Être ou ne pas être, telle est la question

William Delambre avait un frère jumeau avec lequel il s’était parfaitement entendu pendant son enfance, ils étaient très proches. Ils faisaient presque tout ensemble, ils se confiaient des secrets que mêmes leurs parents ne connaissaient pas et ils étaient toujours solidaires quand l’un des deux était dans une mauvaise passe. Mais cela changea peu à peu. William voulut faire un apprentissage alors qu’Eliott voulait continuer une vie d’amusement et de plaisir infinis. C’est cette différence d’opinion qui éloigna ces deux frères pourtant jadis très solidaires. William fit donc son apprentissage pour devenir barman. Au fil des mois, il perdit peu à peu de vu son frère. Il termina son apprentissage avec succès et ne tarda pas à trouver un travail de barman respectable dans un hôtel chic. Sa vie allait pour le mieux : il aimait son métier et le faisait bien, il gagnait bien sa vie grâce à ce dernier, il avait un très bon logement et enfin il avait de très bonnes relations avec ses collègues et son patron.

Cette lettre arriva un jour comme tous les autres. William se leva d’assez bonne heure pour aller au travail, il petit-déjeuna rapidement, s’habilla avec ses habits de travail puis sortit sur le seuil se sa porte pour fermer celle-ci et partir. Il ferma donc sa porte à clé, mis cette clé dans une poche intérieur puis commença à descendre l’escalier qui le mènerait dans le hall de son immeuble. Arrivé là il se dirigea vers la porte mais fut arrêté par le concierge qui lui dit après un court échange de courtoisie qu’il avait reçu une lettre qu’il avait prise pour lui car William n’était pas présent. William demanda :

« Savez-vous par qui a-t-elle était apportée ? »

« Je ne saurais vous dire car l’homme avait le visage dissimulé derrière son manteau et son chapeau, il a juste dit que c’était pour vous. »

William le remercia, prit la lettre, dit au revoir au concierge et il partit au travail. Il décida de lire cette lettre au calme dans son appartement le soir venu.

Après une journée de travail, William rentra chez lui, pris son repas, puis s’installa à son bureau pour lire cette fameuse lettre. Il la prit donc et remarqua qu’il n’y avait rien d’écrit sur l’enveloppe, mais ce n’était qu’un détail. Il ouvrit cette dernière, prit la lettre en elle-même et l’ouvrit. Dès les premiers mots, William sentit un vent glacial le traverser : « Mon très cher frère ! ». C’était donc une lettre d’Eliott ! William la lut rapidement : quelques nouvelles et pas des meilleures, le fait qu’ils ne s’envoyaient pas assez souvent de lettres mais surtout, Eliott lui disait qu’il repasserait le dimanche suivant pour qu’ils puissent un peu discuter. Cela le surprit, son frère avec qui il n’avait pas eu de contact depuis des lustres venait chez lui pour discuter ? Bah, comme ça il verrait un peu son frère…

Le dimanche venu, et William avait pris soin de demander à son patron si ce jour là il pouvait ne pas travailler, William attendit donc l’arrivée de son frère. Ce dernier arriva vers midi et les deux frères conclurent donc de manger ensemble car discuter est bien plus agréable auprès d’un bon repas. William ayant prévu la chose avait même déjà préparé les plats, il les apporta donc. Les deux frères se mirent à table et tout en mangeant, discutaient de tout et de rien. Après un moment de convivialité, William remarqua un changement d’attitude chez son frère. Il esquivait les questions qui parlaient de son travail ou de son logement et William remarqua par ailleurs que les vêtements de son frère paraissaient usés. Tout ce que son frère lui avait dit c’est qu’il habitait Paris. Quand William et Eliott eurent finit de manger, William prit les plats et les couverts et se leva pour les ramener à la cuisine. Il les posa à la cuisine et entendit son frère se lever, puis se rapprocher en lui disant :

« Tu sais William, tu as toujours été le préféré et j’ai toujours été jaloux de toi. »

William commença à se retourner en disant :

« Pourquoi me dis-tu… »

Il n’eut pas le temps de finir sa question, son frère venait de lui planter un couteau dans la poitrine, William regarda le couteau puis son frère d’un air d’incompréhension avant s’écrouler par terre.

William ouvrit les yeux, il avait mal à la tête. Il se redressa lentement puis se leva avec difficulté et en titubant à travers la pièce il essaya de rassembler ses souvenirs : la lettre de son frère, sa venue, le repas, puis…son assassinat ! Il monta la main à sa poitrine mais  ne trouva pas de couteau ni de trace quelconque qu’un couteau lui fut planté là. Il ne comprenait pas, son frère l’avait pourtant bien…tué. Il se retourna et vit… son corps gisant sur le sol avec le couteau en pleine poitrine. William recula et tomba par terre. Après quelques minutes à observer en silence son corps par terre, il se releva et s’approcha lentement. William ne comprenait plus rien à ce qu’il se passait, mais une pensée lui traversa l’esprit : si son corps gisait là et que il était « en vie » il était donc un…revenant ? Il avait entendu étant petit des histoires de revenants, des morts revenus de l’au-delà pour exécuter une tâche particulière pouvant se rendre immatériels s’ils le voulaient. Voulant à tous prix découvrir la vérité, il se leva, se plaça devant le mur qui séparait sa cuisine de son salon et après quelques seconde de concentration, il le traversa sans difficulté. Il réessaya une deuxième et troisième fois, avec succès.

Il resta chez lui à faire des « exercices » pendant un jour entier, voulant à tous prix savoir ce servir de son état de revenant.

William, maintenant connaisseur de son étrange « pouvoir », voulait se venger de son frère. Eliott lui avait dit qu’il habitait Paris, il décida donc de s’y rendre. Il prépara son départ : il prit une valise qu’il remplit de vêtements, de livres et il y mit deux ou trois bouteilles d’alcool qu’il gardait depuis longtemps. Il prit avec lui la totalité de son argent, sa flasque, ses cigarettes et son briquet. Il prépara aussi une lettre pour le concierge dans laquelle il lui disait d’envoyer tout ce qui se trouvait chez lui à l’adresse indiquée, celle de ses parents. Il y glissa aussi tout l’argent nécessaire au payement de sa chambre et à l’expédition de ses affaires. Après avoir fermé sa valise il sortit, ferma sa porte à clé et mit cette dernière dans l’enveloppe du concierge avant de descendre l’escalier. Dans le hall, il s’arrêta devant le comptoir, posa la lettre contenant les instructions, l’argent et la clé de son appartement et partit. Il se dirigea vers la gare, regarda les horaires et prit le premier train pour Paris.

Arrivé à Paris, lieu qu’il ne connaissait pas et où il ne connaissait personne, il admira quelques minutes la ville puis il chercha un hôtel où poser sa valise. Il en trouva un rapidement et après avoir pris sa clé, monta dans sa chambre et épuisé par  le long trajet et surtout par les évènements qui avaient changés sa vie, il s’endormit profondément.

Après une nuit agitée par d’étranges songes, il s’habilla pour sortir en ville. Au tournant d’une rue il vit un vendeur de journaux et il en prit un exemplaire pour se documenter sur la ville de Paris. Il y apprit très vite qu’un nouveau cabaret s’était installé et que le soir même, un spectacle spécial allait être présenté, William décida de s’y rendre pour se détendre. Il interrogea le premier passant qu’il croisa pour lui demander ou le cabaret se trouvait. Le passant le dévisagea quelques secondes pour finalement lui indiqué le chemin pour s’y rendre. William s’aperçut que le cabaret ne se trouvait qu’à quelques rues de son hôtel. William rentra à l’hôtel pour y passer le reste de la journée avant d’aller voir ce fameux, « Lost Paradise ».

Le soir venu, il prit son manteau, de l’argent et ses cigarettes avant de sortir de sa chambre, puis de l’hôtel pour se diriger vers le cabaret. Arrivé en quelques minutes devant celui-ci, il l’observa quelques secondes de loin, rien d’anormal. Il s’approcha ensuite du portier qui le regarda quelques secondes avant de lui ouvrir la porte pour le laisser passer. Il se retrouva dans un grand hall dans lequel il s’avança avant d’arriver devant un homme qui était placé devant la porte qui menait à la salle de spectacle. Il lui donna l’argent nécessaire pour entrer et l’homme ouvrit la porte et le laissa passer en disant « Bienvenue au Lost Paradise ! » que William entendit peu à cause du bruit présent dans la salle. Il entra dans cette dernière.

C’était une grande pièce chaleureuse où autour des tables les gens regardaient le spectacle, mangeaient, buvaient et applaudissaient les artistes. Après avoir balayé du regard la grande pièce, il alla s’asseoir au bar où il demanda un whisky. William resta environ une demi-heure à siroter son whisky et à regarder les spectacles qui faisaient sensation. Après ce délai, un inconnu vint à sa rencontre de l’autre côté du bar. William lui dit simplement bonsoir mais il ne porta pas plus d’attention à cet inconnu jusqu’au moment ou ce dernier se présenta comme étant Edward White, le patron du cabaret. A ces mots William lui dit alors son nom et que ce cabaret était un très bel endroit, les spectacles étaient formidables, l’ambiance était chaleureuse et de plus, l’alcool y était excellent. Le patron lui répondit qu’il était heureux de voir que ses clients étaient bien dans son cabaret avant de dire qu’il était prêt à lui offrir un emploi si William le voulait. William regarda autour de lui, il y avait beaucoup de monde, et demanda à Edward si ils ne pouvaient pas parler de cela plus au calme. Edward lui répondit que cela était tout à fait possible et lui proposa de le suivre des salles privées. Une fois arrivé, Edward et William s’assirent autour d’une table sur laquelle était disposé une bouteille d’alcool dont Edward versa un verre à William et à lui-même. Après ce geste ils burent un peu et presque immédiatement après, Edward dit à William qu’il savait qu’il n’était pas humain, et il glissa à voix basse :

« Comme tous les employés et moi-même. »

Cela laissa William perplexe mais de plus, Edward White lui demanda ce qu’il était précisément et William se demanda s’il fallait lui montrer. Finalement il prit son verre en main, se leva, se mit face à la table et la traversa sans aucune difficulté pour se retrouver à côté d’Edward White qui souriait d’un air amusé. Edward White redis à William qu’il lui offrait un poste dans le cabaret et il ajouta que s’il venait le soir suivant, cela voudrait dire qu’il acceptait son offre. William le remercia, sortit de la salle privée, déposa l’argent pour le whisky sur le bar, prit son manteau et partit pour rentrer à l’hôtel. Il entra dans sa chambre et se coucha pour réfléchir. S’il acceptait le poste, il aurait du travail, un logement, une paie et il serait entouré de gens comme lui. L’ensemble de bonnes raisons le poussa à accepter l’offre du patron du « Lost Paradise », Edward White.

Le soir venu, il refit donc sa valise, passa voir le concierge pour le payer et lui rendre la clé de sa chambre et partit en direction du cabaret. Il arriva devant le portier qui le laissa entrer sans la moindre attente et où il n’eut pas à payer pour entrer. Cela devait provenir du fait que Edward White avait surement prévu le fait que William reviendrait et donc qu’il avait donné l’ordre aux employés de le laisser entrer. Et effectivement, William entra, jeta un regard dans la salle, vu Edward White dans l’escalier avec un grand sourire sur le visage. Voilà comment William Delambre est arrivé dans le cabaret Lost Paradise.