Flûte, ce que les feuilles sont vite remplies. Est-ce que c'est moi qui parle trop ou cette machine prend trop de place avec ses grosses lettres ? Bah, je vais faire un bon stock de feuilles, je n'aurais plus de problèmes. Je suis plutôt contente, je commence finalement pas m'habituer à cette machine, mon père serait heureux de voir cela. Mais vu la hauteur de la lune et l'absence totale de personnes dehors je soupçonne que l'heure est beaucoup trop avancée pour que je puisse surgir dans son bureau. Il doit probablement dormir. Par pur sadisme, je me sentirais d'humeur de l'embêter un peu, mais après il serait capable de se venger en me réveillant brutalement. C'est déjà arrivé qu'il débarque dans ma chambre en gueulant pour finir par se laisser tomber sur le lit... avec moi dedans. Autant petite c'est drôle, autant maintenant, je le chasse à coup de pompes dans le derrière. Voyons voir... Aller une petite biographie sur les éléments qui ont marqué ma vie ? Oui ça à l'air bien comme sujet.

Le premier grand point dans ma vie fut quelque chose qui marquera à jamais mon enfance et la manière dont j'envisagerais par la suite mon avenir. Et non cela n'a rien à voir avec mes parents ! Enfin, je peux toujours un peu en parler, ça ne mange pas de pain.

Ma famille manichéenne.

Mon père est romancier à ses heures perdues, c'est d'ailleurs lui qui m'a apprit l'amour de l'écriture et l'envie d'aller à la rencontre d'autrui pour agrandir mes connaissances. C'est un véritable petit plaisantin, je dois tenir mon humour vaseux de lui, ça ne fait aucun doute. Ayant toujours été plus avec lui qu'avec ma mère, qui travaille en centre ville, j'ai beaucoup appris de lui... en bien ou en mal. Pour l'instant, il n'a pas véritablement de succès dans ses écrits, même si je sais qu'il a quand même un petit fan club et qu'on achète ses livres qui sont pas désagréables à lire. Il tape dans tous les genres, même si la science fiction lui plait bien plus. Mon imagination débordante doit venir de ces lectures. J'ai lu tout ce qu'il a fait et je suis assez fière de son travail. Quoi qu'il en soit, pour subvenir à nos besoins, car l'écriture ne nourrit pas toujours son homme, il tient une librairie de quartier -le nôtre plus précisément- et est populaire des habitants. Comme certain aiment aller parler à leur facteur ou leur boulanger, ici, c'est au libraire qu'on va tailler la bavette. Il doit avoir une tête de bon samaritain. C'est un homme bien... Un peu cinglé par moment mais très ouvert d'esprit. C'est bien pour cela que je l'aime.
Pour ce qui est de ma mère, il serait troublant de les comparer car ils ne se ressemblent pas du tout. Infirmière supérieure dans un hôpital, elle joue aussi les secrétaires auprès du médecin/directeur de l'établissement. Autant dire qu'elle respire le professionnalisme et a des réflexes convulsifs qui agacent. Elle est toujours dans notre dos à ronchonner sur nos actions irréfléchies et nos comportements parfois trop oisifs. Mon père ne dit rien, préférant en rire alors que de mon côté, je dois admettre que cela m'irrite légèrement. Avoir l'impression d'être encore considéré comme une petite fille est rabaissant, vous voyez ? Enfin, je ne lui reprocherais jamais à haute voix, sans elle, la maison serait sans dessus dessous et complétement anarchique.
Je vous vois venir: comment ont ils fait pour être ensemble et fonder une petite famille ?! Oh rien de très surprenant allons, ça saute même aux yeux, c'est tout simplement parce que... c'est... Bon d'accord j'en sais rien non plus !! Mais il me semble que leur histoire a commencé à l'école, ce qui pourrait expliquer bien des choses...

Cauchemars effrayants ou rêves paradisiaques ?

Comme je l'ai mentionné plus tôt, je ne m'effraie pas de grand chose. Mais ai-je précisé que depuis toute petite, je suis comme ça ?Même les terreurs et les histoires enfantines me semblaient futiles et trop exagérés pour être réalistes. Pourquoi ne pas dire qu'il existe un gros barbu vert ou rouge qui vient une fois dans l'année t'apporter des cadeaux si t'es sage, pendant qu'on y est ? Non mais vraiment...
Je me rappelle qu'un soir, alors que je ne trouvais pas le sommeil et regardais le plafond de mon lit, un bruit étrange avait réussi à me faire sursauter. Je devais avoir dans les 8-9 ans et j'étais encore influençable -enfin je crois- et du coup, j'avoue avoir eu peur qu'un voleur s'était introduit dans ma chambre. Il faisait sombre et je ne parvenais pas à dénicher la source du bruit. Cela recommença encore... Comme un cognement sourd sur le parquet qui se rapprochait lentement. Encore un coup... et un autre... et un autre... puis le silence... Et soudain, je sentis quelque chose gratter sous mon lit, comme si une énorme créature cherchait à le renverser. Très perturbant... Pour dormir, je veux dire !
Je m'étais assise en tailleur, observant une ombre apparaître au bord de mon lit. Une sorte de main qui agrippait aux draps; et enfin le semblant d'une tête encapuchonnée qui me regardait avec une respiration rauque.
A cet instant précis, je me suis dis qu'il avait probablement fini son petit numéro et, le regardant avec des yeux ronds, je l'accostais avec mon air innocent.

"Pourquoi tu te caches sous mon lit ? Tu n'en as pas ?"

Quand je repense au silence qui avait suivit, je ne peux m'empêcher de rire. Je l'avais choqué plus qu'il ne m'avait effrayé. le pauvre, je le plains quand même...
Il ne s'était pourtant pas découragé et avait fait mine de pousser quelques grognements et je voyais même ses pupilles briller dans le noir... sauf que cela causa sa perte. Curieuse, j'en fus fascinée et me suis empressée de me rapprocher à 4 pattes pour lui enlever sa capuche pour voir comment ça marchait. Il eut un mouvement de recul, comme si les rôles étaient inversés. Il s'était alors levé, me surplombant de toute sa hauteur en me toisant.

"Comment oses-tu ?! Tu ignores que tu as devant toi le Croque Mitaine ?!"

"Enchantée, je suis Valentine ! dis moi Monsieur, comment tu fais pour allumer tes yeux ? Moi aussi je veux le faire !"

Je m'étais levée et avançais vers lui, ne prenant pas du tout de précaution. Il recula à nouveau pour que je ne le touche pas, perdant de l'assurance et marcha malencontreusement sur l'une de mes peluches, le faisant tomber à la renverse. Là, il avait perdu, toute crédibilité. Sur le coup, j'avais eu peur qu'il se soit fait mal et me suis mise à genoux près de lui. Voyant qu'il allait bien mais qu'il ronchonnait, un fou rire inexplicable me prit. Il me dévisagea un instant, puis se redressa et de dirigea vers ma fenêtre.

" Oh, tu t'en vas déjà ?! Reviens me voir, la prochaine fois on jouera ensemble, d'accord ? Je rangerai ma chambre, promis !"

Il ne répondit rien et partit. Je craignais de ne jamais le revoir et pourtant... il revint jouer, à sa manière. Parfois il provoquait des bruits oppressants au niveau de mon armoire, du coffre à jouets ou encore du lit. Un soir, il tenta même de m'attraper la cheville et de me tirer brusquement. Mais à part lui dire qu'il me chatouillait, il n'eut droit à aucun cri de terreur. Je l'accorde, il arrivait parfois que je dorme quand il venait, et en ces rares occasions, je le grondais pour le réveil brutal, le pauvre.
Au final, j'avais l'impression qu'il commençait à épuiser ses ressources. Il ne manquait pas d'idées mais rien n'y faisait. Finalement un soir il lâcha enfin prise. Agacé ou résigné, il s'arrêta en soupirant, alors que je riais de sa tentative loupée de me sauter dessus par surprise. Il prit ma chaise de bureau, s'y assit et m'observa un long moment avant d'enlever sa cape.
J'avais atteint les 14 ans à ce moment là, il avait compris qu'il n'avait plus aucunes chances. Et pourtant, ce fut la seule fois qu'il parvint à me surprendre. Moi qui depuis le début pensais qu'il s'agissait d'un vieil homme ou d'une créature d'outre tombes, j'avais devant moi un homme qui devait à peine avoir dans les 25-30 ans. Cheveux longs dans les couleurs violet/gris et une cicatrice à l’œil gauche... Il était incroyablement séduisant pour un croque mitaine. Et il l'est toujours !
Il avait un air dépité, ne comprenant pas pourquoi il ne parvenait pas à me faire peur, doutant de son talent pourtant inné pour effrayer les enfants. Je me suis rendue compte que cela l'attristait.
Je ne sais pas pourquoi, mais je fus soudain pris d'une envie de le réconforter. Sans réfléchir, je m'approchais de lui pour le prendre dans mes bras. Okay, c'est pas malin, mais qui pourra dire qu'il a un jour enlacé un croquemitaine ? Bibi évidemment !

"Sincèrement navrée de n'avoir pu accéder à ton souhait, mais une fois notre première rencontre passée, je savais qui tu étais et ne ressentais plus cette frayeur de l'inconnu. Tu ne m'as jamais fait de mal et tu es souvent venu. Il faudrait passer à l'étape supérieure à présent !"

" L'é... l'étape supérieure ?!"

"Yep ! Tu as enfin dévoilé ton visage, je suis heureuse ! On ne pourrait pas cesser le jeu du 'qui fera peur à l'autre ?' et enfin devenir de vrais amis ? Il y a des exceptions partout, être croquemitaine ne déroge pas à la règle... Et d'ailleurs, 'croquemitaine' c'est vraiment ton nom ?"

Je le lâchais pour regarder sa réaction. Finalement, il était bien plus humain qu'il ne voulait le faire voir, avec ses joues soudain rouges. Non vraiment, je ne pouvais m'empêcher de le trouver adorable. -et c'est toujours le cas-.
Cela lui prit un moment de réflexion, mais il finit par me révéler son prénom: Ephraim...
je ne sais pas exactement comment ça a pu se faire, mais nous sommes réellement devenus amis. Oh j'entends déjà certains qui diront que ce n'est pas le croquemitaine. Mais détrompez vous, il en est bien un. Oui j'ai dit un, car malgré ce que l'on peut croire, il en existe un petit paquet ! Il m'a expliqué qu'ils avaient pour travail d'effrayer le plus d'enfants possibles pour une raison qu'il a refusé de me dévoiler -ce qui est bien dommage d'ailleurs-. La seule chose que je devais savoir, c'est qu'il valait mieux que je ne tente pas de reproduire le même schéma qu'avec lui. Il faisait cela depuis tellement d'années qu'il commençait à s'en lasser, d'où le fait qu'il n'avait pas réussi à me faire peur et ne m'avait jamais fait de mal. D'autres plus jeunes, auraient probablement été capables de me tuer.
Ils ne vieillissaient apparemment pas ou très lentement. Eph a vu de nombreuses décennies défiler sans prendre de rides. Je l'envie, frôler l'immortalité doit permettre de découvrir tellement de choses...
Le temps a passé, mais nous avons continué à nous voir. Il ne travaille plus qu'à mi-temps, apparaissant à présent aussi durant la journée dans une tenue plus normale. Je l'ai même surpris en train de jouer les clients curieux dans la librairie de mon père. Je suis très attachée à Eph et je peux dire sans hésitation que je le considère comme mon meilleur ami. Quand on le connait, on oublie sa vraie nature et on ne voit plus qu'un type amical qui a le sourire facile lorsque nous sommes ensembles.
Et d'ailleurs, même si je sais que je ne suis qu'une simple humaine qu'il a vu grandir, je ne peux m'empêcher de me dire que j'aimerais à présent passer encore à une étape supérieure...

Halte là, vous avez vos papiers ?!

Eph m'avait avoué un jour que les croquemitaines n'étaient pas les seules 'races' non humaines qui vivaient en ce monde. Si c'est lui qui le dit, je le crois sans hésitation. Mais sans preuves, je ne peux pas hocher la tête et passer à autre chose. Non, curieuse comme je suis, il est évident que j'allais tout faire pour les rencontrer et prouver leur existence. C'est pour cela que je me suis mise à aimer le paranormal, à foncer dans tel ou tel lieu quand une rumeur étrange se profilait.
Mais peut-on réussir à aller partout en tant que simple civile ?
Bien sur que non.
Ce fut mon père qui me souffla l'idée de devenir journaliste. Écrire des articles, fouiner de droite à gauche, avoir certains privilèges... Oui c'était bien le métier qu'il me fallait.
J'ai vraiment eu de la chance, mon père avait connaissance d'un journal et c'est encore grâce à lui que je pus être embauchée. Je fais de mon mieux pour ne jamais décevoir mon patron, mais je l'accorde, parfois c'est difficile. Enfin, si je ne faisais pas d'efforts, je ne serais pas là à écrire tout ça, si ?
Les premiers jours furent acceptables, je n'étais qu'une petite nouvelle et il était évident que je n'allais pas pouvoir faire ce que je voulais dès le début, je devais encore faire mes preuves...
Je ne détaillerais pas ce que j'ai dû faire pour passer dans les petits papiers du patron, mais autant l'assurer: Rien d'obscènes et dans un cadre parfaitement professionnel !
Lorsqu'il me jugea capable de partir à la recherche d'informations, il me conseilla un endroit parfais pour cela à condition d'avoir les nerfs solides et l'humeur toujours au maximum. Il n'aurait pas pu trouver meilleure journaliste...

Et c'est ainsi que je pus fouler pour la première fois de ma vie le sol de Commissariat. Après tout, rien de tel pour dénicher des informations croustillantes que d'aller les demander aux policiers, non ?
Évidemment, la première fois que je me suis présentée, je n'ai pas été vu d'un bon œil. Une petite curieuse qui mettait son nez là où il ne fallait pas, voilà comment j'étais vu. Comme si cela allait me décourager !
Malgré les renvoies fréquents, je revenais sans cesse, quémandant en premier lieu, puis devenant de plus en plus insistante, feintant d'une manière ou d'une autre pour me glisser de plus en plus profondément dans l'établissement, à la recherche de supérieurs hiérarchiques qui pouvaient me renseigner.
Je ne sais pas combien de plans fumeux j'ai pu faire, mais j'avoue que c'était plutôt amusant quand on y repense. Certain ont beau dire que j'étais une chieuse, ils riaient parfois et à force de se faire, ils semblaient attendre avec impatience une nouvelle tentative de ma part. Me prenait-il pour un clown ou un phénomène de foire ?
A force, ils m'acceptèrent parmi eux. Après tout, je n'étais pas un journaliste véreux qui n'était là que pour modifier la vérité et gagner un maximum d'argent. Non, je crois que mon sens de la justice et de la vérité plaisait, d'où le fait que je n'avais encore jamais finit derrière les barreaux malgré mon harcèlement quotidien pour récolter des informations juteuses.
Toujours est-il qu'un jour, ils n'arrivèrent pas à me rattraper à temps et, cherchant à les semer, je me glissai dans un bureau au hasard... Qui s’avérait être celui du Commissaire en personne...
Et bien évidemment il était là, me regardant d'un air surprit. Flûte, pour la discrétion, c'était complétement ratée. Mais puisque j'étais là, autant en profiter. J'ignore combien de questions j'ai pu lui poser, mais à peine avais-je donné mon nom que déjà un flot monstrueux d'interrogations arriva.
Mais voilà, monsieur Aldrick Voelsungen n'est pas de nature très patiente et il parvint à me faire taire en se redressant de toute sa hauteur. Très charismatique... mais aussi un peu effrayant, une fois que je m'étais rendue compte de mon impolitesse.
Je ne rapporterais pas les remontrances qu'il m'envoya car cela pourrait faire pleurer les plus fragiles. Mais je ne sourcillais pas une seule seconde, attendant poliment qu'il vide son sac et se détende. On se sent toujours de meilleure humeur une fois qu'on a crié, c'est connu... enfin je crois.
En tout cas, il finit par s'arrêter. Avait-il finit ou était-ce parce qu'il se rendait compte que je ne bronchais pas ? A méditer.

Au final, il me donna les informations nécessaires à mon article en échange d'une promesse... enfin plutôt d'un marché. Les détails importants que chacun pouvait trouver devait être dit à l'autre. C'était un flic réglo et moi, une journaliste travaillant pour la vérité, on ne pouvait que bien s'entendre. Il ne m'avait pas prévenu qu'il aurait également besoin de moi pour publier des mensonges, mais je lui pardonne à chaque fois car je sais que cela est une nécessité pour le besoin d'une enquête... Même si à chaque fois, il doit insister longuement pour que j'accepte. Je l'ai dit, je suis franche et mentir ne fait pas parti de mon travail... Enfin, comme c'est Aly, je peux bien faire quelques exceptions...

Moultipass ?!

Un jour, je ne sais pas vraiment ce qui m'a prit, j’ai eu envie de taquiner Aly et de le suivre, comme un vrai petit détective privé, juste histoire de lui faire une farce et de surgir devant lui en faisant un superbe "Tadaaaam ! Tu t'attendais pas à me voir hein ?!"... enfin un plan dans le genre.
La soirée venait de commencer, mais je comptais bien rester dehors pour le traquer et voir où il disparaissait de temps à autre. Il me disait parfois qu'il avait des affaires urgentes ou du boulot à finir chez lui, sauf qu'il m'étais déjà arrivé d'aller devant chez lui et jamais je n'avais vu le moindre signe de vie. Qu'on ne me dise pas qu'il devait dormir, je suis même allée jusqu'à frapper une ou deux fois à sa porte. Curieuse, je devais découvrir ce qu'il pouvait bien dissimuler derrière ce mensonge.
Lunettes de soleil et veste longue avec chapeau, voilà que je me déplaçais furtivement, gardant une bonne distance pour ne pas qu'il ne me repère, mais pas trop non plus, que je ne le perde pas de vu... Sauf qu'au bout d'un moment, c'est ce qui se produisit. Je ne sais pas comment j'avais pu le rater mais au détour d'une ruelle, il avait tout simplement disparu.
Je me rappel m'être retournée et observer avec attention les alentours, juste au cas où j'avais pu être repérée et qu'il allait apparaître pour me tirer les oreilles. Mais rien... j'étais seule.
Je me souviens avoir un peu vagabondé dans le secteur avant de me retrouver devant ce qui allait être une véritable mine d'informations. Mon penchant pour le paranormal allait être gâté.

Un cabaret dénommé le Lost Paradise. Je ne connaissais que de nom, n'ayant vu que quelques publicités sans pour autant m'y intéresser. Et à vrai dire, je tenais pas à l'être jusqu'à ce qu'une voix familière m'interpela. Mon cœur se mit à battre quand Ephraim apparut dans mon champ de vision. Apparemment, il était un habitué du cabaret, aimant bien être au contact de personnes non humaines... Cette révélation me choqua. Pas sur le fait que l'endroit était rempli de créatures étranges, mais sur le fait qu'il aimait boire dans un établissement comme celui là !! ... Oui je mélange les priorités, mais face à ce croquemitaine cher à mon cœur, il est dur d'être raisonnable...
Je suis sûre qu'il aurait préféré que je fasse demi-tour, mais ne voulant pas me laisser seule à une heure avancée, il m'emmena à l'intérieur avec lui, se portant garant de moi lorsque le chef de salle se pointa. Un homme aux allures stricts et un peu angoissant. Et si seulement c'était le seul ! Mais voilà, toutes les personnes que je voyais avaient l'air de venir d'une autre planète... Même certains clients le semblaient.
Je suis restée en sa compagnie toute la soirée, admirant les artistes et les employés du cabaret, ne pouvant m'empêcher de me demander quel genre de créature ils devaient être.
Je n'ai pas dormit de la nuit, mais ça a été une soirée incroyable. J'ai même rencontré des individus très intéressants au caractère bien trempé ou complétement farfelu, me faisant complétement oublier que j'étais là pour le travail.

Depuis cette nuit, je me rends souvent au cabaret, soit en temps que cliente, soit en temps que journaliste sentant venir l'article juteux. Ephraïm a refusé de me dire qui était quoi, me disant de chercher par moi-même et me déconseillant quand même certaines personnes. Apparemment, les humains rentraient dans le menu de quelques uns d'entre eux et si je ne voulais pas être le plat principal, il valait mieux que je ne les taquine pas trop... Il m'a donné un conseil que j'essaye de respecter à la lettre: ne jamais montrer un seul instant que je suis au courant de leur existence. Je pense que c'est d'ailleurs ce qui m'a sauvé la vie jusqu'à maintenant... enfin je crois.
Bien sûr, la plupart du temps, Eph tient à être là, histoire de surveiller mes arrières. Avoir un croque mitaine pour garde du corps, quel pied non ?
Par ailleurs, je me rappel qu'il doit passer me chercher pour une autre soirée au cabaret, je me demande quand il...

Le bruit d'une fenêtre qui s'ouvre me fait sursauter. Ah tient, quand on parle du loup ! Je me retourne et accueille Eph avec un grand sourire. Il tombe à point.
Je lâche ma machine à écrire et je me lève pour aller lui sauter au cou comme il m'arrive souvent de le faire. Il me salue à son tour avec un beau sourire. Il jette un coup d’œil vers les feuilles posées sur mon bureau, demandant ce que c'est. Je me contente de hausser les épaules, bafouillant un "mes devoirs...". Comme si j'allais lui dire que j'étais en train de raconter ma vie et un peu de la sienne ? Il découvrirait ce que je pense de lui et ça, mieux vaut le lui cacher pour le moment, c'est un grand sentimental, il pourrait virer rouge pivoine. Je terminerais tout ça demain... Ou pas !