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Neige

Cabaret du Lost Paradise - Forum RPG

Forum RPG fantastique - Au cœur de Paris, durant la fin du XIXe siècle, un cabaret est au centre de toutes les discussions. Lycanthropes, vampires, démons, gorgones… Des employés peu communs pour un public scandaleusement humain.
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Narcisse Williams
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Narcisse Williams

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MessageSujet: Étoiles, qui d'en haut voyez valser les mondes - Part 1 [ft Rita Upset][1889] - Terminé   Étoiles, qui d'en haut voyez valser les mondes - Part 1 [ft Rita Upset][1889] - Terminé I_icon_minitimeDim 1 Mar - 17:33

Quelques rayons de Lune filtraient dans la pièce pour caresser les tissus, illuminant satin et mousseline d'une douce lumière argentée. Narcisse avait éteint sa bougie sans trop savoir pourquoi, n'en ressentant sans doute pas le besoin alors que son astre préféré veillait sur lui du haut du ciel. Ce soir, il ne se sentait pas d'humeur à se mêler aux festivités qui animaient la salle de spectacle. C'était pourtant un lieu qu'il affectionnait, ne serait-ce que parce qu'il l'éloignait de sa chambre et des songes qui la hantaient. En cette fin de soirée toutefois, il aspirait à de la tranquillité, sûrement parce qu'il était si fatigué que ses jambes en avaient flageolé pendant l'entraînement. Cela faisait deux jours qu'il n'avait pas cédé à l'appel du sommeil, quatre qu'il n'avait dormi plus de trois heures, et ce manque commençait à peser sur son pauvre corps. Lui qui était un être de feu, il avait froid. Il frissonna, serra son épais gilet de laine contre son torse, soupira légèrement, puis laissa son regard se perdre sur les costumes chatoyants qui s'alignaient devant lui. Il ne savait pas ce qu'il faisait là, si on lui demandait. La vérité, c'était que l'acrobate ne pensait plus beaucoup. Sa tête était emplie d'un doux coton vaporeux qui ne lui demandait qu'à se laisser faire et, à défaut de s'abandonner dans les bras de Morphée, il obéissait à ce que ses instincts semblaient lui commander. C'est ainsi qu'il s'était retrouvé ici après avoir erré dans les couloirs sombres et vides du cabaret, enveloppé dans son châle et dans le plaid qui couvrait désormais ses jambes en tailleur.

Il laissa son regard dériver vers le dehors, vers ce mystérieux infini d'étoiles. Les lueurs blanches qu'elles lui renvoyaient l'hypnotisait, l'enveloppaient d'une étreinte onirique à laquelle il ne pouvait se soustraire. Après quelques instants, il était incapable de dire si le flou qui grignotait sa vision était dû au fantasme ou à l'attraction du sommeil qui se faisait plus pressante que jamais. Ses paupières se fermèrent lentement, au rythme d'une pétale de fleur qui virevolte dans le vent avant de glisser jusqu'au sol, si... si... Il y eut soudain une voix. Un chant mélodieux s'élevait dans l'air avec la douceur d'une brise d'été, attirait sa conscience dans ses bras. Narcisse se redressa en clignant des yeux lourds de fatigue, incapable de savoir si ou combien de temps il s'était assoupi. Il passa sa grande main sur son visage comme pour essayer de se redonner bonne figure, tentant de s'accrocher au monde du réel pour savoir à qui appartenait cette mystérieuse mélodie qui lui paraissait si familière. En tournant la tête, il la vit et la reconnut. Rita Upset, si petite et si grande pourtant, l'une des chanteuses du cabaret. Il se souvenait avoir écouté, assis dans un coin ou sur une chaise lorsque le temps le lui permettait, certaines de ses chansons. Il les avait aimées, les aimait toujours d'ailleurs, peut-être parce qu'il se sentait en harmonie avec elles. Ses entrailles semblaient résonner de la mélancolie que prenaient parfois les mots et les mélodies. Hypnotisé, Narcisse se leva. Probablement la cantatrice n'avait-elle pu le voir de là où il s'était échoué contre le mur. Ses longs cheveux ondulant dans le vent, il s'avança, incapable de se détourner du chant de la jeune femme. Jeune, finalement, peut-être pas. Il ne savait pas grand chose d'elle, après tout. Il s'approcha doucement, désireux de ne pas la déranger, intimidé par la présence qu'elle possédait. Cela ne sembla pourtant pas fonctionner, ou si peu : la fatigue avait dénué ses pas de leur discrétion habituelle. Leurs regards se rencontrèrent, et Narcisse s'empourpra. Il baissa immédiatement les yeux, rompant ce lien d'un instant, et avala sa salive. Encore une fois, les actes et les mots lui échappaient, il ne comprenait ni leur sens ni leur mesure, s'étouffait avec leurs possibles conséquences. Encore une fois, il ne fit rien d'autre que triturer ses longs doigts alors que son embarras grandissait. Il n'avait pas voulu gêner ce moment si parfait, il n'avait pas voulu qu'il s'arrête, il n'avait pas voulu que la magie se rompe...
« E-excusez-moi... Je ne voulais pas vous déranger. »
Sa voix était si faible, trop faible peut-être pour un jeune homme tel que lui, mais sa gorge se tordait et ses poumons se rétractaient dès qu'il tentait de parler. Il ne se sentait jamais à la hauteur des mots qu'il voulait adresser. Lorsqu'il se résignait à délier ses lèvres, il se donnait l'impression de dire des sottises. C'était d'ailleurs exactement ce qu'il ressentait, en cet instant. Il se mordit la lèvre et fixa les lattes qui zébraient le sol, incapable de rencontrer le regard de Rita.
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MessageSujet: Re: Étoiles, qui d'en haut voyez valser les mondes - Part 1 [ft Rita Upset][1889] - Terminé   Étoiles, qui d'en haut voyez valser les mondes - Part 1 [ft Rita Upset][1889] - Terminé I_icon_minitimeSam 7 Mar - 15:59

Une nuit de plus, juste une nuit de plus et Rita serait libre de cette lueur entêtante, tenant beaucoup trop à la vie pour lui faciliter la sienne. Ça n’était pas arrivé, depuis quelques mois, qu’un humain soumis à sa vue, soit aussi tenace, et c’était pour ainsi dire le plus mauvais moment qu’il aurait pu choisir de résister : Rita était en train de recoudre l’énorme trou d’un de ses jupons, qu’elle avait créé sur scène lors de sa dernière prestation, le soir même. Cette même robe devait être ramenée chez le prêt-à-porter dès la première heure du lendemain, bien que la banshee aurait bien aimé l’acheter à son propriétaire, ne serait-ce que pour s’éviter ce genre de souci. Alors, les yeux cernés de noir, elle recousait lentement cette déchirure, penchée sur une table de travail de l’atelier sous les combles. Plus personne n’était présent ou réveillé pour la trouver au sein des tissus multicolores et chatoyants, et cela soulageait légèrement la banshee de ne pas montrer ses faiblesses au premier venu, celui qui constaterait avec une curiosité morbide, sa chevelure aux mèches grisonnantes. La jeune femme rit à la pensée que, si jamais l’on venait la déranger, la prendrait-on sûrement pour une petite vieille rabougrie, les doigts tremblants et le visage transit par une douleur et une fatigue antédiluvienne.
Elle s’était même enroulée dans un châle défraîchi, histoire de sauver les apparences, et avait revêtu sa robe de nuit bleue azur, assez épaisse pour que l’on n’aperçoive pas sa peau qui partait en miettes. Elle avait remonté ses genoux sous son mentons, recroquevillée qu’elle était sur sa petite chaise de bois, ses pieds nus dépassant de son jupon. Elle se crispait à chaque essoufflement tumultueux, chaque crampe douloureuse, chaque goutte de sang que l’on purgeait. La grippe faisait encore des siennes, aussi bien dans le corps de ce jeune homme battant que dans celui lassé de Rita. Ses tremblements ne cessaient pas, et il ne fallut pas longtemps avant que la banshee n’abandonne sa table, sa chaise et la bougie qui lui servait à éclairer son regard rougeoyant, qui s’essouffla de tristesse, lorsque la femme, qu’elle éclairait d’amour, cessa d’user d’elle. Cette dernière traina ses orteils dévoilés vers le bord d’une fenêtre au ras du sol, d’où l’on pouvait observer l’océan des toits de Paris. Passant une main dans ses cheveux cassants, elle s’assit là, contemplant de ses yeux encore verts l’incommensurable concert de vies brûlantes, ignorant tout de la lumière bleutée de la Lune, qui essayait de s’infiltrer par la lucarne du mur adjacent. On la sentait vicieuse, Sélénée, comme si elle prenait un plaisir malsain à voir la banshee, vaincue par des sommeils épuisants et par son éternelle malédiction. Rita s’imagina un instant le visage de Ziggy, son cher protégé, ainsi que la sensation d’entourer de ses bras gelés le corps si chétif du lorialet, un apaisement que la chanteuse aurait bien voulu éprouver.

À défaut de cette accalmie, la banshee usa encore de la seule arme qui repoussait encore et toujours les moqueries de l’astre de la nuit : de ses lèvres s’échappèrent, en froides exhalations, des chants des lacs d’antan. Des mélodies dont les paroles ancestrales qu’elles  ne se risquaient même plus à pénétrer dans cette réalité, se contentant de s’inscrire directement sur la toile des esprits. Elle chantait sans vraiment y penser, suivant mécaniquement le motif de la boîte à musique, qui résidait dans son coeur dénué de lumière, les yeux et oreilles fermés à ceux des autres. Mais, se plonger dans l’isolement des sens ne suffit pas à lui enlever toute maudite vigilance, puisque le craquèlement d’un bout de plancher avertit son instinct d’enfin ouvrir les paupières. Ses iris émeraudes se fixèrent sans hésitation dans les améthystes qui s’approchaient impunément d’elle, alors que son essence même était exposée à la ville entière, depuis sa petite fenêtre au ras du sol qui donnait sur flot de tuiles étincelantes de Paris. Une venait juste de se décrocher.
Dans les ténèbres des combles et éblouie par la bougie qu’elle venait de voir s’éteindre, Rita ne décelait que trois éclats ténus, dont deux ne tardèrent pas à disparaître expressément. Se réhabituant lentement au noir qui l’entourait, la banshee put également voir la chevelure argentée, tellement pétillante de vie et chaleur, comparé à ses boucles crépues, ainsi que des doigts crispés et timides. Cependant, seule la voix délicate et perdue permit à la cantatrice de revenir au monde actuel, celle-ci laissant les limbes meurtries de ses souvenirs, et de reconnaître son interlocuteur. Un dragonnet perdu, cherchant sûrement la même paix nocturne que la banshee.

« E-excusez-moi... Je ne voulais pas vous déranger. »

Rita fut touchée la fébrilité de cette voix et par la puissance insoupçonnée de ce coeur, un pouvoir ancestral, qui semblait écraser ce corps si frêle et souple. En dehors de leur mésaventure à la Salpetrière, la banshee avait pu l’observer danser parfois, cachée derrière les guéridons latéraux, admirant la fluidité aérienne de ses mouvements et ses prouesses de haut vol, ses membres élancés tels des ailes impétueuses. Ce souvenir eut vite fait de lui couper le souffle un instant, consciente que le même être s’incarnait dans la lueur faiblarde, qui peinait à s’exprimer face à elle. Un rictus sardonique fut rapidement remplacé par un sourire cordial, alors que des mains glacées trouvaient leurs places sur des pieds nus.

- Cela faisait longtemps, Mr. Williams. Venez donc vous assoir, il fait plus clair de ce côté-là.

Il y a des lueurs que la banshee refusait de tout son corps, allant jusqu’à la rendre alitée de fatigue. Il y a des éclats que l'être séculaire refusait de toute son âme, interdisant même que le ciel ne la touche. Il y a des lumières qui veulent atteindre son coeur, pour lesquelles Rita n'avait pas encore décidé du sort à leur attribuer.


Dernière édition par Rita Upset le Ven 19 Juin - 16:01, édité 1 fois
Narcisse Williams
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MessageSujet: Re: Étoiles, qui d'en haut voyez valser les mondes - Part 1 [ft Rita Upset][1889] - Terminé   Étoiles, qui d'en haut voyez valser les mondes - Part 1 [ft Rita Upset][1889] - Terminé I_icon_minitimeMar 17 Mar - 18:58

Narcisse se balançait d'un pied sur l'autre comme pour se bercer, mal à l'aise. Le mouvement continu l'aidait à se concentrer sur autre chose que l'enclume qui semblait peser sur ses paupières, et à maintenir ses pensées hors de l'embarras qui montait à ses joues. Le silence retomba lourdement. Son regard, d'abord figé sur les rainures du plancher, remonta lentement vers la silhouette recroquevillée de la cantatrice. Il se souvenait de sa première rencontre avec Rita, de la beauté surnaturelle qui avait alors émané d'elle et de la jeunesse qui avait animé ses yeux émeraude. Pourtant, en cette soirée, elle semblait étrangement mal en point, étrangement vieille. Une goutte d'inquiétude alla se noyer dans l'océan de gêne qui ballottait son corps. Il avait peur pour elle, ne lui souhaitait pas la souffrance qu'elle semblait endurer. Ses doigts ondulèrent, à la recherche d'un but qui ne leur venait pas. Il ne savait que faire. Rita, elle, ne semblait pas déstabilisée par cette situation. Elle l'observait, un fin sourire incurvant ses lèvres. L'acrobate se sentit de nouveau intimidé, peureux, lâche. Sa voix se coinça dans sa gorge. Il était prisonnier de son propre corps, comme un albatros sur le pont d'un navire: il voulait voler, se sentait à l'aise dans ses danses aériennes plus que sur la terre ferme.
« Cela faisait longtemps, Mr. Williams. Venez donc vous asseoir, il fait plus clair de ce côté-là. »
Il cligna des paupières, soudainement conscient que son esprit venait de se perdre dans ses propres limbes. La fatigue était néfaste pour ses pensées. Un très léger sourire se dessina sur la bouche du jeune homme alors qu'il regardait la jeune femme. Cela faisait en effet longtemps. Leur première rencontre n'avait pas été des plus reposantes, même si le cadre de la Salpêtrière ne se prêtait pas au calme. Loin, très loin de l'ambiance onirique de cette soirée qui paraissait résignée à l'emporter dans les bras de Morphée. Là où les couloirs froids et tristement morts de l'hôpital avaient été inquiétants, cet endroit était paisible, accueillant. C'était un lieu qui appelait à venir se tranquilliser. Au fond, c'était sûrement cela qu'il était venu chercher... Mais apparemment cela avait échoué, puisqu'il n'était plus seul désormais. Ce n'était peut-être pas plus mal, après tout. Soudainement, il réalisa qu'il était resté planté là, perdu au milieu de ce grand espace, ignorant irrespectueusement l'offre de son interlocutrice. Il s'empourpra. Ne pouvait-il rien faire correctement ?! Rouge, il fit quelques enjambées peu assurées pour aller s'asseoir -trop lourdement à son goût- dans une chaise, face à Rita. Les longs doigts de la cantatrice étaient pris dans les tissus abondants d'une robe de spectacle qu'elle semblait occupée à recoudre. Narcisse, peu décidé à parler pour le moment, se laissa bercer par les mouvements fluides de l'aiguille contre l'étoffe dans un silence qui se voulait agréable. Ses paupières tombèrent doucement sur ses yeux, si bien que le jeune homme fut contraint de battre des cils pour ne pas s'assoupir. Il cacha un bâillement sous le revers de sa main, qu'il passa ensuite sur son visage tiré. Il envoya un regard gêné à son interlocutrice.
« Excusez-moi, je ne suis pas très bavard ce soir. Vous... Comment allez-vous ? »
C'était une question dont il avait une idée de la réponse, mais il était sincèrement inquiet et désireux de sortir son esprit du voile brumeux qui le brouillait. Si une conversation pouvait les soulager, tous deux, il n'avait aucune raison de s'y soustraire. Ses mains froides se posèrent sur ses cuisses, tandis qu'il liait ses chevilles. C'était une position dans laquelle il se sentait bien, plus ouvert. Il était suffisamment confiant pour aller à la rencontre des yeux émeraude qui lui faisaient face. Il scruta le visage blême de la cantatrice, incertain et anxieux, comme espérant y déceler un élément, aussi faible fut-il, de réponse. Il espérait mieux la comprendre, pour pouvoir mieux l'aider. Cependant quelque chose lui soufflait que le mal dont souffrait cette personne ne pouvait être soulagé que par celui qui en était à l'origine. Pour peu, le dragon en eut presque été tenté de tendre la main vers elle et de serrer ses minces doigts au creux des siens. Mais c'était impossible: pas lui. Il en était incapable, il en avait toujours été. Et il se sentait terriblement impuissant et inutile. Son regard se posa sur les épaisses couches de tissus qui couvraient la table, distrait. Déjà que ses propres costumes étaient un véritables cauchemar à laver et à réparer, il n'osait même pas imaginer ce que ce devait être pour sa compagne d'infortune. Cette pensée fit germer une idée dans son esprit figé. S'il ne pouvait la soutenir moralement...
« J-je... Enfin, vous avez besoin d'aide ? »
Il était très certainement une main d'oeuvre vaine et inutile. S'il n'y avait qu'un trou à combler, il ne pourrait rien faire, et même si ce n'était pas le cas, il n'avait pas l'habitude de ce genre de matières et prendrait une éternité à faire le moindre point. Au moins, il avait proposé. Au moins, il savait coudre. C'était le principal, non ?
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MessageSujet: Re: Étoiles, qui d'en haut voyez valser les mondes - Part 1 [ft Rita Upset][1889] - Terminé   Étoiles, qui d'en haut voyez valser les mondes - Part 1 [ft Rita Upset][1889] - Terminé I_icon_minitimeSam 11 Avr - 18:32

Rita observa avec douceur le visage fatigué et empourpré du dragonnet, dont les gestes saccadés avait l’art de faire figure comique devant la banshee installée au sol. Les mains de cette dernière se soulevèrent tranquillement de ses pieds gelés et reprirent mécaniquement leur couture à travers la robe de satin. Le tissu n’avait guère que quelques trous à refermer, mais Rita s’attela à faire une deuxième couture, pour plus de sureté, et pour s’assurer que le fil ne ferait pas tâche dans la somptueuse robe prêtée.
La jeune femme suivit du coin de l’oeil les mouvements graciles et hésitants de Narcisse, venu s’installer brusquement en face d’elle, dans une vieille chaise poussiéreuse, échappant de peu à la lumière qui se jetait impunément dans ce sanctuaire du silence et des bougies mourantes. Laissant à leurs affaires les nombreux phares de l’océan de tuiles, Rita replaça son regard verdissant sur les mains de l’acrobate, qui rehaussait le lourd volet de sa conscience, et la banshee sourit lentement à ce petit accès de faiblesse que la créature lui offrait. Elle ne savait pas si cela était dû à un accès de confiance ou à de la naiveté pure, mais en ce soir douloureux, voir la souffrance d’un autre, aussi infime était-elle, conformait la jeune femme quant à la réalité où elle se trouvait. Le monde des vivants, encore une fois, l’accueillait dans sa mansarde aux milles lueurs discrètes, dont la petite violette combattait encore contre le sommeil. Désormais rassurée, Rita retournai à son ouvrage, avant que la voix de velours de Narcisse ne lance une nouvelle attaque contre l’épuisement qui le traversait.

« Excusez-moi, je ne suis pas très bavard ce soir. Vous... Comment allez-vous ? »

Une question prudente et attentionnée, propre au dragon somnolent. Mais, même si la réponse de Rita se serait bien prêtée à la douceur, elle demeura dans la gorge de sa propriétaire, qui préféra ne pas remuer ses élans émotifs précédents, et de se conserver dans une certaine mesure. Leurs pupilles se croisèrent un court instant, leur permettant de reconnaître leur fatigues respectives, et Rita fut presque tentée d’inviter Narcisse à se rapprocher d’elle, de se muer de cette étrange position qu’il avait adoptée, aussi inconfortable semblait-elle, et d’accrocher les mains si fines du dragon aux siennes, si blanches, rien que pour le contact chaleureux que lui procurerait son interlocuteur. Rita se surprit même à avoir une envie morbide, celle de planter son aiguille dans un des doigts de Narcisse, dont la peau était sûrement aussi solide que de l’acier, rien que pour voir une goutte de sang perler, et de prouver au monde entier que même ces créatures subissaient la mort. Dans un sens, la vieille âme se dit que ce n’était rien d’autre que le moyen de nourrir son côté narcissique, et de prouver qu’elle était supérieure en au moins un point aux vivants : celui de leur subsister. Mais une fois le quota d’ego rempli, son coeur combla les vides de solitude et d’ennui. Alors ne lui restait plus que l’envie de contact et la lueur morte de sa bougie.

« J-je... Enfin, vous avez besoin d'aide ? »

La proposition était vraisemblablement dénuée d’arrière-pensées, que Rita se sentit extrêmement cruelle d’avoir pu penser une seule seconde de percer la cuirasse si solide, qui protégeait ce fragile dragonnet. Elle s’assit en tailleur, rangeant ses pieds blancs sous son jupon, déposant son ouvrage sur ses genoux, déposant un regard gentil sur le genoux de Narcisse.

- C’est bon, Mr Williams, j’ai presque fini. Mais merci pour la proposition, c’en est même presque trop gentil ! tenta-t-elle de railler, ce genre de piques ne faisant généralement pas de tord.

Par l’ironie du sort, Rita se rendit compte que son fil touchait à sa fin. Elle se leva donc pour chercher la bobine, allongée sur la table de travail, à côté de la bougie qui coulait avec agonie. Elle déroula quelques centimètres de corselet bleuté autour de sa main gauche, réajustant son châle bordeaux sur ses cheveux encore gris. Elle fixa la pile de vêtements qui trainaient également, en se demandant si elle devait finir de coudre son costume de Noël ou si elle devait plutôt laisser ça pour dans quelques mois. Les autres bouts de tissus n’étaient que des restes que Rita s’était empressée de récupérer pour les retravailler, les déduisant évidemment de sa paye. Une fois le fil coupée, la banshee se retourna et resta face à Narcisse, adossée contre le rebord mouillé de cire coulante.

- À dire vrai, je devrais plutôt vous retourner la question : vous n’arrêtez pas de piquer du nez. Devrais-je me sentir offensée de vous ennuyer ou alors c’est que la nuit n’est pas de tout repos pour vous ?

Un vieux tissu tartan attira son attention, et vint l’idée qu’elle ferait une excellent couverture pour le jeune homme à moitié endormi sur sa chaise. Elle tira alors l’étoffe de sa pile, avant de la prendre sous son bras et d’en couvrir l’acrobate avant qu’il ne puisse protester.

- La nuit est froide sous la mansarde, faites attention. Je me demande toujours comment fait Andréa pour supporter ça d’ailleurs.

Elle laissa un petit rire chaleureux s’échapper de ses lèvres sèches et brisées, espérant qu’il puisse au moins retomber sur les mains sveltes de Narcisse, si cela devait être le seul contact qu’elle s’autoriserait d’avoir avec les doigts d’ivoire.
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MessageSujet: Re: Étoiles, qui d'en haut voyez valser les mondes - Part 1 [ft Rita Upset][1889] - Terminé   Étoiles, qui d'en haut voyez valser les mondes - Part 1 [ft Rita Upset][1889] - Terminé I_icon_minitimeVen 17 Avr - 16:21

Le silence le berçait de ses maigres bras avec bienveillance, lui, son vieux compagnon. Narcisse luttait contre le sommeil comme contre un ennemi invisible et sournois. Il avait mieux à faire que de se laisser aller aux limbes des rêves: détailler mademoiselle Upset, par exemple. Elle, élégante jusque dans son apparente souffrance, belle jusque dans ses gestes méticuleux et graciles. Face à elle soudain, l'acrobate se sentait perdre de son prestige et de sa finesse. Elle lui paraissait si grande et sage, malgré la fragilité qui semblait parfois la saisir, qu'il en devenait pareil à un enfant. Curieux et intimidé, il voulait en savoir plus tout en ayant peur de ce qu'il pourrait découvrir. Ce fut donc sans un mot qu'il attendit la réponse de la jeune femme.

« C’est bon, Mr Williams, j’ai presque fini. Mais merci pour la proposition, c’en est même presque trop gentil ! »

Déception. Il hocha doucement de la tête, ne sachant trop comment répondre sans paraître fort maladroit. La seconde partie de la locution lui parut plus brumeuse. Une nouvelle fois le garçon se retrouvait face à son inadaptation sociale, peu certain de la manière de prendre cela. Guidé par le ton chaleureux de son interlocutrice, il choisit de laisser un fin sourire bercer ses lèvres. C'était probablement agréable, une simple boutade, n'est-ce pas ? Il n'eut cependant pas le temps de se poser trop de questions : mademoiselle Upset bougeait. Sa concentration vacillante trouva de nouveau un point d'appui. Il s'accrocha à la vision qu'il avait d'une femme jeune et vieille à la fois, qui s'avançait avec une lenteur sage et souveraine vers la table de travail. Là, elle déroula un fil qu'il ne chercha pas à voir puis se retourna vers lui. Il cligna des yeux, surpris dans sa rêverie, se redressa un peu dans sa chaise.

« À dire vrai, je devrais plutôt vous retourner la question : vous n’arrêtez pas de piquer du nez. Devrais-je me sentir offensée de vous ennuyer ou alors c’est que la nuit n’est pas de tout repos pour vous ? »

Alors Narcisse, ainsi mis face aux faits, fit la seule chose qui lui vint à l'esprit : il rougit. Son regard se perdit un bref instant sur les lattes de parquets alors même qu'il haussait des épaules. C'était un geste qui se voulait nonchalant et léger, bien qu'il n'eût sans doute pas l'effet escompté. La peur de vexer la jeune femme se rappela soudain à lui. Il était après tout hors de question qu'elle pensât sa présence dérangeante. L'acrobate releva donc timidement la tête et se décida à avouer, pour une fois, la vérité :

« - N-non, bien sûr que non, vous ne m'ennuyez pas. C'est... J'ai du mal à dormir en ce moment, alors je suis un peu fatigué, je suppose... Je vous prie de m'en excuser... »


À ces mots, comme invité par le langage, un bâillement le força à se cacher le visage de l'arrière de main. Décidément son corps se montrait fort peu coopératif en cette soirée. Il s'empourpra brièvement, gêné de se montrer dans un tel état de faiblesse alors qu'il était un être supposément fort et fier. Rita sembla d'ailleurs remarquer, si ce n'était déjà fait, le froid qui le contaminait minute après minute : une étoffe de tartan vint couvrir ses épaules d'un geste qu'il sentit bienveillant. Les rougeurs s'imprimèrent davantage sur ses joues blafardes et il prit soin de balbutier un remerciement. Mais déjà, la cantatrice reprenait la parole :

« La nuit est froide sous la mansarde, faites attention. Je me demande toujours comment fait Andréa pour supporter ça d’ailleurs. »

Et elle rit. Le son sonnait à ses oreilles comme une musique et pour un peu l'acrobate en eut commencé à danser. Il y avait une chaleur presque ironique dans cet accès d'euphorie, quelque chose qui les dépassait sans doute tous deux mais dont le jeune homme ne pouvait se lasser. Alors, poussé par la beauté de ce qu'il entendait et par le désir qu'elle continue, il esquissa un mince sourire. Leurs regards se croisèrent un instant et il eut même l'audace, pour une fois, de maintenir ce faciès sincèrement jovial. Cela ne dura cependant qu'un bref moment, suite à quoi il baissa de nouveau les yeux avant de resserrer l'étoffe contre lui. Curieusement, il se sentait plus fort sous l'épais tissus, comme protégé d'une carapace invisible. D'une certaine manière il se sentait prêt à parler, ou du moins à essayer. Aussi pencha-t-il doucement la tête sur le côté, laissant ses cheveux d'argent s'éparpiller sur le tissus comme s'ils en avaient été les fils.

« Vous n'avez pas froid, vous ? »

La question était bête, sans doute. Narcisse ne le nierait pas si mademoiselle Upset lui en faisait la réflexion. De toute manière il n'était pas très doué en relationnel, communication incluse. Néanmoins auprès d'elle, il voulait tenter. Il retrouvait cette même sensation qu'au Bal des Folles, cette même envie d'entreprendre et de se laisser aller, pour une fois. Peut-être était-ce cette sagesse immortelle qui émanait de la jeune femme ou simplement son aura mêlée à son propre désir secret, il ne savait trop. Cela restait toutefois agréable. Il joua de ses longs doigts, les tortilla dans les airs d'un air penseur. Son regard vif se posa de nouveau sur Rita, curieux sans doute. Il alla jusqu'à lui offrir un second sourire, plus doux, plus mélancolique aussi.

« E-et vous, mademoiselle ? Pourquoi travailler à cette heure si tardive ? »

Il se trouvait soudain fort indiscret, mais surtout fort impoli. Baissant les yeux, il murmura ses excuses. Pourtant cette réponse, il la voulait, si ce n'était que pour partager un instant, un secret, une parole. Peut-être qu'en cette soirée, ce dont il avait vraiment besoin, c'était des mots.
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MessageSujet: Re: Étoiles, qui d'en haut voyez valser les mondes - Part 1 [ft Rita Upset][1889] - Terminé   Étoiles, qui d'en haut voyez valser les mondes - Part 1 [ft Rita Upset][1889] - Terminé I_icon_minitimeVen 5 Juin - 11:29

Un peu plus de chaleur vint s’installer en son être de glace, lorsque la douce rougeur vint s’insinuer dans les joues du pâle dragonnet. Elle l’observa tirer sur le tissu, se repositionner inconfortablement sur la chaise de bois, croisa encore ses iris mauves incertains, puis son sourire. Un gentil, mignon minuscule sourire, encadré de fils d’argent, comme ceux dessinés sur ces poupées aux prix extravagants, que seules les princesses avaient le luxe de s’offrir.
Après tout, qui d’autre aurait le droit sacré d’observer, sans reproches, le faciès magnifique d’un dragon, aussi timide que Narcisse puisse être. Rita se sentait princesse d’une nuit, victime d’une malédiction qui lui rongeait les os et le coeur de brume, et gardée de toutes les lueurs par une fière et tendre créature, les chassant tous de son regard d’améthyste. Nul besoin de chevalier dans ce cas-là.
Rita tira d’une autre pile un coussin brodé, sur lequel elle s’installa, assise les jambes sur le côté, fuyant toujours la lumière sélénite, fixant, rassurée, le petit acrobate recroquevillé.  La banshee suivait la ligne délicate du cou de Narcisse, tentant de discerner le corps véritable sous la masse lactescente de cheveux, oubliant presque de demeurer pudique. Ce besoin de toucher, de connaître cette rugosité des écailles ardentes ou la douceur de la peau opale, laissant ses vieilles mains fatiguées toucher ce paradoxe vivant, figurant enfin la véracité de la créature qui s’était offerte à sa vue. Après tout, autant de siècles passés entre les spectres et les êtres de chairs n’auraient aucune difficulté à user le discernement le plus fin, et après une nuit aussi agitée, Rita ne s’étonnerait même pas de divaguer.
La banshee se racla la gorge, ramenant sa vue sur ses orteils. Ils étaient réels, eux.

« Vous n'avez pas froid, vous ? »

Un léger gloussement glissa de ses lèvres glacées, de nouveau rose pâle. La jeunesse et les pieds l’avaient enfin happée dans la réalité, laissant ses interrogations précédentes dans le monde des cauchemars. Son visage se tourna vers la chandelle laissée pour morte, s’appuyant dans le creux de sa main menue, soutenue par un genou levé.

«  Je suis le froid, mon cher. C’est à peine si je le ressens ou si j’y porte quelque peu attention. »

Comme toujours, Rita se souhaitait un air de défi, comme si elle mettait quiconque à l’épreuve de deviner la non-couleur de son être, de découvrir son coeur transparent, invisible et pourtant à la vue de tous. Des années à parcourir le monde, et tout ce que Rita cherchait au final, c’était que quelqu’un la remarque.

Tu n’as pas pu t’en empêcher, encore une phrase pleine de mystère et inutilement incomplète. Cette fierté te perdra, banshee à nom, elle te fait déjà oublier les limites entre les mondes et t’induit en erreur sur les êtres à aimer. Ne t’implique pas, ne t’implique pas, ne t’impli- n’aime pas.

Rita fronçait les sourcils, grimaçant au creux de sa main, entendant l’éther d’une oreille inattentive.

« E-et vous, mademoiselle ? Pourquoi travailler à cette heure si tardive ? »

Les murmures qui suivirent échappèrent à l’oreille agacée de la banshee, tant elle se concentrait pour ignorer les mots éthérés, même si l’intervention bienvenue de Narcisse avait chassé la plupart des pensées néfastes. Pour finir de les achever cependant, Rita se déplaça encore une fois vers la fenêtre, restant dans l’angle mort de la Lune, observant à nouveau l’océan de toitures et de lumières endormies.

« Je réparais deux trois petites choses dues pour demain matin, rien de spécial. Et puis, j’en profitai pour… » Elle rit sous cape, ironiquement. «  J’admirais cette marée de vies qu’est cette ville. »

Les éclats eux aussi semblaient si irréels, trop loin pour l’atteindre derrière la vitre grossièrement polie. Les iris émeraudes de la banshee se concentrèrent sur l’une d’entre elle, qui s’était mise à briller un peu plus, séchant de plus belle les lèvres de Rita. Une qui allait éclater doucement, qui partirait dans son sommeil, sans grand pompe, une qui n’allait guère poser de souci à la banshee. Elle l’observait même avec attendrissement, se rappelant enfin du penchant positif de sa malédiction, celui d’avoir le plus beau des kaléidoscopes collé à sa rétine.
Une idée folle traversa l’esprit embrumée de la chanteuse, la faisant presque trépigner sur ses petits pieds nus, craquant authentiquement le vieux parquet. Elle voulait emmener l’acrobate. Elle espérait pourvoir l’emporter voir un de ses secrets, non pas qu’il en voit la seule horreur que tout le monde en retire, mais qu’il aperçoive ne serait-ce qu’une infime partie de la magie que contient la fin des choses. Car, après tout, un dragon gardien, aussi jeune soit-il, se doit de contenir en lui la plus infinie des sagesse. Rita voulait en construire une partie.
Les voix s’étaient changées en chanson, qui portaient désormais son coeur transparent vers la main fine de Narcisse, au contact de laquelle elle frissonna de plaisir. Cette véritable douceur, c’en était presque jouissif.

«  Souhaitez-vous la voir de plus près ? On ne profite vraiment que de la mer qu’une fois plongé dedans.»  

Peut-être cherchait-elle toujours le défi, plaçant ses faibles espoirs de réussite en Narcisse. Après tous ces siècles de chevaliers de passage, la solution de sa malédiction se situait peut-être en ce gardien d’une nuitée argentée.

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MessageSujet: Re: Étoiles, qui d'en haut voyez valser les mondes - Part 1 [ft Rita Upset][1889] - Terminé   Étoiles, qui d'en haut voyez valser les mondes - Part 1 [ft Rita Upset][1889] - Terminé I_icon_minitimeDim 7 Juin - 18:35

«  Je suis le froid, mon cher. C’est à peine si je le ressens ou si j’y porte quelque peu attention. »

Narcisse se rendit soudain compte que la créature qui lui faisait face était un être des brumes, si fantomatique qu'on pouvait le croire immatériel. L'espace d'un instant, il se prit presque à douter. La silhouette vaporeuse de la cantatrice paraissait tout droit sortie d'un fantasme onirique, sa voix venue d'un monde autre que celui qu'il connaissait. Sa fatigue avait-elle été telle qu'il s'en était assoupi sans s'en rendre compte ? Rita était-elle le fruit de son imagination ensommeillée ? Un léger sourire amusé s'épanouit sur ses lèvres à cette idée. Pour qu'il pense ainsi, la fatigue devait encore imprégner son esprit : il ne dormait pas. Cette réalité, pourtant, était semblable à un rêve. Le sourire sardonique de son interlocutrice le happait dans son univers. Étonnement, il sentit sa force décupler en observant la face moqueuse de cette femme du brouillard.

« Je réparais deux trois petites choses dues pour demain matin, rien de spécial. Et puis, j’en profitai pour…J’admirais cette marée de vies qu’est cette ville. »  

Une marée. Narcisse prit le temps de savourer la métaphore au doux son de la voix chantante, de l'imaginer et de la tâter du bout des doigts. Il était vrai que Paris avait ce quelque chose d'immuable changement qui n'était pas si différent du va-et-viens des vagues contre une jetée. Et puis il y avait la foule perpétuelle qui agitait les murs neufs de la ville Lumières, les vies entrecroisées qui se rencontraient. L'acrobate ne pouvait qu'acquiescer. Désireux de voir ce que reflétaient les yeux émeraude de la chanteuse onirique, il se leva sur ses fines jambes et, resserrant l'étoffe sur lui, s'avança vers elle. Son regard améthyste parcourut la rue à la recherche de ce qu'elle percevait de si intense, de si beau pour faire pétiller les pierres précieuses qui entouraient sa pupille. La rue était vide à l'exception de quelques passants perdus dans l'immensité de la capitale et d'un mendiant qui n'avait pour toit que le ciel étoilé. Les cheminées s'étendaient à perte de vue et, au loin, on apercevait la tour Eiffel. Une pointe d'étonnement se glissa dans ses yeux alors qu'il se demandait ce que Rita voyait de si spécial à ce paysage urbain. Il était beau, certes, et sans doute poétique, mais il restait d'abord et avant tout d'une banalité confondante. Une nuit de plus dans Paris.

«  Souhaitez-vous la voir de plus près ? On ne profite vraiment que de la mer qu’une fois plongé dedans.»
 
Il sursauta presque. Se retournant vers Rita pour rencontrer son regard un bref instant, il cligna des paupières. L'hésitation s'empara de son coeur. Sortir à cette heure tardive semblait inconscient et peut-être un peu fou mais... C'était ça, ou laisser la brume lui filer entre les doigts et se retrouver livré à sa fatigue menaçante. Et puis il y avait toujours cette jolie métaphore qui lui convenait tant. Narcisse se sentait prêt pour un bain, en cette soirée. Il hocha donc lentement de la tête, encore pris d'une légère incertitude.

« Si vous le voulez... avec plaisir.»

Ses yeux cherchaient dans ceux de la chanteuse quelque chose qu'elle ne pouvait lui offrir: l'avenir. Il se posait tant de questions, parfois inutiles, ou peut-être même importunes, sur ce que la fin de soirée pouvait leur apporter qu'il avait l'impression de perdre pied. S'il n'arrivait pas à nager dans cet océan de vie, il allait devoir compter sur Rita pour le guider et, bien qu'il fît confiance à la jeune femme, cela le rendait soucieux. Compter sur les autres était une nouveauté qui lui venait de sa première année au cabaret et il éprouvait du mal à s'y habituer. Son regard se teinta de désarroi et il se cacha derrière un sourire embarrassé, baissant une fois de plus les yeux vers le sol.

« M'aiderez-vous à barboter ? J'aurais peur de me noyer, sans vous... »

La métaphore se voulait boutade, mais la voix de l'acrobate trahissait son manque de confiance en lui. Pourtant, il avait envie. Il voulait suivre les petits pas de Rita vers une destination qu'elle seule connaissait et sentir sa vie palpiter au creux de ses doigts, savoir qu'elle le tenait entier pour elle et qu'elle ne ferait rien de mal avec ce bien si précieux qu'il lui confiait.
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MessageSujet: Re: Étoiles, qui d'en haut voyez valser les mondes - Part 1 [ft Rita Upset][1889] - Terminé   Étoiles, qui d'en haut voyez valser les mondes - Part 1 [ft Rita Upset][1889] - Terminé I_icon_minitimeDim 7 Juin - 23:06

La banshee aurait tant désiré savoir ce quelle expression de mauve se cachait sous ces paupières, mi-closes et timides, mais dont les faibles pulsations de lumière parvenaient jusqu’aux mains liées de Narcisse et de Rita. La réponse de cette dernière ne se fit d’ailleurs pas attendre, celle-ci balançant son corps d’avant en arrière, incapable de demeurer en place.

- On ne nage pas dans cette mer, on y vole.

La mélodie qui déroulait dans sa tête se fit de plus en plus insistante, les tambours incitant ses pieds nus à danser au sein de la mer de lumières, la harpe à caresser tendrement les bras de Narcisse, avant d’agripper son poignet et de l’emmener hors de l’atelier, de plus en plus extatique. Elle suivait distraitement l’éclat mourant, descendant les marches en bondissant, traversant l’imposant hall plongé dans l’obscurité et accéda enfin à l’extérieur, libre et enfumé. Le fond de l’air de ce début d’été les mettaient tous les deux en aise, malgré l’heure avancée, et, toujours pieds nus, Rita continua sa course au coeur de la ville. Ses sauts minuscules n’égalisaient guère ceux de Narcisse, mais son allure rattrapait largement son allonge. Et, fatalement, en échappant aux ruelles étroites entourées de lueurs endormies, les deux compagnons finirent sur une place, inondée par la lumière astrale.

Rita hésita un moment, avant de traverser la limite entre ombre et  espace sélénite, marchant avec précaution sur les dalles de pierre. Elle se retourna et lança un sourire tendu à Narcisse, jugea le terrain jusqu’à la prochaine ruelle couverte, puis s’élança : de chaque bond s’élevait un nuage de vapeur froide, les pieds nus réticents à toucher les pavés chauffés par l’astre de la nuit, et, à chaque saut, la banshee se faisait de plus en plus légère, démontrant de son pouvoir à la Lune et à la seule personne aux yeux grands ouverts, son regard mauve observant Rita. Cette dernière ne put, dans sa danse improvisée, constater l’expression nette des yeux de Narcisse. Pourtant elle l’enjoignit, une fois à couvert de Sélénée, les yeux rouges et les cheveux blancs comme neige, de faire de même et d’offrir à l’astre sa plus belle démonstration.  

Ses attributs humains revinrent peu de temps après, au cours de cette représentation absolument magnifique que Narcisse put lui offrir. La lune elle-même eut du mal à mettre son corps d’une grâce incroyable, se mouvant dans les airs d’une mobilité si aisée. Etonnamment, la chanson dans la tête de Rita s’accordait avec perfection aux bonds magnifiques du dragon, qui s’envolait avec les vagues de vie, frôlant la surface presque imprudemment et enroulant la brume de la banshee en un nuage grisâtre.

Une fois les deux êtres réunis dans l’ombre, Rita prit tendrement la main de Narcisse, rendue légèrement moite par l’effort. Puis ils reprirent la route, cette fois-ci en marchant doucement, les grands pas de Narcisse forçant Rita à doubler l’allure des siens. La jeune femme suivait distraitement la lueur en fin de vie, profitant d’abord de la présence si plaisante du dragonnet, suivant intentionnellement un chemin précis dans le dédale de rues pour lequel Paris est si bien connue. Et bien que du temps avait coulé sous les ponts depuis la dernière exploration de la ville par la banshee, celle-ci se souvenait bien du dernier petit endroit de verdure qui avait croisé son chemin: le square Paul Langevin. Ils arrivèrent devant des grilles fermées, mais, armée d’une détermination sans faille, Rita remonta le jupon et demanda à Narcisse de lui faire la courte échelle, afin de passer par dessus la seule partie murée du square. Malgré les réticences de celui-ci, Rita parvint à le convaincre et à le tirer également sur le muret, échangeant un sourire complice avant d’en sauter.
Ainsi, deux ombres blanches atterrirent au centre du jardin, dont les fleurs multiples étaient enfin exemptes de la chaleur estivale. Le parc était abrité de la Lune par le bâtiment qu’il longeait, ce qui permit à Rita de s’élancer sans peur au coeur des arbres, observant autour d’elle. Pas une vie en vue, sinon celle de Narcisse.  

- Dites moi, mon cher? Je crois que vous n’en aviez pas entendu beaucoup tout à l’heure, sous la mansarde. Et si nous réglions cela ?

Tranquillement, Rita se mit dos à Narcisse, entrecroisa les doigts et posa ses mains enlacées contre son ventre, prenant une profonde inspiration et de fredonner une vieille berceuse gaélique, laissant le soin au dragon d’écouter les mots déversés à la fois dans le monde réel et dans l’éther.

"Oh hush-a-bye, my little baby Hush, my little baby, hush
Oh hush-a-bye, my little baby
My own little baby will go to sleep"


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