Une partition marquée par le sang;

L'humain, ce petit être fragile dont la vie ne tient qu'à un fil. Louis en fut un auparavant, petit garçon joyeux et insouciant. A cet âge l'innocence prime, pas de préoccupations sur les notions de bien ou de mal. Les jeunes humains sont des êtres purs, mais ils ne le restent jamais très longtemps en grandissant. Un jour tu as les meilleurs amis du monde, et le jour d'après ils te plantent tous un couteau dans le dos. Survivre dans ce monde hostile demande d'être toujours le plus fort, mais aussi le plus vicieux, le plus rusé, en bref tous les coups sont permis.

Louis Berthelot est né au sein de la petite bourgeoisie au tout début du XVIIIe siècle. Il n'a pas connu sa mère qui est morte en couche, et il était donc élevé par son père artisan, facteur et restaurateur de clavecins et épinettes. Le petit Louis aimait passer du temps dans l'atelier de son père pour jouer sur les instruments fraîchement montés. Outre le fait que cela permettait à son paternel d'affiner les réglages desdits instruments, le petit garçon se révéla être un véritable virtuose, et ses compétences ne s'arrêtèrent pas aux instruments produits par son père. Ce dernier avait un ami Luthier chez qui Louis s'était essayé au violon. Il apprivoisa là aussi l'instrument avec aisance.

Pour affermir son talent, le père Berthelot plaça son fils sous la tutelle d'un professeur de musique. Mais ce dernier fut vite dépassé par son élève. Le jeune garçon s'était lancé dans la composition et avait déjà écrit plusieurs pages de partitions. Le catalogue de ses œuvres s'était bien étoffé quand, un soir, alors qu'il pianotait sur un clavecin de l'atelier de son père, la mélodie qu'il diffusait attira une oreille sensible. Après trois coups à la porte, Louis allait entrebâiller celle-ci pour observer prudemment son visiteur nocturne. Une belle femme se tenait dans l'encadrement de la porte et demandait à rencontrer le virtuose qui produisait une telle musique. Rougissant, Louis se présenta comme l'artiste qui produisait cette musique. Elle demanda s'il était possible de le regarder jouer et le jeune homme, bien qu'intimidé, l'invita à entrer. Il ne se doutait pas qu'en faisant cela il allait marquer un changement dans sa vie. Reprenant place au clavecin, la belle femme dans son dos, il entama l'une de ses partitions fraîchement écrite. Pendant quelques minutes il ne se passa rien, les notes de la mélodie jouée emplissant tout l'espace de l'atelier. Puis la jeune femme s'avança pour chuchoter à l'oreille du jeune homme qu'il serait dommage qu'un tel artiste disparaisse un jour en emportant toutes ses œuvres avec lui dans la tombe. Louis, lui, jouait toujours mais, déstabilisé par la proximité de la jeune femme, rougissait de plus belle et la mélodie se perdait quelque peu dans un soubresaut de notes. Il sursauta quand de douces lèvres vinrent se poser dans le creux de son cou et il ferma les yeux, tentant de se reprendre. Il n'eut pas le temps de le faire que la douce sensation fut remplacée par une douleur vive. Écarquillant les yeux, Louis chercha à se débattre mais il n'arrivait pas à se défaire de la morsure que lui infligeait cette folle. Celle-ci se retira cependant bien assez vite et s'éloigna rapidement jusqu'à l'entrée de l'atelier. S'essuyant délicatement un petit filet de sang au coin de ses lèvres, elle déclara au jeune homme qu'elle lui avait fait cadeau de l'éternité pour pérenniser son art. Sous le regard encore choqué du jeune homme elle disparût dans la nuit.

Cet événement perturba quelques temps Louis qui peinait jouer. Heureusement cela ne dura pas : L'année suivante il apprit la venue d'un jeune compositeur prodige à Paris en la personne de Wolfgang Amadeus Mozart. Emplit de curiosité, le jeune homme se déplaça à la capitale pour assister à l'une de ses exhibitions. Il ne fut pas déçu de découvrir un enfant extraordinaire aux capacités similaires aux siennes. L'exhibition de Mozart entraîna un regain de motivation chez Louis qui décida de faire carrière. Il se mis à composer quelques opéras qu'il présentera au grand public.

Les œuvres de Louis gagnèrent en popularité. A 25 ans il avait atteint l'apogée de sa carrière. Mais son succès était tel qu'il éclipsait certains compositeurs. Le succès attise la jalousie. Et c'est ainsi qu'après l'une de ses représentations Louis fut assassiné dans une rue déserte, poignardé à l'abdomen. Mais au lieu de trouver la mort comme le commun des mortels, il se réveilla dans cette même rue, les vêtements imbibés de sang mais le corps intégralement indemne. Rassemblant ses souvenirs, le jeune homme remis un visage à son agresseur : un compositeur rival qu'il avait devancé sur plusieurs de ses opéras. Assailli par une faim indescriptible et une soif de vengeance, il décidait de rendre une petite visite à ce « collègue ». Il retraça le même schéma que son propre meurtre : il suivit l'humain à la sortie d'une de ses représentations et le tua dans une rue déserte. La différence se fit sur la manière dont il pris la vie de son agresseur, en aspirant tout son sang jusqu'à la dernière goutte.

A partir de cette nuit-là, Louis ne put plus vivre comme un humain normal car il était devenu un criminel et ne pouvait plus sortir en plein jour sous peine de se consumer (il a essayé et l'a appris à ses dépends). Cela mis un terme à sa carrière professionnelle. Le cœur noircit par la haine, il erra pendant de longues années en semant la mort sur son passage. Le gain de puissance de sa condition ainsi que le comportement des hommes ont développé chez lui un profond mépris pour l'humain. Sa renommée se perdit dans les méandres du temps et on n'entendit plus jamais parler de lui. Il voyagea un moment, découvrant d'autres grands compositeurs de l'époque comme Beethoven et Chopin et il perfectionna ses connaissances musicales en s'essayant à tout type d'instrument comme le pianoforte, le violoncelle, la contrebasse et la flûte traversière. Il croisa également la route de plusieurs chasseurs et il dû se montrer rusé pour leur échapper, ou tout simplement les tuer. A force d'affrontements et au fil du temps son expérience en combat se perfectionne. Un soir, alors qu'il était de nouveau sur Paris, il découvrit le cabaret du Lost paradise et se présenta au propriétaire des lieux pour obtenir un poste comme Musicien hypnotiseur et se proposa pour composer la musique de certains numéros.