Elle vient d'où, la lumière ?  Les mains se tendent toujours pour la capturer.
Et elle, lumière, maudite lumière, elle danse. Ô lumière, jolie lumière, pourquoi veux-tu t'échapper? Tu serais si gentille de te laisser attraper.

Le soûlard se lève, il est temps d'aller cuver son vin, et la lumière qui brille faiblement guide ses pas. Sa démarche est chancelante, il hésite parfois, mais la lumière devant-lui ne disparaît pas. Un éclat de raison s'infiltre dans son esprit, il se demande d'où vient ce fragment de jour au plein cœur de la nuit, mais cette étincelle meurt noyée sous des litres d'alcool. Petite luciole, qu'il répète de sa voix pâteuse, viens ici petite luciole... Mais la lumière reste un point fixe, qui ne change pas, ne grossit pas... Et il a beau tendre les mains, impossible. Il se traîne derrière cette étoile, il veut, il la veut, de toute ses forces il désire, et sans même se demander pourquoi, sans même se dire que c'est ridicule, ni se demander d'où vient cette attraction ridicule, cette idée stupide, qu'il peut saisir la lumière... Et il tend sa main... Il tend son bras... Il tend son corps...
Et elle n'est plus là. Il bat des paupières, son air hagard reflète la bêtise, et, émergeant des brumes de son ivresse, la raison, bien amochée, réalise qu'aucun lampadaire n'est allumé. Par la suite, tandis que la raison se rendort, un instinct, celui du flemmard-ménager, qui guide tout un chacun vers son foyer chaud et chaleureux, où on pourra boire jusquà en crever, réalise qu'il n'a en ces lieux nul repère. La nuit si sombre efface les alentours, et rien ne ressemble à ce qu'il connaît.
Et elle réapparait. Tremblotante, tenue mais luisante, cette petite chose qui brille devant lui. Il soupire de joie, et il ne sait même pas pourquoi, mais il était perdu sans elle, et la voilà. Il s'avance, il tangue vers elle, navire fou vers son phare, il balbutie et tremble, et elle, elle qui tremble aussi, elle ne bouge plus, elle est toujours-là devant lui, et ses contours se précise, et ça n'est plus une flamme dans la nuit, c'est une demoiselle, une demoiselle comme une bougie, qui tremblote dans le soir, qui combat vainement l'obscurité, qui a un teint de cire, et des yeux brillant doré. Cette étrange lueur qui l'enrobe, qui provoque comme un malaise pour qui la regarde, et qui pourtant fait briller les yeux de l'alcoolique qui est là.
Et comme il tend la main vers elle, et comme il s'avance, et comme il veut l'attraper... Il sent du vide sous ses pieds. Et il chute, et dans la Seine, le soûlard s'est rajouté aux rangs des noyés.

Les temps passent, les hommes restent semblables, et Luz ne vieillit pas. Ses traits jeunes pour l'éternité, vide d'émotion et gavé de lumière, démonstration des lois de l’évolution. Autrefois, les êtres de sa condition n'était que d'étranges tourbillons de lumière qui fascinaient, et ne prenait forme humaine que quand le besoin s'en ressentait (s'en référer aux Jack o' lantern et divers Will o' the wisp), mais les conditions actuelles leurs ont demandé de changer. Ainsi, si elle n'était, il y a quelques siècles, qu'une blafarde bougie dans l'obscurité, revêtant occasionnellement l'aspect d'un passé enterré, elle est désormais une demoiselle des plus pâlotte qui, quand elle en voit la nécessité, reprends sa forme de lumière.

L'éclat mauve de sa flamme, le froid qui se dégage de son feu, un cierge allumé sur l'éternité, elle est une luciole qu'on ne voudrait pas croiser. Pourtant, la proie qu'elle guette se voit toujours comme ensorcelé, et suit cette petite chose sans se douter. Nul autre que le condamné ne remarque cette étrange manifestation, ou si ils l’aperçoivent ils tiennent généralement à s'en éloigner.

Humaine, elle conserve sa froide pâleur. Sorte de spectre bien solide, se mouvant dans une nuée étrange, créature issue des ténèbres, l'aspect inhumain de Luz est particulièrement visible de nuit, puisqu'elle se révèle diffuser constamment une légère lumière. Si elle peut à loisir intensifier la lumière qu'elle produit, elle ne peut la faire entièrement disparaître.
Coupé court, sa chevelure est blonde argenté, d'une teinte lunaire. Trahie, comme toujours, par l'obscurité, elle luit doucement quand s'efface le jour. Sa peau à la pâleur morbide paraît d'autant plus blafarde en comparaison de cette chevelure claire, et l'aspect chimérique de son être est renforcé par cette paire d'yeux doré, figé dans une contemplation de l'éternel.

Luz a un visage de porcelaine. Ses traits sont tout aussi figé, comme un masque rigide mais délicat, que savoure les yeux mais qui trouble les âmes. Son aspect fragile et éphémère est l'origine même de sa beauté. Sans cette allure chétive, sans cette immobilité, Luz disparaîtrait dans la masse des jolies femmes, trop nombreuses pour être appréciée.

Son corps conserve cet aspect, à mis chemin entre le cierge et la poupée. Fin et délicat, recouvert de cette peau à demi-translucide, elle se briserait au moindre choc. Revêtu de mignonne robes, paré d’adorables bijoux, on en oublierait presque qu'elle n'est pas artiste mais simple employé. Ses vêtements sont pourtant choisi sans coquetterie aucune, elle n'y voit pas le moindre intérêt. Mais le manque de choix la force à se rabattre sur ces trop jolies tenues qui attirent chez les clients un intérêt non-sollicité.
Détail incongru chez une créature de l'ombre (même lumineuse comme un feu-follet), elle porte à son coup une croix, souvenir d'un espoir qu'elle a presque oublié.

En plus d'être fluorescente, la demoiselle se voit muni d'un corps qui, de nuit, peut devenir gazeux, semblable à la flamme qu'elle est. Quand elle-même n'est plus qu'un voile de brume teinté de clarté, on distingue en son cœur la flamme qui l'anime. Précision qui cassera l'ambiance, mais il ne s'agit pas du type figuré.