un papillon au chemin hasardeux, la voici repartie. Et pour cela, un seul mot avait suffi. Ou plutôt un nom bien précis. Edward. Le Boss de Zeno, que ce dernier appréciait beaucoup, par le simple fait qu’il lui avait offert une véritable vie après sa mésaventure scientifique. C’est ainsi qu’un sourire niais vint se peindre sur la face de l’idiot national. Allant jusqu’à prendre dans ses mains chaudes celles de Valentine, il ne put s’empêcher de répondre, presque amusé.

« Je peux vous assurer que je suis aussi humain que vous ! ... Par contre, vous êtes la Madonna du Boss, dites ? »

Il était très curieux, sans doute trop pour son propre bien d’ailleurs, ce qui le conduisait souvent à des erreurs de parcours qu’il aurait mieux valu éviter en toutes circonstances. Ses mémoires italiennes lui revenaient en tête. En Italie, dans une famille il y avait le Boss, ou le Padrino ; soit le père, et également la Madonna, qui était l’équivalent tantôt d’une mère, tantôt d’une jeune épouse plus ou moins en devenir. Il se demandait bien, du coup, si cette ravissante sylphide était la promise de son patron. Si tel était le cas … C’était un sacré veinard ! Zeno en aurait presque été jaloux !

Alors qu'elle comptait lui sauter dessus afin d'obtenir des informations, elle déchanta rapidement. C'était un étrange garçon. Il voulait fuir, avait pâlit à l'évocation du cabaret et des détails normalement interdit en conversation. Mais plus maintenant. Il avait suffit de dire le mot magique. A peine avait elle énoncé le prénom d'Edward, qu'il avait changé de comportement. Il semblait plus à l'aise, et même souriant.
Valentine manqua d'amorcer un geste pour reculer lorsqu'il lui attrapa les mains, les serrant contre les siennes avec un air béat.
La Madonna ? Que voulait-il donc dire par là ? Elle manquait cruellement de culture linguistique et dût faire un effort de logique assez impressionnant pour comprendre enfin ce qu'il essayait de lui demander.

"Vous... vous voulez dire... sa compagne ?"

Elle n'était vraiment pas sûre de ce qu'elle racontait. Allait-il se moquer en lui disant qu'elle se trompait, qu'il avait voulu dire autre chose ? Mais il continuait de la regarder sans qu'une once de surprise ne passe dans ses yeux. C'était donc bien cela qu'il était en train de lui signifier.
Voilà qui était à la fois fort fâcheux... et assez drôle. Que devait-elle faire ? Le taquiner en jouant le jeu, ou se montrer franche ? Elle devait avouer qu'elle hésitait grandement. Mais même si cela l'amusait beaucoup, il valait mieux ne pas trop jouer avec le feu. Elle ne savait pas comment réagirait Edward s'il apprenait qu'elle avait mentit pour s'amuser. Surement pas trop méchamment, il n'était pas du genre à s'énerver pour si peu. Mais dans le doute... et par respect pour lui surtout, elle secoua la tête et sourit aimablement.

"Non, je ne suis pas sa fiancée ou quoi que se soit d'autres. Je suis juste une cliente régulière du Cabaret. Et il m'arrive régulièrement d'aller échanger quelques mots avec le grand Manitou. Il est très agréable, malgré les dires d'un de mes amis."

Oui, elle avait mentionné sans le vouloir son ami le commissaire. Il n'était pas rare qu'elle le voit grogner à la simple évocation du patron de Lost Paradise. Elle n'avait d'ailleurs toujours pas comprit pourquoi une telle rancœur. Mais ne valait il pas mieux se faire sa propre idée de toute façon ?
La journaliste observa Zeno avec intérêt, se demandant bien comment il avait pu arriver à une telle conclusion.

"Pourquoi pensiez vous que j'étais... la 'Madonna' d'Edward ?"

Elle continua à l'observer, toujours curieuse. Il était rare qu'on déduise pareille chose la concernant. Elle se sentait tout de même flattée, hein, mais également très intriguée.
Elle espéra tout du moins que Zeno ne se referme pas suite à sa négation. Lui qui semblait tellement enjoué, comment allait-il réagir maintenant qu'elle avait réfuté son idée ?

Spoiler: