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Neige

Cabaret du Lost Paradise - Forum RPG

Forum RPG fantastique - Au cœur de Paris, durant la fin du XIXe siècle, un cabaret est au centre de toutes les discussions. Lycanthropes, vampires, démons, gorgones… Des employés peu communs pour un public scandaleusement humain.
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 Manche n°2 : Aller simple

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AuteurMessage
Edward White
l Dans l'ombre du loup l BIG BOSS l
Edward White

Messages : 2449
Date d'inscription : 21/12/2010

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MessageSujet: Manche n°2 : Aller simple   Manche n°2 : Aller simple I_icon_minitimeDim 7 Aoû - 21:49

Pousse toi un peu c’est mon tour, grommela Edward après un coup de coude bien placé dans les côtes de son homologue.
Nan.
On avait dit dix minutes pas plus !
Ça c’était avant que tu perdes à « papier caillou ciseaux ».
Tu as triché !
C’est toi qui a commencé en inventant le puits.
Ton emploi d’une « comète » a été beaucoup moins radicale, c’est vrai… Pousse toi !
Nan.
Tu l’auras cherché.
Hey ! Mais… Aïe ! Ah tu le prends com’ fa ?!
Je vais aplatir ta face d’idiot pour le quart d’heure à venir !
Tu feux dire… Ta face d’idiot ?
Mgn…
Est-ce que vous voulez bien vous taire ?!

L’écho de la voix de Miss Moon résonnait encore entre les parois humides des égouts lorsqu’elle releva la tête en direction des deux intenables hurluberlus qui lui faisaient face. Malgré son masque, qu’elle avait refusé de retirer, il n’était pas complexe pour les garçons de discerner le regard assassin dont ils étaient les cibles. Et si Eduard tenta un sourire pour se faire pardonner, son comparse profita sans scrupule de cette distraction pour le repousser et retrouver l’air frais d’une petite bouche d’aération afin d’apaiser son odorat lupin.
Cela faisait près de vingt-quatre heures qu’ils se tenaient à l’abri dans le sous-sol parisien. Un temps exagérément long au regard du loup blanc, dont la maigre patience s’était envolée, remplacée par une humeur massacrante. Toisant la jeune femme d’un regard glacial, il reprit en fixant avec dépit la petite boîte de métal qu’elle tournait et retournait sans cesse entre ses doigts fins depuis quelques temps déjà :

Tu crois peut-être que tu seras touchée par le divin savoir mécanique si on la boucle ?
On ne le saura que si tu la mets en veilleuse.
On aurait plus vite fait de sortir d’ici ! On s’échappe par la première bouche d’égout et…
Et on se fera repérer par les patrouilleurs de M4 qui rappliqueront aussitôt.
Pour se prendre une bonne raclée !
Tu n’as même pas su allumer un briquet !
Moi j’ai réussi !
Oh ça va hein ! Grommela Edward en éloignant son double qui tentait de profiter directement de l’aération. Il suffira de lui tendre une embuscade. Tout plutôt que rester les bras croisés dans un tunnel qui empeste à te regarder bidouiller ce… Je ne sais même pas ce que tu essaies de faire !
Mais quel ronchon ! Il faut que je te gratte derrière les oreilles pour que tu arrêtes de râler ?
Qu… Mais non ! S’empourpra-t-il. Je veux seulement sortir d’ici !

À son hésitation, Moon se détacha de l’objet qu’elle tenait et l’observa calmement. Un sourire perla au coin de ses lèvres, achevant d’agacer son interlocuteur qui se renfrogna, détournant le regard et croisant les bras sur son buste. La belle se garda bien de toute remarque supplémentaire et s’en retourna à son petit bricolage. À peine deux minutes plus tard, elle s’exclama :

Voilà ! Ça devrait fonctionner. Pousse toi un peu Edward.
Ah non ! J’ai encore le droit à cinq minutes.
S’il te plait.

Le concerné roula des yeux, mais finit par acquiescer. Se redressant autant que le permettait sa haute silhouette, il n'échappa pas au choc désagréable de sa tête contre un tuyau de canalisation. Toutes les injures du monde se bousculèrent à ses lèvres, arrachant un léger rire à Miss Moon qui s’accroupit devant la bouche d’aération sous le regard curieux des deux lycanthropes.
Déposant tranquillement la petite boîte au sol, elle en actionna l’interrupteur. Aussitôt un grésillement désagréable s’éleva. Edward ne put tenir sa langue et il abandonna d’un ton railleur :

Excuse moi d’avoir douté de tes compétences ! Tu as réussi à rendre l’endroit encore plus désagréable…
Mais laisse moi une minute !

D’un doigté minutieux, Moon déplia une longue tige de fer, reliée au cube d’acier. Elle la dirigea vers la bouche d’air avant de faire pivoter lentement une petite molette sur la droite de l’appareil. Rapidement l’intensité du crépitement diminua pour laisser place à des paroles entrecoupées mais bel et bien humaines. Edward ouvrit de grands yeux surpris, quand son double comprit enfin ce qu’ils avaient davant eux :

Une radio !
Une… Quoi ?
Une radio. C’est une vieille invention qui doit avoir plus de cinquante ans au moins. Ça permet d’entendre des gens à distance.
Comme un téléphone ?
Presque. On peut aussi y écouter de la musique, des conteurs ou les informations de la ville… Oh !
Et oui ! Avec ça on va pouvoir se tenir au courant de ce qui se passe à la capitale, sans finir sous une pluie de chaussettes. Avec quelques ajustements…

La jeune femme modifia la position de l’antenne, fit encore pivoter de quelques degrés la roulette et enfin, un son clair et net se propagea entre les galeries :

…maaaaaaaaaais ~♪ Pour le plaisiiiiiiiiiiiir ! De…
LA VIEla vie LA VIE la vie LA VIE D'AUJOURD'HUIIIIIII
LA VIE DE MA VIE QUI VIT TOUTE SA VIIIIIIE
LA VIEla vie LA VIE la vie LA VIE D'AUJOURD'HUIIIIIII
LA VIE DE TA VIE QUI VIT POUR TA VIIIIIIIIIE

Euh…
C’est…
Pas vraiment ce à quoi je m’attendais…
C’était « La Vie » votre tube du moment ! Tout de suite un rappel de l’information principale de la journée par Mademoiselle Finette et Bleuarg son assistant. Mais d’abord, la météo !

Une moue boudeuse retroussa les lèvres le Moon qui finit par s’asseoir. Les deux Légendaires l’imitèrent et s’installèrent à ses côtés, la taquinant sans pitié :

C’est bien aussi la météo.
Surtout dans les égouts. C’est indispensable.
Chut.
Tu crois qu’ils donnent aussi les horaires pour les pics d’odeurs infectes ?
Je ne serais pas contre un petit vent du nord.
Ce que vous m’agacez…
Nous ?
C’est pas notre genre pourtant !
Ah ! Taisez vous ça commence.

Un silence religieux s’imposa sur le petit trio dont les regards ne quittaient plus la radio. Un jingle musical plus tard, une voix féminine s’éleva de la petite boîte, suivi d’un timbre grave :

Bonjour ! Et merci d’écouter notre radio !
Bonjour.
Tout de suite l’information du jour. La vague de folie robotique qui a touché la capitale ces derniers jours semble enfin terminée.
Les robots sont sages maintenant.
Tout à fait mon cher Bleuarg ! Et il semblerait que la raison de leur dysfonctionnement ait été découverte. L’arrivée d’étrangers dans la capitale en serait la cause.
Les étrangers ont cassés les robots.
Ils ne l’ont pas fait exprès. Du moins je le crois… Mais ! Afin que tout rentre dans l’ordre, un groupe de grands savants s’est proposé de renvoyer tout ce petit monde chez eux. Et tout cela gratuitement.
Oh.
Ils suffit pour cela que tous les concernés rejoignent leur laboratoire et ils pourront retrouver leur maison. C’est gentil n’est-ce pas Bleuarg ?
Très gentil.
Seulement, pour des raisons gouvernementales, le lieu de travail de ces braves scientifiques doit rester secret. Chaque étranger se verra donc confier un guide qui le conduira à bon port dans le moyen de transport adéquat !
Pour garder le secret.
Oui mon cher Bleuarg. D’ailleurs si certains étrangers nous écoutent, nous vous recommandons de ne pas bouger jusqu’à ce que votre guide vous ait retrouvé. Ce sont des gens très compétents qui sauront vous repérer n’importe où !
Ne pas bouger.
Même dans les égouts ? interrogea machinalement Edward, peu convaincu.
Chut !
À présent mettons le cap sur le fantastique défilé de Kaito Hamazaki. Encore une fois ses tenues ont illuminé le Champs de Mars et…

Moon coupa la radio et leva la tête vers Edward, visiblement dubitatif. Son homologue semblait tout aussi perplexe et la demoiselle devait admettre que, si elle avait à chercher quelqu’un à Paris, elle ne débuterait certainement pas dans les sous-sols de la capitale.

Vu qu’il n’y a plus de danger, on pourrait juste remonter à la prochaine bouche d’égout ?
Validé ! S’enjoua Edward, trop heureux de pouvoir retrouver l’air pollué de l’extérieur.

Il bondit sur ses pieds en un rien de temps, mais se figea aussitôt. Un bruit de pas résonna non loin d’eux. À l'intersection voisine, une lueur se dessina soudainement sur les murs détrempés du tunnel. Quelqu’un approchait.



Manche n°2 ouverte !


Ça y est vous êtes bien familiarisés avec votre nouveau monde ! En même temps, vous n'avez pas eu vraiment le choix.

Mais fini de jouer maintenant, il va falloir vous inquiéter de savoir comment rentrer chez vous. Apparemment, des scientifiques pourraient vous renvoyer dans votre univers. Une bonne nouvelle non ? Mais pour cela, il va falloir rejoindre leur mystérieux laboratoire guidé par des personnages qui ne vous sont peut-être pas tout à fait inconnus.

Regardez ce qui vous attend !


N'oubliez pas de faire défiler sur la droite, il n'y a pas qu'Ashton qui écope d'un guide !

Le déroulement de la manche est très simple : chaque participant doit réaliser un post de RP (et un seul) dans lequel, guidé par un personnage imposé, vous allez devoir voyager pour atteindre un laboratoire qui vous promet de vous renvoyer chez vous.

  • Le calme est revenu à Paris. Votre robot semble ne plus souhaiter votre mort. Nous vous laissons le choix de le conserver ou non pour la suite de vos aventures. Même de le garder en poursuivant si cela vous amuse.

  • Qu'importe la manière, vous avez été mis au courant de la proposition des scientifiques. Presse, radio, hauts-parleurs de la ville… Débrouillez vous pour que vos personnages apprennent qu'une solution leur est proposée pour rentrer au bercail.

  • Vous êtes libre de faire s'écouler autant de temps que vous le souhaitez entre le moment où vous vous êtes abrité et celui ou vous apprendrez que vous allez pourvoir quitter cet univers.

  • Comme expliqué dans le post, le lieu où se trouve le laboratoire est tenu secret. Pour y aller vous n'aurez donc pas d'autre choix que de vous fier (et de supporter) le guide qui vous a été confié. À vous de décider ensuite si vous souhaitez rester avec vos doubles ou non, bien qu'on vous le conseille.

  • Une seule chose est certaine toutefois, c'est que le lieu de travail des scientifiques se situe loin de Paris. Vous allez donc devoir vous fournir un moyen de transport pour l'atteindre le plus rapidement possible. Transport « steampunk » évidemment. Qu'il soit terrestre, aérien, fluvial ou même sous-terrain, imaginez ce que vous voulez ! (Vous pouvez même en prendre plusieurs si le cœur vous en dit.) Vos guides peuvent être de précieuses ressources sur ce point.

  • Justement, concernant ces guides. Vous l'avez remarqué, la ligne « ennemi » de leur présentation risque de vous poser quelques problèmes. Ces trouble-fêtes ne sont pas là pour vous mettre des bâtons dans les roues, mais plutôt pour gêner votre guide et comme vous avez absolument besoin de lui… Lui donner un petit coup de pouce sera peut-être nécessaire.

  • Cette manche s'arrêtera lorsque vous serez arrivé à bon port. Tous les rôlistes se retrouveront au même endroit dans l'entrée de l'immense laboratoire. L'accès se fera comme vous le souhaitez ! Ascenseur, plateforme volante, vaisseaux, jet-pack… Faites vous plaisir ! Pour vous aider et afin qu'il n'y ait pas trop d'incohérences sur la fin, voici à quoi il ressemblera :

    Lieu d'arrivée:

  • C'est le hasard qui a fait le choix pour vous, une liste de plusieurs guides ayant été associée à l'ordre donné par les numéros choisis. N'hésitez pas à nous demander si vous avez des questions à ce sujet.

  • Amusez-vous bien avec ce second rond ! Même ceux n'ayant pas encore posté leur premier post peuvent participer. Toutefois n'oubliez pas de compléter la première manche histoire que le lecteur ne soit pas perdu o/


Vous posterez à la suite ce message, sans ordre particulier et vous avez jusqu'au mercredi 17 août (au soir) pour vous familiariser à ce nouvel univers !

N'hésitez pas à contacter le staff si un élément vous semble flou, on vous répondra le plus vite possible !

Un voyage à la mécanique bien huilée !
https://lostparadise.forumgratuit.org
Lotte Hochvogel
Lotte Hochvogel

Messages : 47
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MessageSujet: Re: Manche n°2 : Aller simple   Manche n°2 : Aller simple I_icon_minitimeMer 17 Aoû - 12:23

En haut des toits de la capitale, de douces vapeurs de thé s'échappaient de tasses en porcelaine posées sur une table installée discrètement près d'une cheminée heureusement éteinte. Deux petites filles aux cheveux blonds se tenaient de chaque côté, les doigts fins glissés dans la hanse de la petite porcelaine, le regard plongé vers l'horizon vaporeux qui s'étendait à perte de vue autour de la célèbre Tour Eiffel qui elle était toujours facilement reconnaissable. Sans un mot, les deux Lotte sirotèrent en même temps leur thé aux fruits rouges avant de reposer leur tasse sur la coupelle prévue à cet effet. L'une leva la tête vers la droite, tandis que l'autre leva la sienne vers la gauche, comme à la recherche de quelqu'un ou de quelque chose. Ce fut la Lotte de ce nouvel univers qui brisa le silence en premier.

- Ce fameux guide prend son temps. Nous devrions redescendre pour qu'il nous trouve plus rapidement.
- Oui, je pensais la même chose. C'était finalement trop audacieux de croire que cette personne serait suffisamment compétente pour nous trouver ici.
- Ce ne sera… pas… la peine !

De derrière la cheminée s'échappa une voix féminine qui attira l'attention des deux petites demoiselles. Celles-ci, sans broncher, tournèrent la tête vers le haut de la cheminée et y découvrirent une grande silhouette fine en train de se hisser au sommet du conduit. Celle-ci exécuta alors un prodigieux saut périlleux en avant et atterrit parfaitement sur le rebord du toit, face à la table à laquelle les deux Lotte étaient installées. Les bras levés, telle une grande gymnaste, elle resta ainsi quelques secondes avant de se rapprocher des deux demoiselles qui elles n'avaient toujours pas bougé. Affublée d'un chapeau clair et d'imposantes lunettes aux verres rouges, la présumée guide (puisqu'il s'agissait d'une femme) profita de ses quelques pas pour souligner sa longue silhouette fine et musclée, accompagnée d'une longue queue de cheval qui pendait avec grâce et vigueur au milieu de son dos. Vêtue d'un pantalon suffisamment proche de son corps pour dessiner ses longues jambes agiles et d'un corset qui cette fois-ci mettait surtout en valeur ses attributs féminins, la jeune femme adressa un sourire pulpeux aux deux petites filles qui se contentèrent de répondre par un haussement de sourcil dubitatif.

- Mesdemoiselles Lotte je présume ?
- …
- …
- Wilhelmina Harker, envoyée par le gouvernement pour vous ramener dans votre monde d'origine. Enchantée. Vous pouvez m'appeler Mina pour…
- Mina ?

Les deux Lotte sourirent et s'échangèrent un regard étonnement complice.

- J'ai connu une Mina, elle était idiote.
- C'est un nom ridicule, je refuse de le prononcer en m'adressant à vous. Bien, nous devons vous suivre donc ? Wil-hel-mi-na.

Les bibliothécaires sautèrent de leur chaise et frottèrent les pans de leur robe avant de claquer des doigts, faisant disparaître le petit mobilier et la porcelaine qui l'accompagnait dans des volutes de fumée pourpre. La directrice et son double levèrent les yeux jusqu'au visage de la guide qui les dépassait de plusieurs têtes. La jeune femme, légèrement déstabilisée, rajusta son chapeau et se tourna vers la Tour Eiffel, se disant sans doute qu'elle n'avait pas tiré le bon lot avec ces deux là, puis s'apprêta à s'adresser aux Lotte avant de se rendre compte qu'elles avaient déjà disparu. Leurs voix se firent entendre beaucoup plus bas, dans la ruelle qui longeait la maison sur laquelle elles buvaient le thé il y a quelques minutes, appuyées par un signe de la main d'une Lotte tandis que l'autre ne se gênait pas pour cacher son agacement. Miss Harker soupira et exécuta une suite de sauts acrobatiques pour rejoindre les Lotte.

- Pour nous rendre à notre destination, il faut sortir de la capitale. J'ai prévu un aéronef qui…
- Nous passerons par la Curia.
- Ce sera plus rapide en effet.

Après avoir complètement ignoré les propos du guide, l'une des Lotte s'engagea dans une ruelle adjacente et d'un geste rapide de la main, débloqua une ouverture entre les briques maladroitement assemblées dissimulées derrière plusieurs planches de bois rongé. Prête à s'y engager, la petite fille s'avança mais fit rapidement un pas en arrière, surprise par les murs de briques qui se refermèrent aussitôt. Déconcertée, elle répéta le même geste et ouvrit à nouveau le passage qui disparut immédiatement.

- Qu'est-ce que…
- Oh ! Qu'est-ce donc ?

Harker s'approcha de Lotte et se pencha pour attraper une drôle de petite bestiole qui agitait ses étranges petites pattes mécaniques pour se remettre debout. La jeune femme recouvrit la créature de ses mains gantées et la leva au niveau de son visage avant de la dévoiler aux deux petites filles qui restaient toujours silencieuses. Sur la paume de Wilhelmina se tenait un petit appareil photo, identique à ceux qui avait envahi la bibliothèque de Minerve. L'engin oscilla, confus, puis orienta son objectif vers les trois visages qui l'observaient. Le robot tressaillit alors en apercevant l'une des Lotte et se tourna, révélant un petit papier plié attaché à son dos. La deuxième directrice tendit la main et déplia le papier avant de le lire à haute voix :

- Les robots ont complètement envahi la Curia, le système de portails est temporairement en maintenance… Ils nous souhaitent bonne chance, et Ingrid a dessiné un cœur.
- Il aurait fallut s'y attendre.
- Mais c'est un schéma anatomique du cœur non ?
- Oui, c'est comme ça qu'elle aime les dessiner.
- Je vois…

Un léger silence s'installa parmi les trois demoiselles, jusqu'à ce que les deux plus petites soupirèrent ensemble. La plus grande, elle, se redressa, félicita le petit robot pour avoir accompli sa mission et se tourna vers les deux Simurgh qui n'étaient vraiment pas ravies de la nouvelle.

- Ne vous inquiétez pas, je connais une méthode pour quitter Paris et aller au point de rendez-vous ! Ce petit robot désire nous suivre, pourquoi ne pas lui donner un petit nom ?
- …
- …
- Très bien… Dans ce cas, pourquoi pas Abraham ?
- Si vous voulez.
- Peu importe.

Satisfaite du prénom de son nouveau compagnon, Harker le posa sur son épaule et sortit de la ruelle, suivie par les deux demoiselles dont elle avait la responsabilité, qui n'étaient pas du tout enchantées par les perspectives qu'offraient ce nouveau périple. Enfin dans son rôle de guide, au grand malheur des Lotte qui n'aimaient vraiment pas suivre les directives de quelqu'un d'autre, Miss Harker leva la tête et s'engagea dans la rue principale, où cabs à vapeur et vélos grande vitesse côtoyaient les passants et les robots. Les deux petites filles restèrent dans l'ombre qu'offrait la ruelle,  réticentes à sortir au grand jour et à côtoyer la multitude de passants qui marchaient devant elles sans y prendre quelconque attention. Harker, d'un geste décidé et clair, fit signe à un cab tiré par un cheval mécanique qui s'arrêta immédiatement à ses pieds. La jeune femme caressa la tête de « l'animal » qui fit ouvrir la porte de la voiture qu'il tirait. Whilelmina invita les deux directrices à entrer, ce qu'elles firent non sans une once d'agacement, puis les suivit avant de fermer la porte dans un jet de vapeur. L'engin se remit en marche et rejoignit la multitude de vaisseaux et d'autres étrangetés mécaniques qui foulaient le pavé à toute vitesse.

- Nous devons nous diriger vers la Seine, j'y connais quelqu'un qui pourra nous donner un aéronef nous permettant de quitter Paris très rapidement. Fit Harker en tapotant l'objectif d'Abraham qui semblait l'avoir complètement adoptée. Les deux Lotte, toujours aussi mal à l'aise avec autant de mécanique autour d'elles, ne dirent rien et se contentèrent de la regarder faire. Vous vous demandez comment je communique avec les robots n'est-ce pas ?
- Non.
- Non.
- Et bien je vais vous le dire. En réalité je-

Un tremblement ébranla soudainement la carriole qui s'arrêta violemment, secouant les trois passagères qui durent s'accrocher à leur siège pour ne pas se faire projeter. Tandis que les deux Lotte en profitèrent pour râler encore un peu : « Voilà pourquoi il ne faut pas compter sur la technologie », « Exactement », Harker ouvrit la porte à l'aide d'un coup de pied franc et exécuta une roulade vigoureuse pour sortir du véhicule. Un genou au sol, elle leva la tête et plissa les yeux, l'air déterminé. Les deux têtes blondes se penchèrent à leur tour pour voir quelle était la cause de l'accident, mais contre toute attente, le cheval mécanique n'avait pas heurté quoi que ce soit. C'était une personne qui se tenait au milieu de la route qui l'avait forcé à s'arrêter, car visiblement ces engins étaient réglés pour s'arrêter au moindre obstacle afin d'empêcher quelconque accident malencontreux.

Sur les pavés se tenait, les bras croisés, une femme semblable à Harker, le visage dissimulé par un chapeau et des lèvres pulpeuses dessinant un charmant sourire carnassier. Whilelmina se releva et se plaça devant les deux Lotte qui étaient descendues du cab, comme pour les protéger, avant de s'adresser à la mystérieuse inconnue qui se plaça face à elle, toujours les bras croisés.

- Lucy… Je n'ai pas le temps de jouer avec toi, j'ai une mission.
- Je suis au courant, fit la concernée d'un air malicieux. Elle se pencha nonchalamment sur le côté pour jeter un œil aux deux directrices qui n'étaient en aucun cas impressionnées, ou en tout cas étaient un peu plus préoccupées par le chien à roulette qui venait de passer près d'elles. C'est donc elles que tu dois escorter ? Des petites filles ? À ces mots, les deux « petites filles » tournèrent la tête, un sourcil levé. Je pensais que ces histoires de double étaient fausses mais je me suis trompée.
- Je te déconseille de te mettre en travers de mon chemin. C'est une mission de haute importance.
- Ah ? Ce serait une erreur de me sous-estimer ma chère Whilelmina.

À ses mots, Lucy glissa sa main au niveau de sa taille et sortit une arme qu'elle pointa en direction de Harker qui balaya le bras de sa rivale à l'aide d'un coup de pied et brandit à son tour deux armes qui s'apparentaient à des revolver, pointées sur la jeune femme qui venait de faire un pas en arrière. Celle-ci passa sa main dans ses cheveux, toujours son sourire insolent sur le visage, puis pointa son arme vers Harker qui ne bougeait pas.

- J'aurai dû avoir cette mission !
- Ce ne sont pas mes affaires.

Ladite Lucy bondit brusquement en direction de sa rivale qui esquiva par une roulade sur le côté avant de sauter vers elle, le corps entièrement gainé comme si elle se jetait dans le vide. Les deux jeunes femmes continuèrent à se poursuivre bêtement de cette façon pendant plusieurs minutes, à enchaîner les roulades et les sauts prodigieusement inutiles dans un but qui resta assez obscur pour les deux Lotte qui se contentaient de regarder les deux acrobates enchaîner les attaques dans le vide. Ce fut la directrice de l'autre monde qui décida d'y mettre fin.

- Bon ça suffit, fit-elle, joignant à sa parole un geste nonchalant de la main qui projeta la certaine Lucy de nombreux mètres plus loin dans la Seine. Miss Harker se redressa alors et rangea ses armes à sa ceinture avant de passer sa main dans ses cheveux noirs, satisfaite de sa victoire. Les deux Lotte levèrent les yeux au ciel et rejoignirent leur guide qui leur indiqua que là où elle désirait se rendre n'était finalement pas si éloigné d'ici. Sur le chemin, et malgré le refus des deux Lotte, Harker raconta pourquoi cette Lucy Westenra désirait lui mettre des bâtons dans les roues. C'était une histoire bête d'amour, d'aventure et de vampires, une histoire racontée avec beaucoup de classe et de volonté, mais qui n'intéressait en rien les deux Simurgh qui n'avaient qu'une envie, terminer au plus vite ce voyage au cœur de Paris. Ce fut donc après plusieurs minutes de marche, ponctuées par les récits des aventures de Harker qui s'était reconvertie en chasseuse de trésor, et les cliquetis longuets d'Abraham qui prenait en photo tout ce qui lui tombait sous la main, que le petit groupe arriva enfin au pied d'un pont qui traversait le fleuve de la capitale.

- L'endroit est ici, mais l'entrée ne se fait que par en dessous. Nous devons plonger.
Instant de silence.
- Pardon ?
- Nous ne-
- Pas le temps de tergiverser, nous n'avons pas le choix.

Harker contempla l'horizon quelques secondes avec un regard plein de conviction et de certitude avant qu'elle ne plonge la tête la première dans la Seine et y disparaisse à l'aide d'une brasse coulée des plus convaincantes. Abraham qui sauta avant de tomber à l'eau, resta à distance, de crainte de se faire mouiller. L'une des Lotte soupira et prit l'objet dans ses mains avant de dresser, tout comme son double, un champ de force autour de son corps afin d'entrer dans le fleuve sans crainte. Les deux petites filles disparurent et s'enfoncèrent doucement dans les profondeurs du fleuve. Au fond, Harker nageait toujours avec sa brasse impeccable et son regard plein de conviction, tandis qu'elle ouvrait une trappe ingénieusement dissimulée dans le lit du fleuve. La jeune femme s'y engagea, suivie par les deux Lotte qui suivirent sans un mot, mais très clairement agacées par la tournure que prenaient les évènements.

Par un miracle encore difficile à saisir, autant pour une Lotte que pour l'autre, Whilelmina parvint à retenir sa respiration suffisamment longtemps pour traverser le tunnel submergé et actionner une poignée encastrée dans le mur qui fit finalement évacuer l'eau de là où le groupe se trouvait. À peine essoufflée, Miss Harker essora sa tresse et secoua rapidement son chapeau avant de mettre ses mains sur ses hanches en attendant que la porte mécanique qui lui faisait face ne s'ouvre.

- Où sommes-nous exactement Harker ?
- Dans l'un des QG de l'organisation de D.R.A.C. Profitez-en pour vous sécher, je vais préparer l'aéronef.
- Nous ne sommes pas mouillées… Cette femme m'exaspère.
- Moi aussi. Je ne saurai dire pourquoi.

Harker elle était déjà partie, toujours avec sa démarche assurée et son esprit inutilement à l'affût, constamment sur ses gardes. Les deux Lotte soupirèrent et firent apparaître une chaise pour chacune d'entre elles ainsi qu'une petite table pour patienter le temps que la drôle de dame ne termine ses préparatifs. Autour d'elles, une multitude de mystérieux vaisseaux dont elles ne savaient rien était entreposée, tous visiblement prêts à décoller. Ennuyées et aucunement impressionnées par ces engins dont elles préféraient rester à distance, toutes deux avaient leur tête appuyée sur leur main, jouant du bout du doigt avec Abraham qui tournicotait sur la table pour jouer avec elle.

- Je me demande dans quel état je vais retrouver ma bibliothèque.
- Sans doute un état semblable à celui dans lequel tu l'as laissée.

Les deux directrices s'échangèrent un regard noir tandis que l'air commençait à dangereusement tournoyer autour d'elles, mais heureusement une intervention extérieure vint faire redescendre la pression magique. Le canon de son arme posé derrière le crâne d'une des Lotte, Lucy avança son visage dans la lumière et adressa son habituel sourire carnassier à la Lotte qui lui faisait face, qui elle ne bronchait pas, tout comme son double, aucunement surprise par l'arrivée de la rivale de Harker, dont les cheveux étaient encore mouillés après son passage dans la Seine. La jeune femme, certaine d'avoir le dessus, abattit son poing sur la table et demanda où se trouvait Whilelmina. Mais aucune des deux petites filles ne répondit, ce fut plutôt le bruit des balles tirées par la Whilelmina en question qui vint surprendre Lucy, qui s'écarta de ses otages avec un saut périlleux arrière pour atterrir sur la coque de l'aéronef qui se trouvait derrière la table et les chaises des deux Hochvogel. À l'autre bout de l'immense salle courait Harker, les deux bras tendus avec une arme dans chacune des mains, tirant à intervalles réguliers des balles qui ricochèrent dans un son métallique sur la carlingue des appareils entreposés. Les deux Lotte, elles, restèrent bien installées avec Abraham, un champ de force autour d'elles pour repousser les malencontreuses balles fuyardes. Lucy finit par se placer sur le sommet d'un des plus grands aéronefs et pointa du doigt sa rivale, toujours au sol et ses bras tendus.

- Tu ne peux rien contre moi Harker ! Je vais te montrer cette force que m'a conférée D.R.A.C !

À ses mots, la jeune femme sortit d'une de ses bottes en cuir une petite fiole contenant un liquide rouge semblable à du sang. Elle l'ouvrit et l'engloutit à toute vitesse, malgré les avertissements de Miss Harker. Le corps de la rivale sembla alors pris d'une violente convulsion, lorsque soudain un puissant cri vint trancher l'imposant silence qui régnait dans la gare d'aéronefs. Comme possédée par une nouvelle force, Lucy se précipita sur Harker qui esquiva avec son habituelle roulade parfaitement maîtrisée, mais fut de nouveau attaquée sans cette fois-ci avoir le temps de riposter. Les iris rouges et les canines avec quelques centimètres de plus, celle qui semblait avoir pris l'apparence et la force des vampires tournoya autour de son adversaire qui, malgré son excellent entraînement, ne parvint pas à faire face à l'incroyable vitesse de Miss Westenra. Celle-ci continuait à pousser ses cris stridents et s'appuya sur la coque d'un vaisseau pour se projeter sur son ennemie afin d'asséner le coup fatal, mais fut brutalement interrompue par l'une des Lotte qui venait d'apparaître juste devant sa guide.

La main levée, elle freina immédiatement la vampire dans sa course et l'immobilisa en l'enveloppant d'une lumière bleutée, avant de l'envoyer voler de la même manière que la première fois à l'autre bout de l'immense garage. Lotte frotta ses mains et se tourna vers Harker qui rangea ses deux armes à sa ceinture et repassa sa tresse par dessus son épaule d'un geste de la tête. La deuxième Lotte les rejoignit et jeta un œil dans la direction dans laquelle Lucy avait disparu, visiblement agacée par la détermination de cette drôle de rivale.

- Nous ferions mieux de ne pas traîner. Nous pouvons y aller ?
- Oui, nous pouvons décoller.
- Décoller ? Mais…

Harker s'éloigna des deux Lotte et fit signe de la main de la suivre avant d'exécuter une série de sauts périlleux inutiles pour rejoindre l'aéronef garé un peu plus loin. Les Simurgh haussèrent les épaules et soupirèrent avant d'emboîter le pas, se demandant si leur guide allait vraiment pouvoir les amener à bon port. Non, elles n'avaient toujours pas comprit ce qu'était réellement un aéronef. Après une série de salto, Miss Harker s'arrêta prêt d'un vaisseau recouvert d'un grand drap gris et arma ses deux revolver à vapeur avant de jeter un œil à droite et à gauche pour des raisons que l'on ignore toujours. Voyant que les deux petites filles l'avaient rejointe, elle empoigna un pan du drap et le tira vers le sol, dévoilant un imposant engin en forme de fusée, orné d'une imposante paire d'ailes semblables à celles de chauve-souris, et d'une multitude de boulons, rouages et tuyaux en tout genre. Le vaisseau était si complexe par son apparence qu'aucune des Lotte ne sut vraiment quoi dire, et si aucune ne montrait quelconque trace de surprise, à l'intérieur aucune des deux n'espérait monter dedans et ne savait vraiment comment cette chose pouvait vraiment voler. Harker tapa du doigt une partie de la carlingue, déclenchant une série de mécanismes qui, dans un puissant jet de vapeur, fit ouvrir une porte sur le flanc de l'appareil.

- Vous venez ? Fit Harker en pénétrant dans l'engin.
- Nous devrions peut-être ressayer de passer par la Curia.
- Je crois que c'est peine perdu…

En effet la guide s'était déjà installée dans le cockpit et enclenchait une série de boutons et de manettes pour démarrer l'aéronef. Les deux Lotte soupirèrent et dissimulèrent leur crainte tant bien que mal avant d'entrer à leur tour dans le vaisseau, où Abraham avait déjà trouvé sa place sur le tableau de bord et où deux sièges situés derrière celui de la pilote attendaient leur propriétaire. Les deux Lotte s'installèrent tant bien que mal et parcoururent des yeux l'intérieur de l'engin, comprenant bien malgré elles qu'elles n'y connaissaient vraiment rien. C'était comme se trouver dans la baleine qui avait dévorer Pinocchio.

- Attachez vos ceintures, nous allons décoller.
- C'est inutile.
- Pour qui nous prenez vous ?
- Décollage ! Vaisseau D.R.A.C Go !
- N-Non non attendez ! Comment est-ce que-

Mais Whilelmina appuya sur une des manettes qui lui faisait face et la tira vers elle, démarrant les puissant réacteurs qui se trouvaient à l'arrière de l'appareil. Une paire d'hélices se mit à tourner de plus en plus vite de chaque côté du cockpit tandis que des nuages de vapeur s'échappaient en permanence des ailes du vaisseau qui se levèrent dans un puissant fracas mécanique. Les deux Lotte, trop paniquées pour pouvoir dissimuler leur peur, s'accrochèrent à leur siège et se collèrent à leur dossier pendant que le vaisseau gagnait de plus en plus de vitesse. Une imposante porte s'ouvrit alors face à l'appareil, faisant entrer une grande quantité d'eau dans le garage que le vaisseau traversa sans difficulté. Quelques secondes plus tard, l'engin sortit de la Seine et gagna les cieux où Harker enclencha une nouvelle série de manettes, déployant une seconde paire d'ailes et une imposante hélice à l'arrière du vaisseau. Une suite interminable de mécanismes et de rejets de vapeur se firent entendre avant que l'aéronef ne prenne encore plus de haut et surplombe même la Tour Eiffel par dessus laquelle il passa avant d'aller s'enfoncer dans l'horizon.

- Décollage réussi ! Nous allons pouvoir gagner la destination en très peu de temps ! Tout va bien ?

Les deux Lotte restèrent silencieuses, vissées sur leur siège, les yeux ronds, incapables de comprendre ce qui était en train de se passer autour d'elles. Leur guide appuyait sur une série de boutons, regardait différentes jauges, actionnait une multitude de manettes qui, pour les deux directrices, n'avaient aucune signification. Cet engin volait sans raison, et était commandé par une technologie dont elles ne connaissait rien. Elles n'avaient qu'une envie, sortir d'ici. Mais l'état de choc était trop grand pour qu'elles puissent dire quoi que ce soit.

- Cet aéronef est le plus rapide que nous possédons dans l'organisation. Sa navigation est extrêmement précise ! Regardez je peux faire un looping les yeux fermés ! *Vrrrriioooooon* Et gagner encore plus de vitesse si je descends en piquée ! *Vrrrrrrrriiiiiiiiiiiioooooooooon* C'est vraiment le nec plus ultra des vaisseaux D.R.A.C ! Vous êtes sous le charme n'est-ce pas ?

Sous le charme n'était peut être pas le mot. Souffrant de mort interne était peut être un peu plus exacte pour les petites filles qui n'arrivaient même plus à parler tant la mort leur avait chatouillé le nez. Et comme si cela ne suffisait pas, un nouveau bruit inquiétant vint ébranler l'appareil qui pencha dangereusement sur la gauche avant de se stabiliser de nouveau. Harker tourna la tête et aperçut à sa droite un appareil semblable au sien, piloté par, il est facile de le deviner, la terrible Lucy qui n'avait toujours pas dit son dernier mot. Toujours en proie à la panique, les deux Lotte restèrent muettes, conscientes que les prochaines minutes allaient être très difficiles pour leur petit cœur. En effet, tonneaux, loopings, descentes en piquée et autres acrobaties aériennes s'enchaînèrent dans un rythme effréné au grand dam des deux petites filles qui n'avaient toujours pas compris comment attacher leur ceinture.

- Je t'aurai Lucy ! Gah !

Un violent choc bouscula le vaisseau, projetant la pilote contre le tableau de bord, la faisant perdre connaissance. L'aéronef oscilla quelques secondes avant de tomber en piquée mais fut rattrapé in extremis par Abraham qui sautilla sur le bouton de pilotage automatique. Lucy, qui n'avait pas dit son reste, arrosa l'appareil de Harker par plusieurs salves de balles qui endommagèrent l'hélice gauche, faisant dangereusement pencher l'appareil vers la droite. Les deux directrices, déjà à moitié mortes intérieurement, se rapprochèrent de leur guide et la secouèrent pour la réveiller, trop paniquées pour user de leur magie. La jeune femme finit par ouvrir les yeux, mais il s'avéra qu'elle était en réalité toujours inconsciente, et était comme prise dans une étrange transe. Les fenêtres du cockpit explosèrent brutalement, entraînant un puissant appel d'air qui manqua d'aspirer la pilote si elle n'était pas retenue par les deux têtes blondes qui ne pouvaient compter que sur elle. Une puissante aura mentale enveloppa soudainement l'appareil qui, après une succession de tonneaux et de virages serrés, se précipita en direction du vaisseau de Lucy qui continuait à tirer sur son adversaire. Comme possédée par une force incontrôlable, Whilelmina pencha la tête en arrière et leva les bras, arrachant les trois hélices de l'engin volant, arrachant un cri de panique de la part des deux passagères. Les pales, habitées par une nouvelle force, tournèrent de plus en plus vite et fondirent sur l'aéronef ennemi qui perdit deux de ses ailes.

Toujours en proie à sa violente transe, Harker détacha les ailes de son vaisseau et les abattit sur l'appareil de Lucy, qui se fit trancher en deux et tomba en piquée. Mais comme si elle n'en avait pas terminé, Miss Harker projeta tous les rouages qui constituaient la carlingue et les projeta dans la direction de l'épave en chute libre afin d'asséner le coup de grâce. Toujours en train de hurler, les deux Lotte constatèrent l'état dans lequel se trouvait leur vaisseau et assistèrent bien malgré elles à une nouvelle chute libre, la leur cette fois-ci, mais contrôlée par la force mentale inédite de Whilelmina qui déchaîna sa puissance sur la carcasse de l'engin qui termina en miettes. « L'atterrissage » se fit au flanc d'une montagne située un peu plus loin de là où les deux vaisseaux s'étaient affrontés, et s'il aurait coûté la vie à n'importe quel passager, les deux Lotte, leur guide, et même Abraham parvinrent à y survivre, grâce à un miracle qu'il serait difficile d'expliquer. Il faut croire que la transe dévastatrice de Harker avait pour idée de conserver la vie de son hôte, malgré tout.

Au pied des restes de l'aéronef, une première Lotte, allongée sur le sol, face contre terre, se remettait tant bien que mal des évènements qu'elle venait de subir.

- … Plus… Plus jamais.
- … J'aurai dû rester dans ma bibliothèque.
- Il semblerait que nous nous en soyons sorties ! Que s'est-il passé au juste ?

Aucune des passagères ne répondit, profitant du contact avec le sol rocheux de la montagne pour s'assurer et se promettre qu'elles ne remettraient plus jamais les pieds dans un appareil fait uniquement de métal et de boulons. Harker regarda l'épave de son vaisseau, les mains sur les hanches, puis rajusta son chapeau et s'attrista de voir qu'un aussi bel appareil avait connu une fin aussi misérable. Puis, après avoir tripoté une petite télécommande attachée à son avant-bras, constata avec satisfaction que le destin avait bien fait les choses puisque le point de ralliement des doubles se trouvait à seulement quelques mètres de là. Les Lotte se relevèrent tant bien que mal puis jetèrent un œil aux restes de l'engin infernal avec un soupçon de crainte. S'assurant que leur guide avait pris un peu d'avance, l'une des petites filles fit disparaître les restes métalliques dans une puissante avalanche rocheuse qu'elle précipita d'un geste de la main, avant de rejoindre son double qui aurait sûrement fait de même. Se trouvant à flan de montagne, le petit groupe devait maintenant redescendre, et d'après Harker leur destination se trouvait derrière le pan rocheux qui leur faisait face.

Les deux directrices reprirent doucement leur habitude et leur caractère ronchon, mais s'assurèrent néanmoins de laisser une petite avance à leur guide, afin de pouvoir disparaître si jamais elle leur demandait de monter dans un nouvel appareil maléfique. Constatant qu'une partie du chemin s'était effondrée, Whilelmina se colla contre la façade rocheuse et exécuta une drôle de marche de crabe le long du mur, invitant les deux directrices à faire de même. Celles-ci soupirèrent et lévitèrent quelques secondes au-dessus du vide pour arriver à l'autre bout du chemin en même temps que leur guide qui se satisfit de sa petite prouesse physique (car la marche du crabe est loin d'être simple !).

- Ah, nous y voilà !
- Je me demande pourquoi ces gens se sont embêtés à nous faire faire autant de voyage pour…
- … Non.

Face à elles, ou plutôt au-dessus d'elles se tenait un immense, gigantesque, gargantuesque vaisseau de métal qui flottait dangereusement au-dessus du sol. Heureuse de voir sa mission accomplie, Harker croisa les bras et afficha un large sourire avant de profiter elle aussi de la vue. Une multitude de lumières inquiétantes, de tiges de métal et de plaques d'acier surplombaient le reste du monde, au grand dam des deux petites Lotte qui ont déjà pu constater les ravages que pouvait faire un engin infiniment plus petit.

- Je ne monterai pas là-dedans.
- C'est hors de question.
- Voilà, le message est transmis, ils vont bientôt venir nous chercher. Bien ! Mise à part les interventions de Lucy ce voyage ce sera globalement bien déroulé n'est-ce pas ? Eh revenez ! Eeeeh !

La promesse de ne jamais remonter dans un engin volant fabriqué par des humains allait devoir attendre… Enfin, d'abord faudrait-il les rattraper.
Jade Perez
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Jade Perez

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MessageSujet: Re: Manche n°2 : Aller simple   Manche n°2 : Aller simple I_icon_minitimeSam 20 Aoû - 16:16

« Et voilà, nous sommes perdues ! »

« Mais non, je sais ce que je fais ! C'est un raccourci ! »

Les deux Jade déambulaient entre les allées les moins fréquentées de la capitale, cachées dans l'ombre. C'était cela ou finir au trou ! Ou pire si on les trouvait ensemble ... C'était risquer la mort, si des humains étaient témoins de pareil phénomène inexpliqué et inexplicable. Surtout si la Curia n'existait pas dans cette dimension. Et c'était sans parler des robots qui semblaient omniprésents ! Mais dans cette ville qui n'était pas tout à fait comme la sienne, Jade en perdait tous ses repères, alors elle n'avait pas tellement le choix de croire sur parole son guide improvisé. De toute façon, elle n'avait aucune idée de quel endroit pouvait être sûr. Peut-être l'amenait-on à la Cour des miracles. Ou encore dans les catacombes pour se cacher quelques heures. Le temps que la tempête passe. Quelle surprise lorsqu'ils se retrouvèrent devant une porte blanche des plus banales au cœur du centre ville. Adieu le côté glamour de la Tour Eiffel ! La cambrioleuse passa une mèche de ses cheveux derrière son oreille, hésitant à frapper, prenant une grande inspiration avant de tendre son petit poing vers le bois poli.

« Salut William. Tu nous laisses entrer un petit moment ? ... Je peux tout t'expliquer. »

« Laisse-moi deviner, un double d'un autre monde t'es tombé dessus pendant ta ronde ? »

Il avait donné tellement dans le mille qu'elles restèrent figées, sans voix. Devant leurs têtes, il ne put s'empêcher d'éclater d'un rire franc, mais il ne tarda pas à ouvrir la porte de son appartement défraîchi. Jade s'installa sur le canapé rouge qui criait au milieu des murs pâles, bien contente de pouvoir souffler un peu. Retour au point de départ de cette journée folle ... Son double se départit de sa veste, partit dans une salle attenante et revint avec une boîte de premiers soins, une cigarette allumée entre les lèvres, s'asseyant comme une reine aux côtés de la blessée pour appliquer un peu de pommade sur ses brûlures et lui faire un bandage de fortune.

« Alors darling ? Qu'est-ce que tu sais ? »

« La même chose que tout le monde. Ça passe en boucle à la radio, entre les programmes musicaux. Pour sûr, ils ne veulent pas que quelqu'un rate l'info et reste coincé ici ! »

Sur ces simples mots, il alla allumer l'appareil qui traînait sur un petit bureau près de l'entrée. Malgré quelques grésillements et autres crachotements, ils réussirent à comprendre l'essentiel du message. On allait les laisser repartir chez eux sans faire d'histoire ! Chic ! Cela suffit pour remettre un sourire sur le visage pâle de Jade, même si cela signifiait que tous ces efforts pour rentrer à bon port sans se faire remarquer avaient été inutiles, car il fallait trouver ce fameux guide et pour ça, il fallait retourner en ville.

« Vous êtes obligées d'y aller ... toutes les deux ? »

« Tu n'es pas sérieux ! Cette petite ne survivra pas toute seule, regarde ce que lui a fait un simple T0S-ter détraqué ! Non, c'est tout décidé. Ne m'attends pas pour le dîner ! »

Et sans plus un mot, lèvres pincées, elle se saisit du bras de sa copie, qui eut à peine le temps d'adresser un petit salut de la main à ce Willlam différent du sien, sans l'être totalement, qu'elle aurait bien aimé connaître davantage, et elles étaient sorties. Peut-être ne s'entendaient-ils pas si bien que cela, en fin de compte ? Quoique, c'était difficile à dire, lorsque vous n'étiez pas même sûr de pouvoir comprendre votre double. Après tout, il n'y avait pas de quoi être embarrassée.

« Rah, il m'énerve, parfois, lui ! Mais il y a plus important. Comment va-t-on faire pour trouver l'autre guignol ? »

« Charmant. Mademoiselle Perez, je présume ? »

Les deux Jade se retournèrent au même moment. Devant elles se tenait un homme qu'elles n'avaient jamais rencontré auparavant. Un certain prestige émanait de sa personne, il s'agissait assurément d'un membre de la bourgeoisie. Et à ses dires, il s'agissait de leur guide ! Voilà de quoi faire une mauvaise première impression que son statut de voleuse ne devait guère améliorer. Jade ne se laissa toutefois pas démonter pour autant.

« Comment nous avez-vous retrouvées ? »

« Cette ... tenue n'est pas aussi discrète que vous aimeriez bien le croire. »

Il avait beau garder des apparences cordiales, cette fois, sa voix était pleine de mépris. Son sourire prenant des allures presque glaciales. Loin de se sentir insultée, Jade se contenta d'afficher une moue désapprobatrice, le regardant de haut. Personne ne l'avait prévenue de ce voyage dans un Paris alternatif. Ce n'était pas de sa faute si elle n'avait pas pu préparer une tenue plus appropriée, surtout en ne sachant rien de l'endroit où elle tomberait ! Quant à emprunter un morceau à son double ... Comment le faire alors que leur course n'avait eu qu'un court répit ?

« Assez discuté. Nous avons une longue route à faire. Ma voiture n'est pas loin. »

Certes. Plus vite elles se seraient débarrassées de cet enquiquineur, mieux ce serait. Jade détestait ce genre de serpent auxquels on ne pouvait pas faire confiance. Heureusement que leurs intérêts étaient communs dans cette aventure. Mais s'ils devaient utiliser une voiture privée, c'était que leur destination était sacrément éloignée ! Donc, Jade retint sa pique, cherchant à éviter de fâcher leur bienfaiteur fortuné, l'autre étant déjà bien pendue au bras du jeune lord. Elle croyait pouvoir lui faire les poches ? Ou le charmer ? Cela lui donnait la nausée, elle valait mieux que cela. D'accord, elle ne crachait pas sur une aventure d'un soir, mais pas au point de sauter sur tout ce qui bouge. L'opulence n'était pas la clé du bonheur, seulement celle d'une vie plus confortable ! La fumée lui aurait presque sorti des oreilles, tant elle fulminait, en silence, mais bon, elle pouvait bien supporter tout cela pendant une heure. Voilà comment, perdue dans ses pensées, elle bouscula ses compagnons de route. Pourquoi s'étaient-ils arrêtés ? Un simple regard aux entourages lui offrit une réponse plausible. Devant le véhicule se tenait un homme pour le moins étrange, rien que pour son accoutrement aux couleurs excentriques.

« Mâ ! Monsieur Gray ! Je sais que vous êtes là ! »

Bah, c'était au moins ça de gagné, leur guide n'était plus un parfait inconnu maintenant. Sans doute avait-il préféré garder sous silence cette entorse aux manières parce qu'il ne les jugeait pas dignes d'en savoir davantage.

« Ce gredin de Picasso ! J'aurais dû me douter qu'il nous mettrait des bâtons dans les roues. Il ne s'arrêtera pas tant qu'il n'aura pas fait mon portrait ... Il va nous falloir trouver un moyen plus subtil d'arriver à nos fins. »

« Pourquoi refuser ? C'est plutôt flatteur. »

« Vous n'avez certainement jamais vu l'une de ses toiles. C'est un véritable affront à la beauté ! »

« J'aime bien, moi. Quoi ? C'est si ... Original ! En plus, ça se revend bien. »

Un point partout. D'un regard entendu, ils rebroussèrent  chemins pour s'éloigner du peintre qui s'égosillait finalement pour rien. Jade ne put retenir son exclamation de surprise lorsqu'elle constata qu'ils se dirigeaient vers l'un des couloirs sous-terrains que cachait la ville. À l'entrée de celui-ci, Dorian leur fit signe d'attendre. Il en ressortit quelques secondes plus tard, accompagné par un gamin.

« Oliver va nous donner un coup de pouce. »

En échange de quoi, hm ? Une menace ou plutôt un cadeau ? Le gamin était pauvre et ça crevait les yeux. Mais bon, c'était pas son problème, hein... Bientôt, elle n'habiterait plus ce monde parallèle. Puis, même dans son Paris à elle, Jade ne pouvait pas venir en aide à tous les orphelins et mal nantis, surtout depuis qu'elle n'était plus vraiment voleuse. On ne change pas la nature profonde des choses, après tout. Assez de remords. Il semblerait qu'un plan se soit mis en place. Pendant que la bande du petit Oliver Twist ferait diversion, ils pourraient s'emparer de la voiture tant convoitée pour se mettre enfin en route vers le laboratoire caché. Ils n'avaient que trop tardé ! Les sens en aguets, ils attendirent tous trois la diversion convenue, il faut avouer qu'elle était aussi un peu curieuse de voir comment ils allaient s'y prendre, les gamins des rues étaient plutôt débrouillards d'habitude, elle était bien placée pour le savoir !

Apparemment, ils avaient réussi eux aussi à mettre la main sur quelques pièces de mécanique, mais leurs méthodes étaient comment dire ... Pour le moins extrêmes ! Au lieu de se servir de robots miniatures comme Jade s'y attendait, c'étaient de véritables explosifs que les jeunes venaient de lancer en direction du dénommé Picasso ! Ils étaient tous fous, sur cette planète, décidément. Encore heureux que la voiture soit épargnée, sinon ils auraient fait tout cela pour rien. Au milieu de la fumée, difficile de distinguer ce qu'il était advenu de leur adversaire, mais ils n'allaient pas traîner pour le découvrir hein ... Surtout si c'était pour se faire accuser de complicité pour meurtre, mais puisque la situation ne semblait affecter aucun des habitants ci-présents, Jade supposait que le but n'était pas une attaque mortelle, ou alors que c'était une occurrence si courante que tout le monde s'en fichait, mais alors ça n'expliquait pas pourquoi une simple voleuse pouvait s'attirer l'attention des policiers de la ville.

Sur ordre du propriétaire, le chauffeur démarra au quart de tour, laissant une traînée de poussière derrière eux. Au moins, la voiture était confortable, et ils n'avaient plus besoin de courir dans tous les sens. Tout semblait se passer comme sur des roulettes, pendant une heure ou deux, jusqu'à ce que les pétarades d'un autre moteur leur laisse savoir qu'ils étaient suivis, et un simple coup d'œil au véhicule suffisait à confirmer l'identité du chauffeur... Non seulement la peinture craquelée était une explosion de couleurs, mais la forme du métal laissait croire à une horrible expérience qui avait mal tournée, et qui s'était échappée du laboratoire d'un scientifique fou. Rien pour la rassurer quant à la suite de cette aventure ! Pire, avec quelques grands cris ponctués de rires, ce monsieur excentrique leur lançait des ballons de peinture, le parcours devenant particulièrement glissant, et puis si jamais l'un de ses projectiles lui tombait dans les cheveux ... Jade n'osait même pas y penser. Cela lui prendrait des heures pour retrouver sa belle couleur rose et décoller chacune des mèches touchées.

« Mais il n'abandonnera donc jamais ?! »

« Bon. Il est temps de sortir le grand jeu. Laissez faire la professionnelle ! »

Se hissant avec adresse sur le toit de la voiture, tournée en direction du véhicule ennemi, Jade prit une pose plus sensuelle, accompagnée d'un large sourire, la laissant partir au vent. Pour sa part, elle ne risquait pas de tomber, puisque son double lui tenait les chevilles en plus de lui avoir passé un bout de corde. Elle effleura sa peau d'un toucher léger et laissa les courants d'air faire le reste du boulot en toute innocence, ou presque. Ce n'était après tout pas sans raison qu'on la traitait parfois comme une dépravée. Avec une grande exclamation de surprise, la voiture de l'espagnol fit une embardée vers le côté de la route. Objectif accompli ! Victorieuse, Jade retrouva la sécurité de l'habitacle en toute décence.

« On ne le reverra pas de sitôt celui-là ! »

« Bien joué ! »

« Il était temps. Nous arrivons. »

Ah bon ? Où ça ? La curiosité étant trop forte, elle se retourna, à nouveau décente. Devant eux, dans le ciel, se trouvait un énorme ballon aux mécanismes complexes. Sa bouche forma un O bien rond, une peur viscérale lui tordant le ventre et l'empêchant de dire quoique ce soit pendant quelques secondes, la respiration bloquée.

« Hors de question que je monte là-haut ! » hoqueta-t-elle.

« Sérieux ? Je sais que je n'ai pas vanté tous les mérites des dirigeables tout à l'heure mais ... »

« Ce n'est pas  le problème ! On sera coupé de tout là-haut, sans aucun moyen de redescendre ! Je ne vais pas le supporter, je ... »

« J'en ai plus qu'assez de vos caprices et de vos crises d'hystérie ! C'est votre seule chance de rentrer chez vous et le départ ne va pas tarder, vous vous en rendez compte !? »

Il faut dire que toute cette journée était plutôt foireuse, mais en plus, les nombreux coups de vents subis par le trajet à haute vitesse l'avait mis dans une humeur exécrable. Sans plus de cérémonie, il la jette sur son épaule comme un vulgaire sac de pommes de terre. Elle ne se serait pas doutée qu'il en avait la force, ni l'audace, risquant de froisser son beau costume... Avant qu'elle n'ait pu se remettre du choc, ils avaient atteint la nacelle. Qui était fort bien remplie d'ailleurs. Oups !

« Edward, tu vas me devoir une sacrée augmentation pour m'entraîner dans de pareilles aventures. »

Oh, allez, elle ne leurrait personne. Elle adorait une petite poussée d'adrénaline à l'occasion... Ce qu'elle aimait moins, c'était se mettre dans des situations qui pourraient peut-être menacer sa vie, ou sa réputation.[/color]


Dernière édition par Jade Perez le Mer 25 Jan - 8:40, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: Manche n°2 : Aller simple   Manche n°2 : Aller simple I_icon_minitimeSam 20 Aoû - 17:09

Je te suis et réserve aussi mon poste, j'ai pas mal de difficulté à écrire cette semaine, j'essayerais de rectifier ça sous peu.
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MessageSujet: Re: Manche n°2 : Aller simple   Manche n°2 : Aller simple I_icon_minitimeSam 20 Aoû - 17:56

- Dooonc ! La betterave ravophile a tournicoté tournicotons autour de la tige saugrenue bliolette et ensuite elle a paravané, non sans difficultés, jusqu'au rhododendron monticulaire de la Reine de salsifettes !
- Et ensuite, remontant par la cheminée caramineuse, la betterave ravophile s'est dandinée à droite, à gauche, et encore à droite, pour enfin dénicher la mandoline durlidondesque sous la pierre en tissu de Madame Couplette !
- Et à la fin frooooousha ! Betterave ravophile a fait une guirlande rosange des cocotiers bleus et s'est emberlificotée dedans pour rebouler en bas de la colline de beurre glacé !
- Manifestement, c'est bien le cas !

Un cri de joie retentit au milieu de la rue par laquelle s'était engagé le petit groupe pour rejoindre la gare qui les amènerait théoriquement vers leur destination. Mechadotty et Kellerstein, après s'être réfugiées chez Monsieur Napolito, entendirent à la radio l'appel aux doubles ayant fait irruption dans la capitale. Comprenant qu'elles ne risquaient plus de finir en sorbet si elles mettaient le pied dehors, les deux doctoresses saluèrent leur hôte de quelques heures et s'engagèrent dans les rues de la capitale, curieuses de trouver leur guide. Mais leur première rencontre ne fut pas avec le guide en question, mais avec Louise et Pipistrelle, qui avaient eu quelques déconvenues au « cabaret » de celui qui se faisait appeler Eduard. Kellerstein comprit qu'elle n'était pas la seule a avoir été transportée dans cet étrange univers, et fut ravie d'entendre que son patron préféré avait connu les mêmes aventures qu'elle. Savoir aussi que le « cabaret » était devenu une arène où s'affrontaient les robots et les humains était également une nouvelle intéressante, particulièrement le fait que Mimi n'était pas une chanteuse ici, mais une grande combattante (enfin d'après ses propres mots).

À peine après avoir retrouvé Louise, visiblement exténuée par le flot interminable de paroles de la jeune rouquine, et toujours accompagnée de Manfred, Yvonne et Ilana, un nouvel individu s'ajouta au groupe, un drôle de bonhomme qui était en train de complimenter un lampadaire pour la formidable taille de son cou avant d'apercevoir les deux doctoresses. Satisfait de sa trouvaille, l'homme mécanique se présenta sous le nom de Lewis Carroll et invita la petite compagnie à le suivre pour qu'il les emmène à l'endroit où Kellerstein pourrait regagner son monde. Comprenant très vite la proximité intellectuelle qu'elle avait avec ce drôle de guide, Kellerstein se réjouit de sa chance, tout comme son double, et accepta avec joie de suivre le robot qui, avant de partir, s'assura bien que ses boulons avaient terminé leur fanfare sur son avant bras. Ce fut ainsi une longue épopée qui s'engagea dans les rues de la capitale, ponctuée par des discussions saugrenues entre les deux doctoresses, la combattante du « Last Paradise », et ce guide farfelu du nom de Lewis Carroll. Tout cela au grand dam de Louise qui commençait sérieusement à perdre patience.

- Bon maintenant arrêtez de vous extasier devant cette bouche d'égout et continuez d'avancer !
- Si cette bouche d'égout est vraiment une bouche, Paris doit sans doute trouver cela déplaisant d'avoir des gens marcher sur son visage n'est-ce pas ?
- Ooooh sans doute !
- Ou alors ça lui fait un massage des joues.
- Fantastiquement indubitable. Continuons !

Le robot repris le pas, suivi par les deux doctoresses qui pensaient plus à s'amuser qu'autre chose, et par Mimi et Louise, cette dernière se demandant comment elle allait pouvoir tenir jusqu'à la fin du voyage.

- Ooooh nous y sommes !

Le groupe s'arrêta et leva la tête pour contempler l'immense façade de la gare qui leur faisait face. Carroll se tourna et aperçut que ses camarades du jour ne regardaient pas dans la bonne direction et pointa du doigt de l'autre côté.

- Non pas cette gare ! Cette maison !

Les quatre visages se tournèrent en même temps et aperçurent avec étonnement une petite maison penchée à l'architecture douteuse, enfilée de manière improbable entre deux autres résidences bien plus logiques.

- On ne va pas prendre le train ?
- Je n'aime pas ces grandes chenilles pleine de fumée. Regardez cette maison ! N'est-elle pas toute penclinée ?
- Ouiii !
- Ooooh ! Je propose qu'on lui dise bonjour !
- Tout à fait !
- On va dire bonjour en se dandinant !

Les deux Dolores, leur guide et Mimi engagèrent un dandinement face à la drôle de maison, tandis que la secrétaire, elle, s'interrogeait de la présence d'une petite fille blonde qui, elle l'avait remarqué, les suivaient depuis quelques temps maintenant.

- Dites vous connaissez cette fille Carroll ? Elle nous suit depuis que vous nous-
*sbuibuibuibuibui !*
- …
- *sifflote*
- Bon Kellerstein, donnez moi cet engin.
- Nooooon !
- J'ai dit que la prochaine fois je le confisquerai ! Allons !

Louise tendit le bras et tira le drôle d'objet des mains de la doctoresse qui fit la moue, attristée de ne plus pouvoir entendre le bruit de son joujou préféré. Louise soupira et se tourna de nouveau vers la petite fille, mais l'enfant s'était déjà volatilisée et à sa place avait déjà repris l'activité habituelle de Paris. Intriguée mais pas inquiète, la secrétaire haussa les épaules et actionna de nouveau son fauteuil roulant pour rejoindre le petit groupe qui s'était déjà éloigné sans même s'en être rendu compte. Quelques mètres plus loin, le groupe s'arrêta de nouveau (on n'avance pas vite avec quatre cerveaux comme ceux là) et se tourna vers une drôle de petite bête qui s'était assise à leurs pieds. Deux longues oreilles blanches, des yeux ronds plein d'amour et un adorable petit nez qui ne cesse de gigoter.

- AAAAAAAAHHW ! Un piti lapin trop choupi tout pleeeeeein ! Viens voir maman Mimiiii ! Eeeh non reviens !
- Il est sans doute en retard ! Suivons-le !

Sans objection aucune (sauf Louise, mais quelle rabat-joie aussi !), le groupe s'engagea dans la poursuite de la petite boule de poil, qui, malgré sa taille, était étonnement rapide. Peut-être était-il vraiment en retard pour courir aussi vite… Mais en retard pour quoi ?

- On s'en foooout !
- À gauche !

Le groupe bifurqua à gauche et s'enfonça dans une rue de traverse qui donna sur un vieil entrepôt recouvert de tuyaux et de nuages de vapeur. Tout le monde s'immobilisa devant la porte sous laquelle le lapin venait de se faufiler, puis sans objection encore une fois (enfin…) Mechadotty appuya sur la poignée et découvrit, avec surprise, qu'elle était ouverte. Tout le monde entra, encore une fois malgré les avertissements de Louise qui ne cessait de répéter qu'ils avaient AUTRE CHOSE à faire que courser un petit lapin, mais le guide souhaitait savoir à quelle fête était convié le mammifère, et si le guide y va, alors tout le monde le suit. Enfin, sauf les gens sensés, mais ils se font de plus en plus rare par les temps qui courent.

À l'intérieur de l'entrepôt, la lumière du soleil perçait avec une certaine difficulté au travers des vitres poussiéreuses qui composaient certaines parties du toit. On apercevait, ici et là, des tuyaux, fils, rouages et morceaux de métal en tout genre, tous emmêlés dans un imbroglio général qui, selon Carroll, devait sans doute faire désordre lors des repas de famille. Des petits bruits de pattes résonnèrent tantôt à droite, tantôt à gauche, poussant le groupe à s'enfoncer de plus en plus loin dans cet entrepôt désert qui titillait la curiosité de la totalité du groupe, oui, même Louise (mais moins Manfred qui était trop occupé à décoincer son bec des rouages de son aile gauche). Enfin, le groupe déboucha sur une place dégagée, illuminée en son centre par un puit de lumière provoqué par une ouverture dans la plaque de métal du toit située juste au-dessus. Au cœur de la lumière se tenait le petit lapin en train de grignoter un petit biscuit idéal pour le thé, qui, en apercevant le groupe, détala à toute vitesse et disparut à nouveau dans l'ombre. À sa place, ce furent deux petits souliers vernis qui s'avancèrent dans la lumière, suivis par une petite robe à froufrou et de beaux cheveux dorés qui, dans leur mouvement, dissimulaient le sourire amusé de leur propriétaire. Le groupe s'arrêta et fixa la petite fille qui leva les yeux et les fixa avec une expression de joie déroutante sur le corps robotique de Carroll qui eut un sursaut d'étonnement.

- Bonjour Monsieur Carroll !
- Ooh, bonjour mademoiselle Lindel, ravi de vous revoir.
- Vraiment ? Cela me rend heureuse !

À ses mots, le petit lapin blanc sortit une nouvelle fois de l'ombre et monta dans les bras de celle qui était sans doute sa propriétaire qui lui câlina la tête avec douceur.

- Que faites-vous ici mademoiselle ? Votre père va s'inquiéter.
- Je m'ennuie là-bas. Alors ? Avez-vous écrit de nouveaux livres ?
- Pas tout à fait, ma plume a mal à la tête ses derniers temps et je ne veux pas qu'elle attrape la fièvre.
- Oh…

La petite fille sembla déçue et baissa la tête. Ses caresses sur la tête du lapin continuèrent malgré le silence qui s'était installé, silence qu'elle brisa à nouveau avec sa charmante voix d'enfant.

- Vous ne me mentez pas, n'est-ce pas ?
- Pourquoi vous mentirais-je ? Seuls les pissenlits mentent, en prétendant qu'ils sont jaunes alors qu'ils sont blancs.
- Oooooh.
- Ooooh c'est vraaaai !
- Je savais qu'ils n'arrêtaient pas de dire des bêtises !
- Chhhhht !

- Peut-être… fit-elle, faussement gênée, que vous ne voulez pas écrire sur moi ?
- C-Ce n'est pas…
- Vous savez, je serai très, très, très, trèèèès heureuse d'être dans votre prochain livre.
- Je ne peux pas aujourd'hui ma petite Alice, je dois escorter ces personnes hors de Paris.

Le visage d'Alice se crispa brusquement. Ses caresses cessèrent aussi.

- Vous partez ?
- Oui mais je vais revenir, je ne suis pas comme ces oiseaux qui s'envolent mais ne reviennent jamais.
- Vous fuyez… ? Mais et mon livre ?
- Si vous patientez, nous ferons une fête !
- Je ne veux pas attendre !

Alice écarta les bras et laissa son animal retomber sur le sol. À peine eut-il terminé sa chute que le petit rongeur se mit à gonfler, gonfler, gonfler tellement que sa peau se déchira, dévoilant une multitude de rouages et de mécanismes d'horlogerie. Deux lampes rouges faisant office de yeux, le lapin géant mécanique termina d'enfler et se posa face à Carroll et son groupe qui recula de quelques pas, essayant malgré tout de tâter la truffe du rongeur robotique. Le flan de la créature s'ouvrit alors, permettant à Alice de s'y introduire, avant que sur le dos du lapin n'apparaisse un petit fauteuil rose dans lequel était installé la demoiselle. Celle-ci, visiblement peu enthousiaste du défilement de son écrivain préféré, le pointa du doigt et ordonna à son robot de l'attraper.

- Nous devrions dégueroustir.

Le signal maintenant donné, tout le groupe prit ses jambes à son cou et partit en courant pour ne pas finir écrasé par le lapin diabolique. Celui-ci engagea immédiatement la course poursuite, détruisant tous les obstacles qui avaient le malheur de se trouver sur son passage. L'entrepôt étant exigu, inutile de dire que les dégâts furent rapidement considérables.

- Petit lapin mignon veut nous mangeeeer !
- Encore heureux qu'il n'y en ait qu'un seul !

Évidemment, une fois la phrase prononcée, un deuxième lapin, non pas enfourché par Alice, se plaça face au groupe qui n'eut d'autre choix que de s'arrêter. Derrière eux arriva à toute vitesse le premier robot, dont le regard rougeoyant transperçait l'ombre de l'entrepôt à plusieurs mètres à la ronde. Prit en tenaille, le groupe s'immobilisa, incapable de trouver une solution pour s'extirper de ce terrible guêpier.

- Maintenant, Monsieur Carroll, vous ne pouvez plus disparaître ! Hihi !
- Alice ma chère, tu ne crois pas que tout ceci est un peu exagéré ? Ces lapins n'ont même pas de queue !

Un instant de silence, puis les lapins se tournèrent et constatèrent qu'en effet, leur derrière n'avait même pas eu la chance d'être garni d'une charmante pelote de poils.

- C'est parce que papa a pas vouluuuu !
- Des plumes d'autruche seraient idéales !
- On ne t'a pas demandé ton avis !
- Vraiment ?

L'attention d'Alice détournée pendant une fraction de seconde, un projectile venu de nulle part vint heurter la télécommande que la petite fille tenait dans sa main, et la fit tomber sur le sol un mètre plus loin. L'enfant hoqueta de surprise et se tourna en direction de la provenance du projectile, découvrant avec étonnement une drôle de silhouette rectangulaire que les deux Dolores reconnurent très rapidement.

- Free-GO !
- MAIN-TE-NANT-JE-SUIS-GEN-TIL.
- D-Docteur !

Derrière l'imposant robot réfrigérant apparut à son tour Ad-4M, le corps toujours recouvert de lames mais beaucoup moins assoiffé de sang comme auparavant. L'assistant fit signe au groupe de les rejoindre, profitant qu'Alice descende de son énorme lapin pour récupérer sa télécommande. Personne ne se fit prier et une fois au niveau de Free-GO, le robot cubique arma son bras canon et projeta un imposant bloc de glace qui explosa le mur qui lui faisait face, donnant directement sur une nouvelle rue. Le groupe s'y engagea à toute vitesse avant de s'enfoncer le plus loin possible dans Paris pour qu'Alice perde leur trace. Après une longue fuite, le groupe s'arrêta enfin, abrité dans un cul-de-sac.

- Adaaaam ! Comment nous avez-vous retrouvé ?
- J-J'ai suivi *clic* Free-GO qui a p-pu vous détecter .*bip bip*
- Fantastique ! Fit Kellerstein en joignant ses mains, maintenant nous n'avons plus rien à craindre!
- Pourquoi t'es tout pointu Adam-chou ? S'interrogea Mimi en tâtant du bout de l'index la pointe d'une des lames de l'infirmier robotique.
- Je n'ai pas s-su replier *dut dut* mes lames…
- Vous ressemblez à un beau petit hérisson ! Aimez vous le croquet ?

Ad-4M n'eut pas le temps de répondre que Louise s'interposa pour rapidement couper court à toute tentative de nouvelle discussion interminable.

- Je vous rappelle qu'une gamine armée de deux lapins géants nous cherche. Ce n'est pas le moment de discuter.
- De qui s'agit-il exactement ?
- Alice Lindle, une de mes plus grandes admiratrices. Elle veut être dans mon prochain livre et est très têtue…
- Je n'appellerai pas ça de l'entêtement vu les moyens qu'elle a sorti pour vous garder là-bas.
- Vous pensez que l'on peut tout de même prendre le train ou non ?

Carroll hésita quelques secondes puis répondit par la négative. Le train qu'il avait envisagé de prendre était déjà parti depuis un bon moment et retourner à la gare risquerait de recroiser Alice. Il fut finalement convenu de se rendre dans l'atelier de l'écrivain, où il pourrait trouver un moyen de quitter la capitale au plus vite. Malgré les doutes de Louise et d'Ad-4M, qui avait déjà plus ou moins cerné le personnage, il fut convenu de le suivre, car de toute manière il était le seul à connaître l'endroit exact du point de rendez-vous dont il avait été question à la radio. Heureusement, s'il manquait clairement quelques boulons au drôle de robot, son sens de l'orientation n'était pas défaillant et malgré les trois ou quatre arrêts inattendus, en plus des illuminations des doctoresses, des blagues lourdingues de Free-GO et des crises de rire de Pipistrelle, le groupe arriva finalement à destination.

Devant eux se dressa un drôle de cabanon en bois humide et légèrement penché vers la droite, dont la toiture asymétrique s'accordait parfaitement à la cheminée tordues sur laquelle séjournait un oiseau mort.

- Permettez-moi de faire un peu de ménage avant que vous n'entriez.

Le robot ouvrit la porte de sa vieille bicoque puis claqua plusieurs fois pour la refermer correctement avant de s'affairer pendant de longues minutes au rangement de sa « maison ».

*blop blop* *frouich frouich frouich* *toc toc* * bibibibiiii* Mais à quoi il joue au juste ? *boum badam* *zuiiiii zui zui* *grom grom* I-Il prend du temps… *dui dui dui* *zzzzziooooou* *iiih iiih uuuuh* *tralalalala* *sbuibuibuibuibui !* Hue hue hue ! Ooooh ! *gniiiiii* *cronc cronc* *flapapapouet* *niiiiioooon* *ding dooong* *cric cric cric* *ssssssssioup* *brrrrrr* *vrout vrout* *BING BANG BOUM GUEEEEEEAAAAAAARRRRGHH*………

- Ça s'est arrêté.
- Il est mort ? Monsieur Carrooooll ?
- J'entends du bruit !

En effet de derrière la drôle de porte résonnèrent des bruits de pas avant que la porte ne s'ouvre et ne libère un épais nuage de poussière. Le robot toussota et secoua la main pour chasser l'air avant d'inviter ses nouveaux compagnons à entrer chez lui. Kellerstein entra la première, suivie par son double, Pipistrelle et les autres. Bientôt, tout le monde fut entré dans le minuscule cabanon, à l'exception d'Ad-4M qui risquait de transpercer tout le monde avec ses lames et Free-Go qui aurait, lui, broyé tout le monde avec son imposante carrure.

- Ne vous inquiétez pas, fit Lewis Carroll, je reviendrai vous chercher tout à l'heure !

À peine eut-il terminé sa phrase que l'écrivain referma la porte et actionna une manette dissimulée derrière un tableau penché dépeignant une échelle (oui, une échelle, c'est tout). Alors, le sol sembla s'affaisser brusquement sous leur pied, avant de s'enfoncer à toute vitesse dans le sol, entraînant ses passagers avec eux.

- J'ai appelé ce charmant mécanisme l'Ascensionneur ! C'est fantastique n'est-ce pas ?
- On va encore loin comme ça ?
- Je ne sais pas. Et vous ?
- Eh ?
- C'est la première fois que je l'utilise ! D'habitude je passe par la porte.
- Youpiiiiii !

L'ascensionneur stoppa brutalement sa chute, puis tourna à droite, puis à gauche, et dans encore d'autres directions improbables impossibles à deviner à cause des quatre murs recouverts d'une tapisserie orangeâtre qui empêchaient de voir réellement où ils se trouvaient. Ce fut finalement dans un fracas mécanique que le drôle de moyen de transport s'immobilisa et recracha un puissant nuage de vapeur. Carroll ouvrit la porte et claqua des doigts pour allumer la lumière. Voyant que cela ne marchait pas, il tapa des mains, tapa des pieds, mais ne parvint pas à se rappeler la commande qui allumait les lumières.

*A-tchi !*

L'éternuement de Pipistrelle fit immédiatement réagir les lampes à gaz qui s'allumèrent toutes simultanément, baignant le gigantesque atelier d'une douce lumière cuivrée. Carroll remercia l'employée du Last Paradise et descendit le premier de l'ascensionneur, suivi des autres.

- C'est trop chouette comme atelier ! Je veux le mêêême !
- C'est grand ! Nous sommes sous Paris ?
- Je crois. Ou sous la mer peut-être… Je demanderai à Madame Pignon de Pin, elle sait tout mieux que moi. Profitez-en pour visiter l'endroit pendant que je vais chercher vos compagnons !

Carroll retourna dans son drôle d'engin et referma violemment la porte avant de l'actionner à nouveau. La minuscule boîte qui servait de cage d'ascenseur recula à toute vitesse et disparut instantanément dans l'ombre, laissant les deux doctoresses, Mimi et Louise seules au milieu de l'imposant atelier du mystérieux écrivain. D'immenses tuyaux de plusieurs mètres de diamètre parcouraient les murs, accompagnés par d'imposants rouages qui tournaient sans arrêt au rythme des secondes que frappaient toutes en chœur les indénombrables horloges qui composaient l'atelier, malgré le fait qu'aucune n'indique la même heure. Sur une table, placée au centre de l'atelier, se dressait fièrement un immense château de cartes, entouré par des petits soldats de plombs, tous posés sur la tête, sauf un, celui avec le bras bleu.

*A-tchi !*

- … Mimi ?
- Oh pardon ! C'est fou ce qu'il y a comme poussière ici !
- J'arrive à voir un peu ! *sbong !* Aïeuh ! En fait non…
- Arrêtez de bouger vous deux ! Pipistrelle tu peux éternuer s'il te plaît ?
- Oui ! Je sais éternuer sur commande ! Mmmmmnnngggggnnnnh…

*A-tchi !*

Les lumières se rallumèrent.

- Oooh les soldats sont à l'endroit maintenant !
- Mais le château de carte est à l'envers.
- Pas si on fait le poirier !

L'ascensionneur fit à nouveau irruption dans l'atelier, toujours accompagné de son habituel nuage de fumée qui manqua de faire éternuer Mimi une nouvelle fois. Free-GO en sortit le premier, poussé par Carroll et Ad-4M pour le faire sortir, suivi de l'infirmier et de l'écrivain qui salua son engin qui était déjà reparti dans l'ombre.

- Attendez, vous venez de le faire partir là ?
- Oui, je lui ai dit au revoir !
- Mais comment on va sortir d'ici ?
- …
- …
- CE-LA-ME-FAIT-FROID-DANS-LE-DOS ! HUE-HUE-HUE !
- Pas d'inquiétude ! Il faut demander à Madame Pignon de Pin.

Le robot trifouilla dans un tiroir, sortit un avion de papier qu'il lança vers Ad-4M (qui le rattrapa maladroitement) avant de dénicher une balle rebondissante qu'il fit violemment rebondir dans tout son atelier, avant de trouver enfin ce qu'il cherchait, une petite toupie arc-en-ciel.

- Iiiiiiiiiiiih ! Elle est trop beeeeeelle !
- Attendez vous ne deviez pas chercher Madame Pignon de Pin ?
- Tournez mademoiselle ! Oooh quelle belle ballerine vous faites !
- LE-VENT-VA-TOURNER ! HUE-HUE-HUE !
- Oooh regarde un hublooot !
- Oooh ! On voit quoi au travers ?
- Je ne sais pas… Hmmm…

Carroll tourna sur lui-même puis ouvrit un placard d'où il sortit une grosse boîte qu'il posa sur la table. De cette boîte, il sortit un petit vase rose dont il sortit une nouvelle boîte en forme de triangle. À l'intérieur se trouvait une boule jaune qu'il ouvrit pour poser enfin sur la table une boîte minuscule qu'il ouvrit, dévoilant Madame Pignon de Pin, qui se tenait fièrement sur son petit coussin de soie verte.

- C-C'est vr-vraiment un p-p-*dut duuut*pignon de pain ?
- J'aurai dû m'y attendre…
- Bonjour Madame Pignon de Pin ! Pardon de vous déranger dans votre sommeil ! Dites-moi, où sommes-nous ?

Louise leva les yeux au ciel, priant que quelque chose de sensé n'intervienne pour mettre de l'ordre dans tout cela, mais Lewis Carroll continua de papoter avec son pignon de pin tandis qu'Ad-4M essayait de savoir s'il entendait quelque chose.

- Ah attends je vois quelque chose…
- Ouiii ! C'est une lumière rouge ? Oh y en a deux !
- On dirait des yeux !

Et la vue de MechaDotty de l'avait pas trompée. À peine eut-elle prononcé sa phrase que le mur contre lequel elle et son double s'appuyait explosa brutalement, laissant pénétrer dans l'atelier un gigantesque lapin robotique, suivi d'un deuxième, sur lequel apparut le fameux siège rose d'Alice, qui tenait entre des mains sa fidèle télécommande, maintenant ornée d'un nœud rouge.

- Je vous ai trouvéééée ~
- Tourneuh tourneuh toupie ma-… Pipistrelle leva les yeux et aperçut les deux énormes lapins aux yeux rouges (car non, elle ne les avait pas entendu, trop absorbée par la toupie). Iiiiirk c'est la mini psychopathe !
- Mademoiselle Alice ! Comment avez vous trouvé mon atelier ?
- Bah je suis passée par la porte !
- Ça me semble logique.
- Oui je me disais la même chose.
- La ferme !

- Je vais vous montrer Monsieur Carroll que vous ne pourrez plus vous passer de moi ! En avant mes chapeaux-pointus-turlututu !
- Oh ça me dit quelque chose !

Les flans des deux lapins mécaniques s'ouvrirent dans un bruit de boîte à musique avant qu'une multitude de chapeaux haut-de-forme en surgissent. Des petites jambes robotisées sortirent ensuite du bas des chapeaux qui se mirent soudainement à courir dans tous les sens partout dans l'atelier. Alice appuya sur un nouveau bouton de sa télécommande, ouvrant le haut des chapeaux qui tirèrent tous une multitude de petits feux d'artifice dans une gigantesque cacophonie. Frustrée, Alice appuya sur de nouveaux boutons, remplaçant les feux d'artifice par des nuages de barbapapa, avant qu'enfin elle ne trouve le bon bouton. Alors, des tasses de thé explosives firent leur apparition sur les rebords des chapeaux qui, semblables à des roulettes de pistolets, étaient près à faire feu au moindre moment.

- Mais… Ce n'est pas l'heure du thé ! N'est-ce pas Madame Pignon de Pin ?
- Lâchez votre espèce de graine ! Vous devez être notre guide je vous rappelle !
- Plaît-il ? Oh c'est exact !… Avez-vous une idée Madame Pignon de Pin ?
- On est foutu…

De plus en plus énervée, Alice retourna l'attention dans sa direction, vexée de voir que son public se disperse trop facilement.

- Cette fois-ci vous ne pouvez plus vous défiler ! J'ai ajouté une petite queue toute mignonne à mes lapins ! Regardez !

Le deuxième lapin d'Alice exécuta un bond prodigieux pour se tourner et montrer sa belle queue en plumes d'autruches, mais dans son geste, il bouscula un chapeau-pointu-turlututu qui tira malencontreusement une tasse explosive qui s'écrasa sur le château de cartes, toujours à l'envers. La drôle de sculpture éclata, projetant ses cartes dans toutes les directions, notamment dans celle de Free-GO qui en reçut une sur le visage. Trop solide pour être inquiété, l'androïde réfrigérant se mit à rire bêtement et fit un pas en arrière, bousculant Ad-4M qui perdit son équilibre et lâcha malencontreusement son avion de papier. Le planeur flotta doucement au dessus de la forêt de chapeau avant de faire demi-tour et d'aller se cogner contre Monsieur Carroll qui se baissa pour le ramasser. Mais par malchance, en se relevant, le robot se cogna contre la table sur laquelle était posée Madame Pignon de Pin qui vola à travers la pièce et vint s'enfoncer dans la narine de Pipistrelle qui, dans une expression de panique, relâcha le plus puissant et distingué éternuement qui soit.

*AAAAATCHRRAAAAAAAAAA !*

- *Sneurfl* Quelqu'un a un mouchoooooir ?
- Ah j'en ai un !

Das le noir le plus total, Alice descendit de son fidèle destrier et tenta de s'approcher de Mimi, mais cogna son petit pied contre un de ses chapeaux-pointus-turlututu. Le mini robot tira une nouvelle tasse explosive, qui éclata contre un de ses congénères, qui réagit de la même manière. S'en suivit alors une série interminable d'explosion de tasses parfumées à la bergamote, un véritable apocalypse qui eut lieu dans le noir le plus total. Enfin, après que le silence ne retrouve sa place, Pipistrelle éternua à nouveau, ramenant la lumière dans l'atelier de Carroll. Des tables, meubles, horloges et autres morceaux de mobilier, il ne restait qu'un pied de table qui tenait tout seul comme par magie, le reste entièrement pulvériser par les tasses meurtrières. Mechadotty et Kellerstein, elles, étaient restées cachées derrière le fauteuil de Louise, qui avait dégainé son parapluie pour s'abriter de l'eau bouillante (toujours avoir un parapluie sur soi ! La preuve). Ad-4M et Mimi étaient derrière Free-GO, qui rigolait bêtement parce qu'il venait de se raconter une blague à lui-même. Alice, elle, sortit sa tête au milieu de ses chapeaux-pointus-turlututu et contempla le désastre. Tous ses robots étaient hors service, les chapeaux étaient pour la plupart les pieds en l'air, incapable de bouger, et les lapins étaient tous les deux assommés et inconscients. Alors, au milieu de la fumée qui s'échappait de l'un des tuyaux de l'atelier se dégagea une silhouette familière à la petite fille qui se releva.

- P-Papa ?
- Ma fille, je me suis tant inquiété.

L'homme moustachu sortit de la fumée et s'approcha de sa fille, gênée d'être retrouvée dans cet état. L'enfant épousseta sa robe et détourna le regard pour ne pas croiser celui de son paternel.

- Monsieur Carroll a beaucoup de travail, tu devrais le laisser tranquille. Je lui demanderai à ce qu'il écrive sur toi un jour.
- Pour de vrai ?
- Oui. Maintenant rentre à la maison.
- Voui…
- Attendez !

Louise s'avança au milieu des chapeaux-pointus-turlututu et s'adressa à la petite blonde qui pinçait ses lèvres, comme si elle avait fait une petite bêtise.

- Tu crois que nous pourrions profiter de tes lapins ? Je veux dire, ils vont vite et on doit aller quelque part.
- Oh oui ! Si tu nous aide, Monsieur Carroll écrira sur toi !
- M-Mais Monsieur Carroll a beaucoup à faire…
- Chhhhht ! Alors ?

La petite fille hésita, se tripota les doigts, les enroula autour de ses cheveux blonds puis acquiesça timidement. Kellerstein poussa un cri de joie tandis que Louise lâcha un soupire de soulagement. Le tout était maintenant de retrouver Carroll qui s'était complètement volatilisé.

- Nous pouvons dire merci à Madame Pignon de Pin ! Je me demande si elle ne se sent pas trop seule maintenant…
- Eeh ! Mais qu'est-ce que vous faites là ? Vous étiez où ?

Le robot présenta discrètement un masque à la secrétaire qui reconnut immédiatement le visage du père d'Alice. Si le temps de compréhension aurait été beaucoup plus long pour Pipistrelle, Louise comprit immédiatement et fut heureuse de voir que leur guide était finalement plus capable que ce qu'il ne le paraissait. Ainsi, après avoir remis sur pieds tous les chapeaux-pointus-turlututu, la fine équipe s'engagea dans les deux lapins mécaniques qui, après un bon coup de main de Mechadotty, étaient prêt à repartir à l'aventure. Le temps de délibération fut assez long, chacun cherchant à entrer dans un lapin en particulier, et ce fut donc au prix de longues minutes et de nombres confrontations dénuées de toute logique que le groupe se sépara finalement et quitta l'atelier de Carroll. L'intérieur des lapins était tout confort, les surfaces étaient recouvertes de tissu matelassé rose et deux canapés douillets étaient à disposition. Les chapeaux-pointus-turlututu, eux, s'étaient tous aplatis et rangés sous les canapés afin de ne pas prendre trop de place. Ad-4M, lui, pu finalement replier ses lames après une petite opération de sa patronne, le permettant de s'asseoir sans endommager les beaux canapés d'Alice. La route fut plutôt longue, mais l'émerveillement de la part de tous les passagers combla suffisamment l'attente pour qu'enfin les lapins mécaniques arrivent à bon port.

- Nous sommes arrivés ! À moins que ce soit notre destination qui soit arrivée à nous. Monsieur le coussin, vous a-t-on déjà dit que vos coins étaient de toute beauté ?
- Je peux sortir voir ?
- Oui Madame Dolores !

Kellerstein s'installa sur le fauteuil rose qui trônait au milieu du lapin mécanique et attendit qu'il monte pour sortir du dos du lapin. À l'extérieur, on était bien loin de l'atelier de Carroll. En effet à la place c'était une zone assez montagneuse qui s'étendait à perte de vue devant les yeux de la doctoresse admirative. Mais ce qui était le plus remarquable, c'était cet immense vaisseau volant qui lévitait dangereusement au-dessus du sol, et dont la taille dépassait l'entendement.

- On va monter là-dedans ?
- Parfaitement !
- Youpi ! Alors en route super lapins !

Alice attendit que Kellerstein regagne l'intérieur de la créature mécanique pour appuyer sur sa télécommande pour reprendre la marche. Les lapins partirent immédiatement à toute vitesse en direction de l'imposant vaisseau, afin d'apporter au milieu de ce métal, une bonne dose de folie qui rendrait sans doute tout cela un peu plus joli.

- Non je ne le ferai pas !
- Alleeeeez !
- Alleeeeez !
*sbuibuibuibuibui !*
- Huhu ~
- Huhu ~
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MessageSujet: Re: Manche n°2 : Aller simple   Manche n°2 : Aller simple I_icon_minitimeSam 20 Aoû - 21:20

Je réserve aussi un petit post depuis mon téléphone à cause de petits soucis informatiques, j'espère pouvoir récupérer mon ordinateur dès demain pour poster illico, désolé en attendant ._.
Aldrick Voelsungen
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MessageSujet: Re: Manche n°2 : Aller simple   Manche n°2 : Aller simple I_icon_minitimeSam 20 Aoû - 23:57

- Alors ?
- L'eau est encore trop haute, ça ne diminue pas. Rien à faire.
- Il va falloir passer par les toits ?
- J'en ai bien peur.

Lyvia fit la moue, peu enchantée manifestement par cette idée.

- Bien ne tardons pas, avec une telle inondation près des berges, je doute qu'on n'ait pas attiré l'attention de tous les robots du secteur.

Achevant de fixer le câble de ceinture, qui reliait à présent l'immeuble d'en face à l'une des voûtes de la cathédrale, Rick eut un sourire satisfait, face au dénivelé qui leur prodiguerait une belle descente.

- Ça devrait tenir, on peut y aller.
- Comment ça "ça : devrait" ?
- On sera vulnérables durant la traversée, mais si personne ne nous attaque...
- Je vois. Coupa Aldrick en regardant en contre bas, pas certain de vouloir entendre la suite de cette phrase. Allons-y.

Rick acquiesça et défaisant son nœud de lavallière l'entoura autour du câble. Lyvia fit la moue, mais s’accrochant fermement à lui prit une grande inspiration et... L'instant suivant tous deux n'étaient plus des silhouettes sombres proches d'un balcon. Aldrick soupira, mais à l'instar de son double, il prit son courage à deux mains et s'élança derrière eux, non sans qu'un cri de surprise ne lui échappe alors que le vent fouettait son visage.

*C'est haut ! Arg ! Mais qu'est-ce qu'ils fichent ?*

- Poussez-vous ! Hurla-t-il en voyant le balcon encombré.

Trop tard ! Le choc, les envoya tous trois valser directement dans la porte-fenêtre qui s'ouvrit avec fracas. Grognements et cris leur échappèrent, avant qu'ils ne puissent se défaire les uns des autres pour se redresser en partie.

- Fichtre ! Voilà ce qui s'appelle faire une entrée fracassante ! Déclara une voix où la joie de vivre dénotait l'amusement certain de la jeunesse. Je saurais m'en souvenir !

Aldrick se tint la tête, encore étourdi, il ne distingua nettement la silhouette fine qui leur parlait que lorsque celle-ci se pencha avec amabilité pour permettre à Lyvia de se relever.

- Ce n’est pas tous les jours qu’un ange tombe du ciel. C’est un plaisir de vous rencontrer mademoiselle.
- Oh, euh, merci. Déclara la Sylphide rougissante.
- Est-ce de là-haut que vous arrivez ? Interrogea-t-il en observant la tyrolienne improvisée, plus curieux qu'angoissé à l'idée de les voir ainsi débouler. Vous... Oh !

Il se tut, permettant aux deux loups de contempler un jeune homme svelte, plutôt élégant, quoique son habit laissa à présager une pauvreté qu'il lui plaisait de combler en se remplissant les poches. D'une manière qui fit froncer le nez au commissaire tant il avait pour habitude de la réprimer. Sur son visage fin, quelques mèches hirsutes rousses, encadraient son visage, avant de terminer en queue-de-cheval. Une légère barbe le vieillissait à peine, tandis que sa stature n'était pas sans dévoiler des muscles fins et habilement sculptés. Son look parut à l'agent un peu décalé toutefois, tant il ne parvenait à s'expliquer la raison de lunettes immenses et de divers objets qu'il n'avait encore jamais vus.

- Mademoiselle, vous n'êtes pas sans me rappeler une bonne amie à moi.
- Ah, vraiment ?
- Oui, une dame blonde de la plus grande beauté. Tout comme vous.~
- À qui avons-nous l'honneur ? S’impatienta subitement Rick, visiblement agacé que la situation lui échappe.
- Je manque à tous mes devoirs. Veuillez me pardonner. Glissa le jeune homme avant qu'un sourire enchanté n'égaie son visage. Lupin. Arsène Lupin.
- Vous !
- Moi.
- Mais vous êtes...
- Attirant ? À votre goût ?
- N'exagérons rien. Souffla Rick qui se rapprocha malgré tout de Lyvia comme s'il avait craint subitement qu'elle ne se volatilise.
- Vous êtes le gentleman cambrioleur ! Reprit Lyvia sidérée. L'écho ne parle que de vous !
- Vous me flattez, mademoiselle. Néanmoins, je puis affirmer que ce prestigieux journal s'emploie aussi à narrer les exploits, ou plutôt devrais-je dire l'absence d'exploits ? De la police lorsque nous nous croisons.
- Ce n'est pas la modestie qui vous étouffe. Déclara Rick, non sans cynisme.
- Ma foi, non, je le concède, mais j'ai d'autres talents. Celui de vous servir de guide par exemple.
- Pardon ?
- En revanche, on m'avait indiqué un seul homme. Il semblerait que des dispositions s'imposent.

Lupin sortit une montre à gousset de l’intérieur de sa veste, parut en changer les réglages et d’un geste vif, appuya sur un bouton, avant de sourire.

- Bien, bien. Tout est réglé. ~
- De quoi diable parlez-vous à la fin ?
- Comment ? Vous n'avez pas entendu les hauts parleurs ? La ville ne parle plus que ça ! Des guides -dont-même- ont été mandés pour vous rapatrier vers un laboratoire où des scientifiques se proposent de vous ramener chez vous.

Aldrick en resta bête. Alors ça, il ne s'y était vraiment pas attendu. Un léger rire le gagna pourtant :

- C’est sérieux ? Un cambrioleur pour guider un commissaire ? Ils ne manquent pas d’humour par ici dit donc !

*Mais bon, s’il s’appelle « Lupin », c’est qu’il n’est peut-être pas si mauvais*

- C'est pour ça que Smart-F0N me persécutait ?
- Pardon ?
- Il semblerait que non.

Les loups haussèrent un sourcil, perplexe face à cette information, mais alors qu'ils ouvraient la bouche pour parler, une alarme désagréable retentie, avant qu'une voix mécanique ne beugle :

- Rends-toi Lupin ! La maison est cernée !
- Ah ce cher Ganimard. Il ne part pas le nord !

Des éclats de rire plein la voix, Lupin s'avança précautionneusement vers la fenêtre, avisant les robots aux extrémités gonflables, tandis que l’un d’eux derrière la porte reprit :

- Rends-toi Lupin !
- Un ami à vous ?
- En quelque sorte.
- Bon sang ! Qu’est-ce que vous avez fait pour vous attirer les foudres de la police ?
- Oh trois fois rien, les affaires m’ont mené ci et là près d’un diamant bleu et…
- Vous l’avez volé ?
- Certes.
- Rendez-le !
- Diable non ! Il m’a déjà coûté trop cher.
- Mais enfin combien sont-ils pour…

Tout en parlant, Aldrick se pencha au-dessus du balcon, découvrant avec stupeur une armada de robots flottant qui semblaient prêt à en découdre.

*La poisse ! Il y en a facilement une trentaine ! *

- Rends-toi Lu… Nouvelle cible verrouillée.

Aldrick tressaillit.

* C’est pas vrai ! *

- À terre !

Il eut tout juste le temps de fermer la fenêtre derrière lui que déjà, les coups de feu pleuvaient, faisant sursauter tous les présents qui s’étaient baissés par réflexe.

- Que… Comment se fait-il qu’ils soient si hostiles ?
- Plus tard, les explications ! Sortons ! Déclara Lyvia en gagnant la porte.
- Non ! N’ouvrez pas ! S’écria Arsène en se précipitant.

Le gentilhomme tomba nez à nez avec le méca-policier, qui entra sans chercher plus loin. Le pistolet au bout de sa mécanique pointait le cambrioleur.

- Au nom de la loi Lupin, je vous arrête !
- Non !

Le robot sembla traiter les données. Son capteur visuel examina la pièce, tâchant d’identifier les présents, malgré un temps de latence qui dénotaient des circuits anciens.

- Rick Voelsungen. Noblesse parisienne, cassier vierge.

Son œil droit, scanna sans ménagement le loup, passant à la belle, qui venait de se mettre en barrière.

- Annuler l’ordre ! Code Dli-Vr@nc3 !
- Agent spécial Lyvia. Code…
- Attention ! Ils remettent ça !

Une nouvelle salve eut lieu, cette fois, certains robots étaient parvenus à se propulser difficilement jusqu’au balcon d’où ils firent feu. Une série de fléchettes tranquillisantes orna le mur derrière eux, tandis qu’Aldrick se redressait péniblement, en tâchant de n’écraser aucun de ses comparses sur lesquels il s’était jeté. Ganimard de sa main de libre, en avait profité pour passer les menottes à Lupin, tout en scannant finalement le second loup.

- Beau réflexe !
- Il faut qu’on sorte d’ici.
- Ça, j’en fais mon affaire. ~
- Ils vont entrer !
- Ganimard, libérez-le ! Ce n’est pas le moment…

Alors seulement l’analyse sembla terminée pour le vieux policier robot, qui déclara :

- Sujet inconnu… Cible verrouillée.

Aussitôt, un cliquetis indiqua que le chien de l’arme de Ganimard venait de sauter. Lupin ouvrit de grands yeux et eu tout juste le réflexe de dévier le tir, pour le diriger vers le premier robot qui était parvenu à entrer. Celui-ci tourna circulairement sur lui-même, répétant :

- Cible… Cible…
- Ganimard sacrebleu ! Mais qu’est-ce qui se passe ? Ils sont tous fous !
- Tu leur fais perdre la tête Aldrick.~
- Tu crois toujours que ton sex-appeal est inégalable ?
- Hey !

Lyvia dressa un mur d’air face aux deux lycanthropes, arrêtant ainsi une nouvelle salve de fléchettes.

- Lupin, par où peut-on sortir ?

Poussant le groupe vers le canapé pour leur éviter une nouvelle attaque, le cambrioleur voulut parler, mais Aldrick se rua sur le policier, les entrainant tous trois sur le sol, en tâchant de le défaire de son arme.

- Maintenez-le Aldrick, j’en ai pour quelques secondes.

D’un geste habile, Lupin piocha une épingle dans la doublure de sa veste, et crocheta les menottes. Jamais le commissaire ne fut si heureux d’être face à un expert du crochetage.

- Désolé Ganimard mais je n’aime pas les relations trop restrictives.
- Cible verrouil....

D’un même accord, Rick et Aldrick avaient soulevé le vieux robot pour le catapulter sur leurs opposants, tandis que Lupin, rapide et agile, avait gagné la cheminée et appuyait de toutes ses forces sur la moulure. Le battant entier du mur pivota, laissant place à un escalier dans le corps même de la cheminée, en parfait état.

- Mademoiselle, après vous. Messieurs, pressons, je vous prie.
- Non.
- Quoi ?
- Rendez d’abord ce que vous avez pris ici.
- Y a plus urgent que ça pour l’instant, dépêche !

Sans lui demander son avis, Rick l’entraina à travers l’escalier, qui se referma derrière Lupin.

- C’était moins une. Jolis réflexes M. Voelsungen.
- Mouais. Firent les deux loups, d’un air contrarié.

Lupin arqua un sourcil, comprenant enfin jusqu’à quel point la dualité était poussée, et s’apprêtait à parler quand Lyvia déclara, au pied de l’escalier :

- Les garçons venez voir !

La gente masculine s’exécuta aussitôt, craignant qu’une nouvelle salve de robots ne surgisse. Mais après avoir traversé d’autres pièces similaires, ils aboutirent sur une cours, descendirent un autre escalier et débouchèrent sur la rue parallèle, où le pavé était sec, et où Lyvia s’était agenouillée près du corps d’une demoiselle.

- On dirait qu’elle ne se sent mal.
- C’est sûr qu’il vaudrait mieux qu’elle se sente femelle.
- Mina…
- Oh, elle reprend connaissance. Tout va bien ?
- Que… Où suis-je ? Où est Mina ?
- Qui ?

Ils n’eurent pas droit à d’avantage de réponse que déjà, la jeune femme se redressait en titubant.

- La Seine !
- Elle lui a donné un petit nom, vous croyez ?

Du haut du pont, avec une certaine grâce, une demoiselle venait de sauter directement dans l’eau vaseuse de la Seine. Après elle, une boule de mana se forma et deux petites filles blondes avec d’énormes bouclettes s’engouffrèrent à sa suite. Sans demander son reste, l’inconnue se releva et s’en fut à son tour courir jusqu’au pont, réitérant le plongeon avec la même aisance.
Lupin avait retenu la course de Lyvia, avant qu’elle ne traverse davantage la rue pour suivre la jeune femme.

- Lyvia attendez ! Si vous allez par-là, nous serons arrêtés avant même que vous soyez sur le pont. Laissons-la régler ses affaires.
- Mais…
- Bas les pattes ! Répliqua Rick en les séparant, visiblement au comble de la colère.
- La jalousie est un vilain défaut messieurs.

Aldrick, quant à lui, s’était dressé -sans savoir pourquoi- en barrière entre la belle et le cambrioleur, jusqu’à ce que le commentaire véridique ne colore ses joues d’un rouge puissant d’embarras. La Sylphide ne put s’opposer davantage à tout ça, que déjà un aéronef était propulsé hors de l’eau, suivi de près par un second.

- Qu’est-ce que… ?
- On dirait que vos routes se recroiseront.
- Comment ?
- Nous allons dans la même direction. D’ailleurs, ne tardons pas, il serait impoli d’être en retard, n’est-ce pas ? Il nous faut gagner la périphérie de la ville, et plus encore.

Lyvia jeta un dernier regard derrière elle avant de suivre leur guide, qui les mena quelques rues plus loin, vers la grande place de la cité. Là, ils passèrent un portique, et descendirent un nouvel escalier, tout de métal cette fois avant de descendre dans les profondeurs de la ville.

- Cité. Deux minutes d’arrêt.
- Pile à l’heure. ~ Souffla Lupin ravi.

Face à eux se dressa un immense réseau d’engrenages, de câbles, et de cheminées à vapeur. Une sorte de capsule ouvrit ses portes, permettant à des gens d’en descendre. La foule éclectique, déserta presque l’habitacle. Jamais encore Aldrick n'avait vu défiler tant de mécanismes incorporés sur des êtres humains. Une armure de fer l’impressionna d’ailleurs en se disputant avec un tout petit garçon blond, à la cape noire, mais dont la jambe et le bras gauche avaient été mécanisés.

- Je te dis qu’on ne peut pas garder ce chat Al !
- Mais Ed ! Il est tout seul…
- L’hyr0nd-L ! Souffla Rick admiratif. Je croyais que ce n’était qu’une légende urbaine.
- Tout conte a une part de vérité.~ Reprit Aldrick en entrant prudemment.

Les portes se refermèrent et la mécanique bien huilée s’enclencha, se contorsionnant dans les passages les plus étroits, s’agrandissant en faisant apparaitre tables, chaises et autres commodités dans les plus larges, l’appareil tel un animal métallique se rua à travers les conduits sombres, avant de déboucher dans l’eau trouble de la Seine. S’adaptant à son environnement avec une vitesse folle, tantôt pressant la foule, tantôt laissant assez d’espace entre chacun pour y installer plusieurs sièges. Se désolidarisant des câbles de la ville pour lui préférer des rails sous-marins, elle gagna alors plusieurs étages, compartimentant les voyageurs sans ébranler personne malgré ses métamorphoses inopinées. Elle longea la berge d’une part et proposa une vision partielle des fonds du fleuve, grâce au concours de plusieurs vitres hermétiques. Aldrick, la bouche ouverte en grand, n’en croyait pas ses yeux.

- Que ça va vite !

Le rire de Lupin s’éleva près de lui, franc et hardi, avec toute l’impatience de la jeunesse. Le cambrioleur s’exclama alors que les deux autres acquiesçaient dans un sourire entendu :

- Et encore ! C’est le trajet le plus lent !

Aldrick ne sut s’il devait se vexer ou rire à son tour, tant il lui semblait alors que l’allégresse de leur guide était communicative.

- Le modèle 16 peut rallier Montmartre et St Ouen en 5 minutes à peine !

Le commissaire voulu sortir sa montre, comme pour vérifier ce que valait à présent le trajet actuel, mais le wagon le plus haut dépassa de l’eau, revêtant partiellement l’apparence d’un tramway de luxe.

- C’est donc ainsi que ça marche. Souffla Rick, impressionné également, bien qu’il fît de gros efforts pour ne rien laisser paraitre.

L’arrêt suivant vit descendre autant de passagers qu’il en monta. L’appareil se remit en branle sur quelques mètres avant de se transformer à nouveau au détour d’un virage en une puissante machine volante, zeppelin de pointe. Sur le pont, ils n’étaient désormais moins d’une douzaine.

- La vue est magnifique… S’extasia Lyvia.
- Pas autant que toi.
- Si tu essaies de te faire pardonner pour ton fan-club, c’est râpé.
- Que… Pas du tout ! Tressaillit Rick, pris de court.

Ils n’eurent cependant pas le temps d’en apprécier toutes les splendeurs, que déjà, une voix familière résonnait près d’eux :

- Cible repérée !
- Que… Ganimard ? Mais comment ?
- Mais d’où sort ce robot à la fin ?
- De l’entrepôt 13. Soupira Lupin en repérant finalement un petit point rouge sur l’épaule d’Aldrick, qu’il retira aussitôt pour l’écraser. Un mouchard ! Comme c’est petit !
- C’est vrai qu’il n’était pas très grand…
- Le robot non plus cela dit.

Ce dernier parut buguer un peu avant de s’en vexer et de s’exclamer :

- Attaque coup de filet !

Alors qu’une poignée d’officiers se joignait au méca-policier, son buste s’ouvrit en grand dévoilant une série de rouages et de pièces en tous genres avant qu’un immense filet de pêche métallique ne s’abatte sur eux. Lupin, plus vif, fit un bon de côté, constatant avec mécontentement la prise admirable de ses trois acolytes.

Deux autres robots policiers se mirent à lui tirer dessus à grand coup de fléchettes paralysantes, forçant Lupin à se réfugier derrière un des mâts. Réajustant sa montre, il la tourna d’un quart de tour, faisant apparaitre dans son dos un jet pack à vapeur. Tel un insecte autour d’une lumière trop vive, Lupin se mit à virevolter en cercle autour des policiers. Ces derniers, eurent toutes les peines du monde à réajuster leurs tirs avec une cible mouvante si rapide. Profitant de la vapeur émise par son moyen de locomotion, Lupin recouvrit bientôt une partie du pont d’un épais brouillard blanchâtre. Se faufilant jusqu’aux autres pour leur venir en aide, il fut surpris de trouver le filet partiellement déchiré et de devoir se baisser quand l’un des robots policiers passa au-dessus de lui.

- À gauche Rick !
- Baisse-toi Aldrick !

Le poing de Rick explosa partiellement les capteurs visuels et sensoriels d’un des robots qui ne cessa pas pour autant sa salve de fléchettes. Aucune d’entre elles, cependant, ne touchèrent les présents, car Lyvia avait formé autour de lui une bulle d’air qui lui renvoya tous ses projectiles. Dos à dos, les deux loups ne parvenaient à se défaire de leurs sourires, cognant bien volontiers ci et là quand les robots s’approchaient de trop.

- Où est Ganimard ?
- Attaque Arrêt-Station !

Tout le bâtiment volant se stoppa d’un bloc, faisant chuter tous les passagers vers l’avant, puis un peu vers l’arrière avant de se stabiliser complétement tandis que le commandant de bord annonçait, après un :

< Pampamdam >


- … Donc il fallait qu’elle éternue pour que la lumière se fasse ? Quelle drôle d’histoire ! L’auteur a eu du nez sur ce coup-là ! Que… Euh, on m’entend déjà là ? Ahem. Mesdames, messieurs, suite à la création d’un nouvel arrêt, nous sommes désormais à 2000 lieues dans le ciel. Vous pouvez donc observer que nous sommes au milieu de nulle part et nous vous déconseillons de sortir. Néanmoins, vous pouvez profiter de la vue. À votre droite : rien du tout, à gauche la montagne de l’oubli, dont le nom… Euh… Qu’est-ce que je disais déjà ? ... C’était important…

La suite ne parut pas aux oreilles du groupe. Ganimard s’était redressé, faisant sortir de son chapeau une hélice d’hélicoptère de petite dimension munie de deux poignées directives de chaque côté pour se lancer à la poursuite de Lupin. Un duel aérien s’en suivit alors, les deux opposants se livrant à une série de loopings. Tandis que pleuvaient les coups, le trio avait récupéré les restes du filet et profitant de l’étourdissement des robots policiers après le choc, les en avaient emmaillotés, comme un énorme donut mécanique.

- Faut qu’on reparte !
- On n’y voit rien avec tout leur bazar.

Rick agita la main pour chasser un peu de l’air comprimé qui faisait planer sur le pont un dense brouillard, et se perpétuait sur un bon mètre de hauteur, malgré les éclaircies qu’apportaient ci et là le robot.

- Mais si ! Là, regardez ! On dirait que ça forme des lignes.
- Y’a des cercles aussi, non ?
- Me dites pas que…

Lyvia parut brièvement décontenancée, puis serrant des poings pointa un index vindicatif vers le cambrioleur volant.

- Lupin cessez immédiatement de jouer au morpion !
- Haha ! J’ai gagné ! S’exclama l’interpellé d’un rire qu’exaltait la joie de vivre.
- Fichtre ! Je vous aurais ! S’écria le robot à qui le choc semblait avoir rendu sa personnalité originelle.
- Allons Ganimard, soyez beau joueur, acceptez votre défaite. Nous sommes pressés.
- Que… Non !
- Tant pis pour vous ! À la fin de l’envoi, je touche !

Se dressant face à son ennemi de toujours, Lupin, agile et vif, fit appel à son poing et expédia vigoureusement ce dernier dans la carlingue métallique de l’automate. Ce dernier se plia en deux, manquant de découper en morceaux son vis-à-vis à cause de son hélice. Mais c’était sans compter sur l’adresse du cambrioleur qui s’éleva précipitamment avant de venir débrancher deux câbles derrière la tête de Ganimard. Le méca-robot grésilla, sembla vouloir s’exprimer mais seul un « Hui hui hui hui hui. »  pareil à une alarme de police lui échappa avant qu’il ne s’éteigne complétement.
Lupin le rattrapa par le col et le reposa doucement sur la plateforme alors que le bâtiment s’ébranlait à nouveau, repartant sans encombre, arrachant un cri de satisfaction au jeune homme :

- Ah ! Notre destination est en vue !

Comme un seul être, tous trois se tournèrent vers la montagne, distinguant derrière elle une immense forteresse volante de métal. Aldrick n’en crut pas ses yeux.

- Remettez-vous allons ! D’ici peu, vous serez à bon port ! Le laboratoire est à l’intérieur !
- Ça a l’air immense !
- J’imagine que vous connaissez l’endroit comme votre poche, Lupin ?

Pour toute réponse, le gentilhomme eut un sourire entendu, alors que la porte de la gargantuesque embarcation s’ouvrait pour laisser entrer le zeppelin entier.

- Il y a plus de monde que je n’imaginais ! S’enjoua Lupin en avisant les premiers arrivants.
- Pas si vite ! Vous n’oubliez rien Lupin ?

Le brun arqua un sourcil, interrogateur.

- Rendez-lui son alliance.

Rick ouvrit de gros yeux, sidéré en observant sa main à laquelle manquait la précieuse bague. Une moue fâchée le gagna avant qu’il ne reprenne contenance et ne déclare sur le même ton en récupérant son bien :

- Tant que vous y êtes, profitez-en pour lui rendre sa montre.

Lupin eut un sourire et s’inclinant à peine, fit de même avec le commissaire qui fouillait ses poches, en vain. Lyvia eut un franc éclat de rire et appuyant chacune de ses mains sur l’épaule des loups présents, déclara :

- Ah ça Lupin ! Vous êtes un homme qui a du flair pour les beaux objets !
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MessageSujet: Re: Manche n°2 : Aller simple   Manche n°2 : Aller simple I_icon_minitimeDim 21 Aoû - 8:54

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MessageSujet: Re: Manche n°2 : Aller simple   Manche n°2 : Aller simple I_icon_minitimeDim 21 Aoû - 10:57

Au premier tremblement des parois, une hésitation palpable gagna le trio. Les regards se croisèrent, s’interrogeant silencieusement de la marche à suivre. Le second, plus violent encore, assourdi les deux loups par l’écho interminable des canalisations. La lumière balayait de plus en plus vivement l’intersection voisine, unique échappatoire sur plusieurs centaines de mètres à la ronde. D’un accord tacite, chacun se mit sur ses gardes. Un nouveau spasme ébranla leur abri, rejoint cette fois par la vague résonance d’un grincement de piston. Le dessin d’une silhouette massive se profila au carrefour, mais un intense faisceau lumineux dirigé dans leur direction les empêcha d’en distinguer davantage. Tous trois tentèrent de s’en préserver en portant leur main à leur visage, mais malgré cette précaution, aucun ne put apercevoir la propriétaire de la voix qui s’éleva :

Tiens, tiens, tiens. On dirait qu’on a trouvé nos brebis égarées Franky. Des brebis assez stupides pour se cacher dans les égouts.
Hé !
En voilà une qui bêle. Allez les filles, soyez gentilles et suivez moi. On n’a pas de temps à perdre.

Mais un soudain bruit de verre brisé accompagna le retour de l’obscurité. L’une des lames de Moon venait de fendre la torche qui leur faisait face, provoquant un salve de jurons colorés chez les nouveaux arrivants. Le trio s’organisa. Les iris des loups s'adaptèrent immédiatement aux ténèbres et leur compagne de route enclencha la vision nocturne de son masque, si bien que tous purent découvrir en même temps leur interlocutrice.

La taille serrée dans un corset de cuir et d’or, une jeune femme élégamment vêtu tirait avec avec agacement sur le long porte cigarette coincé entre ses lèvres. Son regard d’acier, s’agitait derrière des binocles rondes descendues au bout d’un nez fin et pointu. Il allait et venait, précis et rapide, accompagnant des doigts délicats ceints de bagues imposantes sur le monstre de fer qui la soutenait. Soutenue par ses bras massifs, les jupons de la demoiselle tombaient en cascade sur des plaques d’airain aux couleurs hétéroclites liées entre elles par de longues lignes de rivets et de boulons. Les articulations, faites de pistons et de tuyaux, laissaient échapper des nuages de vapeur à chacune de leurs activation et se rejoignaient sur un cou inexistant, surmonté d’une tête grosse et ronde, maintenue de part et d’autre par deux vis massives et fermement serrées. La ligne d’une mâchoire factice séparait ce visage d’acier en deux parts inégales, laissant à la plus petite le soin d'accueillir deux ampoules d’un bleu vif qui dessinaient un regard étrangement bienveillant au colosse. Ce fut d’ailleurs sa voix qui s’éleva. Une voix grave, au timbre métallique mais sans froideur, plus proche du ronronnement nostalgique des vieilles mécaniques.

Madame chatouille mes circuits. Les raisons pour que Madame chatouillent mes circuits sont : Madame est agacée, Madame souhaite me réparer, Madame est d’humeur joueuse. Qu’elle est l’humeur de Madame ?
Agacée ! Ça se voit non ! Et je cherche ton éclairage de secours ! Où est-ce qu’il est !?
Humeur enregistrée. Madame souhaite-elle un thé avec un peu de miel ?
Non ! Je veux ton éclairage !
L’éclairage apaisera-t-il Madame ?
Oui !
Activation de l’éclairage de secours.

Sur le torse de l’Hercules, une petite plaque pivota là où aurait pu se situer son cœur. Une lumière chaude s’en échappa, baignant les lieux d’un ton orangé parfaitement supportable. Le trio s’observa avec surprise, avant de reporter son attention sur « Madame », dont l’agitation avait à peine diminuée.
La jeune femme s’était redressée. La tête haute, elle avait ajusté, l’air de rien, le tombé de sa robe et, après avoir remonté ses lunettes, la voilà qui toisait d’un air hautain les présents. Elle lâcha finalement, une moue boudeuse retroussant à demi sa lèvre inférieure :

Vous me devez mille deux-cents francs pour l’ampoule.
Mille deux c… Minute, c’est à nous qu’elle parle ? Tenta Edward en esquissant un pas en arrière.
Nooooon, reprit son homologue. Elle doit être en communication externe.
Et si on s’éclipsait avant qu’elle termine ? Suggéra Moon qui s’était également reculée.
Bonne idée !
À trois.
Trois !

Et d’un même élan, le trio tourna les talons, se lançant dans une course folle au travers du tunnel. Moon avait pris la tête, sa petite taille lui permettant de se faufiler sans la moindre difficulté parmi la tuyauterie apparente. Il n’en fut pas tout à fait de même pour les deux lycanthropes derrière elle, qui durent se montrer plus qu’imaginatifs en matière de souplesse. Ce départ canon laissa pantoise leur nouvelle connaissance qui mit quelques secondes à réagir :

Attendez ! Où vous allez ?! Mais revenez ici tout de suite !

Elle trépignait et ses bottes, tambourinant sur le buste immense de son acolyte, firent résonner sur une centaine de mètres sa soudaine irritation. Le trio se trouva toutefois trop loin d’eux pour entendre l’interrogation du géant de fer :

Sur une échelle de 1 à 10, comment Madame évalue sa colère ?
Rattrape les !
Sur une échelle de 1 à 10, comment Madame évalue sa colère ?
Laisse tomber, je passe en manuel.

La jeune femme releva sa manche, dévoilant un bracelet à l’esthétique particulière que surmontait un massif bouton d’étain. Elle l’enclencha d’un geste ferme, provoquant l’ouverture d’une trappe dans le dos du colosse. Dans la fumée d’une vapeur sous pression, une chaise molletonnée en fut extraite, rattachée à un poste de pilotage élégant lui-même relié au moteur interne du robot. Aussi à l’aise qu’une amazone montant à crue, la demoiselle se hissa d’un geste sur le petit fauteuil, enfila un paire d’épaisses lunettes de protection et après avoir tirée une large bouffée de sa cigarette, elle souffla :

C’est parti !

Le choc. Les propulseurs puissants de Franky lui permirent de traverser la première paroi du tunnel sans la moindre difficulté, ne laissant derrière lui qu’un tas de briques et un épais nuage de poussière. Les autres pans de pierres n’opposèrent pas non plus la moindre résistance, si bien qu’en s’aidant des radars du colosse, sa partenaire n’eut aucun mal à retrouver la trace du petit groupe. Elle accéléra pour les dépasser depuis un couloir voisin avant de violemment tourner sur la droite. Le géant d’acier pulvérisa le mur, arrêtant enfin sa course face aux fuyards couverts de débris.

Ça suffit ! Pesta la pilote qui secoua ses vêtements d’un revers de main. J’ai été envoyée ici pour vous escorter auprès d’un groupe de grosses-têtes en blouses blanches, pas pour jouer au chat et à la souris.
Donc… C’est vous le guide ? Demanda Edward après avoir éternué à deux reprises.
Guide, escorte, éclaireuse… Utilise le terme que tu veux mon mignon.
Vous auriez peut-être pu commencer par là, lâcha Moon qui sembla s’exaspérer du silence soudain de son comparse. Ou, au moins, éviter de détruire une partie des sous-sols de la ville.
Je commence par ce que je veux. Ce ne sera pas une mangeuse de carottes qui me fera la leçon.
Répétez pour voir ? Argua la guerrière dont la paume venait d’accueillir une lame d’argent.
Ca-r-ot-tes.
Moon !

D’un même geste, les loups retinrent le bras de leur amie dont l’arme ne fit pas d’autres entailles qu’une minuscules rayures sur le pied droit du colosse d’acier. Cela provoqua la colère de la jolie brune qui finit par se défaire de cette étreinte sous le regard moqueur de leur vis-à-vis. Gardant un œil sur Moon, Edward se risqua à demander :

Vous avez prévu une date de départ Madame…
Mary Shelley. Mais Mary suffira. Et lui, c’est Franky, indiqua-t-elle en caressant du bout des doigts la tête ronde de son compagnon. Dis bonjour.
Je suis enchanté de faire votre connaissance. Monsieur désire-t-il une tasse de thé et des petits gâteaux ?
Pas maintenant Franky. On a du travail.
Oui Madame.
D’ailleurs casse moi ce mur.
Bien Madame.
Attendez ! Pourquoi vous…
Pour gagner du temps. Nous allons devoir quitter Paris pour rejoindre le laboratoire et, selon mes estimations, le moyen de transport idéal nous attend derrière ce mur. Explose moi ça.

Le loup n’eut pas le temps de protester que le poing puissant de Franky perfora la paroi voisine d’un trou suffisamment large pour que son corps puisse passer. Contre toute attente, cela fit entrer la lumière dans leur tunnel, en même temps que le bruit pressé d’une foule, mélange de foulées claquantes et de froissements de tissus. Ce fut sans même s’alarmer des dégâts causés que Mary franchit le seuil de ce nouveau monde, suivie du pas plus prudent d’Edward, puis de Moon et du second loup qui s’exclama avec surprise lorsqu’il les eut rejoint :

Le métro !
Il y en a au moins un qui suit, nota Mary à présent debout à leur côté. On va monter dans la prochaine rame et gagner la gare de Lyon.
Et les billets ? Interrogea Moon.
Elle est mignonne ! Le gentil lapin ne se sent pas capable de frauder un peu ?
Ça n'a rien à voir ! C'est idiot de s…
La voilà qui arrive, rejoignons le quai.
Elle m'énerve ! On est obligé de voyager avec elle ?
Oui.
Oui.
Grmf…

Le pas vif et claquant de Mary disparut, en même temps que celui de ses compagnons de route, sous le tonnerre de taule provoqué par la marche lourde de Franky. Ils suivirent le reste des badauds dont la foulée s'était soudain accélérée à l'annonce du prochain voyage. Ils s'entassèrent avec eux au bord d'un petit quai violemment éclairé et séparé de la voie par un long mur de verre. Les gens s'y aglutinaient, comme si tous concouraient pour la course de leur vie. Dans les Starting-blocks, ils guettaient le prochain voyage, prêt à jouer des coudes pour entrer les premiers dans le wagon qui les transporterait à bon port.
Écrasé dans cette masse de bras et de jambes, noyé dans cette océan de haut-de-forme et de coiffures enrubannées, le nez assiégé des parfums virulents des dames ou des effluves acres du cigares des hommes, Edward s'était rarement senti aussi peu à l'aise que dans cet entremêlement d'êtres vivants. Même la stature colossale de Franky ne suffisait pas à éloigner d'eux ces inconnus qui bousculaient et piétinaient quiconque se mettait entre eux et la vitre de protection.
Puis une sonnerie mélodieuse tenta de se frayer un chemin dans le brouhaha ambiant, annonçant l'approche imminente de la « ligne B ». Le loup blanc ne l'entendit qu'à moitié, si bien qu'il fut effrayé du vacarme soudain qui précéda le freinage violent d'un imposant convoi dont la carcasse d'étain rutilait sous les lampes de la station.

La chose était immense. Longue d'une centaine de mètres et hissée sur deux étages, son fuselage aérodynamique habillait son massif squelette de lignes courbes où disparaissait la tuyauterie de son moteur. Aucune fenêtre ne rompait l'homogénéité de sa robe d’acier, même ses portes se fondaient parfaitement dans la masse du titan. Des portes immenses qui s'ouvrirent en même temps que disparut la barrière de protection. Un tourbillon de vie bouillonna sur le quai, recrachant et avalant insatiablement les voyageurs impatients auxquels se joignit le pas massif de Franky et le déhanché déterminé de Mary. Eduard les suivait, mais son homologue resta en arrière, n'ayant aucune envie de mettre les pieds dans cette immense boîte hermétique et bondée. Alors qu'il reculait une nouvelle fois, une étreinte douce s'empara de son poignet. Moon, restée avec lui, abandonna en l'invitant à la suivre :

C'est un mauvais moment à passer. Mais ce n'est pas pire qu'un cheval, pas vrai ?

Le loup grinça des dents et ce fut de bien mauvaise grâce qu'il l'accompagna. Tous deux parvinrent de justesse à se frayer un chemin jusqu'au wagon numéro quatre et retrouvèrent, sans difficulté cette fois, le reste de l’équipe groupé autour de Franky dont la tête dépassait allègrement de la foule. Les portes se refermèrent et la rame démarra, montant en une fraction de seconde à une vitesse si prodigieuse qu’Edward failli passer par terre. Alors commença un voyage labyrinthique parmis les stations du métro parisien. Virages serrés, descentes cauchemardesques, montées en piqué et loopings en série furent de rudes épreuves pour le lycanthrope, dont le corps supporta à grand peine ces changements brutaux auxquels s’ajoutaient la chaleur et la promiscuité caractéristiques de leur moyens de locomotions. Pâle comme un linge, ce fut tout juste s’il perçut l’effervescence qui gagna tout à coup les présents quand s’éleva :

Contrôooooole des billets !

Successivement, tous les visages se tournèrent en direction du timbre métallique qui venait de se propager dans le wagon. Moon ne fit pas exception à la règle et découvrit avec angoisse un gyrophare rouge perché au-dessus de la foule, dont l’avancée dandinante le rapprochait de plus en plus de leur position. Elle jeta un regard glacial à Mary qui tira tranquillement une bouffée de sa cigarette, un sourire aux coins des lèvres. La guerrière ne se priva pas d’une remarque salée :

J’espère que vous aimez les amandes Mary.
Je les adore tout juste caramélisées.
Dommage, celles-ci seront amers.
Du calme petit lapin. Laisse faire les professionnels.

Contrôooooole des billets !

Ce fut à leurs pieds que tous durent regarder (sauf Edward qui préféra ne pas ouvrir les yeux et préserver le contenu de son estomac) pour découvrir le minuscule robot contrôleur sur le chapeau duquel était fixé le phare écarlate. Monté sur une roue, il allait et venait sans cesse, heurtant de temps en temps le pied de Franky qui s’excusait systématiquement.

Contrôooooole des billets !
Inutile de crier mon chou, je suis à côté.
Contrôle des billets.
Voilà qui est bien mieux. Mais il manque un soupçon de politesse.
J’hallucine, s’agaça Moon qui croisa les bras sur sa poitrine.
Contrôle des billets.
Il manque toujours un petit mot.
Contrôle des billets.
S’il…
Contrôle des billets.
Ça n’a pas l’air de marcher, murmura Eduard.
Qu’est-ce que tu espérais ?
Allé un petit effort ! S’il vous…
Contrôle des billets.

Chatelet, les Halles. Correspondance avec les lignes 4, 11, 14, RER A…

Courrez !
Quoi ?!

Mais impossible de s’accorder le temps de la réflexion. Franky, transformé en véritable tank, repoussa les passagers sur son chemin et se posa en barrière à la fermeture de la porte. Mary en profita pour quitter la rame d’un pas gracieux, talonnée par le trio contraint de maltraiter une dernière fois Edward qui retrouva des couleurs dès qu’il toucha la terre ferme. Ce ne fut qu’une fois tous dehors que le colosse d’acier lâcha le battant et leur emboîta le pas, s'engouffrant avec eux dans la vaste station du Chatelet. Il ne prit pas garde à la petite voix qui s’éleva derrière lui. Son gyrophare sacrifié, le petit contrôleur put s’extirper du wagon et se lança sur les traces des fuyards.

Contrôle des billets !
À gauche ! S’exclama Mary dont le dérapage parfaitement contrôlé les conduisit droit sur une rangée d’escalator.

Ce fut elle qui s'engagea la première, bousculant d'un déhanché sexy les voyageurs alignés sur le mauvais côté de la file. Les deux loups préfèrent passer par l'escalier classique dont ils avalèrent quatre à quatre les marches, ne se retournant que lorsqu'ils entendirent les plaintes des passagers de l’escalator voisin soudain arrêté. Une fraction de seconde plus tard et ce fut l'éclat de voix furieux de Moon qui résonna. Restée en arrière la demoiselle se débattait avait le corps massif de Franky, coincé au bas de la rampe par des gardes-corps trop étroits.

Mais fais quelque chose gros plein de soupe !
La forme arrondie de mon corps a été pensée pour apporter du réconfort aux gens.
Heureuse de l'apprendre. Maintenant bouge !
Je ne peux pas, je suis coincé.
Tords les rambardes, je ne sais pas !
Abîmer les infrastructures publiques n'entre pas dans mes attributions.
Et le mur des égouts alors ?
Contrôle des billets !
Besoin d’un coup de main ?

Un soupir de soulagement souleva les épaules de Moon lorsqu’elle fit face aux deux lycanthropes, revenus sur leurs pas. Se plaçant de part et d’autre de Franky, chacun s’agrippa à l’une des barrières, tandis que la jeune femme maintenait la ceinture du colosse qu’elle tirait en arrière appuyée par ses bottes à réactions. Après quelques efforts, la force des loups vint à bout des garde-corps qui s’éloignèrent l’un de l’autre, libérant enfin le robot qui, dans son élan, renversa un de ses confrères nettoyeurs dont le seau d’eau savonneuse se répandit au pied des marches. Il voulut s’excuser, mais le trio ne lui en laissa pas l’occasion et le repoussa tant bien que mal vers les escaliers de béton.
Le petit contrôleur eut tôt fait de les rejoindre, mais emporté par son élan, il ne remarqua pas à temps le sol glissant et sa course se solda par un joyeux dérapage, qui permit à la petite équipe d’atteindre, enfin, le haut des marches. Essoufflés par l’effort qu’ils avaient dû fournir pour accélérer l’allure pataude de Franky, ils accueillirent avec fort peu d’enthousiasme la remarque lassée de Mary :

Ce que vous êtes lents !
On pensait plutôt à un « merci », haleta Edward, les mains sur les genoux.
Un merci ? Alors que j’attends ici depuis au moins trois minutes ?
On est vraiment obligé de voyager avec elle ?! Pesta Moon.
Oui !
Oui !
Raaah !

La belle se pinça les lèvres, contenant à grand peine la flopée d’injures qui s’y bousculait. Leur souffle tout juste retrouvé, ils durent se remettre en route, car derrière eux s’éleva à nouveau le timbre répétitif du contrôleur qui se révélait particulièrement tenace. Ils s’élancèrent alors dans le dédale de l’immense station, véritable ville dans la ville où magasins et marchés côtoyaient les vagues incessantes de passants pressés. Mais malgré tous leurs efforts, la voix métallique de leur poursuivant ne cessait de se rapprocher. Dépassant une boutique de vêtement, Moon les arrêta d’un cri soudain :

Stop !! J’ai une idée ! Venez !
Quoi ? Non ! Pourquoi est-ce que je te suivrai ? s'offusqua Mary.
Parce que c’est de votre faute si on est dans cette galère !
Et qu’à ce rythme on arrivera jamais à bon port, appuya Edward.
Sans compter que notre ami le pot de colle arrive, donc à moins que vous souhaitiez payer…
Jamais !
Alors venez !
Grmf !
Sur une échelle de 1 à 10, comment Madame évalue sa colère ?
Oh toi !

Malgré la réfractaire, tous finirent par emboîter le pas à Moon qui les entraîna dans le magasin voisin. Ce fut accroupis entre deux rayonnages de petites culottes qu’elle leur expliqua son plan. Cinq minutes plus tard, elle le mettait à exécution.

Ça ne marchera jamais, grinça Edward en ajustant une paire de lunettes de protection aux verres teintés sur son visage.
Fais moi confiance. Et recolle ta moustache, elle penche.
Vous seriez sympa de m’aiguiller, parce qu’avec cet énorme chapeau je ne vois absolument rien, abandonna le second loup après buté contre un roll-up publicitaire.
Pourquoi est-ce que c’est moi qui écope du faux nez ! S’emporta Mary dont le visage, jusqu’alors si séduisant, était à présent superbement enlaidi d’un postiche bon marché.
C’est le seul qu’on a trouvé pour masquer vos lunettes, mentit Moon en ajustant la chemise à fleurs XXXL de Franky.
Dans ce cas, pourquoi n'avoir changé que la couleur de ton masque ?
Parce que c’est mon plan ! Maintenant chut ! Le voilà !
Contrôle des billets !

Toujours perché sur sa roue, le contrôleur s’engagea dans leur allée à vive allure. Doublant dans un premier temps le groupe grossièrement costumé, il revint bien vite sur ses pas et les toisa avec insistance du haut de ses trentes petits centimètres. Il tenta, sans assurance :

Contrôle des bi…
Vas y Edward, murmura Moon en lui assénant un léger coup de coude.

Après avoir vaguement râlé, le concerné se racla la gorge, puis se penchant soudainement il pointa du doigt l’allée de gauche et s’exclama, une main sur sa moustache, dans un français massacré d’un accent improbable :

Y sont palti pal là bôs !

Sous la surprise, le petit robot fut pris d’un vif tressaillement et après un tour sur lui même, il se précipita dans la direction indiquée au son d’un strident : « Contrôle des billets ! ». Il laissa derrière lui un groupe bouche bée, à l’exception de Moon qui ajustait son nouveau masque, le visage rayonnant de son succès.

Pari gagné Mary ! Vous gardez le faux nez !
Quel pari ? S’étrangla la jeune femme qui se débarrassa immédiatement de son déguisement.
Bien essayé, murmura Edward à la lapine qui lui répondit par un sourire.
Il s’est passé quoi ? Ça a marché ? Quelqu’un pour… Aie ! Désolé madame. Ou Monsieur…
C’est une poubelle Eduard, souffla Moon en lui retirant son large chapeau.
Madame donc !
Qui te dit qu’elle est mariée ? Interrogea, taquin, son homologue.

Un même rire étouffé gagna le trio lorsqu’il rejoignit au pas de course leur guide, déjà en route, suivie de Franky, le seul avec Moon à avoir conservé sa nouvelle apparence.

D’un pas décidé, Mary les conduisit sur le quai de la ligne quatorze avec comme but, la gare de Lyon. Il ne fut pas aisé de faire monter Edward dans la rame qui se présenta, fort heureusement même sa force de loup-garou ne put rivaliser avec la musculature d’acier de Franky qui, après avoir tenté de l’amadouer les mains pleines des petits gâteaux, le ceignit à la taille et l’embarqua dans le wagon. Heureusement pour le loup blanc, le trajet fut rapide, un seul arrêt les séparant de leur point de chute.

Lorsqu’ils quittèrent enfin le quai de métro, ce fut pour suivre le mouvement de la foule qui remontait en pente douce en direction de la gare. Il leur fallut se faufiler parmis deux familles dont les bambins agités s’étaient lancés dans une bataille de sabres mécaniques. Entre un vif « Luc ! Je suis ton père ! Range ce sabre ! », un railleur « Naaaaaaan ! » et le bruit de roulement tranquille d’une multitude de valises, ce fut un soulagement lorsque la petite équipe déboucha enfin sous la vaste coupole de verre de la station. L’effervescence y était plus féroce encore, une véritable fourmilière, ce qui n’empêcha pas le trio de s’émerveiller de l’architecture formidable des lieux.
Véritable bijou de technologie, la gare de Lyon était traversée d’un tuyauterie complexe et fumante dont les vapeurs se mêlaient au souffle noir des lointaines locomotives. Des machinistes, perchés à plusieurs mètres de haut, en prenaient soin sans même être remarqués par la majorité des passants. Ça et les, des murs d’engrenages, protégés par d’immenses vitres, produisaient de réguliers cliquetis qui se perdaient dans le brouhaha de la foule. Véritables œuvres d’art d’acier, elles habillaient les lieux d’une vie irréelle et parfaitement minutée. C’était sur l’une d’elle que le regard des trois amis s’étaient posés, avant qu’une exclamation soudaine de Mary ne les oblige à s’en détacher. Ils la retrouvèrent à quelques mètres de là, en pleine discussion avec un groom mécanique :

Est-ce que vous vous moquez de moi ?
Bonjour. Gardez votre calme.
Et puis quoi encore ?
Bonjour. Gardez votre calme.
Écoutez moi bien. Nous sommes attendus, c’est le gouvernement qui nous envoie alors…
Bonjour. Gardez votre calme.
Sur une échelle de 1 à 10, comment Madame évalue sa colère ?
C’est pas vrai…
Un problème Mary ? Demanda Edward lorsqu’ils l’eurent rejoint.
Regarde par toi même…

Elle pointa du doigt le tableau d’affichage des heures de départ et d’arrivée des trains. Véritable arbre de Noël avant l’heure, le mot « annulé » clignotait de toute part. Le lycanthrope ne comprit pas immédiatement ce que cela impliquait pour eux, ce fut son homologue qui l’aiguilla dans un soupir las :

C’est vrai qu’ils sont en grève.
Encore ? S’enquit Moon.
Donc on est coincé ?
Hors de question. Venez.

Avec panache, la jeune femme se détourna de l’employé mécanique qui offrit la même rengaine aux voyageurs excédés qui suivirent. Elle gagna d’un pas vif et déterminé les quais extérieurs et dépassa, sans même les regarder, les immenses locomotives qui défilaient à sa droite. Sur trois, voire quatre étages pour les plus hautes, elles avaient l’air de véritables paquebot d’acier. D’ailleurs chacune était parée d’une figure de proue conséquente, souvent le buste ou la face d’un animal puissant, sculpté dans le métal. Ainsi Edward et sa bande croisèrent un lion, un buffle, un rhinocéros et même un loup qui dont la posture, forte et valeureuse, firent la fierté des deux lycanthropes. Les trains se succédèrent, sous leurs regards émerveillés. Ils s’imaginaient déjà à bord de l’un d’eux, confortablement installé dans un fauteuil luxueux ou dans une petite cabine soigneusement agencée dans laquelle une hôtesse passerait leur servir le repas ou leur proposer des sucreries.

Nous y voilà !

Une exclamation admirative s’échappa des lèvres des présents qui contemplaient avec envie la dernière voiture. La plus belle de toute, sans aucune hésitation. Ornée d’une superbe gueule de dragon, sa carlingue avait un dessin plus agressif que les autres. Des lignes géométriques, mises plus en valeur encore par une peinture d’un rouge vif qui…

Vous regardez du mauvais côté.

D’un même geste, tous se décalèrent d’un pas sur la gauche et firent face, avec plus de stupéfaction encore, à leur moyen de transport. Tous furent coa de surprise. Jamais aucun univers n’avait connu pareil t'as de rouille décrépi !

Cette… ruine fonctionne encore ? Grimaça Moon.
Bien sûr qu’elle fonctionne encore ! Ce n’est pas un peu de rouille qui la fera tomber en morceau, assura Mary, descendue sur la voie, en donnant un léger coup sur la carlingue.

Une plaque de fer se décrocha sous ses doigts, tombant au sol dans un bruit sourd et soulevant un léger nuage de poussière.

Effectivement, si ça ne tombe que quand on tape dessus, nous sommes sauvés, ironisa Edward.

Trois wagons plus loin, ce fut la porte entière d’une voiture qui s’effondra, arrachant une même grimace au trio. Discrètement, Moon s’enquit :

On est toujours obligé de voyager avec elle ?
Finalement…
Peut-être pas.
Contrôle des billets !
Mais quelle plaie celui là ! Montons !

Ce fut au pas de course qu'ils longèrent les différents wagons à la recherche de celui qui aurait le moins souffert. Mais ils eurent tout juste le temps de dépasser le deuxième qu'une ombre menaçante se dressa au-dessus d'eux, précédent un choc prodigieux et une surprise de taille qui leur barra la route.
C'était une main. Une énorme main faite de tôle et d'acier qui venait de s'abattre à quelques mètres d'eux, ébranlant le sol et soulevant un nuage de poussière à la hauteur de ses dimensions hors-norme. Elle était attachée à un bras plus gros encore, lui même relié au poitrail d'acier gigantesque qui leur avait occulté le soleil. Il leur fallut se tordre le cou pour apercevoir le visage de ce colosse d'airain. Entouré des deux cheminées fumantes qui paraient ses épaules, un casque semblable à ceux des gladiateurs les observait d’un œil unique et brillant quand, à son sommet semblait s’agiter une petite forme humaine.

C’est quoi ça encore ?! S’enquit Edward après une quinte de toux.

La réponse ne tarda pas et, après un bref grésillement, une voix au volume prodigieusement accru s’éleva, faisant trembler la structure de la gare.

Mary ! C’est papa ! Je suis venue te ramener à la maison !
La honte, souffrit la concernée en tournant la tête. Faîtes comme si vous ne l’aviez pas vu.
Ah mais parce que vous l’aviez remarqué ce robot géant vous ? railla Eduard.
Non, où ça ?
Ah oui, maintenant que tu le dis !
Mary ! Ne m’oblige pas à venir te chercher !
Écoute papa, je ne rentrerais pas à la maison.
Et pourquoi je te prie ?
Parce que je suis fiancée !
Quoi ?!

La main immense s’arracha au sol, se portant avec effroi devant le visage de l'immense robot dont la pupille unique semblait s'être dilatée de surprise.

M-m-m-mais… Avec qui ? Quand ça ?
Avec lui ! Répliqua-t-elle sans hésiter, enserrant le bras d'Edward.
Qu…
Quoi ?
QUOI ?!
Donc laisse nous vivre notre amour !
Alors c'est toi qui m’a volé ma fille ?!
N… Non monsieur. C'est un malentendu je vous assure !
Parfaitement ! Je l'aime papa !
T-t-tu l'as envouté ! Ne t'inquiète pas ma chérie, je vais te sortir de là !
Mais tu m'écoutes ?
Contrôle des billets !
Encore lui ?! Vite, montez !

La main se fit index accusateur. Elle s’agita au dessus du petit groupe tandis que résonnait à nouveau :

Ne t’approche pas de ce train Mary ! Ne fais pas cette erreur ! O-Où je me fâche !
Vous êtes sûr de vous Mary ? Interrogea Eduard qui trouvait plus judicieux d’affronter un minuscule robot que le colosse de deux cents mètres de haut qui leur faisait face.
T’occupe, répliqua-t-elle en le repoussant à l’intérieur du wagon.

Elle referma la porte au nez du petit contrôleur qui se mit à toquer avec insistance. Peine perdue. Sans attendre, Mary retira à sa montre un losange d’acier qu’elle enfonça sur la paroi la plus proche, enclenchant son unique bouton. Aussitôt, un mécanisme complexe se déploya sur toute la surface et plus encore, la couvrant en une fraction de seconde d’une série de tuyaux et d’engrenages de toutes formes et de toutes tailles. Puis tout se figea.

Accrochez vous !

Mary enclencha pour la seconde fois la pièce de fer à présent solidement ancrée dans le wagon. Un grincement terrifiant ébranla la rame qui se mit si soudainement en mouvement qu’elle déséquilibra le trio. Sa vitesse s’accrut rapidement et, en même temps qu’ils laissaient derrière eux le contrôleur d’acier, ils s’attirèrent les foudres du père de Mary dont la voix s’engouffra sans mal jusqu’à l’intérieur de la carlingue :

Je te préviens jeune fille ! Ça ne va pas se passer comme ça ! Je compte jusqu’à trois et si tu n’as pas arrêté cette rame je…

Mais la têtue Mary se moqua de la menace. Concentrée sur le bracelet complexe qui lui ceignait le poignet, elle n’eut qu’à jouer avec quelques unes de ces commandes pour que leur train, qu’elle pilotait à présent à distance, s’élance définitivement sur les rails à une vitesse prodigieuse. Collés aux vitres Edward et ses deux compagnons de route virent Paris disparaître derrière eux, masqué par l’énorme robot qui venait de les prendre en chasse.
Malgré sa taille, il se révéla diablement agile et au moins aussi rapide. Tant et si bien qu’il parvint à agripper la dernière voiture de leur moyen de transport. Le choc fut violent et aurait envoyé tous les passagers s’écraser contre l’avant de leur wagon s’ils ne s’étaient pas retenus à Franky ou aux montants des portes. Fort heureusement, l’état de délabrement de leur train ne les fit pas longtemps prisonniers. L’attelage liant les deux voitures se rompit sous l’étreinte du géant d’acier, propulsant le reste de leur train plus promptement encore sur la voie. Ils étaient à présent dans le dernier wagons de la rame engagée sur des rails qui s’élevaient au dessus des villes et des bois cerclant Paris. Ils s’aventuraient sur un pont aérien immense qui ne leur permettrait plus aucune erreur de pilotage.

Il faut qu’on se protège de ses mains ! S’exclama Moon après avoir assisté à la destruction d’un pan entier du chemin de fer derrière eux par le poigne énorme du colosse.
Je décide de ce dont on doit se protéger, objecta Mary qu’un violent hoquet du wagon manqua de faire passer par terre. Et ce sera de ces mains ! Franky !
Madame souhaite-t-elle une tasse de thé ?
Exactement !

Sous le regard inquiet du trio, Franky retira et replia soigneusement sa chemise, avant de percer de son poing puissant le toit du wagon. Il s’y engouffra à demi, bouchant le trou. La partie émergée de son corps se métamorphosa. Ses deux bras se rejoignirent pour former un unique canon, tandis que sa tête se dotait d’une technologie avancée de ciblage. À l’intérieur de la voiture, le poste de pilotage inclut dans son corps était à nouveau accessible. Il n’attendait plus qu’un habile pilote.

Qu’est-ce que tu attends la lapine ? Tu vois bien que je conduis !

Moon resta interdite une seconde, jusqu’à ce qu’une nouvelle vibration du train ne la ramène sur terre. Elle se hissa d’un bond sur le fauteuil molletonné de Franky et saisit les commandes de visée, devenant ainsi l’artilleuse officielle de leur wagon. Elle dut rapidement faire ses preuves car la main de leur poursuivant de préparait à saisir leur voiture. D’un bloc, elle réussit à faire pivoter le canon de Franky dans la direction adéquat, visa et fit feu presque aussitôt. Au lieu du boulet de canon que l’on aurait pu espérer, ce fut une théière qui s’abattit entre le pouce et l’index de leur assaillant, une théière pleine de nitroglycérine qui explosa avec tonnerre et panache. On exulta dans le wagon, pourtant loin d’être sorti d’affaire. Car si la main gauche du robot géant avait été sérieusement endomagée, le père de Mary était loin d’avoir dit son dernier mot. Sa fille rentrerait à la maison coûte que coûte !

Je ne voulais pas en arriver là Mary, mais tu m’y as obligé !

Une capsule ronde fut éjectée des lèvres métalliques de leur adversaire. Moon la visa aussitôt, mais elle n’eut pas le temps de tirer que la sphère se désagrégea dans les airs. Elle utilisa son système de visée pour comprendre ce qui se passait, mais lorsqu’elle parvint enfin à obtenir une image net, il était trop tard.

Des araignées ?
Quoiii !? S’écria Mary dont le mouvement failli les faire dérailler. Je déteste les araignées ! Je les déteeeeee… Hyaaaaaaah !

Sur la fenêtre voisine venait de se dessiner la silhouette d’une araignée mécanique des plus splendides. Huit belles pattes et un abdomen tout en rondeur lui donnait une forme parfaitement cauchemardesque pour n’importe quel arachnophobe. L’agitation de Mary mis à mal ses qualités de pilote. Leur train fut alors agité d’un équilibre précaire et évita de justesse un drame lorsqu’une seconde araignées se joignit à la première. Les cliquetis qui se répendaient sur le toit de leur wagon n’annonçaient aucune amélioration météorologique, la pluie de tarentule d’acier s’étant vraisemblement étendue à toute la carlingue.

Elles sont trop nombreuses, s’exclama Moon. Elles obstruent ma visière !

Les deux lycanthropes échangèrent un regard, puis un sourire. Edward se précipita vers la porte arrière du wagon, tandis que son homologue rassurait au mieux Mary :

On va écraser ces bestioles Mary, alors amenez nous à bon port !

Il rejoignit son homologue sur le balcon extérieur. Ensemble, il arrachèrent la rambarde de protection pour la transformer en une arme qu’Eduard récupéra. Il se tourna vers son comparse, interrogeant :

Tu es certain que tu n’en veux pas ?
Ne t’en fais pas, j’ai bien mieux.

D’une main, il retira de sous sa chemise un collier au bout duquel pendait un étrange médaillon, vestige d’une aventure toute aussi rocambolesque. Ils ne s’attardèrent pas plus longtemps. Eduard s’engagea sur l’échelle qui lui donnait accès au toit du wagon, le second loup sur ses talons. La voiture grouillait d’araignées robotiques qui cherchaient visiblement à pénétrer dans la carlingue en la perçant de leurs mandibules acérées.
Armé de sa batte de fortune, le patron du Last Paradise se jeta le premier dans la bataille, éjectant chaque arachnide sur sa route d’un splendide home run. Il réussit se frayer un chemin jusqu’au poste de ciblage de Moon, mais à peine avait-il réussi à le dégager sommairement que les bestioles d’acier revenaient à la charge et recouvrait le terrain.

Edward ! C’est quand tu v…

Écarquillant les yeux, Eduard fut surpris de découvrir derrière lui un énorme loup blanc, assis sur le toit du wagon, la langue pendante. Le vent dans les poils, il était tout frétillant de cette nouvelle sensation qui lui agitait la truffe, si bien qu’il fallut que son compagnon d’arme s’y reprenne à deux fois afin d’obtenir enfin son attention.
Alors le canidé se jeta à son tour dans la bataille, bien plus joueur que son homologue dont l’équilibre s’avérait parfois complexe. Bondissant de droite à gauche, quand il ne brisait pas les pattes de fer dans sa gueule puissante, il éjectait par dizaine les arachnides de la voiture d’un seul coup de patte. Se posant finalement en « loup de garde » face au poste de Moon, il le défendit tous crocs dehors et permit, avec le concours d’Eduard, d’éviter à la petite troupe l’assaut de la main droite du robot.

Chacun concentré sur leur effort, ils ne firent pas attention au dessin que prenaient les rails. À présent engagé dans une montée à la pente marquée, le train ne cessait de gagner en altitude. Grimpant encore et toujours, le sommet se profila lentement mais sûrement et avec lui, une descente vertigineuse. Ce fut Mary qui les avertit, un peu trop tard sans doute, car déjà l’accélération de la pente se faisait sentir. Edward eut tout juste le temps d’enfoncer ses griffes dans la taule, son partenaire coincé sous ses énormes pattes, que les voitures dévalèrent à toute allure la voie. La vitesse d’accélération les balota péniblement, mais eut au moins le mérite de les débarrasser des trois-quarts des araignées ainsi que du robot géant, disparu de leur champs de vision.
Mais ils n’avaient pas encore atteint le bas de la pente qu’un grand fracas fit légèrement redresser la tête aux deux loups. Une gémissement s’échappa de la gueule du plus poilu, quand le second hurla à plein poumon :

Mary freine ! Freine !!

Le colosse de fer les avait devancé et c’était de ses deux pieds qu’il venait d'anéantir leur route, transformant le reste des rails en un tremplin effrayant donnant droit dans le vide, entre les deux jambes du titan qui attendait de les réceptionner.

Tenez vous bien, ça va secouer !

La jeune femme usa des derniers mètres de la pente pour donner à son train plus de célérité, tant que ses roues abîmées vibraient sur la voie, menaçant à tout moment de dérailler. Sur le toit les deux loups furent aux premières loges pour admirer la superbe rampe qui les attendait. Edward ne put que s’agripper au mieux au toit de la voiture, quand son double se tenait le plus fermement possible à ses poils. Ils fermèrent les yeux lorsque la locomotive, située quatre wagons plus loin, s’élança la première dans le vide. Le reste de la rame suivit, jusqu’à leur voiture qui prit la direction la plus adéquat pour tomber directement entre les doigts du titan d’acier. Ou presque. Car l’ingéniosité de Mary leur gardait une dernière surprise.

Maintenant Franky !

Alors que la jeune femme détachait leur wagon du reste du train, les pieds de son Hercules en traversèrent le plancher. Il activa ses propulseurs, freina leur chute et leur permit de se faufiler entre les jambes du robot. Ils venaient juste de le dépasser lorsque Mary s’exclama :

À toi de jouer Lapinette !
Je l’ai dans mon viseur !

Impossible de rater l’énorme bouton d’arrêt d’urgence installé, par une facétie d’ingénieur sans doute, sur le postérieur du robot. Le tir de Moon fut impeccable de précision et heurta de plein fouet l'interrupteur qui figea aussitôt le titan d’acier. Trépignant sur la tête de sa statue de fer, le père de la guide s’écria d’une petite voix qui parvint à peine au groupe de fuyards :

Reviens tout de suite ! Mary ! Maryyyy !

Il ne put que regarder, impuissant, s’éloigner le wagon volant qui oscillait maladroitement de droite à gauche, seulement équilibré par l'habileté de Franky. Sur son toit, les deux passagers qui se débarrassaient des dernières araignées mécaniques, ne s’arrêtèrent que quand, à leur aplomb, apparut un imposant complexe de fer. De forme sphérique et de taille conséquente, il était perchée au-dessus d’un petit village qu’il couvrait de son ombre. S’ils s’interrogèrent sur son utilité, Mary ne tarda pas à les renseigner :

On touche au but. Il ne reste plus qu’à se pos…

Les réacteurs de Franky toussèrent, précipitant leur soudain leur chute.

Qu’est-ce qui se passe ? S’enquit Moon qui tenta comme elle pouvait de faire redémarrer sa mécanique.
Je crois que j’ai besoin d’être remonté.
Quoi ?! Ce n’est pas le moment Franky !

Au-dessus d’elles, les loups luttaient tant bien que mal avec les G accumulés. Edward avait réussi à saisir le col de son homologue après qu’il ait brusquement perdu l’équilibre. Il le soutenait au-dessus du vide, ses griffes peinant de plus en plus à les maintenir tous les deux sur le wagon.
Le sommet du complexe s’approchait dangereusement et le choc avec leur voiture s’annonçait plus que douloureux. Pourtant, les filles ne perdirent pas leur sang-froid et ce fut en puisant dans leurs dernières forces qu’elles s’acharnèrent sur la clef de Franky.

Puis ce fut l’impact. La voiture explosa au sol, projetant des vis, des boulons et des morceaux de tôles sur plusieurs mètres à la ronde. Ce fut au milieu de ce capharnaüm que se posa l’Hercules d’acier avec, dans chaque bras, une demoiselle et, agrippé à son dos, le loup blanc qui avait retrouvé son apparence humaine et tenait toujours Eduard. Après s’être tous les quatre assurés qu’ils ne craignaient rien, ils retrouvèrent la terre ferme. Un soupir de soulagement commun les gagna tandis que Mary abandonnait fièrement :

Voilà. Nous sommes arrivés ! Et sans le moindre problème.
Pardon ? S’étrangla Moon. On ne sait même pas par où entrer !
Il n’y a qu’à trouver une bouche d’aération et…
Contrôle des billets !




Sur une échelle de 1 à 10, comment Madame évalue sa colère ?




Fin de cette deuxième manche !

Visiblement les délais ont été compliqués à tenir pour beaucoup sur cette manche. Merci toutefois à ceux qui ont réussi à poster ou à ceux qui ont réservé ou qui nous on prévenu de leur retard o/

On espère que vous réussirez tous à poster ! Pour les plus en retard n'hésitez pas à publier votre texte après le mien si vous le souhaitez.

Rendez-vous prochainement pour la dernière manche de notre évent de l'été !
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Ryden Haesmar
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Ryden Haesmar

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MessageSujet: Re: Manche n°2 : Aller simple   Manche n°2 : Aller simple I_icon_minitimeJeu 25 Aoû - 22:01

- Qu’est-ce qu’on attend ? Qu’on meurt d’ennui ?
- Vous savez, la patience est une vertu qui se travaille.

Cela faisait maintenant plusieurs et interminables heures qu’ils attendaient dans la petite pièce parsemée d’ossements. Ryden avait même tenté à quelques reprises de partir, mais son double l’avait toujours repoussé avec fermeté dans le fond, sans lui donner d’explication. Après sa cinquième tentative, il s’était résolu à rester patiemment assis sur le lit de fortune. Dos au mur, face à l’entrée, il avait décidé à la place de le bombarder de questions. S’il ne voulait pas le laisser partir, il devrait au moins répondre à ses questions.

- Pourquoi me gardez-vous prisonnier ? Que me voulez-vous ?
- Je ne vous garde pas prisonnier, M. Haesmar. Et ce que je veux de vous, vous le saurez bien assez tôt, répondit-il le regard rivé sur l’entrée, toujours accoté nonchalamment sur le mur.
- Comment connaissez-vous mon nom ? Surprit, ne se rappelait pas le lui avoir mentionné.
- Simple supposition. J’imagine que j’ai vu juste.
- Alors, si je ne suis pas prisonnier, pourquoi m’empêchez-vous de partir et pourquoi m’avoir attaqué ?
- Qu’est-ce qu’il vous fait croire que je vous ai attaqué ?
- Laissez-moi y réfléchir… hum… peut-être quand vous avez foncé vers moi, que votre machine infernale m’a agressé sans raison et que vous avez pris la relève quand elle a été indisposée ! Ne serait-ce pas des raisons suffisantes de penser cela ?
- Vu de cette angle, on pourrait effectivement, mais du mien, c’est…

Soudainement, des bruits de pas lourds retentirent dans le réseau souterrain des catacombes. Sur ses gardes, Ryden se releva, inquiet. Ce qui approchait ne pouvait être humain. C’était impossible. Seul un être énorme pouvait faire un vacarme pareil. SI on se fiait au son qu’il produisait, non seulement il lui restait trois ou quatre mètres avant d’apparaître, mais il était évident qu’il savait exactement où il allait. Sa démarche était rapide et sûre. Pourtant les catacombes pouvaient être un vrai labyrinthe pour celui qui ne les connaissait pas.

- Ah, le voilà enfin. Il était temps, dit le Gardien toujours de son éternelle voix neutre.
- Qu’est-ce qui…

Apparu alors un homme, pouvait-on vraiment appeler ça un homme ?, il ressemblait plus à un géant ou un ogre, mesurant une tête de plus que les Ryden, des muscles surdimensionnés. À côté de lui, les deux autres avaient l’air de cure-dents. Son visage, loin d’être une beauté, était déformé par le vice et la cruauté, ses petits yeux d’un bleu glacial se cachaient sous une puissante arcade sourcilière, un nez large et crochu et une mâchoire carré qui était en partie dissimulée sous d’énormes rouflaquettes. Si au départ ses habits avaient été celui d’un noble, à présent, il ne restait que quelques lambeaux qui dissimulaient juste assez de peau pour ne pas être complètement indécent.

- Bonjour Hyde. Avez-vous eu des problèmes ? Je m'attendais à voir le Dr. Jeckyll.
- Oui, une folle nous a pris en chasse. Si vous aviez vu comment je m’en suis débarrassé !, répondit l’homme d’une grosse voix caverneuse.
- Attendez, ne me dites pas que c’est LE Dr. Jeckyll et Mr. Hyde du roman Strange case of Dr. Jeckyll and Mr. Hyde ?

Deux regards se tournèrent aussitôt vers Ryden qui s’était rapproché d’eux. Si l’un était totalement inexpressif, comme à son habitude, l’autre démontrait une incompréhension totale.

- Quoi ? Il m’arrive de lire.

L’ignorant complètement, le Gardien et le nouvel arrivant, se tenant dans l’entrée, bloquant par la même occasion la seule sortie, discutèrent un instant à voix basse. Ryden ne réussit à capter que quelques mots, pas suffisamment pour comprendre le sujet de leur discussion. Il faut dire qu’il était trop occupé à dévisager, avec une certaine fascination, le personnage de Robert Louis Stevenson pour écouter leur conversation. Il avait presque l’air d’un enfant devant son héros.

- Il n'y a pas que les historiens qui dépeignent mal la réalité, les auteurs aussi. Je savais que Mr. Hyde était laid, mais je ne l’imaginais pas à ce point-là. Et n’est-il pas supposé être jeune et chétif ? Il est vraiment différent en vrai, pensa-t-il tout haut.

A peine eut-il le temps de finir sa phrase qu’un énorme point le frappa, le propulsant encore une fois dans le fond de la pièce sans ménagement.

- Était-ce nécessaire de le provoquer ? Il est très susceptible lorsqu'il est question de son physique, lâcha son double avec une minuscule pointe d’exaspération dans la voix.
- Je ne pensais même pas qu’il m’écoutait, grommela Ryden.
- Et Mr. Hyde, il serait préférable que vous n’abîmiez pas la marchandise… plus qu’elle ne l’est déjà.
- Tu n’es pas une beauté, non plus, le homard. On dirait que tu viens de manger la raclée de ta vie; avec ta lèvre fendue, ton œil tuméfié et tes nombreuses éraflures et ecchymoses sur le corps, maugréa à son tour le géant. Et c’est quoi cet accoutrement ?
- Premièrement, mon physique actuel n’est que temporaire. Deuxièmement, à qui la faute ? Si son robot et lui ne m’avaient pas agressé sauvagement aussi ! dit-il en pointant son double qui restait de marbre. Troisièmement, je ne suis pas une marchandise ! Et pour finir, concernant mon habillement, c’est une longue histoire. De toute façon, le vôtre n’est pas mieux.
- Ha ha ha !, riant si fort que les murs en tremblèrent, donnant l’impression que les morts se réveillaient. Le homard a un sale caractère et toute une imagination ! Peut-être que C-Ch0ir t’a attaqué, mais lui, j’en doute fortement.
- Vous n’y étiez pas, comment pouvez-vous affirmer cela ?
- Parce qu’i…
- Ça suffit, vous deux. Nous sommes restés ici déjà trop longtemps. Il est temps de partir, le coupa le Gardien.

Alors que le géant se retournait pour partir, une apparition métallique apparue brièvement dans l’embouchure. N’étant pas convaincu de l’avoir réellement vu, Ryden s’approcha un peu, mais recula aussitôt.

- Non, non, non ! Pas cette chose ! Pas encore !

Un C-Ch0ir se tenait tranquille près du Gardien, dissimulé dans l’ombre de Mr. Hyde.

- Calmez-vous, il ne vous fera rien, sauf si vous le provoquez. La preuve, ils sont arrivés ensemble. Je lui ai demandé d’aller chercher notre guide.
- Notre guide ? Pourquoi ? Qu’est-ce que vous me voulez à la fin ?

Au même moment, le géant se mit à se tortiller douloureusement dans des positions anormales. Une fois la transformation terminée, un petit homme ordinaire d’une quarantaine d’années prit sa place.

- Ah, M. Haesmar ! Je vois qu’Hyde a réussi à vous trouver. Nous pouvons y aller maintenant. Le voyage sera long jusqu’au laboratoire.
- Un laboratoire ? Pour quoi faire ?
- Pour vous retourner d'où vous venez. On m’a chargé de vous guider jusqu’à ce lieu secret. Là-bas, des scientifiques vont vous renvoyer, vous et d’autres étrangers, chez vous
- Et j’imagine que ces scientifiques font cela par bonté d’âme., dit-il sarcastiquement. Je ne suis pas aussi bête que j’en ai l’air. Vous savez que les laboratoires secrets et les savants mettent rarement le monde en confiance. Ajoutez le gouvernement et vous avez le trio ultime...
- Avez-vous une autre solution pour rentrer chez vous ?
- Non, mais la vôtre me semble, tout de même, suspecte.
- N’avez-vous si peu confiance envers les autres ?

S’il ne répondit pas à la question, son expression le fit à sa place. Comprenant qu’il n’arriverait peut-être pas à le convaincre, ou du moins sans perdre un temps fou, le Gardien prit une petite poudre blanche dans l’une de ses poches et l’approcha du nez de son sosie. Surpris par la rapidité du geste, celui-ci la respira involontairement, presque instantanément, il s’effondra à terre.

- Avez-vous conscience qu’il va refuser catégoriquement de nous suivre maintenant ?
- Assurez-vous qu’il ne puisse pas fuir lorsqu’il se réveillera et tout devrait bien aller, dit-il simplement en mettant Ryden sur son épaule.

Après un petit détour pour habiller tout le monde correctement, ils entrèrent dans un immense entrepôt à l'apparence désaffecté. Cependant, une fois à l’intérieur, une vraie beauté de la technologie aéronautique les y attendait. Malheureusement, avant même qu’ils puissent l’approcher, une porte s’ouvrit et une étrange femme fit son apparition à quelques mètres de l’aéronef. Il était impossible de ne pas la remarquer parmi les employés qui travaillaient près de l’engin. Elle vociférait des paroles qui n'avaient aucun sens, en jetant des regards noirs au docteur. En fait, elle donnait presque l’impression d’exécuter un exorciste.

- PAR LES SAINTES PATATES DU P’TIT JÉSUS…
- Elle, encore ! Elle ne doit pas s’approcher de l’aéronef !
- … VOUS DEVEZ BRÛLER POUR EXPIER VOTRE ÂME MALODORANTE !
- Il est rempli d’hydrogène !
-… FEU EST MON DIEU. FEU VOUS PURIFIRA PAR SA CHALEUR EXQUISE !
- Amen…, lâcha Ryden à moitié conscient.

Soudainement, la femme, qui portait une bonbonne dans le dos reliée à ses gants par des tuyaux, étira sa main vers leur moyen de transport. Agissant comme un lance-flamme, une énorme flamme sortit de sa paume et enflamma le zeppelin. Quelques secondes plus tard, il explosait, détruisant une partie de l’entrepôt et projetant le quatuor deux mètres plus loin. Malheureusement pour eux, lorsque C-Ch0ir les fit sortir des décombres, grâce à son souffle, la femme s’était rapprochée et les menaçait de ses flammes.

Suffisamment conscient pour savoir qu'il fallait fuir, Ryden tenta de s'éclipser, mais son corps toujours sous l'effet de la poudre refusa de lui obéir. Impuissant, il n'eut pas d'autre choix que de se laisser faire lorsque son double le remit sur son épaule et partit à la suite du docteur.
Ils coururent ainsi à travers les rues, les ruelles et la foule parisienne avant de finir leur course devant un petit embarcadère qui longeait la Seine. Le docteur s’aventura sur le quai et s’arrêta près de leur future embarcation.

- Ah… j’étais sûr… qu’il ne l’aurait pas pris, souffla-t-il finalement entre deux respirations, plié en deux. Voici l’Insub…mersible.

Devant eux se trouvait un vieux navire de bois et de métal, ressemblant à une version mécanique et plus petite du Queen Anne’s Revenge. Malgré son air vieillot, on percevait encore son charme d’antan.
Mais dès qu’ils embarquèrent à bord, un son désagréable et à la fois familier arriva à leurs oreilles. Déposant négligemment Ryden sur un tas de cordages, le Gardien se retourna vers ladite voix.


- Ne serait-il pas temps de partir avant qu’elle fasse exploser notre nouveau moyen de transport ?
- Laissez-moi deux-trois minutes, le temps de le faire démarrer, cria Jeckyll en disparaissant dans la cale où se trouvait la salle des machines.

Pour une étrange raison, les deux sosies se regardèrent ensuite simultanément. Puis, Ryden, semi-conscient de ce qui se passait, lui décocha un sourire béat avant de répondre d’une voix pâteuse:

- J’suis la machandise qu’y faut pas abimé. Alors, j’t’la laiche.

Ne daignant même pas lui répondre, son double se vira vers son protecteur et lui lança des ordres. Aussitôt, C-Ch0ir s’élança vers la femme et l’attaqua. Elle eut droit au même traitement que le toxicologue à quelques différences près, elle ripostait mieux. Puis, le docteur sortit de la cale en courant, monta au gaillard arrière et alla jouer avec le tableau de bord. Quelques secondes et plusieurs coups de clé à molette plus tard, le moteur se mit à tousser, puis à ronronner avant de rugir. C’était l’heure de partir. Le Gardien rappela immédiatement son protecteur, mais L’Insubmersible commençait déjà à s’éloigner de l’embarcadère. N’ayant pas d’autre chose, C-Ch0ir sprinta jusqu’au bout du quai et sauta, suivi de près par la pyromane. Tous les curieux qui assistèrent à la scène furent persuadés qu’il n’y arriverait pas, mais au dernier moment, la machine fut attrapée par son maître. Alors que l’autre tomba dans le fleuve, exprimant toute sa rage.

Se sentant à présent en sûreté, le Gardien conduisit son double dans la cabine du capitaine, ne voulant pas que celui-ci se jette à l’eau par mégarde. Puis, il s’installa confortable avec son robot à la proue. Ils voguèrent ainsi pendant un certain temps, jusqu’à ce qu’ils débouchent finalement sur l’océan. Dès lors, le docteur actionna des boutons et des levers. Aussitôt, leur navire se transforma sous leurs yeux. Les voiles s’ouvrirent automatiquement et la structure même s’agrandit pour prendre la forme d’une vraie frégate. Maintenant, la ressemblance avec le Queen Anne’s Revenge était plus que flagrante, s’en était presque une copie. Cette modification leur permit de filer à une vitesse incroyable, leur donnant presque l’impression de voler sur les vagues. Cependant, à cause de tout ce changement Ryden se réveilla de sa torpeur, plus conscient que jamais et furieux. Le temps de le dire, il était sur le pont et le paysage qu’il vit le découragea. Il n’y avait de l’eau et juste de l’eau à perte de vue. Il pouvait oublier toute tentative de fuite maintenant. Il aurait bien été voir son double pour lui exprimer sa pensée, mais dès qu’il vit C-Ch0ir, il se ravisa. Pour l’instant, il n’avait pas d’autre choix que de les suivre. Il monta s’assoir près de Jeckyll et profita de ce moment pour essayer de récolter quelques informations.


- Le voyage sera plus long par la voie maritime. Malgré tout, l’Insubmersible a été créer pour la vitesse. Pouvez-vous croire que son créateur, un grand navigateur et fan de Barbe Noire, qui s’avère être aussi un bon ami, a construit des merveilles nautiques plus incroyable encore que celle-ci ? dit le docteur en voyant s’approcher Ryden, agissant comme si de rien n’était. Cependant, on percevait aisément son inconfort.Mais ce bon vieux navire a toujours été capricieux pour le démarrage.
- Qui était cette femme ? changeant brusquement de sujet.
- Fanny Van de Grift.
- Ne serait-ce pas la femme de Robert Louis Stevenson ? demanda le démon surpris. Pourquoi nous a-t-elle attaqués ? Elle n’aime pas les créations de son mari ?
- J’ignore de quoi vous parler, M. Haesmar. Miss Van de Grift n’est pas mariée, si ce n’est peut-être à la folie. Et ses raisons, elles sont aussi obscures que son jugement. Tout ce que je sais, c’est qu’elle veut nous voir disparaitre, Mr. Hyde et moi. J’ai essayé de raisonner avec elle, mais vous avez vu comment elle est.
- Et lui, pointant l’homme à l’avant, qui est-il ? Vous semblez vous connaître. Pourquoi est-il là ?
- Vous avez raison, nous nous connaissons. Mais, si vous voulez des réponses, demandez-les-lui.
- Pourquoi ne répondez-vous pas ? Ce ne sont que de simples questions.
- Parce que…
- Je crois qu’on est poursuivi, interrompit ladite personne toujours aussi inexpressive et qui s’était rapproché sans que le démon ne l’ait vu.

* Le fait-il exprès ? *, maugréa intérieurement Ryden.

En fait, lorsqu’ils portèrent attention, ils entendirent un bruit de moteur qui devait être tout près d’eux. Cependant, ils avaient beau regarder dans toutes les directions, rien n’était visible à l’horizon. Et soudain, un petit aéronef apparut à tribord, passa juste au-dessus de leur tête, laissa tombé deux objets ronds et s’éloigna à bâbord. Celle qui le conduisait n’était nulle autre que Miss Van de Grift, beuglant et gesticulant toujours comme une démente. Comment les avait-elle retrouvés, personne ne le comprit. Cependant, ils surent tous qu’ils lui seraient difficiles, cette fois-ci, de lui échapper. Son engin, ressemblant à une petite chaloupe agrémentée d’hélices de chaque côté et d’un puissant moteur, était tout aussi rapide que leur navire et beaucoup plus manœuvrable.

- Est-ce que quelqu’un comprend ce qu’elle dit ?, demanda le démon intrigué malgré tout, car le regard qu’elle leur lançait était inquiétant, un mélange entre rage, démence et satisfaction du devoir accomplie.

Cependant, ce qui intriguait encore plus le docteur était les objets qu’elle avait laissé tomber. Il décida donc d’aller assouvir sa curiosité en allant à leurs recherches pendant que les deux autres s’occupaient de la pyromane.

- Elle parle de chaussettes démoniaques qu’elle va faire disparaître, en parlant, j’imagine, du Dr. Jeckyll et de M. Hyde. Elle rajoute qu’il va y avoir de jolies étincelles purificatrices et qu’il va faire chaud, chaud, chaud, répondit son double d’un ton neutre, comme si ce qu’il venait de dire était tout à fait logique et normal.
- Vous plaisantez ?
- Non, j’ai lu sur ses lèvres.
- Euh… D’accord… Quoi ?!

Comprenant en même temps le sens des paroles de la pyromane, les deux Ryden se regardèrent. Une seconde après, Jeckyll remontait de la cale en courant et en criant : « DES 3XPL0-S1Fs ! » Aussitôt, tout le monde se dirigea vers la balustrade où seul le Gardien eut une hésitation avant de sauter. Au moment où ils se jetèrent par-dessus bord, leur moyen de transport explosa. Propulsés par l’onde de déflagration, ils entrèrent à l’eau à grande vitesse et non sans douleur pour personne.

Lorsque finalement Ryden refit surface, il remarqua qu’Hyde avait repris les rênes. Quand et comment avait-il fait ça, il n’aurait su le dire. Quoi qu’il en soit, le colosse était là. Et tous deux devaient maintenant éviter la pluie de débris qui leur tombaient dessus. Pour couronner le tout, Van de Grift avait repéré le colosse. Furieuse de le voir toujours vivant, elle rapprocha son aéronef, se mit debout et actionna son lance-flamme dans sa direction. Ce dernier, en mauvaise posture, disparaissait sous l’eau pour réapparaître plus loin. Pendant ce temps, elle chantait d’un air féroce tout en le pourchassant:

- ♪ Feu, feu, joli feu ! Ton ardeur nous réjouit. Feu, feu, joli feu ! Monte dans la nuit. Vive la chaleur du feu, vive sa chaleur !…

Incrédule devant la scène qui se déroulait sous ses yeux, Ryden réalisa soudainement qu’il leur manquait des joueurs. Où étaient les autres ? Il ne les voyait nulle part. Il n’avait pas d’autre choix, il devait intervenir et aider son guide. Alors qu’il cherchait une solution, la réponse arriva sans crier gare. Un puissant jet d’eau sortit tout près de lui, propulsant son double dans les airs. Celui-ci atterrit, par un heureux hasard, dans l’embarcation volante. Profitant de la confusion de la femme, Hyde et Ryden ramassèrent chacun un débris qui flottait près d’eux et le lui lancèrent. Ce qui s’ensuivit ensuite, fut un étrange enchainement d’éléments presque impossibles à croire. Si l’un frappa la pyromane, la faisant tomber à l’eau, l’autre arracha complètement les hélices tribord et heurta rudement la tête du Gardien qui se relevait au même moment. Aussitôt, l’engin perdit sa stabilité et chuta. Pendant ce temps, ce qui restait de L’Insubmersible coulait au fond de l’océan en une lente agonie.

- Bravo, le génie ! On va faire comment maintenant pour l’utiliser ?
-
- Nom d’un artichaut céleste…
- Ah non, là ça suffit !

Exaspéré par la cause de leurs nombreux soucis, il nagea jusqu’à la femme et s’apprêtait à lui présenter les profondeurs de l’océan lorsqu’une idée plus cruelle lui vint à l’oreille. Laissant le soin à Hyde de s’occuper de leur assaillante, il chercha à travers les débris une planche qui pourrait faire office de radeau.

- N’oubliez pas, dès qu’elle ne bouge plus, vous la remontez. Elle doit rester vivante et si elle revient à elle, replongez-la.

Pendant ce temps, toujours à bord de l’aéronef qui servait maintenant de bateau, le Gardien avait repris ses esprits et observait ses compagnons. Lorsque Ryden revint vers le colosse avec le résultat de sa fouille, il les vit mettre la femme inerte et l’attacher solidement après le radeau de fortune. Puis, les deux hommes cessèrent et s’échangèrent des regards.

- Vous êtes sûr qu’elle venait d’arrêter de se débattre ? Elle ne respire plus… Et je sens pas de pouls…
- Oui ! J’en suis sûr.
- Très bien, ne vous fâchez pas.

Le géant donna ensuite un bon coup au niveau du thorax de la femme. Était-ce volontaire ou juste une manière d’exprimer son mécontentement ? Les Ryden n’auraient su le dire. Mais presque aussitôt, elle se mit à expulser tant bien que mal l’eau dans ses poumons. Satisfaits d’eux, ils poussèrent son radeau au loin tout en l’entendant les injurier difficilement. Puis, ils rejoignirent la chaloupe.

- Bon voyage. Allez mourir d’une mort lente et pénible,[/ cria le démon à la pyromane.
- Et si quelqu’un la repêche ?
- Euh…
- Euh...

Les deux autres se regardèrent incertains, ils n’avaient pas pensé à cette éventualité. Mais le démon se mit à rire avant de répondre :

- Quelles sont les chances que quelqu’un la trouve avant qu’elle meurt de faim, de déshydrations ou même de folie ? Attachée comme elle l’est, elle ne peut rien faire. Et puis, vous avez bien vu, Mr. Hyde lui a cassé des côtés lorsqu’il l’a frappé. Non seulement, elle doit souffrir à chaque respiration, mais en plus, juste parler lui est difficile.

Maintenant qu’ils avaient réglé le problème de Van de Grift, il ne restait plus qu’à s’occuper du leur. Ils inspectèrent donc leur embarcation. La coque semblait correcte malgré quelques encoches par-ci, par-là. Cependant, le moteur les préoccupa un peu plus. Une partie était submergée, mais avec un peu de chance, il fonctionnerait peut-être encore, leur permettant d’avancer à bonne allure. Alors que tout le monde se croisait les doigts, le Gardien le fit démarrer. Après la deuxième tentative, il se mit à ronronner doucement. Cependant, leur joie s’éteignit rapidement. Dès que le colosse embarqua à bord, les deux Ryden virent leur espoir s’envoler au loin. Ils crurent même pendant quelques secondes que la chaloupe allait couler sous le poids de Hyde. Non seulement, le moteur ne fonctionnait plus, mais en plus il était à présent presque complètement sous l’eau. Pour couronner le tout, il devait rester dix à quinze centimètres de coque visible. Il suffisait d’une vague de grosseur moyenne et il pouvait dire adieu à leur embarcation.

- Aaaiish ! s’écria Ryden toujours dans l’eau, découragé et sur le bord de la crise de nerfs. Pourquoi a-t-il fallu que vous lanciez un aussi gros débris ? Si vous ne l’aviez pas fait, à l’heure qu’il est, on serait loin d’ici ! À bord d’une chaloupe volante, pas d’une qu’y dérive !

Il fit ensuite une allusion peu flatteuse de son poids et au fait qu’il avait noyé le moteur. Il n’en fallut pas plus pour que le géant se jette à l’eau et fasse boire à plusieurs reprises la tasse au démon. Heureusement pour Ryden, le Gardien arrêta leur "enfantillage", pour leur proposer une solution. Il leur montra une planche de bois large à son extrémité qui venait de passer devant lui avant d’ajouter :

- Vous allez ramer, Hyde.
- Pourquoi moi ?
- Parce que vous êtes le guide et vous avez des gros bras musclés, qui nous fera avancer plus vite que si c’est un de nous deux. Ai-je besoin de vous énumérer une troisième raison, répondit Ryden malgré lui.

À contrecœur, le géant retourna au bateau et s’installa à l’arrière pendant que le démon se plaçait au milieu.


- Pourquoi suis-je le seul à ramer ?
- Parce qu’il n’y a qu’une seule rame, lui répondit le Gardien au bout de la chaloupe.

Alors qu’il avançait finalement à bonne vitesse, Ryden se tourna vers son double.

- Au fait, comment avez-vous fait pour être projeté dans les airs après être tombé à l’eau ?
- C-Ch0ir.
- Aaah ! C’est ce que je croyais aussi, dit-il en même temps que son regard tournait vers Hyde. Vous ne comprenez pas ?
- Non.
- Ce n’est pas grave…

Après plusieurs heures sous le soleil cuisant, tout le monde avait terriblement chaud, sauf bien sûr le Gardien que rien ne semblait le déranger. Il restait là, immobile à regarder l’horizon, protéger par son habit. Il donnait presque l’impression de méditer. Alors que Ryden, lui, était en train de devenir fou dû à l’inactivité et à tout ce bleu qui l’entourait, peut-être aussi à cause de la déshydratation.
Semi couché, semi assis, les pieds dans l’eau, à fredonner une vieille comptine de son enfance et à s’arracher des poils de barbe imaginaire, il observait le ciel d’un regard vide. À une ou deux reprises, il avait même cru apercevoir plus loin dans le ciel des aéronefs. Tandis que Hyde, brûlé par les coups de soleil à 90 % de son corps, ramait toujours avec une cadence plus lente.

Alors que l’astre solaire commençait à décliner, le démon décida pour la xième fois de porter son regard vers l’horizon. Peut-être que cette fois-ci serait la bonne, il verrait enfin la terre ferme. Soudainement, il releva le buste, tapota le genou du colosse et pointa à tribord, surexcité. Il ne se rendit même pas compte que l’autre fulminait dû à la douleur de son érythème solaire.


- Dites-moi que vous voyez la même chose ! N’est-ce pas une montagne là-bas ? Dites-moi qu’on est enfin arrivé !

Leur guide se plissa les yeux pour mieux voir la chaîne montagneuse au loin.

- Je l’ignore.
- Comment vous l’ignorez ? Vous la voyez ou pas ?
- Je la vois, mais j’ignore on est où ?

Intéressé tout à coup par leur discussion, le Gardien sortit de sa méditation et vira la tête vers ses deux compagnons,

- Quoi ?! Ne me dites pas, depuis tout ce temps, vous ramez sans savoir où vous allez ?
- Oui. Comment voulez-vous que je m’oriente ?
- Encore chanceux qu’on ne tournait pas en rond, marmonna Ryden.

Mais avant que le colosse puisse répliquer quoi que ce soit, il fut pris de douloureuses convulsions. Quelques secondes après, le Dr. Jeckyll se retrouva à sa place avec étonnamment toujours la rame en main. Cependant, non seulement personne ne savait où ils se trouvaient, mais en plus, ils venaient de perdre leur rameur. Irrité par tout cela, le démon arracha la planche de bois des mains de l’homme et décida de remplacer Hyde en exprimant sa pensée haut et fort.

Lorsqu’ils finirent par toucher la terre ferme, la nuit était tombée. Mais ce qui les réjouissait encore plus, c’était qu’ils apercevaient de la lumière derrière la montagne, signe d’une quelconque civilisation. Malgré la fatigue, la soif, la faim et la douleur qu’ils ressentaient, ils grimpèrent leur dernier obstacle le temps de le dire (sauf le Gardien, qui, lui, ne ressentait rien de tout cela). Une fois tout en haut, ils virent ce qui illuminait tant le ciel, une gigantesque structure volait au-dessus d’une petite ville côtière.


- Vous croyez qu’elle sert à quoi cette grosse boule volante ?
- Je l’ignore, répondit Jeckyll en échangeant un regard avec le Gardien.

Puis, un son de moteur qui se reprochait fit vibrer leurs tympans. Le docteur s’éloigna un peu pour chercher la source du bruit. Un petit aéronef conduit par un pécheur passa tout près de lui. Il l’interpella en faisant des signes pour qu’il s’arrête, ce qu’il fit. Alors que Ryden scrutait toujours le vaisseau, le scientifique parla quelques instants avec l’homme.


-  Bonne nouvelle ! J’ai discuté brièvement avec ce gentil monsieur et il a proposé de nous héberger pour la nuit, déclara Jeckyll lorsqu’il revint vers ses compagnons.
- Il a sûrement eu pitié de notre état lamentable…, marmonna Ryden en regardant leur piètre apparence.

Si l’un avait une allure identique ou presque à celle qu’il avait au début, les deux autres avaient l’air de deux épaves. Seul leur habit était différent. Le plus vieux n’avait qu’un semblant de caleçon. Tandis que le plus jeune ne portait plus qu’un pantalon qui avait vécu des jours meilleurs. Ils étaient tous les deux aussi écarlates, l’un que l’autre, et parsemés d’éraflures.

Dès qu’ils furent tous à l’intérieur de l’aéronef, le pécheur décolla et se dirigea vers la ville. Cependant, Ryden comprit rapidement qu’il venait de se faire avoir encore une fois. En fait, ils n’allaient pas vers les habitations, au contraire, ils montaient en direction de la structure volante. Hors de lui, il réalisa enfin où ils allaient.

- Ne me dites pas que cette chose est LE laboratoire secret ?
- Désolé, mais si je vous l’avais dit plus tôt, vous n’auriez pas suivi. Je ne voulais nous retarder encore plus… déjà qu’on risque d’être les derniers arrivés. , dit-il sincèrement navré.
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Manche n°2 : Aller simple

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