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Cabaret du Lost Paradise - Forum RPG

Forum RPG fantastique - Au cœur de Paris, durant la fin du XIXe siècle, un cabaret est au centre de toutes les discussions. Lycanthropes, vampires, démons, gorgones… Des employés peu communs pour un public scandaleusement humain.
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 Event | Le Bal des folles [1889]

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MessageSujet: Re: Event | Le Bal des folles [1889]   Event | Le Bal des folles [1889] - Page 3 I_icon_minitimeDim 13 Avr - 12:15


Le mime s’était fait embarqué dans cette petite compagnie contre sont gré… enfin avait-il un avis a emmètre ? non… on ne lui demandait jamais.
Enfin, il aurait pu tomber plus mal !
Des types bizarre, une doctoresse maléfique et un poil allumée et June.
Mais June était gentille. Le roux était en tout cas fort rassuré de voir que sa pseudo victime allait mieux, et il ne put empêcher ses joues de se tinter d’un rouge encore plus vif quand celle-ci vint l’aider à se relever avec toute la douceur du monde. Il regardait ses pieds, détestant l’espace d’un instant être la petite bête qu’on regarde. Enfin c’était bien de sa faute pour le coup, il n’avait qu’à faire plus attention ou, du moins faire une entrée moins remarquable.
Alors, il fut embarqué dans cette « aventure » qui lui plaisait de moins en moins. Suivant de son pas léger les autres membres de cette petite équipe, jouant à la perfection son rôle de fantôme : restant silencieux et invisible. Non pas qu’il ne voulait pas participer à la recherche de cette pauvre femme… mais il avait surtout peur de gêner les cervelles des autres, il pouvait presque voir leur tête fumer s’attaquant à ses énigmes tordues et complexes.
Mais il faut avouer qu’il était vraiment admiratif, le docteur Keller oups ! Kellerstein pardon ( il ne tenait pas à se faire crier dessus par la dame en question… enfin pour cela il faudrait qu’elle lise dans ses pensées… ce qui n’était pas possible… hein ? … hein ? )
Elle arrivait à résoudre toutes les énigmes toute seule faisant tourner en bourrique ce pauvre Adam. Le roux se sentait compatissant envers le pauvre bougre qui essayait de faire de son mieux pour aider Dolores.
Quoiqu’il en soit le docteur était quelqu’un d’intelligent, diaboliquement intelligent… Et même si Ziggy voulait être autre chose qu’un boulet suivant bêtement sans être d’aucune utilité… il avait trop peur de s’imposer, et puis elle lui faisait tout de même un peu peur…. Enfin bref. Il pesait le pour et le contre tout en marchant écoutant en fond sonore les pas du groupe et les discours de Mme Keller expliquant comment à chaque fois elle s’y était pris pour résoudre l’énigme. Il sourit en entendant la pointe de fierté dans sa voix, il y avait de quoi être fière oui.
Il arrivèrent dans la cour où déjà un bon nombre de gens s’étaient réunis autour de Calliope. Le mime souffla de soulagement, elle avait l’air saine et sauve ! Mais elle s’emporta de nouveau dans une crise hystérique déblatérant une nouvelle fois ses folles paroles. Ziggy recula d’un pas en tremblant : il n’aimait pas voir les gens souffrir, il n’aimait pas sa détresse ni le ton de sa voix emprunte de folie. Son cœur fut pris d’un pincement quand la jeune femme s’effondra dans les bras d’un homme, et attendit un peu anxieux le diagnostic des médecins. Il souffla une nouvelle fois, il semblerait qu’elle n’ait rien.

Quand tous s’en allèrent il fut pris de l’envie d’aller avec eux, mais les paroles de la doctoresse le fit rester sur place. Elle alla voir un homme étrange qui lui donna quelque chose, un morceau de papier. Elle l’observa et sourit d’un sourire machiavéliquement kellersteinnien : ainsi donc l’histoire n’était pas finit et cette ambiante folie leur laissait une ultime énigme. Leur meneuse s’élança une nouvelle fois à la poursuite des mystères, alors le mime suivit. Lorsque qu’Adam demanda aà voir le papier Ziggy observa par-dessus son épaule sans qu’il ne le remarque c’était ça aussi l’avantage d’être un fantôme. Il se gratta la tête et fit marcher ses méninges…. Décidément, ces dessins étaient jolis mais en comprendre le sens était chose fort compliquée. Il pencha la tête, il n’était décidément pas un bon sherlock holmes.
L’interne semblait comprendre alors que le mime était toujours perdu. Il fit une moue boudeuse et reporta son regard sur le docteur et une étrange et furibonde boule de poils. Il leva les yeux vers ce qui les entourait. Ce lieu sentait la guerre, une épique bataille entre forces de la nature avait dû avoir lieu, un carnage, une rage profonde et un désir de vengeance : Puis un héros mystique que se relève des cendres de ses ennemis avec son trésor dans une boit-
Quoi ?
Le trésor !
Il s’approcha de la dame et de son chat pour jeter un coup d’œil. Cette femme était décidément très impressionnante, elle avait résolu le mystère de la Salpêtrière . Il sourit et posa sa main sur son épaule, voulant la féliciter, il n’avait pas été d’une grande aide, ni d’un grand secours mais il était tout de même content que tout cela finisse bien. Il essaya d’articuler ses lèvres dans une quelconque formule de félicitation, ou du moins pour exprimer son admiration au Docteur Sherlock Kellerstein Holmes, mais ne réussit qu’a bredouiller un

« T-toutes mes F-F-F-Fel-Fel… »

Il abandonna, l’émotion et le respect l’empêchaient de parler, alors sur les paroles du docteur, il applaudit doucement le pigeon, pour ses exploits. Le mime regarda Adam et fronça les sourcils, alors il n’était pas content celui-là ? quelle tête étrange faisait il en regardant le doc’. Décidément… drôle de soirée.


hors-jeu.:
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MessageSujet: Re: Event | Le Bal des folles [1889]   Event | Le Bal des folles [1889] - Page 3 I_icon_minitimeDim 13 Avr - 22:40

Un plic-ploc incessant renversait lentement la tête à la banshee. Elle se tournait et se retournait contre sa partie du mur, cherchant un réconfort quelconque dans un sommeil immobile et sans rêves. Si seulement Narcisse voulait bien éteindre cette lanterne empêcheuse de sombrer à souhait. Sa robe longue formait la couette parfaite, aux morceaux de couleurs arlequins et au tissu doux comme la soie délicieusement précieuse des ténèbres. L’oreiller de ses mèches poivre-sel massait son crâne endolori par sa lumière têtue et par l’anxiété, tandis que le plic-ploc pulsait dans ses tempes, régulièrement, trop envoûtant.

Il lui semblait, dans ses moments de lucidité, que Narcisse cherchait apparemment une sortie ou du moins une ouverture dans le mur qui supportait le dos de Rita, presque désespéré. Il tournait en rond, trépignait devant elle, se mettait parfois à son niveau pour vérifier si la banshee n’avait définitivement pas fini dans le coma, puis retournait à ses recherches. Parfois, il s’éloignait tellement que la lumière de la lanterne disparaissait par moment de la vision brouillée de la jeune femme. Cependant, Rita n’avait jamais assez de répit devant la lueur désagréable, celle qui la ramenait à sa vérité, puisque Narcisse se ramenait avec sa loupiote en courant, apeuré par les couloirs obscurs ou par la crainte de perdre la banshee. À cela, cette dernière soupirait avec exaspération. Puis recommençait la ronde de l’angoisse, coupé par les courtes somnolences de la créature épuisée.
De longues heures passèrent, ou tout du moins il semblait que le temps s’était ainsi écoulé. Rita avait le corps complètement engourdi, non pas par le froid, ce qui aurait pu apporter un aspect absurde à cette situation déjà surprenante, mais par l’immobilité étonnante dont la banshee faisait preuve. Narcisse s’était également installé, juste en face de la jeune femme, sa lanterne épuisée entre ses bras frêles et couverts de son léger manteau brodé, et soupirait de concert avec Rita. Mais c’est seulement au bout de ce long temps de torpeur, que Rita vit enfin le bout du tunnel sinueux, qui l’avait mené dans une si piètre aventure et dans un état si pitoyable. En réalité, elle crut d’abord que Narcisse avait trouvé un moyen quelconque de rallumer sa torche d’espoir, avant de s’apercevoir que ce dernier la fixait tout aussi mollement qu’auparavant. Ses paupières s’agitèrent, ainsi que son coeur s’emballant jusqu’à l’embrasement. Rita se releva d’un coup, ballotant des jambes à cause de l’afflux soudain de sang gelé, et fixa droit en face d’elle, son regard portant bien au delà des murs humides aux gouttes battant la mesure. La migraine la reprit et cela lui fit étrangement du bien, car enfin un signe de réconfort traversa son esprit. Elle partit en trombe de son coin du mur, suivie de près par un Narcisse affolé par la soudaine agitation de sa collègue, et courut presque au détour des couloirs. Rita savait exactement où aller, motivée d’en finir une bonne fois pour toute avec cette histoire, et ne s’arrêta dans sa course que lorsqu’enfin, sa lumière se présente devant elle.

Une femme au dos courbé, couvert d’un châle sombre, avançait lanterne en main et pas peu assuré. L’âge avait marqué ses traits sur les yeux usées de l’arrivante, tandis que ces derniers se tournaient lentement vers les deux invités, qu’elle gratifia d’un sourire si chaleureux que Rita se sentirait fondre, si sa gorge et ses cheveux ne se raidissaient pas d’avance. Le jeune homme ne perdit, quant à lui, pas une seconde avant de perdre toute méfiance et de s’avancer égaiement vers la vieille dame. Elle arborait avec fierté son uniforme d’infirmière, tandis que son corps avachi rendait hommage à une vie d’hospitalité et de services, rongé non seulement par la vieillesse, mais par la maladie apparente sur son côté droit.

- Et bien, mademoiselle, monsieur, vous vous êtes perdus dans un endroit bien inconvenant pour un rendez-vous.

Elle clopina jusqu’au jeune homme, qui lui souriait à pleines dents. Elle lui tira une mèche albâtre, façon un peu stricte de rappeler ses manières à l’acrobate, et de lui indiquer subtilement de s’occuper de sa compagne. Message que le garçon ne reçut d’aucune façon, mais la banshee et la vieille dame s’en accommodèrent que trop bien. Chacune se fixèrent dans les yeux, ceux verts de l’infirmière et ceux rouges rubis de Rita, qui se cachait encore dans l’obscurité.

- J’ai croisé Charlotte, qui m’a dit où vous étiez. Bien que ses crises soient de plus en plus fréquentes, il en va de même pour sa lucidité. Suivez-moi maintenant, je vais vous sortir d’ici. Après tout, c’est moi qui suis responsable de cet endroit. Du moins pour cette nuit.

En chemin, l’infirmière ne prononça guère plus de choses que les directions à suivre, et pesta également, par moment, contre ses congénères, trop agitées et trop tête en l’air pour garder ne serait-ce un oeil sur leur si dure charge, leurs patients. Les deux jeunes gens marchaient à son allure, lente et patiente, jusqu’à arriver devant une porte, tellement désirée que Narcisse s’empressa de sortir, presque en bondissant, tandis qu’à sa suite, la vieille femme referma la seule ouverture vers l’extérieur, avant de se retourner vers la banshee, qui put enfin s’écrouler au sol de douleur. Des soubresauts et des gémissements résonnèrent au travers de son petit corps torturés, qui s’évaporait en de blanches volutes. Rita s’essoufflait de secondes en secondes et sa peau semblait se geler, ainsi que celle lépreuse de l’infirmière. Cette dernière s’était effondrée tout autant, appuyée contre le mur de pierre. Elle jeta un regard contrit à la créature, et celle-ci lança des yeux soulagés envers l’agonisante. Oui, la vieille dame allait mourir, et Rita n’avait aucune honte à éprouver une joie préalable à sa libération.

- Vous avez du attendre longtemps avant de venir me cueillir, faucheuse. J’espère que, vous au moins, vous ferez votre travail convenablement.

Bien que Rita tenta d’objecter, sa voix ne fut qu’emportée par un début de hurlement.

- Désolée que ce fut si long. Si vous saviez le nombre de cachets que j’ai dû prendre ! Rien que ça pour me garder en vie un jour de plus. C’en est assez. J’en subis encore les effets et cela m’empêche de dormir. Ici au moins, personne ne pourra me réveiller.

Le cri était déjà audible, bien que Rita tentait de retenir encore sa fatale clameur. Elle gémissait encore à un niveau humain, pensant à Narcisse dehors, se demandant s’il était inquiet de n’avoir vu personne le suivre.

- Je voulais que personne ne puisse me trouver. Par pitié, si vous n’avez qu’une once de pitié pour nous pauvres mortels, prenez cette clé et refermez cette porte. Si du moins ils ont l’envie de me chercher, ils devront passer par le chemin le plus long. Bonne nuit, faucheuse, et que mon âme ne vous soit pas trop lourde à porter au Purgatoire.

Sur ce, le sommeil prit la vieille dame pour de bon, alors que le hurlement spectral arracha à Rita toute sa vigueur. Fut-il assez fort pour résonner dans tout l’hospice ? Il le fut assez pour parvenir à Narcisse, que la banshee rejoint en trainant des pieds, les cheveux et le front trempés de sueur. L’acrobate était affolé, mais l’évanouissement soudain de la jeune femme coupa court à toute discussion, ce qui amena le garçon à porter sa camarade jusqu’à la salle de reception, où bientôt couverture et un verre de vin permit à Rita de se remettre de ses émotions. Peut-être auraient-ils à discuter de cet évènement, mais cette soirée contenait déjà que trop de mystère à résoudre pour que celui-ci soit éclairci tout de suite. Le temps redonnerait peut-être les mots clés et déliera la langue sèche du principal témoin, et seulement là, l’énigme pourra enfin conduire vers la lumière de cette affaire.
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MessageSujet: Re: Event | Le Bal des folles [1889]   Event | Le Bal des folles [1889] - Page 3 I_icon_minitimeLun 14 Avr - 9:19


    Andréa hésita un peu alors que la silhouette d'Aldrick disparaissait complètement de sa vue. Il avait dans l'obligation de prévenir la famille du lycanthrope, et donc de retrouver Éléna, mais un doute persistait quant à ce que deviendrait son oncle. Tournant à plusieurs reprises sur lui-même, mis en mouvement pas l'indécision croissante qui le gagnait, le louveteau finit par trancher. Espérant que le commissaire surveillerait Edward et que tous deux se retrouveraient à la salle de réception, il rejoignit au pas de course la famille de l'agent de police, ne s'arrêtant qu'une fois auprès de la jolie brune.

    « Excusez-moi, lança-t-il essoufflé. Aldrick m'a demandé de vous dire qu'il vous rejoindrait plus tard. Il a quelque chose d'urgent à faire apparemment. Et euh... Il s'excuse aussi. »

    Le regard d'Élise l'ébranla un peu et un instant, il douta de ses paroles, se demandant s'il avait prononcé un mot malheureux, avant que le sourire que lui accorda Éléna ne dissipe ses incertitudes. Visiblement, leur mère était simplement autoritaire, un peu comme la Denise, patronne de la mercerie, qui faisait systématiquement les gros yeux dès qu'un client ouvrait sa porte. Avec elle, on avait toujours l'impression d'avoir fait quelque chose de mal. Andréa s'était d'ailleurs souvent demandé quelle tête elle pouvait faire, lorsqu'elle était vraiment en colère.

    Finalement, il se contenta d'un salut poli envers Madame Voelsungen, avant de poser le regard sur son aînée qui lui posa mille questions sur sa santé. Le jeune homme dut affirmer à plusieurs reprises qu'il n'avait rien avant que la jeune fille ne semble enfin rassurée. Il chercha même à détourner la conversation, demandant d'une voix où pointait un peu de curiosités :

    « Alors ? Vous avez résolu ce mystère-ci ?
    - Non... Répliqua la jeune fille, un brin gênée. Mon frère a pris le carnet sur lequel j'avais écrit les mots de Mademoiselle Calliope. Je ne me souviens plus de ce qu'elle a prononcé exactement.
    - Elle a dit... Je crois que ça s'approchait de cela : Enfermé pour chanter dans ce cri la Sainte en boite pleure trop à sa douce musique. Elle danse. Le cerveau du génie jamais ne dors. Enfermé, au compte de trois...
    - Oh ! Vous vous souvenez de tout ?
    - C'est à force de retenir les listes des courses, on me rajoute souvent des éléments à l'oral alors j'ai appris à retenir ce qu'on me dit. Ça m'évite de faire des allers-retours.
    - Mais alors, vous avez trouvé le code n'est-ce pas ? La clef doit être la dernière phrase.
    - Enfermé, au compte de trois ? C'est possible. Attendez. Imaginons que l'on commence par le mot "Enfermé" de la première phrase en ce cas.
    - Mais trois quoi ? Trois lettres ? Cela donnerait... E, E, É.
    - Oh, c'est trois mots ! Tenez écoutez, en comptant tous les trois mots à partir du premier cela donne... Enfermé dans... la boîte à musique. Le... génie dors.
    - Le trésor serait donc une boîte à musique ? Quel dommage que nous ne l'ayons pas retrouvé ! Mais et le génie alors, à quoi cela correspondrait-il ? »

    Andréa se tut, ne s'apercevant qu'à cet instant qu'en cherchant à impressionner Éléna, il avait fait une énorme erreur. Cherchant le regard de la jeune fille, il fut incapable de savoir si elle était informée de l'existence des Légendaires. Elle souriait, l'interrogeant tout de même en silence dans l'attente d'une réponse. Le louveteau chercha désespérément toute forme de soutien auprès de la mère d'Aldrick, mais ses signaux de détresse ne durent pas être assez voyants car il ne put attirer son attention. Inspirant profondément, ses iris balayèrent une dernière fois les environs dans l'espoir d'y trouver son salut, mais sans succès. Après tout, elle était la sœur d'un loup-garou alors...

    Inspirant profondément, Andréa prit un air de réflexion intense, copiant volontairement la manie qu'avait son père de se pincer le haut du nez lorsque venait l'instant crucial de la réponse. Certes, cela donnait mieux avec des lunettes, mais faute de mieux, le jeune homme songea qu'il devait être crédible dans son rôle. Et sortant finalement de sa torpeur, il se tourna vers la jeune fille et lui répondit avec un grand sérieux :

    « Je pense qu'il est question de la mélodie. C'est peut-être un morceau encore inconnu écrit par un grand musicien et elle ne se réveille qui si l'on tourne la manivelle ?
    - Oh oui, c'est probablement cela. Ce doit être une musique extraordinaire alors, j'espère qu'Aldrick pourra nous en dire plus.
    - Éléna... Si tu continues de discuter, il arrivera très certainement avant nous, souligna Élise. »

    La demoiselle rougit légèrement, alors qu'Andréa s'excusait déjà de les ralentir. Et rattrapant leur retard, ils gagnèrent finalement la salle de réception sans que le jeune homme n'ose proposer une danse à la jolie magicienne, au moins autant par timidité que parce qu'il n'avait jamais dansé à un bal.

    ---------------------------

    Une fois débarrassé du directeur, Edward put gagner le coin de la place Sainte-Claire qu'il avait vu noté dans le carnet de Céleste Girault. Il ne s'y présenta pourtant sans une pointe d'appréhension, craignant que ses déductions soient erronées ou pires encore, que la boîte à musique ait fini sa course entre les mains d'un humain. En envoyant Aldrick en éclaireur, il était censé s'assurer que cela ne puisse pas arriver, mais doutant un peu des capacités d'enquêteur de ce dernier, il n'avait pas non plus tout misé sur sa rapidité.

    Traversant d'un pas rapide le carré d'arbres et de végétation, le loup-garou rejoignit le lieu de rendez-vous au pas de course, évitant à plusieurs reprises des racines disposées en traitres lorsque les branchages ne l'obligeaient pas à courber l'échine.

    La première personne qu'il vit sur place fut Ziggy. Edward le heurta si fortement qu'il manqua de le faire tomber au sol, mais fort heureusement, ses réflexes de lycanthrope aidant, il le rattrapa et le remit aussitôt sur pied bien que dans sa précipitation, le geste ait été plus violent que prévu. Il s'excusa du bout des lèvres, posant tour à tour son regard dépareillé sur Dolores, un inconnu plutôt sympathique en possession de la boîte, Aldrick et Andr... Minute.

    La fièvre d'analyse quitta aussitôt le loup-garou pour se muer en une lourde accusation qu'il fit uniquement peser sur le commissaire. On lisait sans mal dans ses iris, l'unique question qui le taraudait, à savoir : « Où est Andréa ? ». Mais peut-être par politesse, ou suite à une simple réflexion plus poussée, sa pensée ne se mua pas en parole, espérant simplement qu'Élise ne toucherait pas à un seul des cheveux de son neveu. Finalement, le loup se détendit un peu avant de saluer l'interne :

    « Monsieur, je vois que vous avez trouvé le trésor, toutes mes...
    - Ah n... Non. C'est le docteur K... Kellerstein ! Le coupa le jeune homme.
    - Kellerstein ? »

    Edward avisa sa doctoresse de pied en cap, remarquant Yvonne d'abord, Manfred ensuite, et comprenant finalement dans quel délire la jeune femme était partie. Les choses rentrant dans l'ordre, il préféra prendre le parti de s'en amuser, et reprit après ce qui semblait être une méditation poussée :

    « Oh ! Mais oui ! Le fabuleux Docteur Kellerstein, mais où avais-je la tête. Enchanté docteur, et toutes mes félicitations pour cette trouvaille. »

    Contre toute attente, Edward serra la plume à Manfred qui répliqua par un roucoulement très solennel avant qu'un dodelinement de sa tête ne manque de le faire passer par-dessus l'épaule de Dolores.

    « Bien. Commissaire, il me semble que vous êtes dans l'obligation de récupérer cette boîte non ? Si mes souvenirs sont exacts, vous devez en faire l'expertise la plus poussée avant de la rendre à son propriétaire, au cas où son vol aurait été signalé.
    - Ah... Ah bon ? Oh alors tenez M. le C... Com... Commissaire. »

    La boîte à musique fut remise à Aldrick et Edward invita tout ce petit monde à rejoindre la salle de réception. Tous se mirent en route, les deux loups fermant la marche, ce qui laissa le temps au plus âgé des deux de donner le carnet de Céleste à son homologue, avant de faire part des directives à appliquer au petit coffret de bois :

    « La Curia aura toutes les informations nécessaires dans ce petit carnet. Il doit même être possible de continuer à faire fonctionner la mélodie une fois le génie libéré. Si c'est le cas, pourrais-tu rapporter la boîte à Dolores ? Elle aime garder des souvenirs de ses expéditions. »

    Il attendit un accord, puis rejoignit le reste du groupe qui gagnait déjà les portes de la salle de bal. Edward y retrouva, non sans soulagement, son matelot en un seul morceau, et la soirée put se terminer entre la ritournelle des valses et la ronde des petits fours. Edward allait d'ailleurs avaler un adorable petit feuilleté à la viande lorsque la voix de son neveu le parvint :

    « Tu m'apprendras à danser ? »

    Le loup-garou s'étouffa au point que les larmes lui montèrent aux yeux. Et son pauvre verre de champagne n'aidant guère, la question resta en suspend tandis que le regard d'Edward coulait jusqu'à la magicienne d'Oz.

    Voilà qui n'annonçait rien de bon.


Fin !


---------------------

Ainsi s'achève la rocambolesque aventure du Bal des Folles !


J'espère que cela vous a plu et que vous vous êtes amusés autant avec vos personnages en résolvant les nombreuses énigmes déposées par Calliope !

Nous vous remercions pour votre participation sans faille, et vos écrits qui ont permis d'avancer dans l'histoire et de résoudre le mystère du génie de la boîte à musique.

Pour les plus curieux, vous avez dû vous apercevoir qu'un mystère reste entier. Qui est ce mystérieux génie, que fait-il dans une boîte à musique ? Mais surtout qui a organisé cette formidable chasse au trésor ?

Vous aurez toutes les réponses dans le poste suivant où vous découvrirez l'histoire de cet esprit des sables et où toute la lumière sera faite sur cette affaire.

Encore un grand merci à tous !
On espère vous voir aussi nombreux pour les autres évènements !


Dernière édition par Edward White le Lun 14 Avr - 9:59, édité 3 fois
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MessageSujet: Re: Event | Le Bal des folles [1889]   Event | Le Bal des folles [1889] - Page 3 I_icon_minitimeLun 14 Avr - 9:38

N.D.A. Retrouvez la conclusion de l'event dans le poste précédent o/



Sani – Le génie de la boîte à musique


    Tout commença des siècles plus tôt, au cœur des terres arides des pays d'orient. En ces temps là, les hommes craignaient les esprits, les démons ou les sorciers, dont les noms ne s'échappaient d'aucune lèvre de peur d'attirer leurs courroux. On les respectait pour leur savoir et leurs immenses pouvoirs qui commandaient à la terre et au ciel, maîtrisant ainsi l'abondance d'eau et l'opulence des récoltes qui en découlait. Certains même, étaient adulés, confondus avec des divinités devant lesquelles on se prosternait sans honte, chérissant leur bonté et la protection qu'ils offraient à leur peuple.

    Cependant, notre héros était loin d'être aussi présomptueux, bien que non dénué de magie. Sani — c'était le nom qu'il avait choisi — était un génie que la curiosité avait poussé à prendre corps dans le monde des humains. Il était discret, timide même, au point que malgré ses grands pouvoirs il n'osait demander la mains de Farah, la fille du chef du village, où il avait trouvé bon vivre. L'endroit était calme, perdu dans une enclave au sud de la Perse. Il y exerçait comme médecin, ou plutôt guérisseur, car malgré les connaissances poussées du monde arabique, seul un génie était encore capable de soigner certains maux inconnus. Il arrivait que l'on vienne le voir des quatre coins d'Europe et d'Asie, s'étonnant toujours de cette figure jeune, au teint halé, percée de deux iris noirs que certains croyaient capable de faire fuir les serpents.
    Malgré cela, Sani vivait sobrement dans une petite maison excentrée qui donnait sur le reste du village. Sa vie était paisible et elle aurait pu le rester si le jeune homme n'avait pas appris à ses dépends que ces hommes qu'il chérissait pouvaient se montrer avides et cruels.

    Un jour que le soleil écrasait plus que d'ordinaire la tranquillité de leur village, on toqua à la porte du médecin. Ce dernier ouvrit, comme il le faisait à chaque fois, mais il fut surpris de trouver face à lui deux gardes perses, qui le prièrent de bien vouloir les suivre après quelques explications :

    « Votre roi, Kavadh II, se meurt. Votre réputation n'est plus à faire, aussi est-il dans votre devoir de venir lui appliquer votre magie. »

    Sani, honoré d'une telle confiance, accepta immédiatement et après avoir pris quelques affaires, dont son nécessaire de soin, il quitta son village, promettant de revenir dès que le roi serait guéri.

    Le voyage dura deux jours, sans qu'un seul arrêt ne soit permis à leurs montures. Ils traversèrent les reliefs, puis les plaines, avant d'atteindre les fortification d'Asbanbar, ville monumentale où régnait le grand et bon seigneur de la Perse.

    Sani fut introduit au palais alors que ses habitants semblaient en proie aux plus vives inquiétudes. Telle une fourmilière assiégée, ils s'agitaient en tous sens, se heurtant, criant, pleurant, ce qui fit forte impression au génie habitué au calme et à l'ordre. Les gardes qui le guidaient, n'étaient visiblement pas gênés par ces mouvements de foule et ce fut dans l’indifférence absolue qu'ils traversèrent le hall et ses immenses colonnes de pierres pour rejoindre les appartements du souverain. Sani y entra cependant seul, découvrant, non sans peine, un homme d'une quarantaine d'années, en proie à une terrible fièvre et au corps rongé par la peste. Il ne pouvait rien faire et il le savait. La maladie avait déjà grandement évolué, s'attaquant aux poumons du roi. Il lui restait peut-être un ou deux jours à vivre, car même avec toutes les connaissances et la magie d'un génie, la guérison était impossible.

    Pourtant, Sani resta aux côtés du roi Kavadh II, d’heure en heure, apaisant au mieux ses souffrances. En guérisseur appliqué, il fit de son mieux et ce fut avec une certaine fierté qu'il laissa le dirigeant de la Perse s'éteindre dans un sommeil serein, sans que le mal qui l’animait n'imprima son visage.

    Le palais fut informé du décès, et la peine qui l'envahit laissa presqu'aussitôt place à l'inquiétude car le nouveau souverain était jeune d'à peine sept ans et les convoitises étaient grandes. Sani, qui s'était attaché à l'enfant, lui proposa de rester avec lui, devenant ainsi son conseiller et son médecin attitré. Son règne dura deux ans, avant qu'un coup d'état n'éclate et que le sang ne soit versé.

    Alors que les couloirs du palais étaient envahis par le terrible général Shahr et ses troupes, Sani fut arrêté et tenu en respect par une lame d'argent qui asséchait son essence de génie.

    « Où as tu caché l'enfant ! S'exclama Shahr, appliquant son sabre sur le torse du guérisseur.
    - Je mourrais plutôt que de vous le révéler !
    - Tu m'es trop précieux pour périr génie, mais je connais votre magie et je sais comment me l'approprier. Alors parle !
    - Jamais !
    - Dans ce cas je ne te laisserai pas le choix. Tu passeras ton éternité dans ma lame. »

    Le sabre fendit l'air. Sani se changea en brume, mais le souffle de l'argent lui brûla le corps et il ne put se déplacer. Blessé, ce fut avec effroi qu'il constata que tout son être était aspiré par la cimeterre avec lequel le général battait l'air, tout en répétant inlassablement des paroles incompréhensibles. Le décor de pierres blanches de la demeure royale se troubla alors qu'un cri déchirant résonnait entre ses colonnes. Le noir se fit. Le silence aussi.
    Sani se réveilla dans un lieu vide, froid et hostile qui le terrifia. Les parois, d'un gris métallique, reflétaient ses traits tirés par la souffrance et la peur. Il cria, mais sa voix se répercuta entre les murs pour se perdre dans un écho interminable. Il se recroquevilla, prenant l'apparence d'une toute petite souris, songeant avec tristesse à ces récits qu'il n'avait jamais cru ; ceux contant l'asservissement des siens, enfermés et utilisés par les hommes.

    Puis on l'appela. Ce fut avec un mal nouveau et insupportable qu'il fut arraché à sa prison, s'élevant bientôt au dessus de la lame de Shahr sous son apparence de rongeur. Immédiatement, il tenta de fuir. Prenant les traits d'un agile guépard, il bondit du sabre, mais à peine avait-il atteint la fenêtre la plus proche qu'une chaîne glaciale le reteint. Devenant tour à tour oiseau, chat, lapin, chacal, serpent puis homme, rien n’y changeait, toujours cette étreinte de glace l'empêchait d'avancer. Il dut se rendre à l'évidence, le voilà lié à ce cimeterre.

    Alors, la voix tyrannique du général résonna dans la pièce, arrachant une exclamation d'effroi à Sani :

    « Génie. Je souhaite que tu me révèles où est caché le petit roi Ardâchir III. »

    Contre sa volonté, les lèvres de Sani s'ouvrirent. Il voulu plaquer ses mains contre celles-ci, mais déjà, les mots s'en échappaient, annonçant d'une voix brisée par l'horreur d'un secret dévoilé sous la contrainte :

    « Dans le coffre rouge de feu son père. »

    Un sourire ignoble éclaira le visage anguleux de Shahr, puis Sani retrouva sa prison d'argent, le corps secoué de sanglots honteux. Ardâchir III fut assassiné et le général, grâce à son nouvel esclave, fut proclamé roi.

    C'est alors que commença le périple de Sani, dont les propriétaires se suivirent. Bloqué dans la lame, il vit défiler les êtres les plus cruels et ce fut involontairement qu'il participa aux successions, à un rythme effréné, des souverains de Perse. Les assassinats s'enchaînèrent, un roi ne restant guère plus de quelques mois sur le trône malgré les grands pouvoirs qu'il s'octroyait en dépouillant le précédent monarque de l'épée d'argent. Trop idiots ou trop avides, tous épanchaient les trois vœux auxquels ils avaient le droit en or, en femme ou en pouvoir, finissant démunis lorsque la mort arrivait à leur porte.

    Souillé de sang, le cimeterre avait d'ailleurs pris une teinte plus sombre, presque noire, et rapidement, on la crut maudite. Le sabre fut brisé et jeté, laissant le pauvre Sani enfermé pour bien des siècles, chaque nouvelle année de rétention ne faisant qu'accroître sa haine envers le genre humain.
    Il fit cependant du chemin. Ramassé bien plus tard par un forgeron, il parcourut une bonne partie de l'Europe, participa à bien d'autres guerres, vit les croisades, contribua à la chute de Constantinople, fut au cœur d'intrigues politiques, avant de retomber dans l'oubli.

    Lorsqu'il reparut, ce fut sur une étale d'un petit marché de Sicile, à Palerme. Il avait changé bien des fois de forme, mais l'argent, matériaux précieux de sa prison, lui avait évité de finir délaissé de tous, au fond d'un fleuve. Il fut acheté par un jeune homme qui, pour la première fois, s'intéressa au minuscule sceau en langue perse, inscrite sur le morceau de métal. Il paya une broutille et emporta Sani chez lui, où il entreprit de le polir pour lui rendre sa jeunesse d’antan.

    Ce garçon était un petit escroc du nom de Joseph Balsamo. Il avait dans l'idée que cette inscription incompréhensible lui permettrait de revendre l'objet trois ou quatre fois son prix en le faisant passer pour un artefact quelconque venu d'un mystérieux passé oriental. Aussi quelle ne fut pas sa surprise lorsqu'une immense et terrifiante chauve-souris s'échappa de l'argent dans un cri si aiguë, qu'il fit voler en éclat les vitres de la petite maison. Joseph tomba de son tabouret, observant avec effroi et durant de longues minutes, cette manifestation incroyable, avant qu'il n'ose demander :

    « Qu… Qui êtes vous ?! »

    Sani avait appris, avec le temps, qu'il se devait d'effrayer chacun de ses propriétaires pour éviter d'avoir à les servir. En effet, les siècles passants, la majorité des hommes ignorait désormais ce qu'était un génie ou la manière dont il se manifestait. Désormais, tous criaient au démon et aussitôt, on le jetait le plus loin possible, lui assurant une tranquillité pour des années. Aussi, ce ne fut pas sans quelques manifestations de flammes et des yeux rougeoyants qu'il répondit :

    « Je suis le diable ! Tremble humain, car je viens pour ta vie ! »

    Mais ce que Sani ignorait, c'était qu'en bon petit aigrefin, Joseph Balsamo s'était documenté sur tous ces êtres légendaires que l'on rencontrait dans les histoires afin de mieux servir ses intérêts. Or, il n'ignorait pas que les démons ne se cachent pas dans les objets, contrairement aux génies qui pouvaient y être incarcérés contre leur gré, et ce fut fort de ce constat que le petit escroc italien se planifia l'une des vies les plus extraordinaires du XVIIIe siècle.

    Toutefois, avant son départ pour cette folle aventure, l'intelligent Joseph Balsamo décida de dissimuler à tous son génie et ce d'une remarquable manière. Façonnant sa prison en un engrenage, il le plaça au centre d'un petit mécanisme de boîte à musique qui, lorsque l'on tournait la manivelle dans le sens habituel, jouait un air mélodieux, tandis que dans l'autre sens, elle frictionnait la rondelle d'argent, invitant le génie à sortir de sa torpeur, le tout habillé d'un coffret de bois simple, dissimulant ainsi la valeur de l'objet.

    Sani ne resta pas moins de vingt-six ans à son service, reconnaissant sans mal que cet original n'avait rien à voir avec les autres hommes qu'il avait servi. Bien qu'autant égoïste qu'eux, il n'en était pas moins beaucoup plus malin, aussi ce fut après des réflexions poussées et mûrement préparées qu'il dépensa ses vœux, devenant ainsi « mage » autoproclamé. Sa notoriété dans les tours de passe-passe, potions, élixirs, incantations et autres fausses sorcelleries l'amenèrent en France, où il prit le nom du comte de Cagliostro et participa à la mystérieuse affaire du collier de la Reine qui lui vallut un séjour à la Bastille.
    Lors de ce petit passage en prison, ses appartements furent vidés, et une maladresse causa la chute d'une partie du chargement dont la boîte à musique, directement dans la Seine. Elle y resta un an, pour le plus grand désarroi de Sani qui n'avait pas eu connaissance de l'affaire, puis elle fut repêchée par un marinier qui la mit en vente chez un antiquaire après l'avoir soigneusement nettoyée.

    « Combien pour cette boîte à musique ?
    - Soixante francs monsieur.
    - C'est bien cher… Fonctionne-t-elle au moins ?
    - Absolument monsieur, mais il faut bien tourner la manivelle dans le sens des aiguilles d'une montre, sinon cela se bloque.
    - Bien, je la prends alors. C'est un présent pour une dame.
    - Vraiment ? Elle sera ravie, c'est un très joli objet. À quel nom l'achat ?
    - Marquis d'Abervillier.
    - Elle est à vous. »

    Et ce fut donc pour soixante francs que Grégoire d'Abervillier se procura la vie de Sani qui atterrit sur la table de nuit de la belle Cassandre, épouse du notable. Ce fut son plus grand malheur.

    Plusieurs mois furent nécessaires à Sani avant de s'apercevoir qu'il réussissait à communiquer avec la marquise, principalement lorsqu'elle dormait. Était-ce à cause de sa prison d'argent que l'eau avait corrodée ou de la sensibilité étonnante de la belle dame, impossible à dire, mais il vit là une chance inespérée de retrouver sa liberté. Toutes les nuits, pendant près d'un an, il essaya de lui demander de l'aide, de partager sa douleur et sa solitude sans se douter de l'effet que cela aurait sur les nerfs de Cassandre.
    Petit à petit, elle perdit pied, prise de crises étranges au beau milieu de ses songes, lorsque la crainte de s'endormir ne la poussait pas à faire les cent pas dans leur demeure à des heures indues. Malheureusement, le génie n'entendait, ni ne voyait ce qui se passait autour de lui et ce fut avec un acharnement croissant qu'il chercha du secours, si bien que Grégoire fut contraint de l'envoyer à la Salpêtrière pour qu'elle puisse bénéficier de soins particuliers. Le rang de noble permit à la marquise d'accéder à une cellule plus grande, avec un meilleur confort, ainsi que d'emporter certaines affaires. Sani fit le voyage avec elle, poursuivant ses supplications, il parvint, d'années en années, à les lui faire entendre de jour comme de nuit.

    La révolution française sonna le glas de la noblesse et quelques années plus tard, Cassandre s'éteignit des suites d'une longue maladie, certainement soulagée de ne plus avoir à supporter cette voix dans sa tête et toutes ces horribles sensations de froid et de brûlure qui lui faisaient perdre la raison. Son époux l'ayant devancé de quelques années, ses affaires furent conservées par la prison et Sani se retrouva de nouveau seul.

    Le génie avait perdu la notion du temps, aussi les cinq années qu'il passa à attendre lui parurent une éternité. Lorsqu'enfin la mélodie de son mécanisme fut de nouveau jouée, il n'eut de cesse d'essayer de communiquer avec le monde extérieur. Il souhaitait sortir plus que tout au monde, ne supportant plus l’univers silencieux dans lequel il vivait depuis plus d'un millénaire, mais dans cette boîte personne ne pouvait le voir, ni même deviner sa présence, il devait se débrouiller.
    Dès lors, ses propriétaires furent toutes des femmes, plus précisément des infirmières de l'hospice. Toutes logèrent dans la chambre numéro treize où la petite boîte avait été déposée par Coralie Marlot, première employée à l'avoir retrouvée. Ce fut ainsi que tour à tour, ces jeunes femmes furent en contact avec Sani et perdirent, elles aussi, lentement pied. Soumises à l'acharnement du génie, les plus solides tenaient une ou deux années quand les plus sensibles se voyaient internées au bout de quelques mois.

    La rumeur se répandit rapidement parmi les employés. La chambre treize était maudite. Pourtant, on continua d’y loger des jeunes filles plusieurs années de suite, jusqu’à l’arrivée de Céleste Grirault.

    Petite brune aux regard de braise, elle fut celle avec qui Sani parvint à entretenir le lien plus poussé. Malheureusement, Céleste n’en fut pas moins bouleversée. À son tour prise de crises d’insomnies, quand elle ne laissait pas échapper des paroles incompréhensibles ou que son corps ne se tordait pas de douleur sous un froid intense en plein été ou une chaleur insupportable au cœur de la saison froide, elle plongea dans la folie.
    Elle résista près de quatre ans. Quatre ans avant que Sani ne réussisse un échange de quelques pensées qui terrifièrent l’infirmière :

    « Je suis dans la boîte musique ! Sauvez moi !
    - C’est impossible…
    - J’ai mal !
    - Enfermé dans une boîte ?
    - Ouvrez la ! Aidez moi !
    - Vous êtes le diable !
    - La boîte !
    - C’est vous ! Vous me rendez folle ! Démon ! »

    L’esprit égaré de la jeune femme guida ses actes. Sans réfléchir, Céleste s’empara du petit coffret de bois et se rendit à la place Sainte-Claire au pas de course. Ce fut là qu’elle le déposa, au creux d’un des arbres, implorant la patronne des pauvresses de la guérir du mal causé par de démon qui s’était logé dans la boîte à musique.

    La malheureuse ne fut pas exaucée et disparut quelques semaines plus tard, ne laissant derrière elle qu’un carnet auquel on porta peu d’importance et une épitaphe sur laquelle fut gravé, selon sa volonté, le lieu exacte où son « démon » résidait.

    Sani reprit ainsi ses années de solitudes, jusqu’à cette année de 1889. Calliope, de son véritable nom Amandine Lemaire, lui servit de messagère. La pauvre enfant, faible d’esprit, lui permit d’utiliser ses dernières forces pour passer un message et raconter une partie de son histoire. Il fut celui qui organisa les épreuves, incapable de transmettre une information claire par les lèvres d’une autre. Contraint d’agir de manière détournée, prévoyant chaque détail des mois à l’avance, il pria pour que cette ultime tentative, la plus folle de toute, aboutisse à son sauvetage. Les plus ingénieux ont ainsi pu reconstituer une partie de son passé, avant de retrouver cette maudite boîte à musique et son engrenage d’argent, le seul conçu de ce métal noble dans lequel sa naïveté envers le genre humain l’a conduit.

    Désormais entre les mains de Dolores, il ne craint plus rien. Il sera enfin libéré par la Curia, mais après plus de mille ans enfermé, le monde risque de lui paraître bien changé.

Ainsi débute une nouvelle vie…
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